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02/10/2008

Universal, liberticide universel.

Avec le regretté Thierry Gilardi et d'autres personnalités de l'époque, Pascal Nègre, patron d'Universal, faisait partie des habitués du stade Jean Bouin à l'époque où, adjoint au maire du 16e arrondissement de Paris chargé des sports, j'y allais souvent soutenir l'équipe parisienne.

Nègre n'était alors ni vraiment grand ni petit, mince, un peu anguleux, affable et terne. Il venait vêtu "chic et sport", tendance noir profond, avec des références ado. Quand on l'interrogeait, il affirmait que la Star'Ac était certes de la bouse mais que cette bouse lui permettait de financer de vrais musiciens.

Aujourd'hui, il est permis de mettre en doute cette vision enjolivée des choses.

La télépoubelle n'est pas un programme innocent. Les lecteurs de mon blog vont rétorquer qu'il n'existe pas de programme innocent et que toute la télé est comme ça. C'est un peu vrai, mais l'impact crétinisant de cette émission, sur la jeunesse en particulier, est patent. Il s'agit bel et bien de l'un des instruments qui ensevelissent le peuple dans la sottise lénifiante et dans l'émotivité à trois sous, tous outils qui ont fait le succès de Sarkozy lors de la dernière présidentielle.

D'ailleurs, Sarkozy et les siens ne s'y trompent pas, puisqu'ils s'emploient à défendre bec et ongles les intérêts d'un allié si utile, Universal et ses semblables, les officines de bêtise.

Universal, cette fois, ne se contente plus de l'oppression diffuse et, pour remédier à la résistance croissante de l'Internet qui bat son modèle économique oppressif en brêche, il pousse de toutes ses forces à l'adoption du funeste projet Hadopi, en instrumentalisant les artistes qui, paraît-il, ne pourraient vivre sans lui, Universal.

Artistes réellement dépendants ? Rien n'est moins vrai.

Dans le domaine de la musique comme en d'autres, tout est affaire de pouvoir, rien que de pouvoir. Dans un monde idéal, l'artiste rencontre directement le public (ce que d'ailleurs Internet permet) et, s'il est bon, ses affaires marchent. Dans les années 1950, les cabarets de la rive gauche jouaient à peu près ce rôle de rencontre. Juste après, les choses ont cessé de se passer ainsi : le pouvoir a été détenu par les programmateurs de radio. Puis les choses changèrent encore. Finalement, avant Internet, le déclic appartenait aux grandes maisons de disques, lesquelles se sont cannibalisées, et comme résultat, il y a surtout Universal.

Pourquoi un tel pouvoir ? Parce qu'il existe trois catégories d'artistes musicaux : ceux qui ont du talent et peuvent plaire au public, ceux qui ont du talent et pour lequel il faudra se battre pour convaincre le public réticent, et enfin ceux qui n'ont pas de talent et qui n'existent que par la grâce d'une puissance : une figure politique, un nabab économique, un média, une maison de disques.

Ce qu'Universal défend, ce ne sont pas les artistes, mais le lien de dépendance qu'il a créé avec des artistes qui n'ont pas de talent ou qui le gâchent (Star'Ac), et avec ceux qu'il empêche d'accéder directement au public, sous prétexte qu'ils auraient tous besoin de son aide parce qu'ils seraient difficiles.

Regardons la quantité d'albums qui se vendent uniquement grâce au matraquage et qui réellement n'en valent pas la peine. C'est cela qu'Universal défend, ce modèle-là, qui promeut la nullité pour garantir son pouvoir.

Il m'est arrivé de voir une vidéo où Brassens était interrogé sur les enregistrements par magnétophone, qui devaient, à l'époque, ruiner l'industrie du disque, c'est ce qu'on disait. L'argument était le même, on disait : est-ce que cela n'est pas du vol d'enregistrer une chanson sur un disque (un vinyl alors) ? Et Brassens disait "si, bien sûr", mais il rigolait en se rappelant à haute voix que, lorsqu'il était jeune, il lui était arrivé de piquer des partitions musicales chez les marchands, ce n'était pas si grave, "quand on est jeune, on n'a pas d'argent".

Et les maisons de disques, si promptes à accuser les autres de vol, sont-elles si irréprochables qu'elles le disent ? Allons, aucune d'elle n'a jamais fraudé le fisc ni l'URSSAF ? Frauder, allez-vous me dire, ce n'est pas voler. Bien sûr que si : c'est voler les autres, ceux qui cotisent régulièrement.

Allons, ce qu'Universal défend, c'est son industrie, sa puissance déclinante, et non pas les artistes, car les artistes pourraient très bien vivre de la scène en propageant leurs oeuvres par Internet, sans même imaginer l'utopie de l'abolition de l'argent chère à certains lecteurs de mon blog.

Et donc ce qu'il défend, c'est l'instrument d'aliénation que constitue la Star'Ac, qu'il prétend être la gagneuse de ses "bons" artistes.

Dès lors, qu'il se satisfasse si aisément d'une manoeuvre aussi liberticide que la "riposte graduée" n'a rien d'étonnant. Ce gars-là, cette maison-là, est déjà dans le camp des bourreaux.