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13/04/2007

Pauvre de Gaulle.

Faisons une séquence historique.
 
En 1956, à la suite de la nationalisation du canal de Suez, les Français et les Anglais, dépossédés tous deux par Nasser, lancent une opération militaire en Égypte pour protéger leur canal. 
 
Aussitôt, les Soviétiques interviennent et menacent d'employer la bombe atomique contre les deux puissances si celles-ci ne se retirent pas au plus vite.
 
Les États-Unis consultés disent que les possessions des Européens hors d'Europe ne sont pas couvertes par le traité de l'Atlantique Nord (OTAN) et qu'ils ne garantissent donc pas les Européens contre les menaces russes.
 
Le Royaume-Uni choisit donc de reculer et la France, qui ne possède pas la bombe, est contrainte de se retirer.
 
Accessoirement, elle vient de perdre en fait la guerre d'Algérie qui va cependant continuer plus de cinq ans.
 
Toujours est-il que, atteinte dans ses objectifs les plus stratégiques, la France vient de constater l'impuissance de ses alliances. De là l'appui des milieux de la souveraineté au coup d'État de mai 1958.
 
Car depuis les lendemains du désastre de Suez, la France construit sa propre bombe nucléaire. Et il se trouve qu'elle a besoin du Sahara algérien pour l'expérimenter. Il faut un pouvoir fort pour gérer cette nécessité. On va voir se dessiner, dans la stratégie gaullienne du conflit algérien, l'objectif particulier du Sahara.
 
Et c'est dans le désert algérien que, quelques années après l'indépendance, la France gaullienne expérimente sa première bombe atomique avec succès.
 
De Gaulle a garanti les premiers essais nucléaires à l'air libre de notre première arme atomique (vivement qu'on n'ait plus besoin de cette arme effrayante même sous forme de menace).
 
Puis, le monde sachant que la France désormais compte parmi les puissances nucléaires, de Gaulle, bien sûr animé par ses propres préventions à l'encontre des Américains, mais également sur le constat que ceux-ci nous ont fait une inélégance dans l'affaire de Suez, annonce que la France quitte le commandement militaire intégré de l'OTAN.
 
Les États-Unis ont marqué les limites de leur soutien, nous marquons les limites du nôtre.
 
Bien entendu, les Américains sont furieux et décident d'agiter tous leurs réseaux en France contre de Gaulle (à partir donc de 1966).
 
En fin de compte, celui-ci quitte le pouvoir.
 
Et c'est seulement en 1970 que la colère s'éteint, lorsque Nixon vient s'incliner sur la dépouille de de Gaulle lors de ses obsèques, Kissinger glisse à l'oreille de Pompidou : "Le président Nixon considère que la bombe nucléaire française est un fait", ce qui, en termes diplomatiques, signifie que l'incident est clos : la France est tolérée comme puissance nucléaire puisqu'elle a accepté l'entrée de l'Angleterre dans l'organisation européenne.
 
Voilà.
 
Voilà le vrai visage d'une séquence historique qui nous rappelle que, si l'Amérique est, reste et restera notre amie, notre alliée en démocratie et en République, nous ne devons en aucun cas vivre agenouillés devant elle : il n'est d'amitié qu'entre libres.
 
Et je dis ça sans défendre une vision coloniale, on s'en doute, ni faire une propagande excessive pour l'usage de l'arme atomique, bien sûr aussi. La question est seulement que tant que nous n'aurons pas un gouvernement mondial, des règles simples et universelles (et appliquées) et une protection des états faibles contre les abus léonins des états forts, nous avons le devoir de militer pour notre indépendance et celle de tous les autres peuples, en particulier des démocraties.
 
Or la roue a tourné : les héritiers du gaullisme sont atlantistes (pauvre de Gaulle !) et ceux du centrisme militent pour l'indépendance et la dignité. Toujours plus amicaux des États-Unis, mais toujours en liberté.
 
N'y a-t-il pas aujourd'hui une majorité d'Américains qui pensent que la guerre en Irak était une erreur ? Nos amis démocrates américains ne le pensent-ils pas eux-mêmes ?
 
Alors quand j'entends que Sarko envisage de nommer pour premier ministre Fillon, je crie, je me scandalise. Car ledit Fillon, dans les années 1990, a présidé un organisme de nature associative basé à Paris, le CASE. Objet de cette organisation ? Promouvoir l'amitié franco-américaine. On voit ce que cela signifie.
 
Autrement dit, Sarko, c'est un mille-feuilles où toutes les couches s'appellent ultradroite américaine : une couche de pâte-feuilletée Bush, une couche de crème pâtissière Cheney, etc.
 
Et c'est cela qu'il faudrait élire ?
 
Pas moi.
 
Et je sais que beaucoup d'autres non plus, jusque dans l'UMP, à preuve l'engagement du journaliste et blogueur Christophe Carignano pour l'union nationale voulue par Bayrou.
 
Allons, de Gaulle, tranquillise-toi : tous tes petits-fils ne t'ont pas oublié. 

21:35 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : présidentielle, udf, bayrou, sarkozy, royal | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

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