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03/11/2009

23 ans.

Mirabelle me tague sur une chaîne qui, si j'ai bien compris, vient de Falconhill via Ataraxosphère et autres.

Le jour de mes 23 ans, il y a tout juste 22 ans aujourd'hui, je l'ai passé à l'hôpital militaire de Lille. J'avais en effet débuté la période des classes de mon service militaire un mois plus tôt, dans les premiers jours d'octobre, à la base aérienne 103, à Cambrai. Il faisait un soleil éclatant le jour de mon arrivée sur cette base, le sous-officier qui était venu chercher à la gare les deux ou trois troufions héberlués qui s'y trouvaient échoués (je n'étais pas arrivé à la bonne gare, ni à la bonne heure, j'ai toujours été incapable de faire tout comme tout le monde), chantonnait, en conduisant, un "tube" de l'époque : "Bienvenue à Paris, les filles sont si jolies..." ou bien, plus traditionnel et festif : "Ah, le petit vin blanc, qu'on boit sous les tonnelles, quand les filles sont belles, du côté de Nogent...".

Le premier soir, avant d'être répartis entre différentes destinations (les élèves officiers - EOR - d'un côté, les élèves sous-officiers d'un autre côté, la troupe au milieu), nous avions dormi sous la tente, un barnum collectif pour au moins une cinquantaine de bleusaille. La journée avait été belle, la nuit fut glaciale. Le lendemain, j'avais une rhinite, une trachéite, une bronchite, une... bref, je prenais 27 pilules par jour, j'avançais dans le brouillard, si bien qu'on a fini par m'envoyer à l'hôpital de Lille dont je ne suis sorti que pour la dernière semaine des classes.

De Cambrai, je suis parvenu à me faire affecter à Creil, dans l'Oise, au nord de Paris, une base désaffectée qui relevait de Cambrai, où se trouvait un détachement chargé de veiller sur la base qui servait de point d'appui en cas de déclaration de guerre. C'était calme et informel, je crois que nous étions une vingtaine d'"aviateurs" (nom donné aux soldats de l'armée de l'air), il devait y avoir deux ou trois sous-officiers, le plus haut gradé était un capitaine qui attendait la retraite en sifllotant. Je rentrais dîner chez moi à Paris, mais je me levais à cinq heures du matin pour arriver à la base à huit, c'était assez fatigant.

De Creil, j'ai donc réussi à me faire muter à la base aérienne 117, à Paris, place Balard, dans le XVe arrondissement, à une demi-heure à pied de chez moi, ce qui était beaucoup plus confortable. Là, j'ai été affecté à la bibliothèque juridique de la Direction du Personnel Militaire de l'Armée de l'Air (DPMAA), placé sous la houlette d'un personnage jeune mais étrange, le sergent-chef Jésus. Je travaillais avec les officiers de la DPMAA, et subitement, le grade le plus bas était celui de capitaine. On trouvait là beaucoup d'Officiers de Réserve en Situation d'Active (ORSA), des gens qui, ayant fait leur service militaire, avaient ensuite fait un bout de carrière dans le civil, puis été embauchés par l'Armée de l'Air dans un cadre militaire.

Les plus amusants étaient les pilotes, qui racontaient leurs nombreuses anecdotes de vol et d'atterrissage. De quoi faire frémir Dassault et tous les fabricants d'avions de guerre. Curieusement, ils ne racontaient jamais d'histoires de guerre. Durant toute la période de mon service militaire, je n'ai entendu qu'un sous-officier parler de combats de sa jeunesse. Le reste du temps, rien.

C'est pendant cette période de bibliothèque que j'ai pu rédiger mon mémoire de maîtrise de DEA en droit public interne. J'avais choisi un sujet rare, sur lequel les textes et la jurisprudence étaient des plus succincts, et j'ai rédigé en trois jours un mémoire de quinze pages, pour lequel j'ai obtenu la note convenable de 14/20. Ouf, j'avais enfin terminé ce DEA que j'avais vaguement suivi en étant délégué général national  (permanent salarié payé au black) des jeunes centristes (JDS) lors de la pré-campagne de Raymond Barre pour l'élection présidentielle qui eut lieu pendant mon service militaire.

Fin juin, il me restait trois mois à faire, mon général (un quatre étoiles typique nommé Clariond, qui commandait la DPMAA) se soucia de concours administratifs que je voulais passer à la rentrée : il m'accorda une "permission libérable", qui me permettait de n'avoir plus à revenir à la B.A. 117 que pour rendre mon paquetage, fin septembre. J'ai pris quelques vacances.

À la rentrée, après avoir vaguement concouru, je me suis intéressé à l'Assemblée Nationale : les élections législatives avaient eu lieu en juin, nous avions un certain nombre de nouveaux députés, j'avais envie de devenir assistant parlementaire. Ayant quelques copains dans la place, j'ai pu assister aux journées parlementaires qui avaient lieu à l'hôtel Lutétia à Paris, prendre des contacts, et finalement, ce fut Nathalie Boulay-Laurent (récemment première adjointe malheureuse de Dassault à Corbeil) qui me donna la piste décisive, un député du Doubs tout à fait sympathique et peu intéressé par la politique nationale nommé Michel Jacquemin. Le jour de mes 24 ans, j'avais été embauché et j'ai fêté ça au Laurent Perrier brut millésimé 1977 à la buvette de l'Assemblée, avec deux ou trois assistantes aves lesquelles j'avais commencé à tisser des liens.

Celles qui me plaisaient le plus étaient Roseline, l'assistante très droite ultra-catho du maire d'Angoulême Georges Chavanne, Christine, l'assistante non moins conservatrice de Christine Boutin, et Sylvie, la belle-sœur et assistante de Dominique Baudis. Juste en face de l'Assemblée, au bureau parisien du paerlement européen, j'avais aussi la très belle Virginie de Villepin, qui, je crois, est aujourd'hui au groupe radical au Sénat. Je précise que ce n'étaient pas des liaisons, il ne s'est rien passé. Je crois que Virginie était d'ailleurs la seule pour laquelle je craquais vraiment.

C'était contrariant de devoir supporter les harangues de l'assistante de Boutin contre l'avortement, et d'une manière générale l'atmosphère peu créative de ceux qui se disaient centristes, que je voyais autrement que lorsque j'avais été militant du mouvement de jeunes. C'est le moment où j'ai donc commencé à m'en éloigner, mais ceci est une autre histoire.