28/02/2007
Libre, l'Histoire ?
Voici un texte que je viens de publier sur le blog de So que j'ai ajouté en référence parmi les "blogs à lire" :
Le lien entre l'historiograhie et le pouvoir politique n'a pas de commencement.
Grégoire de Tours, qui écrit bien avant Charlemagne, fait une chronique historique pour fonder les prétentions politiques des rois mérovingiens. Au plus ancien Moyen Âge.
Et je réédite bientôt une Histoire de Bretagne publiée pour la première fois au XVIe siècle et censurée alors parce qu'elle développait les thèmes de l'historiographie officielle bretonne qui heurtaient de front ceux de la même historiographie officielle "française" ou parisienne.
Par conséquent, dire une vision de l'Histoire est toujours un acte politique et on a toujours censuré au nom d'une histoire officielle.
Toujours, sauf au XXe siècle. Le progrès fut alors énoncé : chacun était libre de décider soi-même la vision de l'Histoire qu'il choisissait.
Or voici que les vieilles tendances inquisitoriales, les vieux démons de la pensée, refont surface : l'historien, voire le citoyen, avait conquis une liberté, on la lui retire. C'est bien entendu le législateur qui doit dire ce qui est historique et ce qui ne l'est pas. C'est le législateur qui doit qualifier les événements et, le cas échéant, attribuer une conséquence judiciaire à sa qualification.
On est donc revenu au Moyen Âge, Torquemada danse sur la tombe de Victor Hugo, et tout le monde s'en félicite.
Ici comme ailleurs, il faut le dire et le répéter : la liberté d'expression est une liberté publique. Tout texte spécial qui la codifie est attentatoire à sa substance même. Elle ne peut faire l'objet de décisions judiciaires que sur des principes généraux et seul le juge de droit commun doit pouvoir en connaître.
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Commentaires
( je m'excuse mon post est parti après une mauvaise manipulation sur le clavier) avant. La France, un état que l'on oublie. Alors que peuvent faire les politiciens aujourd'hui pour empêcher les historiens de les oublier? Il ne leur plus que les mesures désespérées, ils proposent et votent des lois stupides, toutes plus absurdes les unes et que les autres en espérant que l'une d'elle les fera rentrer à la postérité. La Censure est devenu le moyen pour eux de contrôler que personne ne puisse empêcher cette course contre l'oubli. Napoléon III avait compris le rôle de l'Histoire, et il en profita pour faire modifier certaines archives.
Écrit par : Michaël | 28/02/2007
Pour parler le politiquement incorrect, un historien ne doit-il pas toujours être un "révisionniste" ? Bien entendu, je ne compte pas au nombre des historiens les provocateurs ou les idéologues qui tiennent par principe des propos révisionnistes ; en revanche, il me paraît préjudiciable que le législateur interdise aux historiens de travailler sur tel ou tel épisode, sauf à répéter une vérité historique officielle.
Pour ma part, j'ai eu à travailler et je travaille encore à l'occasion sur le Moyen Âge central, dans le domaine particulier de l'hagio-historiographie (les Vies de sainst comme matériau historique au sens large) : pour l'instant, le champ d'investigation demeure largement ouvert ; mais il m'arrive parfois de craindre le vote d'une loi mémorielle, élaborée par des gens auxquels on ne saurait prêter, je n'en doute pas un instant, que de ces bonnes intentions dont l'enfer est malheureusement pavé.
Écrit par : André-Yves Bourgès | 28/02/2007
Il serait grand temps que soit rétablie la dignité de la loi. On l'utilise à tous (et hors de) propos. C'est une serpillère.
La loi a pour fonction de régir des comportements.
Dans le film "Un homme pour l'éternité" (j'ignore son titre anglais, mais il a reçu l'oscar vers 1965), Thomas More s'adresse au roi Henry VIII et lui dit (version française) :
- Si le roi Henry décrète que la terre est plate, alors qu'elle est ronde, la terre sera-t-elle plate pour autant ? Et s'il décrète qu'elle est ronde alors qu'elle est plate, sera-t-elle ronde pour autant ?
C'est une forte régression de l'esprit. Il faut vraiment que notre pays soit complètement perdu pour ne pas réagir à ce genre d'abus.
Écrit par : Hervé Torchet | 28/02/2007
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