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17/11/2008

Vers une VIe république ?

Dans sa note (excellente) de ce soir, Quitterie Delmas s'appuie sur le drame du Dr Demange, député UMP de Moselle, qui vient de tuer sa maîtresse puis de se suicider, après avoir perdu en mars dernier la mairie de Thionville, qu'il dirigeait depuis 1995. Elle évoque la pression psychologique considérable que subissent les élus, et avant eux les candidats, et avant eux les militants, pour tracer un chemin, percer, exitser, puis durer. Et elle appelle à une réforme institutionnelle profonde qui améliorerait l'engagement politique et qui, ainsi, deviendrait une pierre blanche sur le chemin de la VIe république.

Je voudrais très modestement apporter mon témoignage sur l'état d'esprit scandaleux qui règne dans la politique française.

Après quatorze ans de militantisme intense, après avoir occupé toutes sortes de postes et assumé toutes sortes de fonctions, j'ai été élu en 1995 dans mon arrondissement de Paris (le XVIe), grâce non pas à la qualité de mon engagement, mais grâce d'une part à un renvoi d'ascenseur de Jean-Luc Moudenc (devenu ex-maire de Toulouse entre-temps) en 1994, et surtout grâce au choix de soutenir Chirac plutôt que Balladur lors de la présidentielle, en 1995 également.

Comme mon deal avec Goasguen le prévoyait, je suis devenu adjoint au maire du XVIe, Pierre-Christian Taittinger. On ne m'avait aucunement préparé, ça va de soi, à la gestion municipale, et comme j'étais à la fois le plus jeune et le moins sportif, on m'a nommé à la Jeunesse et aux Sports. J'ai eu beau faire observer que mes compétences et mes penchants... ceci... celà... rien n'y a fait : la délégation Jeunesse et Sports était UDF, celles que je souhaitais étaient RPR. Bienvenue au royaume d'Ubu.

Très inexpérimenté, j'ai travaillé double. Il faut le dire, c'est une fonction à temps plein : le XVIe compte plus de 150 000 habitants et, pour mon domaine d'action, Roland Garros, le Parc des Princes, Jean Bouin (pour les amateurs de rugby), Coubertin (pour ceux de judo et d'escrime), le siège national du Stade Français, d'importantes installations dans le Bois de Boulogne, et des dizaines de milliers d'adhérents dans les clubs de quartier qui vont de la pêche à la mouche jusqu'au football. J'ai épluché les dossiers, compris (je crois) les enjeux, consacré des temps infinis à négocier des budgets, bref, fait ce qui m'apparaissait juste mais que ne font pas en général les adjoints qui préfèrent toucher leur indeminté à la fin du mois et laisser la machine politico-administrative travailler à leur place.

Au bout d'un peu plus de cinq ans de ce régime (mal payé, à peu près le SMIC, ce qui explique que les élus soient tentés de...), mon maire m'a invité ainsi que certains élus à un déjeuner un peu spécial à l'issue de la visite qu'il rendait chaque année avec nous à la paroisse Sainte-Jeanne de Chantal, près de Boulogne-Billancourt.

Il nous offrit non pas un bol de ciguë, mais quelques bouteilles tirées de sa cave, un château Cheval Blanc 1955 (un très grand vin d'une très grande année). Et tous ceux qui se trouvaient à ce déjeuner avec lui étaient aussi ceux qui ne figureraient pas sur sa liste la fois suivante, selon la négociation qu'il avait faite avec les partis politiques en présence.

Mais il ne nous l'avait pas dit. Et jamais l'UDF d'alors ne me le dit non plus : ils avaient eu besoin de ma place pour quelqu'un d'autre.

Et pendant des semaines, je continuai à faire tout ce que je croyais possible, honnête et juste pour ne pas subir l'injustice dont j'ignorais le décret inexorable. Mais finalement, je ne fus pas sur cette liste (ni sur une autre). Et pas une fois, on ne prit un téléphone pour m'en parler, des gens que je connaissais pourtant depuis longtemps, preque des amis. Pas une fois avant, pas une fois après. Rien.

Quand je vécus le désert, le vide, qui succédait à six ans de "Monsieur le Maire" et d'écharpe tricolore, à six ans de bagarres pour des budgets et contre des pratiques léonines, quand je fus la tête dans le cul, il n'y en eut pas un pour me tendre la main, parce que c'est un métier de minables.

Un métier qui ne devrait pas en être un, d'ailleurs.

Et quand, à son tour, notre chère Quitterie Delmas subit la plus affreuse des injustices en n'étant pas investie pour les législatives du printemps 2007, j'avoue que j'ai été heureux, profondément heureux, que nous soyons si nombreux à lui témoigner notre affection et notre soutien, lors des tout premiers cafés démocrates.

Aujourd'hui, il n'est pas question qu'une telle injustice la frappe de nouveau.

J'irai au café citoyen organisé par Aujourd'hui Autrement, mercredi soir, et je soutiendrai son appel pour une réforme de la fonction d'élu et, plus largement, pour l'instauration d'une VIe république.

Commentaires

Désolée Hervé, crise d'eczéma! Aussi, grrr, ffftt, ftt ft !!!
Pas de mon fait, la blogo sait...

Écrit par : Martine | 17/11/2008

Bouh, j'ai peur.

Mais ce que je dis n'a rien à voir avec le fonctionnement spécifique du MoDem : c'est le monde politique qui est comme ça.

Écrit par : Hervé Torchet | 17/11/2008

Ensuite, mercredi outre-manche.
Et puis, encore, vous semblez refuser les efforts faits internes de Mme Gourault et autres, je vous ai prévenu, que j'avais les 'timbres sensibles' un homme averti en vaut deux! dit le dicton, je suis trèèèès colère...!!!

Écrit par : Martine | 17/11/2008

Riires! Eh oui Hervé, mais nous sommes sensés faire de la politique autrement, n'est-ce pas???
Pour ce que j'ai pu observer comme sottises, équitablement réparties, :), vous et votre 'pouliche' guère en reste...
Et puis, pitié...vous etes définitivement un trèèès mauvais publicitaire!
En toutes amitiés

Écrit par : Martine | 17/11/2008

@ Martine

Écoutez mieux Quitterie.

Écrit par : Hervé Torchet | 17/11/2008

Euh...Que dire... j'ai une étrange sensation de plagiat et quand pas le cas, de positionnements étranges, ou dont la subtilité m'échappe mais...Je suis blonde, je l'avoue :D

Écrit par : Martine | 17/11/2008

Ton absence, comme la mienne, sur les listes lors des municipales de 2001 s'explique aussi par ce qui s'est passé à JAPY.

Souviens toi que nous nous sommes opposés au ralliement à SEGUIN contre la décision unilatérale de quelques élus déjà pressés de vendre leur âme pour un siège que leur assurait l'ex maire d'EPINAL.

A JAPY, cela n'est pas passé inaperçu et je me souviens comme tu étais remonté lors de cette réunion et la façon dont tu l'as manifesté.

En tout cas, je suis trés heureux de ne pas avoir été sur les listes lors de cette échéance.

Écrit par : Guillaume A | 18/11/2008

@ Guillaume A

Je pensais que nous devions avoir nos propres listes, mais les choses étaient déjà ficelées, en fait, à ce moment-là, justement.

Écrit par : Hervé Torchet | 18/11/2008

Ça me rappelle ta note sur Goasguen... Celle-ci est aussi est édifiante.

Écrit par : Leroy-Morin | 18/11/2008

Excellent billet. Le meurtre commis par le député de Thionville, puis son suicide, font resurgir la violence de la politique, emballée en écharpes tricolores et arrosée au champagne. Comme l'écrit Quitterie, les gens qui font de la politique ne sont pas des minables au départ, mais ils se comportent vite comme tels parce que c'est la règle du jeu, et au bout de quelques années, ils le deviennent eux-mêmes.

Pour revenir au sujet rebattu de la démocratie interne au MoDem, ce qui me semble manquer dans les propos de beaucoup de "démocrates pro-démocratie interne", c'est la reconnaissance de cette violence structurelle. Leur tendance à fantasmer que les mots "politique autrement" pourraient abolir la violence, et faire reconnaître, faire récompenser les comportements vertueux. Hélas, si l'on a besoin de "politique autrement", de transparence, de courage, d'indépendance, d'écoute, de responsabilité, de respect, de dialogue, etc., c'est parce que ce qui est naturel et durable en politique, ce qui y survit à l'usure du temps, c'est la jungle.

Écrit par : FrédéricLN | 18/11/2008

@Frédéric,

Survie=adaptation

Écrit par : Martine | 18/11/2008

adaptation, ou fuite, une réaction souvent judicieuse face au danger !

Écrit par : FrédéricLN | 18/11/2008

Hervé >>> "adhérer à l'UMP n'est-il pas déjà un signe de démence ? OK je blague"

Il n'empêche... à bien y regarder... ;o)

Hervé >>> "Un métier qui ne devrait pas en être un, d'ailleurs."

N'en déplaise à Jacques Chirac, la politique n'est pas un métier, et les indemnités liées aux mandats ne sont pas des salaires. Le problème, c'est que beaucoup d'élus pensent le contraire, y compris de très jeunes élus, comme j'ai pu le constater en tant qu'adhérent du PS. C'est lamentable. Minable même, comme tu dis. Et c'est comme ça dans tous les partis de gouvernement.

Amicalement, :-)

Hyarion, l'anarcho-monarchiste.

Écrit par : Hyarion | 18/11/2008

Les commentaires sont fermés.