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02/12/2012

Sciences Po : les pratiques mafieuses du PS

Depuis la publication du PV provisoire de la réunion du Conseil d'Administration de la Fondation Nationale des Sciences Politiques (FNSP) et l'article arrogant et superficiel de l'hebdomadaire "Marianne" (qui nous a habitués à beaucoup mieux), la vérité se dévoile à Sciences Po pour ce qu'elle est : une chasse à l'homme doublée d'une chasse aux sorcières, empruntant des méthodes mafieuses à des fins d'ailleurs louches.

On ne me verra pas défendre feu Richard Descoings avec autant de ferveur que Jean-Claude Casanova le fait, j'ai été inquiet de son choix de renoncer à la culture générale dans le recrutement de ses étudiants, qui faisait écho à la décision sarkozyste de supprimer l'histoire-géo en classe de terminale scientifique. Tout cela me paraissait militer pour la barbarie et l'amnésie ambiantes, qui font le lit des extrêmes (mais peut-être était-ce le but recherché sinon par Descoings, du moins par Sarkozy).

L'histoire de Descoings

Il faut revenir sur les conditions de la nomination de Richard Descoings. Elle date de 1996. Alors, Alain Juppé est premier ministre et François Bayrou ministre de l'Éducation Nationale, ministre de tutelle de l'établissement selon le statut (de nature législative) élaboré dans l'immédiat après-guerre. Avant d'atterrir à Sciences Po, Descoings passa par deux cabinets ministériels, ceux de MM. Lang et Charasse. Il se trouve qu'en 1996, Jacques Chirac, récemment élu président de la République, a quelque obligation envers le camp mitterrandien qui l'a aidé à accéder à l'Élysée et qui continue à le protéger au Conseil Constitutionnel en garantissant son immunité judiciaire. Or MM. Lang et Charasse font partie de ces mitterrandiens, je crois que M. Charasse siège même au Conseil Constitutionnel. La nomination de Descoings à la tête de Sciences Po, voulue par M. Juppé, est entérinée par M. Bayrou, dont les relations avec le président Chirac ne sont pas alors au beau fixe. Sans doute l'intervention d'Alain Lancelot et de Michel Pébereau l'aide-t-elle à cette décision.

Des éléments de l'histoire de Michel Pébereau

Selon ce qu'il a dit, M. Pébereau a été approché vers 1987 par François Goguel, un très grand politologue français, pour lui succéder à la tête de l'Institut d'Études Politiques de Paris (IEP) la structure pédagogique de l'ensemble formé avec la FNSP. A cette époque, M. Pébereau, déjà président de la banque BNP, soutient Raymond Barre (comme François Bayrou) pour l'élection présidentielle de 1988, Barre étant lui-même professeur à Sciences Po et c'est lui qui a nommé Lancelot directeur.

Il se trouve que dans le même temps, l'État décide de se défaire de plusieurs des installations vétustes des services centraux de ses ministères, dont celle du ministère du Logement ou de l'Équipement (j'écris de mémoire), qui se trouve dans le XVIe arrondissement, non loin de la Seine, en contrebas de la colline de Passy. Le ministre, Pierre Méhaignerie, veille sur la vente du grand terrain qui doit rapporter d'utiles liquidités à l'État. Et c'est la filiale de promotion immobilière de la banque de M. Pébereau qui obtient le marché.

Mais il se trouve que ce terrain se trouve à Paris, dans la ville dont M. Chirac est le maire. Lorsque celui-ci est défait en 1988 à l'élection présidentielle, il entreprend donc de mettre tous les bâtons possibles dans les roues de M. Pébereau. Dans le même temps, un comité d'élus et de riverains s'oppose à une vaste construction Porte Maillot, à l'autre bout du même arrondissement, dont on dit que le contrat signé avec des promoteurs canadiens a contribué à financer la campagne présidentielle de M. Chirac. Les deux batailles locales font rage et s'enveniment si bien que M. Chirac doit renoncer à son projet Porte Maillot et que l'opération du ministère qui devait rapporter des millions à la BNP lui en coûte plusieurs dizaines de millions (de Francs à l'époque). C'est donc sans surprise que l'on trouve M. Pébereau dans le camp de M. Balladur en 1995 alors même qu'entre-temps, Raymond Barre a fait la paix avec M. Chirac qu'il soutient.

Par la suite, la guerre se poursuit pour M. Pébereau en la personne de la Société Générale, banque étiquetée chiraquienne à laquelle la BNP mène une guerre sans merci. Et j'avoue que lorsque l'on a appris que le frère de Jérôme Kerviel a travaillé à la BNP, j'ai fait partie des gens qui ont cru un instant à la thèse du complot lorsque l'affaire qui a ébranlé la Société Générale est apparue au grand jour.

Et finalement, retrouver M. Pébereau parmi les sarkozystes de 2011 avec Gérard Carreyrou (ami en son vivant de Pierre Bérégovoy) ne pouvait plus surprendre, même si cela pouvait contrarier, voire révolter, étant donné les pratiques politiques honteuses dudit Sarkozy.

Mais revenons à nos moutons

Le rôle de Mme Fioraso

J'ai lu attentivement le PV que le site de l'hebdomadaire "Marianne" a heureusement mis en ligne. Je ne partage pas du tout le sentiment des journalistes de "Marianne" qui ont écrit à son propos et qui en ont rendu compte. En réalité, dans cette affaire, le PS emploie des méthodes mafieuses pour n'avoir pas à ouvrir un débat de fond. Le débat de fond serait de réfléchir à la nature de Sciences Po, que les dernières évolutions font muer (d'une façon irréversible ?), débat qu'il y aurait à ouvrir publiquement et ouvertement. Les méthodes mafieuses consistent à ne pas ouvrir ce débat, mais à utiliser des procédures d'aspect judiciaire pour des problèmes qui ne le sont pas, ce qui suppose que l'on ne cherche pas à guérir le mal, mais à en profiter. Voyons-les.

Dans leur article, les journalistes de "Marianne" affirment que Mme Fioraso n'a jamais mis les pieds à Sciences Po. Il se trouve que ce n'est pas ce que dit sa fiche Wikipedia, qui indique que Mme Fioraso a enseigné à Sciences Po Paris tout récemment, en 2011, donc sous la houlette de Descoings. Par ailleurs, adjointe au maire de Grenoble chargée de l'enseignement supérieur, elle a forcément eu à connaître des évolutions de l'IEP de Grenoble et donc des relations de celui-ci avec Paris.

Or il se trouve que parmi les députés qui ont reçu MM. Pébereau et Casanova à l'Assemblée Nationale, voici quelques jours, plusieurs femmes qui se plaignaient de la non-féminisation de la direction de Sciences Po dans son ensemble se réclamaient ... de Sciences Po Grenoble. Comme par hasard.

C'est donc après sa nomination comme ministre de l'Enseignement supérieur en juin que Mme Fioraso a encouragé une enquête de la cour des Comptes (commencée, elle aussi, en juin). Et pendant tout l'été et le début de l'automne, Mme Fioraso a demandé à la FNSP (en la personne de son représentant légal, le président) de surseoir à la désignation d'un nouveau directeur, en attendant les conclusions de la cour des Comptes (ce faisant, Mme Fioraso ne tenait aucun compte de la présomption d'innocence et préjugeait d'une culpabilité qu'elle organisait par ailleurs en spectacle futur).

En septembre, la cour devait rendre son rapport, Mme Fioraso demanda à Sciences Po de remettre une réunion destinée à désigner le nouveau directeur, ce qui fut fait. Mais pendant ce temps, les fuites commencèrent, et il est admis, selon M. Casanova, que ces fuites du premier rapport de la cour des Comptes ne pouvaient provenir que de la cour elle-même ou ... du cabinet de Mme la ministre de l'Enseignement supérieur, Mme Fioraso.

Or les fuites déstabilisaient l'établissement. Et l'on notait que sur les vingt-quatre candidats au poste de directeur de Sciences Po, quatre émanaient ... de la cour des Comptes. Un autre était le politologue Dominique Reynié. Celui-ci parut incarner d'abord une ligne sarkozyste, traditionnelle pour lui qui dirigeait par ailleurs la Fondation pour l'Innovation Politique, une institution née de l'UMP et d'abord financée par celle-ci avant de l'être par le gouvernement (dans une proportion écrasante, non moins de 80% apparemment). Il apparut ensuite que M. Reynié, se mettant au service du nouveau gouvernement, pouvait chercher là un moyen d'une nouvelle virginité, mobile tellement noble et désintéressé qu'il en ferait pleurer. En tout état de cause, M. Reynié ne peut être considéré comme indépendant dans cette affaire.

Mme Fioraso avait donc tendu son piège : via M. Reynié, elle entretenait l'agitation à Sciences Po et entravait la nomination d'un directeur pour susciter l'impression d'enlisement, tout en distillant des informations sur le rapport de la cour des Comptes (dont les conclusions ne sont pas indiscutables). Finalement, las d'attendre une publication d'un rapport qui était à chaque fois retardée par la cour (pour les raisons que l'on devine) mais dont une main mal intentionnée ne cessait de laisser filtrer les mauvaises feuilles dans la presse, la FNSP prit ses responsabilités et désigna un candidat au poste de directeur, que Mme Fioraso, selon le piège qu'elle avait tendu, put refuser, au mépris de toutes les traditions et alors même que le candidat proposé n'était pas une seule fois mis en cause par le rapport de la cour des Comptes.

La volonté d'étatisation

M. Casanova, dans le PV publié par "Marianne", relève un fait qui a totalement échappé aux journalistes de cet hebdomadaire, tout occupés à crier avec les loups du lynchage. La cour des Comptes a considéré que Sciences Po relevait du statut des associations sans but lucratif et beaucoup d'irrégularités supposées reposent sur ce postulat. Or ce postulat est parfaitement discutable et cette définition ou qualification juridique échappe entièrement à la cour des Comptes, elle relève en dernier ressort sans doute du tribunal des Conflits. En tout état de cause, il faut entendre ce que dit M. Casanova lorsqu'il explique que cette qualification d'association à but non lucratif n'a jamais été évoquée pour Sciences Po dont le statut sui generis est de nature législative (donc supérieur aux décisions de la cour des Comptes auxquelles il doit s'imposer).

Le reste des irrégularités échappe aux décisions du conseil d'administration. En revanche, les orientations stratégiques qui sont visées par les adversaires de l'équipe actuelle de Sciences Po sont revendiquées par un homme dont la moralité me paraît peu discutable, le politologue Olivier Duhamal, qui a grandi en terreau centriste avant de passer au Parti Socialiste.

Donc la montagne judiciaire accouchera d'une souris, ce que chacun de bonne foi peut prévoir, et ce qui devrait faire réfléchir ceux qui crient avec les loups.

Il faut enfin en venir aux "logements de fonction" attribués dans des conditions opaques. L'hebdomadaire "Marianne" a donc si peu d'arguments pour s'abaisser à des accusations aussi mesquines et floues ? Allons, n'y a-t-il pas, parmi les dirigeants de "Marianne" quelqu'un qui a, lui aussi, bénéficié d'un logement dit "social" alors qu'il était journaliste ? Soyons sérieux.

La vérité est politique. Ce qui est reproché, à juste titre, à Descoings, ce sont ses accointances avec le pouvoir sarkozyste. Le reste est sans intérêt. Aller plus loin, c'est laisser supposer que l'on ne veut pas modifier les pratiques de Sciences Po, mais s'en emparer, s'emparer des salaires mirobolants, s'emparer de ces logements de fonction qui font toujours tellement baver dans les chaumières, s'emparer du pouvoir. Et si, en dénonçant la non-féminisation de Sciences Po, on n'allait pas finalement jusqu'à laisser percer une obscure homophobie à l'encontre de Descoings ? Et si, en invoquant sans cesse Sciences Po Grenoble, on ne préparait pas une tentative de prise de pouvoir de Mme Fioraso sur l'institution ? Cela expliquerait tout.

En réalité, il faut cesser ces mises en cause judiciaires qui ne reposent sur rien, rétablir quelques procédures comme cela est proposé par le conseil de la FNSP et pacifier la situation sans réclamer aucune tête.

Ensuite, il faut ouvrir un débat public sur le statut de Sciences Po, en collaboration avec les actuelles instances, et en cessant de brailler comme des gorets.

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Commentaires

@Hervé,
Vous savez selon les fiches wikipédia, JLassalle n'a jamais été tete de liste lors des dernières régionales si l'on suit les fiches, un autre affiché^^^, vous et moi et bien d'autres savont que ne fut pas le cas...

Écrit par : Martine | 02/12/2012

Dslée Hervé ai fait une faute d'ortho volontaire, j'ai préféré cette option: passer pour une grotesque blonde, plutot que d'ouvrir la voie vers à la planche à savon(s)/nettes? D'autres pourraien passer pour parler de septième art bien sur avec référence aux plaques de beurres...

Écrit par : Martine | 02/12/2012

Les commentaires sont fermés.