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08/02/2008

Quitterie Delmas avec Monique Baruti dans le VIIIe.

Le VIIIe arrondissement est un pur produit du XIXe siècle. Auparavant, il se trouvait presque entièrement hors les murs de Paris. En 1900, on l'appelait, administrativement, l'"arrondissement de l'Élysée" : le palais du président de la République s'y trouve et c'est le maire du VIIIe, le dinosaure sourcilleux Lebel, qui a récemment célébré le mariage du président qui est ainsi passé de la "peste brune" à la "peste Bruni".
 
Deux ou trois traits caractérisent le VIIIe arrondissement. Parmi eux, le premier est ce que l'on nomme encore par esprit de carte postale "la plus belle avenue du monde" et qui méritait ce surnom prestigieux sous Napoléon III et jusqu'aux années 1890 : alors elle était bordée de somptueux hôtels particuliers déployant un luxe époustouflant, au fond scandaleux mais magnifique, et dont il reste la trace la plus évidente au rond-point des Champs-Élysées, l'hôtel Dassault. Je veux parler bien sûr des Champs-Élysées.
 
La duchesse d'Albe, soeur de l'impératrice Eugénie, y avait une demeure énorme qui, logiquement, fut parmi les premières rasées après la chute du régime pour percer la rue Lincoln où se trouve l'un des derniers cinémas d'art et d'essai de ce quartier longtemps dédié au cinéma et où l'on renontre encore parfois des "stars" (même quand Sarkozy n'y est pas) aux terrasses.
 
Des immeubles, pas tous beaux, ont remplacé l'ancienne splendeur comme ils ont pu. Dans certains, des années 1880, on a classé un étage, décoré vers 1900 par un milliardaire mexicain ou un prince russe devenu fou d'amour pour Paris et pour ses jolies femmes.
 
Évidemment, en bas de l'avenue, il y a la place de la Concorde, l'obélisque et, en haut, l'Arc-de-Triomphe qui ... triomphe, et pour lequel on dû araser fortement une colline qui ponctuait la perspective ouverte depuis le Louvre et les Tuileries.
 
Peu de gens vivent dans cette partie de l'arrondissement : les prix y sont prohibitifs. Je crois qu'il y a encore un particulier (un seul) qui réside sur les Champs-Élysées.
 
À l'ouest des Champs-Élysées, les gens vivent la même vie que ceux du nord de mon XVIe arrondissement, ils viennent du reste au marché de l'avenue du président Wilson, dans le XVIe. À l'est, il y a surtout des bureaux, c'est bruyant, pas toujours propre et fortement pollué. Il faut s'éloigner un peu vers l'est et le nord pour atteindre des régions habitables. Et là sont les deux autres traits caractéristiques de l'arrondissement.
 
Le premier est la plaine Montceau, le lieu typique de l'aménagement du grand luxe haussmannien. Je donnerai après cette note une nouvelle fois la vidéo que j'ai tournée dans le jardin de la fondation Rothschild, qui illustre parfaitement cette époque somptuaire et qu'on devrait visiter en lisant d'un oeil "l'argent", l'épisode des Rougon-Macquart de Zola consacré aux folies d'Aristide Sacquart, le flamboyant mégalomane de la famille.
 
Le deuxième est ce qu'on nomme le "quartier de l'Europe" parce que toutes les rues y portent le nom d'une ville européenne, souvent des capitales : Rome, Moscou, Londres, Athènes, Bucarest, Constantinople, mais aussi des villes plus modestes comme Liège.
 
Pour l'anecdote, l'un de mes arrière-grands-pères, officier de marine, résidait dans les années 1930 rue de Constantinople, à l'angle de la place de l'Europe, dans un immeuble dont l'une des façades ouvrait sur une voie ferrée qui monte je crois de la gare Saint-Lazare, et mon père me disait que, avec ses frères et soeur, quand ils étaient enfants, le grand jeu était d'ouvrir les fenêtres sur la voie ferrée pour que lorsque le train passait, la vapeur montât de sa cheminée et envahît l'appartement, ce qui mettait tout le monde en fureur.
 
C'est dans ce quartier, organisé autour de la place de l'Europe, que réside la moitié de la population du VIIIe arrondissement, soit 20000 personnes.
 
Comme beaucoup de quartiers à vocation de haute bourgeoisie haussmannienne, il a été conçu comme un quartier de standing : sans le moindre commerce, et il garde un peu la trace de cette origine, même si des boutiques s'y sont tout de même insinuées avec le temps.
 
Le quartier de l'Europe est plutôt fermé sur lui-même. Une seule artère en sort : la rue de Lisbonne, qui descend dans la plaine Montceau jusqu'à la rue de Courcelles, tout contre le parc Montceau, à la frontière du XVIIe arrondissement, celui de Françoise de Panafieu (qui en fait réside dans le XVIe). C'est rue de Lisbonne, à la jointure des deux portions, que Monique Baruti et ses colistiers avaient invité les habitants du quartier à une réunion informelle à laquelle Quitterie Delmas et les Citoyens Démocrates ont eu la joie de se joindre.
 
Monique Baruti est une jeune femme dynamique, une avocate d'affaire, mariée, mère de famille, qui a vécu à Bruxelles, qui s'implique dans son quartier, qui gère tout à la fois, et qui découvre la candidature politique.
 
Elle est accompagnée de bons et solides colistiers, consultants, patrons de PME (dont un dans l'informatique), futurs profs, représentatifs de ce qui me paraît être le nouveau VIIIe.
 
En effet, cet arrondissement a vécu de plein fouet la métamorphose désertifiante des années 1970 et 1980 : le prix de l'immobilier qui flambe, les particuliers qui ne peuvent plus y faire face, les bureaux qui dévorent les rues une à une. On a donc dans une part notable de l'arrondissement un premier et flagrant paradoxe : un vrai quartier résidentiel, de beaux immeubles, des rues calmes, mais tout ça entièrement occupé par des bureaux venus là pour le prestige de l'adresse et qui ne s'y trouvent, en fait, pas à l'aise.
 
C'est d'ailleurs parce qu'ils ne s'y trouvent pas à l'aise que l'on constate un deuxième paradoxe : la vague des bureaux a commencé à refluer, les habitants reviennent peu à peu, mais l'effet de la désertification se poursuit, à travers la transformation des derniers commerces de proximité en casemates de restauration rapide, ouvertes seulement pour les bureaux, à l'heure du déjeuner. Le soir, tout est désert, c'est en quelque sorte le double effet kiss-cool de l'occupation par les bureaux : la première lame rase les habitants dans leurs appartements, la deuxième les rase avant qu'ils ne se rétractent, dans les boutiques du coin de la rue.
 
Impossible, donc, de trouver une baguette dans ce quartier, et pour faire ses courses, il faut se déplacer jusqu'à l'une des zones commerciales de périphérie : rue de Lévis dans le XVIIe, marché des Batignolles, grands magasins boulevard Haussmann dans le IXe, Champs-Élysées, marché de l'avenue du Président Wilson dans le XVIe. Tout cela ne serait pas grave si cela ne signifiait en pratique que l'on fait ses courses en voiture, ce qui n'est bon pour personne, et qu'on les fait difficilement si l'on est ralenti ou en famille.
 
La survie et le développement de commerces de proximité semblent donc le premier axe d'une politique pour rendre la vie plus facile et plus agréable dans le VIIIe, ce qui donne un excellent sujet aux candidats du MoDem pour s'adresser aux nouveaux habitants de l'arrondissement qui sont, à mon avis, leur meilleure cible.
 
Car le quartier a ses traditions et ses réseaux pas toujours faciles à pénétrer. Tout le monde n'entre pas au cercle Interallié, par exemple. Il faut donc s'attaquer d'abord à ceux qui sont accessibles.
 
Les projets développés par l'équipe, intelligente et créative, s'articulent autour de cette réalité : redynamiser les écoles qui commencent à être surchargées par l'afflux des enfants des nouveaux habitants, multiplier les crèches qui manquent cruellement comme partout dans Paris (c'est l'une des promesses de campagne de Delanoë en 2001 les moins tenues), créer un réseau de transport de grande proximité pour les personnes de mobilité réduite, maintenir les commerces existants, se donner les moyens d'en recréer d'autres si le retour des populations s'accentue, bref, faciliter la vie des gens.
 
Après cet excellent exposé, Quitterie Delmas a conclu la soirée en félicitant Monique et ses colistiers, tous très en verve, s'exprimant avec engagement et pertinence.
 
Puis elle s'en est allée vers l'est et moi à travers les rues désertes du quartier vide, j'ai retraversé la place de l'Étoile, suis redescendu vers la Seine pour m'arrêter au bar des Théâtres, avaler un stack tartare juste à côté de l'actrice Natacha Rénier qui, toute sage sur son siège, attendait ses sandwichs emballés dans l'aluminium avant de traverser l'avenue pour entrer en scène au théâtre.
 
Une jolie vision pour finir la soirée. 
 
Demain, je rejoins l'inégalable Quitterie à Nanterre. 
 
Dans trente jours, le premier tour.
 
 

19XI07
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