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24/03/2013

Vers une nouvelle ère absolutiste ?

Internet, nous le mesurons chaque jour un peu plus, est une révolution d'échelle historique comparable à l'invention de l'imprimerie. La comparaison devient aiguë en ce sens que l'imprimerie donna possibilité et envie à une population nombreuse d'accéder directement aux textes, non seulement aux textes religieux, mais aussi aux poèmes épiques et les romans chevaleresques. Cet accès direct et immédiat, et sa facilité, sont la caractéristique commune de l'invention de l'imprimerie et de l'internet.

Or il se trouve que depuis l'invention de l'imprimerie, une masse considérable de population a appris à lire, une proportion encore plus considérable de la population humaine, et que si l'imprimerie toucha l'Europe d'abord et se répandit lentement au-delà, la toile de l'internet est devenue universelle en relativement peu de temps, touchant toutes les régions du monde même si elle n'est pas encore accessible à tous les humains. Un saut d'échelle est donc perceptible, la révolution devient exponentielle.

Maintenant, si nous pouvons dresser un bilan très positif de l'invention de l'imprimerie (notamment parce qu'elle a justement favorisé l'apprentissage de la lecture et la diffusion de la pensée), il faut reconnaître que sa première conséquence indirecte mais manifeste a été l'époque des absolutismes traversée par l'Europe jusqu'à la révolution aristocratique britannique du XVIIe siècle et surtout jusqu'à la révolution populaire française de la fin du XVIIIe siècle.

Au moment où naît l'imprimerie, les monarchies sont faibles et sévèrement bornées par le système féodal. Ce système se caractérise par la médiation du pouvoir et du contact. Le quidam n'a de rapport avec son roi qu'à travers un filtre, la pyramide féodale, qui commence par son seigneur de patelin, se poursuit par le suzerain de ce seigneur, et ainsi de suite jusqu'au roi. La féodalité reproduit ainsi le modèle de l'Eglise catholique, installée en médiatrice entre le fidèle et Dieu. La philosophie d'accès direct aux textes et à Dieu, court-circuitant l'Eglise (c'est l'esprit de la Réforme) et les autres corps intermédiaires, aboutit à un contact fictif mais direct entre le souverain et son peuple, sans le cadre juridique protecteur accumulé par le droit féodal. Cette nouvelle situation est la légitimation historique de la monarchie absolue. La question se pose donc : y aura-t-il, du fait de la philosophie incarnée par internet, une nouvelle ère absolutiste ?

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Commentaires

L'idée de regarder ces invention sous le prisme du temps long est intéressante.

S'il y a un absolutisme dans Internet, c'est celui de l'individu. L'individu se crois fondé à porter des jugements sur tout. Il en résulte un terrible aplatissement des valeurs. Tout se vaut, un prix Nobel de littérature et un ado twittant: en 140 signes c'est souvent le second qui a du génie.
Mais quand on dit que tout se vaut, on se gourre peut-être: en apparence c'est vrai, mais en fait, en faisant la promotion de la confusion, où tout se vaut, Internet accroit les inégalités entre ceux qui savent distinguer l'insignifiant du signifinant et ceux qui restent hypnotisés par l'abondance d'information sans valeur.
Et le KGB dans tout ça?

Écrit par : Eric | 26/03/2013

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