04/02/2015
Faut-il construire des mosquées sur fonds publics ?
Dimanche dernier, le ministre des Finances Michel Sapin était l'invité de Maïtena Biraben dans l'émission Le Supplément sur la chaîne Canal Plus. Au milieu des questions qui lui étaient posées, M. Sapin indiqua que les églises catholiques et certaines synagogues étant construites au moment de l'adoption de la loi de Séparation des Églises et de l'État, les musulmans se trouvaient brimés puisque les mosquées ne l'étaient pas, et qu'il avait donc fallu faire avec les moyens du bord pour financer la construction de mosquées. Par cette petite phrase, l'ami intime du président Hollande a confirmé ce que plusieurs accusateurs affirmaient depuis déjà des mois : des élus, notamment socialistes, ont troqué des permis de construire et des financements de mosquées contre le vote bloqué des fidèles de ces édifices de culte.
M. Sapin ne s'en offusquait pas, mais nous avons le droit, et même le devoir, de nous en indigner : ce faisant, par ce troc, les élus concernés ont établi un lien entre citoyenneté et religion. Or ce lien est la seule et ineffaçable infraction concevable à la loi de 1905. Des élus qui, par ailleurs, prônent la laïcité s'appuient sur la confessionnalisation d'un vote collectif. Contredisant Victor Hugo, ils disent : à la conscience, je préfère la consigne et, qui plus est, la consigne d'un corbeau.
C'est cela qui n'est pas - et qui ne peut pas être - acceptable dans la République française, pas plus que le financement de crèches confessionnelles Loubavitch par la Ville de Paris, pas plus que les contorsions de bien des élus pour faire plaisir aux derniers catholiques (ou protestants) de leurs paroisses, à l'exception bien entendu des départements de l'Alsace-Moselle, encore sous régime concordataire.
Il n'est pas acceptable que des élus troquent des lignes budgétaires contre des voix. Le vote confessionnel musulman semble d'ailleurs le dernier à fonctionner encore. Cela, au profit d'élus dont la plupart sont socialistes. Il mue un clientélisme ordinaire en faute majeure contre la loi de 1905. Les élus en question devraient répondre de leurs actes devant les tribunaux, si cela ne dépendait que de moi.
Pourquoi fait-on cela ainsi ? Officiellement, c'est pour ne pas ouvrir de guerres civiles. Officieusement, c'est pour profiter de la manne électorale. On l'a bien compris. Mais par ce procédé en catimini, on joue avec le feu, et l'on pourrait se brûler prochainement.
Il est cependant un point sur lequel on peut tomber d'accord avec M. Sapin et ses séides : oui, il y a une injustice à combler, il faudrait trouver le financement public d'un nombre suffisant de mosquées. Une loi suffirait à le permettre comme elle le fit en 1920 pour la Grande Mosquée de Paris. Dans un contexte d'asphyxie budgétaire, cette perspective paraît terrifiante, mais il faudra s'y résoudre. Financer les mosquées sur fonds publics a l'avantage de donner à l'État un droit de regard sur le respect des principes républicains par les cultes, et cet avantage n'échappe à personne. C'est à l'État, et non aux collectivités locales, que devrait échoir ce financement public des mosquées.
Cela permettrait de mettre un terme au scandaleux clientélisme antirépublicain auquel se livrent paraît-il ces élus, et d'afficher les réalités avec courage. Cela déplairait évidemment aux excités. Mais il y aurait moins de perversité dans cette nouvelle situation que dans l'actuelle où l'on sent bien le jeu avec le feu, que nous constations dans la stigmatisation de l'ancien pouvoir, et que nous reconnaissons dans les jeux ambigus de l'actuel.
Cette ambiguïté fait d'ailleurs que le PS ne mérite pas que l'on vote pour lui dimanche dans le Doubs. Et cependant, il faut bien empêcher l'adversaire d'être élu. Alors, sans double-jeu, disons que si nous habitions là, nous voterions PS pour éliminer l'autre, mais ajoutons que le PS nous doit une contrepartie. Je ne veux pas dire par là que les militants du PS doivent se précipiter pour acheter mes livres (même si je suis content quand il s'en vend beaucoup), mais qu'il faut que le PS (et ceux qui l'imitent) nous prouve(nt) qu'il est prêt à s'amender. Faute de quoi, il se précipitera de lui-même dans l'abîme, et peut-être nous tous avec.
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