06/03/2013
Savary, Chavez : dure semaine pour les fumeurs de cigares
Pendant que, pour la première fois depuis des siècles, un pape quitte la tiare sans y laisser le dernier soupir, d'autres se dévouent pour mourir à sa place, Stéphane Hessel tout récemment, et les deux fumeurs de cigares, Jérôme Savary et Hugo Chavez, plus récemment encore. De Stéphane Hessel, on a tout dit, sa résistance, le fait que sa mère avait inspiré le film "Jules et Jim" de François Truffault, et bien sûr son bref essai "Indignez-vous", qui a soulevé les Espagnols et, en France, l'espoir finalement déçu de personnalités comme François Bayrou, qui s'attendait à voir déferler la foule des Indignés de la Bastille à l'Elysée. Puis Hessel expliqua que l'Occupation allemande 1940-44 avait été de la petite bière (ce qui est une insulte aux déportés et à ceux de ses camarades qui ont subi la torture de l'Occupant, sans compter ceux, bien plus nombreux encore, qui ont souffert de privations, de terreur, pendant cette période) et l'espoir s'en fut, mais au moment des bilans, les mauvais jours s'éteignent et ne restent que les bons.
Chavez et Savary, ce sont d'autres calibres, le premier liberticide, l'autre libertaire. Liberticide, Chavez ne l'est pas apparu au début. Nous avons aimé son défi lancé à la face du géant américain, nous avons aimé sa façon de museler les firmes multinationales toutes puissantes, mais ensuite, son régime a dérivé, presse muselée, liberté d'expression contrôlée, peuple surveillé et conditionné, bref tout l'arsenal de ce qu'il ne faut pas faire (et qu'il n'est pas le seul à avoir fait). Libertaire, Savary le fut, virtuose du théâtre de rue, avant-garde des saltimbanques, jongleur, mime, chanteur, musicien, agitateur, libre, libre, jusqu'au jour où il rencontra un puissant et, comme tant d'autres, choisit de placer son art sous la protection de ce puissant. Dès lors, dans la dorure des palais officiels, à Chaillot, à l'Opéra Comique, il illustra jusqu'à l'extrême ce qu'a été la génération de 1968 : une contestation des tenants du pouvoir installé destinée à prendre leur place. Il est devenu l'art officiel. Pas le pire, parfois le meilleur, mais l'oiseau choisit la cage.
La particularité commune de Chavez et de Savarzy était le cigare. Pour le premier, une occasion de rendre hommage au frère castriste et à Cuba. Pour le second, un moyen de se rattacher à la puissante confrérie des fumeurs de cigares, l'un des réseaux et lobbys qui flottent entre deux eaux dans les canaux du pouvoir dans notre pays. Et devinez, Chavez et Savary, de quoi ils sont morts : du cancer.
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Commentaires
La phrase de Stéphane Hessel dans le FAZ a été pour le moins maladroite (disons qu'elle méritait un point Godwin), mais il est difficile de l'interpréter comme une injure envers les déportés par l'occupant nazi, puisqu'il l'a été lui-même. Son interview portait d'ailleurs précisément sur ce sujet : http://www.faz.net/frankfurter-allgemeine-zeitung/feuilleton/wie-ich-buchenwald-und-andere-lager-ueberlebte-1581433.html La remarque sur l'occupation "relativement inoffensive" (relativ harmlose) porte spécifiquement sur la politique culturelle (eine offene Kulturpolitik : Man durfte in Paris Stücke von Jean-Paul Sartre aufführen oder Juliette Gréco hören.).
Je sais bien qu'envers les vivants, on peut polémiquer à son aise en espérant qu'ils améliorent leur propos : mais "au moment des bilans", il me semble inutile de caricaturer.
Écrit par : FrédéricLN | 17/03/2013
@ FLN
Certes, mais il est inutile d'énoncer d'autres phrases que Hessel aurait mieux fait de ne pas prononcer. Si son message global est admirable, il y a eu quelques sujets de polémiques, vers la fin, sur lesquels je ne crois pas nécessaire de m'étendre, et que j'ai globalement inclus sous cette citation dont tu as raison de souligner la portée réelle. Maintenant, la mort d'un certain nombre de nos grands artistes en déportation est un sujet sur lequel on peut discuter aussi. En vérité, les nonagénaires résistants ont tant de nostalgie des heures exaltées de leur jeunesse, qu'il leur arrive d'en oublier les heures les plus cruelles, parce qu'ils leur ont survécu, eux. J'entendais, chez Frédéric Taddéi, de ces glorieux survivants, dire qu'au fond, la plus belle époque de leur vie a été l'Occupation,à cause de la Résistance. Il arrive que les curseurs tricotent des courbes fort emmêlées.
Écrit par : hervé torchet | 17/03/2013
Bon… en fait, Stéphane Hessel oubliait si peu l'horreur de la déportation, que l'interview en question y est essentiellement consacrée. Mais bien sûr, je suis d'accord avec toi sur le fait que des paroles inconsidérées (= dont il mesurait mal l'impact qu'elles prenaient maintenant qu'il était devenu une référence morale) ont sans doute nui à la vague d'indignation constructive que lui, comme nous, espérions.
Écrit par : FrédéricLN | 18/03/2013
@Fred,
Je me souviens d'avoir croisé un certain M.Gaudin à une époque pas lointaine du tout et sa cour.
Comment dire? Il a tenu des propos qui n'étaient nullement le reflet de son parcours d'autrefois, quand bien meme je n'avais pas réagi, une seule personne de sa cour est passée me voir pour l'excuser et m'expliquer.
Lorsque l'on vieillit sous les feux des projecteurs ou cherchant à les retenir. Pas facile^^^, d'autant plus que la bataille pour la succession va faire rage là-bas.
Une des raisons pour laquelle, je résume souvent sous "la vieillesse peut etre un naufrage".
Sinon, dans ma ville l'UDI et un "ex"-MoDem AC en fait? soutenu par une certaine UMP sont prets à passer alliance avec le FN...Pas belle la vie?
Bonne soirée à vous
Écrit par : Martine | 18/03/2013
"MooDem" en faits réels, en vérité AC et soutenu par la Lepagina lors de son épisode MoDem...N'est-ce pas triste? Com ca la vie...Vais-je laisser faire? Chuuut :x
@Hervé,
Vous me semblez avoir oublié quelques autres fumeurs de Havane dans l'histoire, comme un certain Christian Blanc avec son actionnarat salariés ( un magnifique foutage de gueule, d'ailleurs les salariés suite à son chantage affectif indécent ont fini par le reconduire vers la porte , savez-vous comment la flèche de son paquebot était rebaptisée? La" b... à B", et le personnel ne détestait pas jouer les provocs sous ses fenètres à juste titre ) Pas mécontente du tout que son grand paris ne voit pas le jour... Et bien d'autres^^^.
Écrit par : Martine | 19/03/2013
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