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06/01/2008

Quitterie Delmas à Bobigny.

Il faut imaginer qu'à Bobigny, on trouve encore des monuments dédiés à Lénine. Il faut aussi imaginer un urbanisme taillé au bulldozer, des tours granitiques, énormes, glaciales. Il faut imaginer que vivent là des gens qui se sentent sans cesse montrés du doigt et qui voudraient que cela cesse.
 
L'un d'eux dit d'ailleurs qu'il se reconnaît en Bayrou, parce que Bayrou, maintenant, "il sait lui aussi ce que c'est que d'être constamment stigmatisé".
 
Je suis arrivé par le métro, la ligne 5, que j'ai prise en changeant à la station parisienne qui porte le beau nom de "république". Et l'un de ceux qui se sont faits le plus applaudir ce soir, c'est celui qui a dit dans un beau français empreint d'un léger accent : "nous sommes tous des enfants de la république". La république, celle qui n'a ni couleur, ni religion, celle qui aime également tous ses enfants.
 
Celui-là, le plus vieux, a prononcé un très joli discours de foi dans la capacité du MoDem à changer les choses. Il a tendu les mains vers les plus jeunes pour leur signifier qu'ils incarnent l'espoir. Et il s'est tourné vers Karima, la cheville ouvrière de la liste de Nadia Falfoul à Bobigny. Il a rappelé que cette fille-là, il l'a connue toute petite, bébé (elle a vingt-trois ans). Il l'a vue s'en sortir, grandir, aller à l'université.
 
Eh oui, elle le confirme : elle étudie l'Histoire pour devenir prof. En se décrivant, elle avoue aussi que son frère est en prison à Villepinte. Elle ne s'en vante pas, ne s'en défend pas. Elle explique le poids du stigmate, la suspicion permanente, les contrôles d'identité, les policiers qui trop souvent nient son statut de Français à part entière.
 
Et je crois entendre de nouveau ce que j'ai déjà entendu le soir où Quitterie alla soutenir Jean-Michel Cadiot et Ali Menzel à Sarcelles, l'engrenage de provocation et de représailles dans lequel des policiers pas malins mettent trop souvent les phalanges.
 
D'autres parlent. L'un note que si Karima doit travailler vingt heures par semaine pour se payer ses études d'Histoire, lui ce sont quatorze heures PAR JOUR qu'il lui a fallu travailler pour devenir autodidacte et cadre supérieur.
 
Un autre encore, responsable associatif, profite de l'arrivée d'Ali Menzel dans la salle pour affirmer que lui-même est persuadé qu'à Villiers-le-Bel (ville d'Ali), "ce n'était pas un accident" (la mort de deux jeunes à moto renversés par des policiers). Et d'ajouter que si son intuition est juste, alors la capacité du système à "couvrir" en quelques heures un tel forfait est effrayante.
 
D'autres s'expriment, un professeur retraité, une employée, qui révèlent l'opacité du système d'habitations publiques à Bobigny, rappellent qu'il n'y a pas si longtemps, il fallait avoir la carte d'"un certain parti" pour avoir quoi que ce fût.
 
Un autre responsable associatif, qui veut être candidat dans une ville voisine (mais avoue certaines difficultés relationnelles avec le MoDem), s'exprime avec autorité pour soutenir Nadia Falfoul et incite ses colistiers à l'accompagner de très près et en grand nombre lorsqu'elle fait campagne dans les rues.
 
D'autres parlent encore, révélant d'autres fiertés, d'autres malheurs.
 
Puis des candidats d'Aulnay-sous-Bois prennent la parole.
 
Puis Pierre Creuzet, élu de Nanterre, l'homme qui a réchappé de la tuerie du conseil municipal de cette ville voici quelques années et qui vint ensuite, le bras en écharpe, dire quelques mots devant le Conseil National de l'UDF à la maison de la Mutualité, Pierre Creuzet, donc, se lance dans un exposé enflammé sur les mairies qu'il faut arracher aux communistes, sur la commodité que représente pour la droite ces "villes-poubelles" où l'on peut déverser indéfiniment les habitants dont on ne veut pas dans les villes voisines.
 
Là mieux qu'ailleurs se prouve la vocation du MoDem non pas à dépasser le clivage droite-gauche, mais à renverser un système de répartition des rôles et des profits où la droite et la gauche sont en fait de connivence.
 
Et Christian Delom, candidat aux municipales de Clamart (et à la législative partielle ces jours-ci), emboîte le pas à Creuzet en fustigeant la corruption qui règne dans ces territoires, le Sarkoland.
 
J'ai oublié de rendre compte, un peu plus tôt dans la soirée, des propos très clairs et très volontaires tenus par la candidate de Bobigny, Nadia Falfoul, qui, du haut de ses vingt-six ans, montre beaucoup de sérieux, d'aplomb et de sens politique.
 
Enfin, Quitterie conclut la soirée en se réjouissant de voir l'élan de rénovation impulsé par Bayrou si bien relayé sur le terrain, par tant d'énergies et d'engagements. Elle affirme sa conviction que là est la promesse de la France de demain.
 
Alors, après encore un long moment de rencontre avec les Balbiniens, commence une réunion des colistiers de Quitterie pour l'élection du Conseil National du MoDem. On échange des informations, on s'émerveille ou s'étonne des QUATORZE listes en présence pour l'Île de France, on fait observer que parmi elles, il y aura beaucoup de casse et que la dispersion des voix les rendra inutiles. Une lourde hypothèque pèse notamment sur ceux qui ont choisi de ne présenter de candidats que par département. Car ils pourraient n'obtenir que très peu d'élus, alors que s'ils avaient respecté l'esprit des statuts, ils en auraient eu plus. On note aussi que le site du MoDem a défiguré la profession de foi et la liste de notre candidature.
 
Reste la question du calendrier, qui demeure en suspens.
 
Puis, après une photo de groupe, nous repartons en métro.
 
Nous ne parvenons pas à comprendre la dispersion des candidatures franciliennes dont le projet est identique. 
 
Décidément, il a les ailes lourdes au décollage, notre Mouvement Démocrate. Mais il ira loin. 

Commentaires

Si il a les ailes lourdes tu prends un ULM , il décollera tout seul.

Pierre

Écrit par : ulm pierre | 06/01/2008

@ Pierre

Il suffira que Quitterie souffle sur les ailes du MoDem pour qu'elles deviennent légères.

Écrit par : Hervé Torchet | 06/01/2008

Entièrement d'accord avec tout ce a qui a été dit.
Tous derrière Quitterie pour un MoDem transparent, libre et engagé.
" je le crois parce que je l'espère" ( Léon Blum)

Écrit par : Domitille | 06/01/2008

@Domitille : et moi entierement d'accord avec toi Domitille, à jeudi, amities, virginie

Écrit par : virginie v | 06/01/2008

Hervé,

permets-moi de te remercier pour ton excellent compte-rendu (comme toujours! - et ce n'est pas de la langue de bois)

Permets-moi d'être un peu long ici pour une fois.

Permets-moi aussi de préciser 2 points.
1. Christian Delom a renoncé juste avant Noël d'être candidat aux législatives partielles pour se consacrer à sa liste transpartisane pour les municipales de Clamart. (aurait-il dit l'inverse hier?)
2. Selon moi, ce n'est pas tout la gauche qui joue le jeu des villes riches (UMP) / villes pauvres, mais la plupart du temps le PC. En général le PS ne se satisfait pas de cette situation.
En ce sens, en banlieue, force est de constater que les forces prônant la mixité sociale sont l'UDF-MoDem, le PS, et les Verts (ces derniers pesant généralement peu en banlieue) . D'ailleurs, il est arrivé souvent ces 10 dernières annés que l'UDF soit peu motivée par cette mixité. Et c'est notamment pour cela que je me sens à ma place dans le MoDem, alors que je n'avais pas pris ma carte à l'UMP.

Permets-moi en outre une réflexion personnelle négative (mais pas méchante, tu t'en doutes) : j'ai beaucoup de mal à encaisser l'expression "s'en sortir". En général, cela sous-entend qu'il faut rejeter en partie son origine, et aussi que la vie a quelque chose d'une jungle. Je ne suis peut-être pas assez précis, mais je veux juste dire que cette expression légitimise une pensée qui me parait établir comme acquis que certains resteront dans leur m... pendant que le talent ou la chance des autres leur permettront d'y échapper. Bref, je n'aime pas cette expression car "ceux qui restent" ne sont pas dans une impasse. Et je ne dis pas ça avec naïveté, ou sans savoir à quoi ressemble les galères de certaines banlieues.

Permets-moi enfin de te souhaiter une bonne année.
Si tu m'as permis tout cela, merci pour ta générosité ;-)

A jeudi 10, sans doute?

Écrit par : guillaumeD | 06/01/2008

Dont acte sur la législative, je n'avais pas eu cette info et ça me paraît un choix noble.

"S'en sortir" est un expression utilisée par l'orateur lui-même et qui, comme telle, m'a frappé.

Ton analyse de l'attitude de la gauche non comuniste est un utile complément, mais il faut que celle-ci précise ses positions qui demeurent amibguës à plus d'un titre.

Écrit par : Hervé Torchet | 06/01/2008

@ Guillaume

Je ne doute pas de la bonne volonté de la gauche en question, ce n'est pas le sens de mon compte-rendu, mais j'aimerais que les choses se clarifient à l'intérieur de la gauche entre les vieux réflexes et la bonne volonté. Voilà tout.

Écrit par : Hervé Torchet | 06/01/2008

merci Hervé de tes réponses.
Je trouve très justes tes remarques sur la gauche. Et évidemment, je ne veux pas défendre le PS à tout prix.
Pour "s'en sortir", si je fais un jour un peu plus connaissance avec Karima, j'espère lui en parler. (c'est marrant, on pense pareil ;-)
Je vois aussi avec dépit que j'ai écrit "prendre ma carte à l'UMP" au lieu de "UDF" : lourd lapsus à assumer...

Écrit par : guillaumeD | 06/01/2008

Pour vous donner des nouvelles de Bordeaux cela ne se passe pas comme voulu avec les listes communes UMP où il fallait s'en douter le Modem est à des places assez lointaines et non éligibles.V. Fayet va tenir réunion lundi je crois mais ne veut pas de listes autonomes.Bayrou devrait refaire un petit tour à mon avis dans son "cher Bordeaux".

Pierre

Écrit par : ulm pierre | 06/01/2008

Si ça les oblige à se botter les fesses, c'est plutôt une bonne nouvele. Il est encore temps qu'ils fassent une liste autonome, même si ça leur déplaît. Bayrou serait en effet bien inspiré d'y retourner.

Écrit par : Hervé Torchet | 06/01/2008

Hervé, pas très équilibré non plus le panachage du blog... La littérature est en position non elligible sur ta liste ?

Écrit par : Rosa | 06/01/2008

@ La Solidarité

Si dans le souvenir de la Fraternité
Tu trouvais la Solidarité
Qui te manque aujourd'hui
N'oublie pas et oui
Q'au bout d'une rue déserte
Ma porte te reste ouverte.


Pierre

Écrit par : ulm pierre | 07/01/2008

@ Rosa

Comme j'ai eu l'occasion de l'écrire ici même, Hervé fait ce qu'il veut de son blog ; mais, à mon grand regret, je ne vois plus ici qu'une tribune politique au service de la future carrière politique de Quitterie Delmas, dont je ne pense rien de particulier et qui d'ailleurs ne m'intéresse pas (ces propos, est-il besoin de le préciser ? ne concernent que la seule personne publique de QD).

Je pressens que la déception sera l'occasion pour Hervé de revenir à la littérature : beaucoup d'autres l'ont expérimenté avant lui ; mais, en attendant ce jour, le voilà tout entier à sa passion enchainé, ce dont je me console en pensant aux beaux portraits à la Retz, à la Saint-Simon ou à la Chateaubriand qui demain sortiront de son clavier.

A propos de Chateaubriand, cette fameuse citation très actuelle eu égard à la médiocre qualité du personnel politique aujourd'hui aux affaires en France :
"Il est des temps où l'on ne doit dépenser le mépris qu'avec économie, à cause du grand nombre de nécessiteux".

Bien cordialement.

Écrit par : André-Yves Bourgès | 07/01/2008

Je partage ce point de vue André-Yves en espérant que cela ne prenne pas trop de temps...

Écrit par : Rosa | 07/01/2008

Quitterie Delmas va vous étonner.

Écrit par : Hervé Torchet | 08/01/2008

Les commentaires sont fermés.