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26/02/2007

Deuxième pensée nocturne.

Parmi mes ascendants, je compte un dénommé Jean-Baptiste Lanjuinais, cousin germain de Jean-Demis Lanjuinais. Ce dernier fut l'un des fondateurs du club breton en 1789 et le principal rédacteur de la constitution civile du clergé.

La fille de ce Jean-Baptiste Lanjuinais épousa un négociant, mon ancêtre par les femmes. Leur cousin Paul Lanjuinais offrit à ce couple l'un des exemplaires des oeuvres complètes de son père le grand Lanjuinais, en quatre volumes, qu'il fit éditer au XIXe siècle.

Or mon arrière-grand-mère, descendante de ce couple, eut une idée étrange lorsqu'elle rédigea son testament : religieuse au point d'être qualifiée de superstitieuse, elle demandait à être revêtue de l'habit de Saint François sur son lit de mort (ce qui ne fut pas fait) mais elle éprouva aussi le besoin surprenant de mentionner les "oeuvres complètes du chanoine Lanjuinais" comme devant être conservées avec soin.

Or il n'existe qu'un chanoine Lanjuinais : un oncle de Jean-Denis Lanjuinais, qui fut chassé de l'Église, se réfugia en Suisse et se fit calviniste... Il n'a jamais écrit que quelques pamphlets, ses oeuvres tiendraient dans un opuscule et personne n'a jamais songé à les éditer.

Pour le reste, les oeuvres de Lanjuinais, ce sont celles ... de Jean-Denis Lanjuinais. Un homme que les pieuses punaises de 1905 (comme apparemment mon arrière-grand-mère) auraient jeté au feu sans remords.

Rédigeant son testament, elle mentait.

Elle mentait devant l'Église qu'elle semblait flatter par ailleurs. De quoi faire réfléchir.

Je n'ai jamais réussi à élucider cette énigme. Mon père, qui a postulé un jour au Grand Orient (j'ignore s'il y a été admis, je dois l'avouer, mais il a conservé la pelure de sa lettre et moi après lui) considérait sa grand-mère comme une grenouille de bénitier. Il n'avait pas lu son testament avec autant de soin que moi.

De temps à autre, je contemple la reliure bleue des quatre volumes, puis je me replonge dans la prose du dénommé Lanjuinais et je me dis : quel temps gagné, quel temps gagné, si on pouvait se passer totalement de Dieu... Libre.

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Commentaires

Mais on peut... qu'est-ce qui t'en empêche ? (Par contre, le gain n'est pas forcément de l'ordre du temps.)

Écrit par : fuligineuse | 26/02/2007

Je ne pensais pas à moi perso, mais à la société.

Écrit par : Hervé Torchet | 26/02/2007

Je ne suis pas du tout d'accord... Je pense que c'est au contraire la foi religieuse qui permet la vraie liberté en particulier qui nous libère des conditionnements qui nous aliènent dans le monde "non religieux"
Je pense que l'athéisme est nécessaire et utile mais pour ma part j'ai accédé à plus de Liberté grâce aux Exercices spirituels d'Ignace de Loyola, le génial fondateur des Jésuites et qui a fondé sa spiritualité sur l'apprentissage du discernement... Spiritualité révolutionnaire en son temps (XVIème siècle) et toujours d'actualité...
Certes on ne gagne pas de temps mais au fait
gagner du temps.... POUR QUOI FAIRE ?

Écrit par : Rosa | 26/02/2007

J'oubliais : cette spiritualité n'a bien sûr rien à voir avec l'Eglise triomphante du XIX ème siècle qui semblait inspirer votre arrière-grand-mère...

Écrit par : Rosa | 26/02/2007

Votre aïeule a peut-être simplement confondu dans son souvenir le chanoine et l'homme de lettres : vous savez comme moi avec quelle circonspection il faut considérer les traditions familiales, qu'une approche objective des documents généalogiques permet souvent de "démythifier". Au demeurant, votre aïeule avait-elle lu les oeuvres de Lanjuinais ?

Quant à l'interrogation finale de Rosa, je crois qu'elle est véritablement au coeur du débat de nos sociétés développées : gagner du temps pour mieux le perdre. Un exemple un peu trivial (bien loin en tout cas des "Exercices spirituels" de Loyola) : la durée moyenne d'un déplacement au coeur d'une grande ville européenne (Paris, ou Londres) n'a pas diminué depuis 150 ans.

Écrit par : André-Yves Bourgès | 26/02/2007

Je ne suis ni athée ni spiritualiste, tout juste sceptique. Il y des gens à qui l'idée de Dieu dit quelque chose ; à moi, rien. C'est un concept historique, un sujet de recherche d'architecture ou d'icono parfois passionnante, mais c'est aussi un frein, je trouve. Il me semble qu'avec plus de temps, il y aurait des possibles repêchés parmi ceux que le défaut de temps force à écarter. C'est mon opinion, bien entendu. Et je n'ai pas la prétention de régler d'un trait de plume un problème sur lequel les philosophes les plus charpentés suent sang et eau.

Écrit par : Hervé Torchet | 26/02/2007

Je préfère cette nuance... Le scepticisme (je vénère Montaigne) est constructif et la foi en a besoin : une foi religieuse si elle n'est pas régulièrement remise en cause n'est plus foi mais croyance et risque de devenir fanatisme
Pour moi le scepticisme est VITAL (surtout en politique d'ailleurs !)
Ce qui m'avait gênée dans votre propos c'est le lien entre question de Dieu et perte de temps...
Contempler un tableau c'est aussi perdre son temps

Écrit par : Rosa | 27/02/2007

Je trouve Dieu moins utile que certains tableaux ; c'est une question de point de vue.

Écrit par : Hervé Torchet | 27/02/2007

"Utile" : quelle horreur ! Est-ce du Happy few ?

Écrit par : Rosa | 27/02/2007

Happy, peut-être pas.

Écrit par : Hervé Torchet | 27/02/2007

Les commentaires sont fermés.