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22/06/2012

L'université d'été 1993

En mettant de l'ordre dans des papiers pour un déménagement, je suis tombé sur cette photo de l'Université d'Été (UE) des Jeunes Démocrates Sociaux (JDS) de 1993, tenue près de Biarritz, dans les Pyrénées Atlantiques. On reconnaît à gauche Bernard Bosson, alors secrétaire général du Centre des Démocrates Sociaux (CDS), au centre Philippe Douste-Blazy, alors maire de Lourdes et qui venait d'être élu député des Hautes-Pyrénées, puis un peu plus à droite, en nage (il ruisselait dès qu'il montait à une tribune), Dominique Baudis, alors maire de Toulouse et qui devait occuper une fonction plutôt protocolaire (du genre président exécutif) dans le CDS. Je suis moi-même juste au-dessus de l'épaule de Baudis, en polo vert. Derrière moi figure Jacques Mangon et entre Douste et Baudis, Jean-Pierre J., alors soutien de Bayrou, mais qui s'est brouillé avec lui ensuite pour une raison que j'ignore, et qui vendait du jurançon (délicieux) au profit de la fédération CDS des Pyrénées-Atlantiques sur un stand de l'UE.

Bosson, Douste-Blazy, Baudis

Il y a évidemment un absent sur cette photo. Je viens d'en parler, c'est François Bayrou. Il n'a fait qu'un bref passage sur le campus de cette université d'été, s'étant blessé dans une piscine vide. Pourtant, cette Université d'Été avait lieu dans le département dont il était le député depuis déjà sept ans. Le repos forcé qu'il subit alors fut décisif dans son engagement vers la présidence du CDS. Mais j'anticipe...

Le retour aux affaires et à la coalition avec le RPR

L'année 1993 avait vu le retour au pouvoir de la coalition UDF-RPR (Union pour la Démocratie Française, Rassemblement pour la République), le Parti Socialiste (PS) s'engluait dans les dissensions internes, dans les affaires de la fin du règne mitterrandien, et en particulier celle du sang contaminé où on allait jusqu'à mettre le nom de Laurent Fabius en cause (à mon avis d'une façon très extrapolée et excessive). Le PS était totalement discrédité, sans chef incontesté pour succéder au vieux président malade et déjà très affaibli.

J'étais moi-même un revenant, ayant pris quelques distances avec l'engagement politique pour des raisons personnelles et professionnelles. Mais la violence de l'opprobre qui s'était abattue sur le PS m'avait conduit à reprendre le chemin du mouvement centriste et, donc, de l'Université d'Été, rendez-vous incontournable de cette formation politique membre de l'UDF.

L'UDF et le RPR avaient obtenu presque le même nombre de sièges à l'Assemblée Nationale grâce à la bonne négociation d'investitures menée par le tandem Valéry Giscard d'Estaing (VGE) - Bayrou, respectivement président et secrétaire général de l'UDF. Mais le CDS, qui avait fait dissidence en 1988 et soutenu un moment le gouvernement Rocard, avait peu profité de cette vague bleue et le nombre de ses députés avait peu augmenté par rapport à la mandature précédente. Qui pis est, il avait perdu le groupe parlementaire qu'il avait alors formé, ayant pris cet engagement en vue des négociations d'investitures.

Pourquoi Bayrou manque-t-il sur cette photo ? Parce qu'il était l'un des espoirs de cette famille politique. Après 1986, on parlait des "trois B" : Bayrou, Baudis et Bosson, comme des trois têtes montantes capables d'incarner l'avenir du centrisme français. Baudis avait tenté sa chance (peut-être dans le cadre de la tentative de retour de VGE) au congrès d'Angloulême, mais il s'était montré trop consensuel et avait de ce fait échoué, Bosson était donné comme le successeur naturel de Pierre Méhaignerie, alors président du CDS depuis onze ans, et Bayrou faisait figure de vilain petit canard (déjà), d'homme de "Giscard", puisqu'il occupait le poste de secrétaire général de l'UDF, comme je l'ai dit plus haut. Douste-Blazy était le nouveau venu, le quatrième de la partie de cartes, mais on sentait son parcours prometteur.

Or finalement, cette génération de centristes a tourné court. Aucun des quatre n'a fait la très grande carrière entrevue. Baudis avait le profil le plus brillant, sa notoriété d'ancien présentateur du journal télévisé et son statut de maire de Toulouse en faisaient d'emblée une figure politique de premier plan. Mais il lui manquait, je crois, le feu sacré de l'ambition. Bosson a cessé toute activité politique en 2007 après avoir été longtemps député et maire d'Annecy. Douste-Blazy, un temps maire de Toulouse lui aussi, et plusieurs fois ministre, n'a pas su capitaliser sur ses qualités humaines indéniables et traîne un cortège d'ennemis acharnés qui font courir toutes sortes de rumeurs sur son compte. Peut-être paie-t-il l'erreur d'avoir été l'artisan principal création de l'UMP et donc de la trahison de l'esprit centriste traditionnel, que son récent soutien à Bayrou a un peu compensée.

Quant à Bayrou lui-même, il semble aujourd'hui que son heure soit passée. À moins que... Mais revenons à 1993.

L'arrière-pensée présidentielle

À moins de deux ans de l'échéance de 1995, l'élection présidentielle est dans tous les esprits. Raymond Barre, candidat malheureux en 1988, n'est pas sérieusement envisagé pour 1995 : il aura soixante et onze ans et, d'ailleurs, son heure est passée. VGE a tenté un retour, mais la mort (hum) accidentelle de Michel d'Ornano en 1992 a porté un coup très rude à ses espérances et il paraît hors jeu.

Donc qui soutenir ? Jean-Luc Moudenc, alors président des JDS (et que je félicite de sa toute récente - 17 juin 2012 - élection à la députation), fait campagne pour la désignation de René Monory, alors président du Sénat. Monory est un candidat naturel, son statut de numéro deux du protocole républicain est un atout, il a une bonne image, mais il a déjà passé soixante-dix ans, il en aura presque soixante-douze en 1995, et finalement, sa candidature ne peut dépasser le résultat d'une candidature de témoignage.

Balladur n'est pas encore candidat. Mais on sent toute la sympathie que lui porte Bernard Bosson et comme celui-ci est donné comme successeur naturel de Pierre Méhaignerie... Bosson a d'ailleurs amené sa fille unique à cette UE, une jolie et svelte adolescente de quinze ans aux très longs cheveux blonds lisses et soyeux, qui passe au milieu des regards comme une princesse héritière objet de convoitises inavouées (et prématurées).

Comme à son habitude, Bernard Stasi est là presque dès l'ouverture et quittera l'UE pour rejoindre sa ville d'Épernay où il présidera aux cérémonies de commémoration de la ville fin août 1944. Il a perdu son siège de député en mars, mais le gouvernement Balladur l'a désigné pour diriger la commission qui réfléchit au nom de ce qu'on appelle le "Grand Stade", qui deviendra le Stade de France et dont la construction a été décidée en vue de la coupe du monde 1998. Sportif avéré, Stasi participe aux parties de waterpolo dans la piscine avec les jeunes militants, qu'il accompagne aussi en boîte de nuit à la fin des travaux du soir de la studieuse université d'été, un pull toujours noué sur les épaules et les poignets des manches de sa chemise retroussés.

On finit par oublier un peu les enjeux nationaux, tout au plaisir de se retrouver entre copains après quelques années d'éloignement relatif. Alors, on participe au journal de l'Université d'Été, un quotidien rédigé chaque soir et imprimé dans la nuit (une idée lancée par Éric Azière en 1986). J'arrive à assister aux ateliers savants du matin, aux ateliers piscine de l'après-midi, aux nouveaux ateliers savants de fin d'après-midi, à l'atelier boîte de nuit du soir et à veiller encore pour contribuer à la rédaction et à la parution de cette feuille imprimée par photocopie noir et blanc (sur une bécane de taille modeste) sur une maquette imprimée à l'avance en quadrichromie. Je fais les trois huit à moi tout seul, mais sans contrainte, juste par amusement, je ne suis candidat à rien.

Mais ce qu'on n'oublie pas, c'est le congrès statutaire qui doit se tenir en avril 1994 à Rouen (ville de Jean Lecanuet, fondateur du mouvement) et, au bord de la piscine, on cherche quel candidat pourrait faire pièce à Bosson. Et le seul nom qui revient est celui de l'absent, Bayrou, qui fait la même conclusion au même moment.

Quant à moi curieusement, ce retour désinvolte dans la famille cetnriste me conduira à diriger l'une des équipes de la campagne de l'élection européenne de juin 1994 pour la liste conduite par Dominique Baudis et Hélène Carrère d'Encausse, auprès de l'ami Moudenc et sous l'autorité du directeur de campagne ... Jean-Pierre Raffarin ... avant d'atterrir chez Bayrou, après k'Uniersité d'Été 1994.

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Commentaires

"Quant à moi curieusement, ce retour désinvolte dans la famille centriste me conduira à diriger l'une des équipes de la campagne de l'élection européenne de juin 1994 pour la liste..."

Eh bien j'espère que si François Bayrou se présente en 2014 pour cette même élection -comme beaucoup de militants MoDem le souhaitent justement ; l'Hérétique en a parlé dans un de ses billets- tu en seras de nouveau un des acteurs principaux.
Bien que tu aies dit vouloir te consacrer plutôt à l'écriture, tu démontres encore une fois ici ta passion pour la politique ! Ta grande connaissance des évolutions de pensée est indéniable. Et le MoDem, unique courant indépendant, ne peut se passer de la "banque de données" que toi seul semble détenir...

Écrit par : Françoise Boulanger | 25/06/2012

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