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07/09/2012

Gauche sous pression, droite sans passion

De quoi parle-t-on, en cette rentrée ? de la provocation de Richard Millet, de l'élection présidentielle américaine (je crois qu'Obama est quand même "moins pire" que l'autre), du retour de "Vive le Québec libre !" (ça, c'est une bonne nouvelle), de la pauvre Syrie martyrisée, et de la gauche au pouvoir, et de la droite dans l'opposition.

La gauche est sous pression

Ce qui arrive à la gauche de François Hollande me rappelle la chute morale de Jospin il y a quinze ans : DSK, son ministre des finances, fit passer tout un train de réformes du monde financier que la gauche n'aurait jamais acceptées si la droite les avait adoptées. Mais la gauche, tétanisée par son improbable victoire aux points (les triangulaires du Front National), se sentait dans l'obligation de se justifier vis à vis de l'électorat modéré, et elle en fit trop, elle se montra zélée, trop. Sous pression.

La gauche d'aujourd'hui subit semblable pression : les chiffres détestables s'affichent les uns après les autres contre notre pays, perte de compétitivité, perte de rang dans la créativité de l'économie, croissance nulle, fermetures d'usines, faillites en nombre, démoralisation des enseignants, tout va mal. Donc la pression des néolibéraux se fait de plus en plus dure : il faut faire comme l'Italie, fermer des lits d'hôpitaux, comme l'Espagne, ruiner les fonctionnaires, réduire les charges sociales dans l'urgence, etc.

En face de cette pression, une partie de la gauche regimbe et veut de toutes façons continuer à dépenser sans compter. On sent bien une semblable tentation chez Jean-Marc Ayrault, alors que François Hollande rappelle qu'il a promis une stabilisation des dépenses publiques qui aboutit à leur baisse lente. D'autres, comme Vincent Peillon, affirment plus crânement "Il faut baisser la dépense publique".

Ce qui est certain, c'est que le retour à l'équilibre des comptes publics, quoiqu'en disent certains, doit être le plus rapide possible, que le plus vite possible, il soit vrai de dire : "Ça y est, la situation commence à s'améliorer", c'est la condition sine qua non d'une diminution de la démoralisation. C'est pourquoi j'ai appuyé jusqu'ici l'idée d'un retour en deux ou trois ans à cet équilibre, me résignant seulement aux quatre à cinq ans annoncés par Hollande, car je crois que plus le temps passe, plus l'effort coûte dans tous les sens du terme.

Cela étant, il ne doit pas être question de faire n'importe quoi, ni de jeter le bébé avec l'eau du bain, passer sans vergogne d'un extrême à l'autre, ni profiter de ce qu'on est la gauche pour faire entériner des réformes néolibérales (donc pas libérales) dont la pire droite n'aurait jamais osé rêver. Le juste dosage, voilà la quadrature du cercle de la majorité de Hollande au moment de peaufiner son budget de l'État pour l'an prochain.

La droite est sans passion

La droite a été battue. Elle ne s'en remet pas, et ses divisions idéologiques demeurent. D'un côté, les gens de droite qui votent contre la gauche, parce que la gauche, c'est l'impôt. De l'autre, l'esprit sarkozyste de querelle identitaire volontiers portée à la chicanerie belliqueuse et à la tentation du pogrom.

Pour incarner ces deux courants, d'un côté François Fillon, l'ancien "collaborateur" (moins passif qu'on ne l'a cru) de Sarkozy ; de l'autre, Jean-François Copé, dont la ressemblance physique avec Tariq Ramadan est sans cesse plus flagrante, même, au-delà du physique, dans la manière tordue dont il mène le discours.

Au milieu, les figurants, plus ou moins sympathiques, parmi lesquels la jolie Nathalie Kosciusko-Morizet, qui croit que le ticket de métro vaut quatre Euros et, sans doute, que le SMIC est à quatre mille Euros, ce qui permet à chacun de se loger dans les quartiers populaires parisiens : les Champs-Élysées, la place Vendôme, merde quoi.

Les plaies sont encore fraîches, mais la bataille, on le sent, ne fera pas vibrer les foules. Tant mieux, il y a plus important à faire dans la situation dramatique de la France.

Ah, au fait, j'oubliais, j'ai rencontré François Bayrou la semaine dernière, dans son bureau. Il va bien. Sur les grandes questions, il a eu raison avant les autres.

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Commentaires

Oui, la vie politique française manque de relief. Les élections américaines, elles, semblent très serrées, indécises.

J'imagine Jacques Chirac devant un Ricard-grenadine (sa boisson fétiche, selon les médias où il est apparu cet été) qui se dit: "Je soutiendrais bien Fillon parce que j'aime pas Copé. Mais j'aime pas Fillon". Et on imagine que Chirac peut cogiter sur le sujet pendant des heures.

Écrit par : Eric | 07/09/2012

Jacques Chirac qui avait donné sa démission de premier ministre du président Valery Giscard d'Estaing en 1976... Rappelez-vous la situation de crise à ce moment-là, aussi grave que celle que nous connaissons aujourd'hui. Raymond Barre, homme du centre, pas encaré parce que se disant "au-dessus" des partis, lui a succédé. Pourtant aussi bien la gauche que la droite ont fini par le désavouer. Ce qui commence déjà à se produire en ce moment même, pour un gouvernement de gauche...
Or si RB avait constitué un gouvernement d'union nationale, au lieu de rester obstinément à droite, la dette aurait été réduite, parce que la confiance serait revenue. La confiance étant l'unique moteur de l'économie. La solution est là : François Hollande devrait nommer François Bayrou premier ministre qui lui par contre saura réunir des ministres de différents partis. (Nicolas Sarkozy a essayé de le faire mais il a échoué parce que son arrangement n'était pas sincère !)
Chacun doit garder son identité pour être représentatif de tous les français.

Écrit par : Françoise Boulanger | 08/09/2012

VGE, dont Barre était le premier ministre, a tjs voulu élargir la majorité au centre gauche, mais a rencontré de terribles obstacles sur ce chemin. Voyons ce qui va arriver cette fois-ci.

Écrit par : Hervé Torchet | 08/09/2012

Très jolie synthèse de ce qui se passe en ce moment, à la lueur de notre histoire politique récente.

Pour Hollande, je crois aussi qu'il a à résoudre la "quadrature du cercle", sachant que dans la mesure où elle est impossible..., sa popularité ne cessera de chuter. C'est un peu aussi comme le principe de l'entropie (j'ai failli écrire "entromperie"): dès qu'Hollande bougera sur quoi que ce soit, il créera du désordre au sein de la Gauche et plus généralement au sein des électeurs de gauche.

Ton portrait de la droite actuelle m'a beaucoup fait rire: notamment pour ce qui est de NKM et du trop ambitieux JF. Copé: merci pour cet instant de délice!

Écrit par : JF le démocrate | 16/09/2012

"Ce qui est certain, c'est que le retour à l'équilibre des comptes publics, quoiqu'en disent certains, doit être le plus rapide possible, que le plus vite possible, il soit vrai de dire : "Ça y est, la situation commence à s'améliorer"."

Très bien vu, je crois.

Et le "matraquage fiscal des gros revenus", sciemment annoncé pendant la campagne, accélère encore le cours du temps : ceux-là, qui se demandent s'ils investiront dans notre économie ou dans une autre, n'attendront pas cinq ans.

Écrit par : FrédéricLN | 26/09/2012

PS - par contre, je trouve quelque peu irénique ton explication du strauss-kahnisme (raccourci facile, ok, pour la doctrine PS "le business copain des réseaux de l'Etat a toujours raison"), par

"Mais la gauche, tétanisée par son improbable victoire aux points (les triangulaires du Front National), se sentait dans l'obligation de se justifier vis à vis de l'électorat modéré, et elle en fit trop"

Je n'ai pas le souvenir que l'électorat modéré soit descendu sur le pavé pour réclamer ni les baisses d'impôts, ni les stock-options dans les grandes entreprises, ni la privatisation partielle des autoroutes ASF, etc.

Il me semble que de solides copinages fourniraient une explication plus robuste.

Écrit par : FrédéricLN | 26/09/2012

@ FLN

Je pensais à la réforme des métiers et de l'environnement fiscal et juridique de la finance, par exemple, mais tu as raison.

Écrit par : Hervé Torchet | 27/09/2012

Et à la réflexion, ces mesures du gouvernement Jospin (baisses d'impôts, dérégulation de la finance) ont bien dû contribuer à répandre l'idée que, comme il l'avait dit ensuite par gaffe, "mon projet n'est pas socialiste".

Écrit par : FrédéricLN | 22/10/2012

@ FLN

Tu as raison, et pour en revenir à la situation actuelle, il doit bien y avoir un moyen terme entre les erreurs de dsk et le ''trop d'impôts'' actuel.

Écrit par : Hervé Torchet | 22/10/2012

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