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21/10/2010

Retraites : le double trompe-l'œil

Ayant produit un article avant l'été sur l question des retraites, auquel les éléments semblaient avoir donné raison, je n'imaginais pas nécessaire d'en donner un second. Un passage au bar de la Comète de Nicolas m'a convaincu de la nécessité d'en donner un nouveau, précisant certains aspects de mes idées sur la question, avec en ligne de mire la conclusion à laquelle je viendrai, qui sera le double trompe-l'œil annoncé dans le titre.

Éléments d'arithmétique

Comme je l'énonçais dans mon précédent article sur ce sujet, l'arithmétique est implacable et agit sur plusieurs niveaux de notre problème de robinets du jour. Pour aller au terme de la simplification, jusqu'à l'épure, disons qu'il y a, d'un côté, un nombre x global de points de retraite. Si une retraite de 1000 Euros représente 1000 points de retraite par tête, 5 millions de retraités qui ont 1000 Euros chacun représentent à eux tous 5 milliards de points de retraite. En fait, chacun a un nombre différent, ceux qui touchent la moitié du plafond n'ont (selon mon schéma théorique) que 500 points, d'autres 644, d'autres 832, etc jusqu'à 1000, retraite au plafond du montant dit "de la Sécu" (je répète que ce ne sont pas les montants réels, mais ceux de mon schéma). Ce nombre global de points, mettons-le à (5 millions x 763 points qui seraient la moyenne =) 395 millions de points, mettons le point à 1 Euro pour faire simple. Notre nombre x donne 395 millions d'Euros de pensions de retraites. En face, nous avons une proportion y du PIB consacrée à la rémunération du travail (nous sommes dans le principe de la retraite par répartition, sans intrusion de solidarité des comptes publics). Il faut donc trouver 395 millions. Il est facile de projeter ce raisonnement sur les vrais chiffres : pensions versées par le régime général, PIB, part du PIB consacrée aux salaires des employés assujettis à cotisation du régime général.

Maintenant, considérons le nombre de points non pas comme une donnée fixe, mais comme un flux : chaque année, des points s'éteignent avec la mort de pensionnés, d'autres points arrivent à échéance avec la retraite de salariés.

Il se trouve qu'à l'époque où la retraite à 60 ans a été créée, la France des vieux était encore fortement marquée par son ancienne sociologie : beaucoup de paysans et de commerçants, qui ne coûtaient rien au régime général. La proportion des salariés dans les classes d'âges élevées était relativement faible, le montant global des points à financer par le régime général était faible, cependant que la proportion des salariés dans les classes d'âges actives était très fort/ Il y avait donc beaucoup d'actifs pour payer peu de retraites du régime général.

Et il se trouve aussi que les classes d'âges qui partent en retraite en ce moment sont ces fameuses classes nombreuses qui pouvaient payer voici trente ans. Et il se trouve enfin que la part des salariés dans la population active, elle, n'a pas augmenté, elle a plutôt régressé, car depuis vingt-cinq ans, le secteur d'emplois qui a beaucoup augmenté est celui de la fonction publique, qui, en grande majorité, ne cotise pas au régime général.

Dans le même temps, la durée moyenne de vie s'est allongée. Le coefficient de correction du point en fonction de sa durée d'exigibilité (qui coïncide avec la durée de vie à la retraite) a explosé : en 1981, on vivait en moyenne 70 ans, on vit 80 ans aujourd'hui. Il faut donc, à population égale, payer deux fois plus de pensions de retraites, c'est mathématique, puisqu'on va vivre retraité deux fois plus longtemps.

Donc on a des générations de retraités nombreuses et coriaces et des générations de cotisants clairsemées. On voit bien l'effet de ciseau sur le taux de couverture des besoins par les capacités. De là la nécessité d'augmenter, d'une manière ou d'une autre, le montant cotisé par tête. Cela s'appelle l'augmentation de la durée de travail et de la durée de cotisation.

La fiscalisation, fausse bonne idée

Le Partis Socialiste, devant les réalités, n'a pas formulé beaucoup d'idées originales. La plus forte serait de faire basculer le financement des retraites sur l'impôt. Fausse bonne idée. Pourquoi fausse ? Tout simplement parce que la gauche est incapable de faire payer les entreprises. Je rappelle que, les bonnes années, l'Impôt sur les Sociétés (IS) procure environ 50 milliards d'Euros à l'État, cependant que les subventions aux seules entreprises du Cac 40 s'élèvent à 60 milliards. Autrement dit, notre système fiscal est fait pour ne pas faire payer les contribuables qui, pourtant, en auraient le plus les moyens. Et la gauche, pas un instant, n'a remis ce système-là en cause, pas un instant elle n'a proposé de faire payer les grandes entreprises ou, même si elle le proposait, elle n'irait pas au bout de ce projet, car nombre de ses grands élus sont poussés par des lobbys. Donc en définitive, ce seraient les contribuables, les classes moyennes, qui paieraient. On aurait les mêmes inconvénients qu'actuellement, sans les avantages d'un système qui a des coûts de fonctionnement assez faibles, plus faibles que ceux de l'État. On y perdrait.

La vérité est qu'il faudrait démystifier les deux trompe-l'œil de la situation actuelle.

Le premier, c'est la dette. Nous sommes écrasés sous une dette collective effrayante, pas seulement nous les Français, mais l'ensemble des États. La dernière fois que j'ai consulté les chiffres, l'endettement étatique mondial s'élevait à 60 000 milliards d'Euros, somme effarante. Seulement voilà, les transactions financières mondiales, elles, s'élèvent à 360 000 milliards d'Euros. Il suffirait  d'un prélèvement de 16 % sur les mouvements financiers pendant une année pour effacer les dettes publiques. Disons que 5 % pendant deux ans suffiraient à ramener les endettements publics jusqu'à un montant tolérable. C'est la bonne idée, avant même la taxe Tobin. Mais qui peut sérieusement croire qu'on parviendra à l'imposer ?

Le deuxième trompe-l'œil, ce sont les mouvements sociaux. L'expérience française du XXe siècle a prouvé que toutes les fortes broncas sociales ont appelé l'extrême droite vers les sommets électoraux. Le poujadisme est né de cela dans les années 1950 et, parmi les députés élus avec Poujade en 1956, il y avait déjà Le Pen. Le tohu-bohu actuel ne peut aboutir qu'à une remontée de l'extrême droite, à moins que le centre ne refasse surface comme je l'ai expliqué récemment. Le plus triste, c'est que les grévistes se racontent qu'ils font la révolution, alors qu'ils se contentent de la mimer, et qu'en plus, ils ne font presque aucun mal à ceux que leurs actions devraient frapper : les fameux grands patrons, les 200 familles disait-on autrefois. Les emmerdements actuels ne s'abattent que sur les laborieux, les PME, les employés qui ont besoin de leur salaire, et ne coûtent rient d'irréparable aux grands intérêts. Si j'étais gréviste, plutôt qu'un dépôt de carburant, je bloquerais le terrain de golf d'un milliardaire, ou bien j'y planterais des choux. Bio de préférence, comme dirait Quitterie.

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Commentaires

Pour bloquer les golfs, je suggère les patates. C'est très envahissant.

Sinon, on est à peu près d'accord, notamment à propos de la dette.

Bon billet

(sauf mon nom de famille, si tu pouvais le virer : rien de bien grave mais une recherche de mon nom associé à Comète, dans google, arriverait directement ici).

Écrit par : Nicolas | 22/10/2010

Fait.

Écrit par : Hervé Torchet | 22/10/2010

Merci !

Écrit par : Nicolas | 22/10/2010

Psychanalyse d’une réforme…

Nous ne creusons pas assez de tunnels dans les consciences assoupies et endormies de nos concitoyens.
Alors que l’injustice dont ils sont victimes de jour en jour, exige d’eux, de couper une fois pour toutes le cordon et devenir démons, violents ou truands pour mettre fin à cette supercherie où tout le monde biaise et personne ne jouit !

http://www.tueursnet.com/index.php?journal=Balle%20de%20meforme

Écrit par : tueursnet | 03/11/2010

@ tueursnet

Psychanalyse d'un spam. Mais bon, on l'a tous fait.

Écrit par : Hervé Torchet | 04/11/2010

Les commentaires sont fermés.