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14/09/2008

Quitterie Delmas, portrait d'une Européenne.

Au moment où se dessine la perspective d'un nouveau projet du Mouvement Démocrate incarné par Quitterie Delmas, il m'a paru utile de faire le portrait de celle dont je fais d'habitude l'éloge.

Chacun la connaît, chacun en a son opinion. Tout le monde reconnaît son énergie, sa volonté, sa présence, son charisme. Quelques-uns la critiquent quand ils ne la connaissent que par ouï-dire, la jugeant par la rapidité de sa trajectoire plus que par le sens de ses actes. On la décrit souvent ambitieuse, on la découvre modeste, appliquée, impliquée. Elle joue son rôle.

Lors de l'élection du collège des adhérents du Conseil National, elle sut bâtir une liste solide, équilibrée, pluraliste, ouverte sur une géographie étendue. Elle conçut une campagne novatrice, non pas vers les adhérents, mais fondée sur le soutien apporté aux candidats aux municipales. Elle démontra maturité, représentativité, créativité. Partout, ceux qui la rencontraient tombaient sous son charme, non seulement comme femme, mais surtout comme volonté politique en marche.

Qui est-elle ?

Elle a trente ans. Elle est née quand Raymond Barre était premier ministre. Son enfance et son adolescence ont eu la république de Mitterrand pour décor. Elle a eu vingt ans quand Chirac était président et Jospin premier ministre.

Ce n'est pas une Parisienne pur sucre : elle a fait ses études supérieures (une école de commerce) à Angers, dans l'Ouest, et son premier travail (eh oui, elle a travaillé comme tout le monde, c'est si rare en politique...) dans le Morbihan, en Bretagne, non loin du berceau de sa famille maternelle. Par la suite, elle a vécu deux ans à Bruxelles, concevant des campagnes de communication pour des ONG.

Elle se décrit comme irrésistiblement impliquée dans l'oeuvre pour les autres, dans la représentation : déléguée de classe dans le secondaire, activiste du BDE et organisatrice d'animations créatives au cours de ses études supérieures. Le travail dans le secteur marchand ne pouvait pas la satisfaire, il lui fallait agir pour autrui ; de là vint le travail associatif. Puis comme la sujétion de nombreux projets des ONG à des décisions politiques la laissait frustrée, elle décida de prendre le problème à bras le corps et de s'engager.

Elle adhéra à l'UDF en 2003, choisissant une formation politique qui lui permettait de concilier ses amitiés personnelles de gauche et d'ailleurs, et son enracinement familial de centre-droit. Très vite, elle comprit que l'activité maison de cette UDF finissante était les élections internes. Elle fit ses première armes dans un scrutin concernant les jeunes démocrates. Elle s'y fit remarquer : l'année suivante, elle figurait en 23e position sur la liste de l'UDF pour les élections régionales. Cette liste dépassa les 15% mais ce n'était pas suffisant pour faire d'elle une élue.

C'est à l'occasion de cette campagne que j'ai eu mon premier contact avec elle. J'avais levé le pied, me consacrant à mes ouvrages historiques bretons, et je ne participais plus guère aux activités du mouvement. Quitterie, candidate active, fit de la relance téléphonique et il se trouva que je figurais dans sa liste. Elle me téléphona, j'indiquai que bien entendu je voterais pour la liste UDF d'alors et que je distribuerais quelques tracts, jugeant que mon statut d'ex-élu avait là un sens et une utilité.

Elle fut recrutée vers cette époque par l'UDF et travailla durant presque trois ans pour le parti, se faisant connaître, tissant des réseaux, participant à l'élargissement de l'assiette politique étroite de feue l'UDF finissante.

Je fis sa connaissance en 2005. C'était lors d'une soirée qui avait lieu au stade Jean Bouin, dans mon arrondissement (celui où joue le Stade Français de rugby). Marielle de Sarnez et le maire du XVIe arrondissement d'alors, Pierre-Christian Taittinger, avaient eu l'idée de permettre aux adhérents de l'UDF (le parti de loin le plus européen, historiquement européen) de regarder ensemble l'émission où Jacques Chirac, président de la république, dialoguait avec des jeunes. Ce soir-là, je vis Quitterie pour la première fois.

Elle était supposée accompagner Marielle de Sarnez si celle-ci entrait au gouvernement. À cette époque, en effet, il était question que Chirac remplaçât son premier ministre Raffarin, on savait que ce serait par Dominique de Villepin, et on disait que ce dernier avait proposé à deux de nos amis au moins de siéger dans son gouvernement : Marielle et Jean-Christophe Lagarde étaient les deux noms qui revenaient le plus souvent, surtout celui de Marielle.

Je faisais partie des gens qui déconseillaient le choix de participer à la majorité. Non pas par animosité contre Villepin d'ailleurs, mais parce qu'il était manifeste que son gouvernement, doté de la même inspiration et encadré des mêmes bornes que le précédent, ne pouvait pas réussir à redresser le pays et à engager les profondes réformes qui s'imposaient. Il ne pouvait qu'échouer, entraîné sur la même pente savonneuse que le précédent, il ne pouvait que couler, nous disions en substance, que c'était "le Titanic". Nous ne nous trompions pas, hélas pour la France.

Toujours est-il qu'il y avait une effervescence particulière pour Quitterie et pour sa déjà inséparable amie Virginie Votier. Elles se trouvaient au milieu du gué avec Marielle, entrant ou non avec elle au gouvernement.

Je me souviens d'une soirée de fin de campagne référendaire, dans le Xe arrondissement, au bord du canal, et de Quitterie toute orange.

À peu près vers la même époque, une fois écartée l'hypothèse gouvernementale, Quitterie se lança dans une campagne pour la présidence nationale des jeunes démocrates. Il devait s'agir de succéder au successeur de Jean-Christophe Lagarde (qui tirait encore les ficelles du mouvement jeunes) et, connaissant la prudence et l'organisation de Lagarde, je savais d'avance qu'elle n'avait aucune chance de réussir, mais elle fit une campagne si éblouissante, là encore mobile, au contact, partout à la fois, qu'elle obtint un score remarquable qui me donna à penser que, sans les "précautions" de Lagarde, elle aurait probablement gagné haut la main.

En revanche, cette campagne fut l'occasion d'un refroidissement momentané de ses relations avec Marielle, car cette dernière insistait pour qu'il n'y eût qu'une liste et que Quitterie acceptât de se joindre à son concurrent. "Je ne fais pas de deal" fut alors le leitmotiv de Quitterie. Elle trouvait que son rôle était la présidence des jeunes, et défendait son opinion.

Or elle se trompait. Car s'il est vrai que Quitterie a bien à porter la voix des jeunes, ce n'est pas parmi les jeunes, mais bien dans le grand bain du mouvement tout entier. C'est ce qui apparut quelques mois plus tard à l'occasion de la campagne présidentielle, où elle anima l'élan spontané des blogs bayrouistes avec le charisme que l'on sait, avec aussi une finesse d'analyse et une clairvoyance qui l'ont fait remarquer à l'intérieur du mouvement comme à l'extérieur.

Sans doute se fit-elle trop remarquer, puisqu'on tenta de l'écarter du chemin qui était pour elle le plus naturel. Double méprise, erreur, erreur d'ailleurs sanctionnée et donc réparée depuis, François Bayrou ayant jugé nécessaire de la désigner déléguée nationale du Mouvement Démocrate et Marielle ayant choisi de s'appuyer sur elle pour la préparation des élections européennes.

La voici donc, intronisée par la rumeur publique tête de l'une des huit listes démocrates pour les élections de juin prochain.

Elle a pour atouts sa jeunesse, qui est nécessaire à l'image de Bayrou, son charisme, son talent politique déjà démontré.

De toute évidence, sans elle parmi les huit, la campagne européenne manquerait de ce supplément de lumière qui a élevé la campagne  présidentielle de Bayrou au-dessus de toutes celles que l'UDF avait faites depuis 1998. Sans Quitterie, la campagne serait forcément un échec et tous le savent.

Reste maintenant à organiser la bataille électorale, chacun à sa place.

Commentaires

Sur ce blog, je croyais lire les articles d'un hommes sous le charme d'une jolie fille, je lis en fait les articles d'un citoyen sous le charme d'une leader politique !
Bravo de cet article qui m'éclaire à la fois sur Quitterie et sur Hervé.

Je reste cependant persuadé que les leaders politiques de demain seront des hommes et des femmes de terroir.
Le parcours de Quitterie fait preuve d'une grande capacité à appréhender intellectuellement les dossiers mais elle n'a pas pris le temps d'incarner une culture locale, un terroir, une particularité : la sienne.
D'ailleurs elle commence à se faire malmener à Paris, dans la fosse aux lions, où elle apparait aux grandes figures du MoDem comme une concurente aux prochaines élections.
Il eut été préférable qu'elle apparaisse comme la candidate évidente aux électeurs du Morbihan.
Il eut été préferable qu'elle apparaisse comme la solution aux problème des électeurs de Bretagne.
A lieu de cela, elle a choisi Paris et le "fait du prince", s'en remettant au bon vouloir du roi pour se retrouver sur une liste électorale.

Pour moi, c'est un mauvais choix.
Je ne doute cependant pas de ses énormes capacités de travail, d'une reélle volonté de changer le monde politique mais elle n'a pas pris le temps de se faire une bonne assise populaire et de séduire aussi par sa douceur, son application, sa disponibilité et sa sagesse.

Elle a toutes les qualité pour devenir une leader politique de premier ordre mais ce n'est pas à elle, ni à Bayrou et ses sbires de le décider.
Non, en démocratie, ce sont les électeurs qui le décident, même si il est évident que Quitterie est capable.
Il faut une assise populaire !

Écrit par : GuiGrou | 15/09/2008

Il faut reconnaître à Quitterie de réelles qualités de sincérité, d'enthousiasme et de bienveillance. Une certaine lucidité politique aussi. Espérons que ce talent en devenir ne sera pas broyé dans les arcanes politiciennes... mais elle doit désormais assumer pleinement son rôle en osant le suffrage universel et non pas seulement le vote militant. Bon vent à elle.

Écrit par : bertin | 15/09/2008

@ GuiGrou

Quitterie a eu grandement raison de ne pas rechercher des mandats qu'il lui aurait été difficile d'assumer sérieusement. Et, promotrice du mandat unique, elle trouvera dans la fonction parlementaire européenne un terrain où elle donnera le meilleur d'elle-même.

Écrit par : Hervé Torchet | 15/09/2008

Merci Hervé pour ce billet fort intéressant.

@GuiGrou
Mais les électeurs de Bretagne n'ont aucun problème ! :D

Plus sérieusement, tu dis que choisir "Paris" a été un mauvais choix et qu'il aurait fallu incarner un territoire. Je ne suis pas sur que les deux choses soient en contradiction.

Je ne connais pas personnellement Quitterie. Bien sur, on s'est croisé à l'UR mais je pense que connaitre une personne c'est pas lui dire "bonjour, ça va?". Cependant, les amis communs qu'on partage me parlent de quelqu'un de très grande qualité.

Oui, il y aura des la "bagarre" pour les listes. C'est, somme toute, normal : le parcours interne prépare les candidats à la vraie lutte électorale. Et les électeurs veulent du "solide".

A mon humble avis, Quitterie est, pour l'instant, une trajectoire. L'expérience, les succès et les inévitables petits échecs à venir ne pourront qu'étoffer sa figure et lui donner plus de profondeur. Car apprendre tout les jours c'est la marque de l'intelligence.

Alors, elle pourra devenir un choix "évident".

Écrit par : Claudio Pirrone | 15/09/2008

@ claudio et Hervé : Merci de commenter mon commentaire.

Il est évident que Quitterie a su se bâtir un réseau. Vous parlez aussi beaucoup de ses qualités humaines.
Moi même, sans la connaître, j'avoue qu'elle éveille ma curiosité et attire ma sympathie. C'est rare!
Plus anecdodiquement, j'adore sa petite voix éraillée.

Mais le grand sud-ouest n'est pas un terrain d'expérimentation politique pour une jeune femme en devenir!
Nous y avons des problèmes particuliers. Des hommes et des femmes de terrain se sont déjà investis pour défendre nos particularités. C'est donc à ceux-là que je ferai confiance pour les élections européennes !

Par contre, vous pouvez compter sur moi pour soutenir et défendre Quitterie ( mais je ne pense pas qu'elle ait besoin d'être défendue) si elle est tête de liste aux européennes pour Paris ou la Bretagne !

Écrit par : GuiGrou | 15/09/2008

Pourrais t'on imaginer une candidature Q. Delmas dans le Grand-ouest pour les Européennes ?
Un candidature qui renvoie Mme Lepage à ses intrigues internes et qui fasse que le MoDem soit incarné par le renouveau et la compétence politique ?

Voilà qui ne manque pas d'intérêt :))

Écrit par : jpm | 15/09/2008

Dans le Grand-Ouest surement pas : il n'y a que l'Ouest ;-) (Bretagne, Pays de Loire, Poitou-Charente)

Écrit par : Claudio Pirrone | 15/09/2008

Un beau et instructif portrait, merci !

L'auteur me permettra toutefois de penser, avec tout le respect et l'admiration que j'ai pour Quitterie, que la chute "Sans Quitterie, la campagne serait forcément un échec et tous le savent." eût gagnée à être formulée de façon plus solidement fondée ;-)

Ceci dit en souhaitant effectivement la présence de Quitterie parmi les candidats Démocrates aux élections européennes - de même que la candidature de Corinne Lepage, celle de Marielle de Sarnez, celle d'Éva Joly, celle de Jean-François Kahn etc. - beaucoup de personnes qui joueraient un grand rôle au Parlement de Strasbourg si les Français choisissaient de les y envoyer.

Écrit par : FrédéricLN | 17/09/2008

@ FLN

Concernant Eva Joly, je suppose que tu as suivi l'actualité.

Je maintiens ce que je dis sur la campagne européenne et Quitterie.

Écrit par : Hervé Torchet | 17/09/2008

@Hervé

La disparition subite du billet "Au revoir", c'était une (auto) censure ? Une invitation ?

Écrit par : Werner | 17/09/2008

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