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16/12/2009

Triple "Pan sur le bec" au "Canard" (UDF en plus).

Il est très rare que je dise du mal de la presse écrite, de la presse en général, et des gens en général. Pour la presse écrite, je risquerais d'empiéter sur le territoire de l'excellent Éric de Crise dans les Médias (le lien est dans la marge, colonne de droite, mais je ne le fais pas ici, car autrement Wikio et son précieux classement le pénaliseraient...).

Cependant, aujourd'hui, je dois souffler dans les bronches du volatile, du volubile canard, car trop, c'est trop.

Dès la une, "Le Canard" enchaîne : un sujet sur les impôts sur les sociétés du Cac 40, qui en paient très peu. Pas un mot de la revue Alternatives Économiques qui avait sorti ce scoop, sur lequel j'avais fait une partie de mon article (rédigé après un conseil de Quitterie sur son blog) ici même dès le ... 15 novembre, voici plus d'un mois !

Ensuite, à l'intérieur, un long article de Didier Hassoux (qu'il m'est arrivé de rencontrer au siège du "Canard") sur la réouverture du cercle de jeux Concorde. Étant donné le nombre d'articles sortis depuis des mois sur Bakchich sur ce sujet, il me semble que la moindre des choses aurait été de citer au moins ce site, voire sa version papier, Bakchich Hebdo, qui persiste dans les kiosques (aidé depuis peu par Isabelle Adjani).

Enfin, il y a l'affaire Tapie vs Club Med. On nous explique que Bernard Tapie a fait pression sur les cours de cette entreprise (née sous une forme quasi-coopérative, si ma mémoire est bonne, et devenue ordinaire) pour racheter une proportion non négligeable de son capital, et faire ainsi pression sur l'équipe dirigeante emmenée par Henri (alias Riton) Giscard d'Estaing, l'un des fils de l'ancien président VGE. Les cours du Club sont remontés, et Tapie a revendu ses parts avec moult bénéfice. Que le "Canard" trouve le moyen de donner cette info sans faire le lien avec le fait que VGE soit depuis lors descendu de son olympe et du château d'Estaing pour souffleter les actuels dirigeants d'une UDF qui n'est plus qu'un fantôme, relève d'une cécité dont le "Canard" ne se vante habituellement pas. Tapie a quand même juré la mort politique de Bayrou qui l'a abondamment dénoncé lors de son indemnisation étrange par l'État sur décision politique.

Il n'est pas question pour moi de défendre Bayrou, il est bien assez grand pour le faire tout seul et, comme je l'ai écrit, je suis perplexe sur mon éventuel vote de mars prochain, mais la double imposture de ceux qui se réclament d'une marque commerciale UDF (a-t-on vu qu'un parti politique soit une échoppe ? c'est bien une idée de maquereaux politiques faisandés) et d'une prétendue idyllique UDF nimbée des paillettes de la perfection politique et morale, cette double imposture m'agace, et, moi qui suis adhérent de l'UDF presque depuis son origine, je crois utile de dénoncer l'imposture en rétablissant certaines vérités.

L'UDF, une usurpation, déjà

Dans les années 1960, le Sénat a incarné la résistance à la mainmise du parti présidentiel sur tous les rouages de l'État, rouages politiques en particulier. Gaston Monnerville a incarné le Sénat durant la première décennie de la Ve république avec fermeté et calme. Lorsqu'il a fallu le remplacer, en 1968, il y a eu un très grand nombre de tours de scrutin, et finalement, c'est Alain Poher qui est sorti des urnes.

Alain Poher n'était déjà plus un homme jeune, il était né avant la guerre de 1914-18. On l'a traité de falot et d'un certain nombre d'autres noms d'oiseaux, mais on doit inscrire à son actif la ratification, pendant sa seconde présidence de la république par intérim, en 1974, la Convention Européenne des Droits de l'Homme (CEDH), que la France avait refusé de ratifier jusque-là (on croit rêver). Il ne put la faire ratifier complètement, et dut maintenir une réserve, la peine de mort n'était pas abolie. Après son abolition en 1981, la Convention fut enfin pleinement ratifiée.

La ligne politique qui fit élire Poher président du Sénat en 1968 était complexe. Elle préfigura en fait ce qui allait devenir l'UDF. En 1971, les démocrates de Lecanuet et les radicaux de Jean-Jacques Servan-Schreiber (JJSS), qui en étaient le pivot, se rapprochèrent dans une première confédération, le Mouvement Réformateur. D'eux se rapprochèrent quelques socialistes qui désapprouvaient l'Union de la Gauche et l'alliance du PS avec le PCF (ils finirent dans le Parti Social Démocrate, le PSD, de Max Lejeune puis d'André Santini). Lors de l'élection présidentielle de 1974, cet axe s'élargit : il y avait déjà quelques indépendants (CNI) qui s'étaient rapprochés de Lecanuet dans les années 1960, et ce furent les indépendants de l'intérieur de la majorité présidentielle sortante, les Républicains Indépendants qui, avec Giscard, rejoignirent la coalition.

Giscard faisait ainsi au centre à peu près ce que Mitterrand avait fait à la gauche au congrès d'Épinay : il arrivait avec très peu de militants, encore moins d'électeurs, mais offrait sa dynamique personnelle pour la conquête du pouvoir, et prenait, minoritaire, la tête de la troupe. Les réformateurs avaient un capital électoral supérieur à 15 % (que Bayrou n'a curieusement jamais réussi à reconstituer depuis la présidentielle de 2007), les RI représentaient peut-être 3 ou 5 %, la fronde des 44 députés autour de Chirac amenait probablement les 5 ou 6 points qui ont fait la différence contre Jacques Chaban-Delmas, rival de VGE au premier tour.

Après la victoire de Giscard, seuls les réformateurs et les RI restèrent dans le camp de Giscard, Chirac retourna à son UDR qu'il changea bientôt en RPR en 1976. Le changement de sigle choisi par Chirac et ses amis fut probablement une erreur : en créant l'UDF en 1978, Giscard et les siens parurent retrouver le fil de la légitimité présidentielle. La plupart des électeurs sont très peu attentifs à l'actualité politique et les info leur tombent très lentement dans l'oreille. C'est ainsi qu'il faut concevoir la naissance de l'UDF comme une usurpation, une habile récupération de sigle (de l'UDR à l'UDF).

Un livre sortit, officiellement signé par Giscard, et intitulé "Démocratie Française", qui permit de faire comprendre que l'Union pour la Démocratie Française (UDF) était le parti présidentiel.

L'UDF de Giscard et Lecanuet est morte en 1998, vendue au Front National

Dans un premier temps, la récupération fonctionna plutôt bien. Les élections européennes de 1979 virent la déroute du RPR chiraquien et le triomphe de l'UDF giscardienne, emmenée par Simone Veil. Ce fut pourtant son unique succès, car dans les trente ans qui ont suivi, l'UDF est allée de défaite en déroute et son territoire s'est réduit comme peau de chagrin, jusqu'au maintien sous tente à oxygène organisé par le congrès de Villepinte en décembre 2007.

Dans les années 1980, pourtant, l'UDF porte beau : elle détient une forte majorité de conseils généraux et la présidence du Sénat. Peu à peu, miette par miette, Chirac va grignoter tout cela. Vers 1985, Raymond Barre s'impose comme le candidat naturel de l'UDF. On oublie sa phrase malheureuse et suspecte sur l'attentat antisémite de la rue Copernic, en 1980, et on voit qu'il a laissé les finances de l'État redressées et l'industrie prête pour les restructurations que les nationalisations de 1981 ont permis d'accélérer.

En mars 1986, l'UDF et le RPR font chambre à part pour les législatives qui se jouent à la proportionnelle. Catastrophe : le RPR devance l'UDF et l'addition des sièges du RPR et de l'UDF n'a qu'une voix de majorité à l'Assemblée Nationale. Barre va-t-il voter la confiance à Chirac qui sera pourtant son rival à la présidentielle ? Il fait l'erreur de la voter. Je me souviens d'avoir pensé dès cette époque-là qu'il avait tort. En fait, la hiérarchie de la présidentielle se mettait en place : Barre serait devancé au premier tour par Chirac, et ce dernier le serait au second par Mitterrand, dont il acceptait de devenir le subalterne en devenant son premier ministre. Le seul que le vote arrangeait était Mitterrand, et probablement Rocard.

Toujours est-il qu'on vit à l'occasion de la présidentielle de 1988 se dessiner la vraie et laide nature de l'UDF : en début de campagne, en 1986 et 1987, tout le monde, parmi les élites de l'UDF, pouvait se croire "premier-ministrable", mais à mesure que la campagne se déroulait et que la liste des premiers-ministres potentiels de Barre se raccourcissait, les élites en question, quitte à négocier un gros ministère, trouvaient plus rentables de le négocier avec Chirac, qui avait forcément plus de raison de se décarcasser pour obtenir leurs voix.

Le PSD d'André Santini, liens corses obligent, n'eut même jamais l'idée de soutenir Barre. Les autres composantes de l'UDF se délitèrent progressivement. Il faut dire que l'UDF n'était pas un parti politique, mais une confédération de partis. On disait la "nébuleuse" centriste, tant s'y multipliaient les formations, clubs et autres réseaux. Ses dirigeants n'avaient aucun patriotisme de parti. Ils développaient un patriotisme de réseau, souvent transpartisan. La disparition du MRP, par exemple, au début de la Ve république, avait essaimé ses élus un peu partout : Maurice Schumann (à ne pas confondre avec Robert Schuman) avait fait partie des jeunes de Marc Sangnier, comme Marc Bécam qui fut ensuite maire RPR de Quimper. Robert Schwint, inamovible maire PS de Besançon durant une période très longue, venait lui aussi du MRP. Et bien entendu, ce qui restait des cadres du MRP avait servi de soubassement à la création du Centre Démocrate par Jean Lecanuet en 1963. Ces liens de réseaux étaient infiniment plus précieux aux gens de l'UDF que leur propre parti.

Chirac s'emparait aussi des collectivités locales, une par une : tel maire UDF était maintenu en poste à condition d'accepter de céder des délégations-clefs au RPR. La sanction, s'il refusait, était qu'il perdait sa ville, fût-ce au profit de la gauche : depuis 1981, on savait que Chirac pratiquait la politique du pire. De surcroît, il tenait les finances des agriculteurs et la FNSEA, ce qui lui permettait de grignoter la majorité absolue de l'intergroupe UDF au Sénat. Enfin, il avait offert des prébendes aux leaders centristes : parmi les pensionnés de la Ville de Paris, on trouvait par exemple le nom de Lecanuet.

L'élection de René Monory à la succession d'Alain Poher, devenu aveugle et quasi-grabataire, en 1992, fut le dernier feu d'une confédération dont la crise des régionales de 1998 précipita la fin.

La fin de la première UDF, le rôle de Pasqua et du Front National

Lors de l'élection présidentielle de 1995, Giscard, Barre et Monory s'étaient rassemblés pour soutenir la candidature de Chirac. Le soutien de celui-ci à l'adoption du traité de Maestricht, en 1992, avait probablement été le prix de ces ralliements, ou du moins, la preuve. En face de Chirac, le vrai adversaire n'était pas Balladur, mais Pasqua.

En effet, on disait que le fils de Pasqua était très proche des réseaux du Front National (FN), et que, si le FN avait son siège dans les Hauts-de-Seine, ce n'était pas par hasard, car, indirectement mais massivement, le FN était soutenu par le conseil général de ce département, dont le président n'était autre que Charles Pasqua. De fait, Paul Graziani (autre corse) et Pasqua dominaient le département depuis 1982, date à laquelle les lois de décentralisation lui avaient conféré l'énorme budget que chacun connaît aujourd'hui. Le FN ayant prospéré à partir de 1983, on peut imaginer le lien de cause à effet que les gens faisaient.

Pasqua avait essayé de s'emparer de la présidence du Sénat en 1992, peut-être avec l'aide de Pierre Bordry, alors directeur de cabinet du fantomatique Poher, mais Monory avait réussi à conserver le poste à l'UDF.

Le ralliement des principaux leaders historiques de l'UDF à la candidature de Chirac de 1995, pendant que la jeune génération, de Bayrou à Léotard en passant par presque tous les autres, s'enrôlait chez Balladur, scella la première fin de l'UDF, qui était désormais incapable de présenter un candidat à l'élection présidentielle.

Le divorce fut consommé en 1998 : les élections régionales, à la proportionnelle intégrale, virent des majorités relatives de la droite RPR-UDF dans trois régions, qui ne pouvaient aboutir à des présidences de régions de droite qu'avec les voix des élus du FN. C'était le cas en Picardie, en Rhône-Alpes et en Languedoc-Roussillon. La composante libérale de l'UDF accepta les voix du FN (sauf les modérés emmenés par Léotard et Robien, qui découpa sa carte de son parti en direct à la télé), cependant que la composante centriste les refusa (sauf Charles Baur en Picardie et Claude Goasguen), ainsi que les radicaux.

Dans la foulée, l'intergroupe UDF perdit la majorité absolue au Sénat, et le chiraquien (merde, je ne me rappelle plus son nom, ni même sa gueule) succéda à Monory (au grand dam de Pasqua, qui aurait bien profité de la disparition de l'UDF pour placer l'un des siens à la tête de la Haute Assemblée, vu qu'il se préparait à une candidature présidentielle en 2002, pour laquelle il avait tout fait pour rendre le FN incontournable et lui-même seul allié possible du FN, seul donc à pouvoir faire gagner ce qu'il nommait la droite au second tour en 2002...).

L'UDF, la première, la vraie, était morte. Il en restait un rogaton, encore présentable en terme d'élus, mais retrognolé, qui devint la Nouvelle UDF.

La nouvelle UDF, l'honneur retrouvé des centristes

En ayant pour fait originaire le refus d'alliance avec le FN, les centristes de la Nouvelle UDF pouvaient marcher le front haut. Mais la dynamique née en 1978 s'était entièrement brisée, et la réalité politique ne pouvait manquer de les rappeler à la modestie. En 1999, l'élection européenne présenta deux droites à égalité, et le centre doit en difficulté. On ne sait pas si Séguin a délibérément sabordé sa campagne euroipéenne pour aider son ex-allié Pasqua qui s'y présentait contre lui, ni si Sarkozy a joué entièrement le jeu, mais le résultat est que le RPR, réparti en deux listes, dépassait deux fois 10 %, proche des scores du FN et de l'UDF nouvelle emmenée par Bayrou.

J'étais alors élu du XVIe arrondissement de Paris et, bureau de vote par bureau de vote, j'avais constaté qu'une partie des électeurs de l'UDF, dès ce moment-là, s'était portée sur la liste écolo emmenée par Daniel Cohn-Bendit (DCB). La porosité des deux électorats était très nette, ce que DCB a su exploiter lors des dernières élections européennes en 2009, qu'il tente de prolonger aux régionales de 2010 (mais la situation est-elle la même ?). Ce n'était donc pas sottement que Bayrou avait tenu à doter son Force Démocrate (successeur du CDS en 1995) d'une vraie aile écologiste.

Le trop faible score de Bayrou aux Européennes passa, parce que les élus n'avaient pas de solution de repli. Mais le score de Bayrou à la présidentielle de 2002 fut encore pire, et la création de l'UMP à cette même époque offrit l'occasion à la plupart d'entre eux de quitter le navire qui faisait eau de toutes parts. Outre quelques indécrottables bayrouistes ou centristes utopiques, et quelques députés émanant de systèmes locaux très efficaces, ne restèrent là que ceux des élus qui souffraient, disons-le, d'une chiracophobie aiguë. Ces mêmes chiracophobes sont la majeure partie de ceux qui, dès avant le premier tour de l'élection de 2007, ont rejoint Sarkozy, qui avait réussi à faire la peau à Chirac.

Entre-temps, l'idée était venue à Bayrou, ou à son entourage, de tourner casaque. Je me souviens d'une conversation avec Éric Azière, qui est proche de Marielle de Sarnez, ce devait être en 2005, au stade Jean Bouin à Paris. Il traçait les perspectives d'avenir, j'en mesurais mal les conséquences à cette époque : désormais, le parti de centre droit serait l'UMP (putain, qu'est-ce que ce serait s'ils étaient l'extrême droite !), et Bayrou... eh bien, ce n'est que plus tard que j'ai entendu parler de "stratégie à l'Italienne". Il s'agissait de se calquer sur une méthode qui avait permis à Romano Prodi de prendre le pouvoir par une vaste coalition allant du centre chrétien jusqu'à une gauche très à gauche, très très à gauche. L'idée du Parti Libéral Démocrate anglais (qui, du centre, déborde la gauche par la gauche) rejoignait la même stratégie, mutatis mutandis, ou du moins offrait une variante possible du même esprit.

Le passage de Bayrou à gauche ne pouvait se faire sans étapes. La création du Mouvement Démocrate fut la première de ces étapes.

L'avant-dernier congrès de l'UDF à Villepinte et la création du Mouvement Démocrate (MoDem)

L'UMP détenant le Sénat et Chirac tenant la FNSEA, la légitimité historique héritée de la première UDF avait tout à fait disparu : Chirac avait fait gagner l'Europe (grande idée commune de la nébuleuse UDF) au référendum de 1992, la décentralisation (autre grande idée commune) avait été organisée par Mitterrand et la bipolarisation avait peu à peu gagné la vie politique jusque dans les communes de taille modeste. Les réseaux démocrates-chrétiens, radicaux-socialistes, ou autres, avaient perdu leur socle sociologique naturel. Il ne restait donc plus rien de cette première UDF.

Giscard lui-même s'était éloigné pour une raison tout à fait futile : Bayrou avait refusé de prendre une de ses maîtresses (dont on disait qu'elle avait un enfant de lui) sur sa liste des Européennes de 1999.

La présidentielle du printemps 2007 s'était faite encore sur l'étiquette UDF, mais les députés avaient quitté le navire bayrouiste entre les deux tours. Au passage, toujours à propos du "Canard" d'aujourd'hui, lorsqu'on prête à Sarkozy la phrase qu'Hervé Morin a attendu l'entre-deux-tours pour rejoindre l'escadre sarkozyste, le "Canard" ne me paraît guère critique. Soit ses info sont fausses, soit (ce qui est plus probable), il entre dans le jeu de la manœuvre tentée par Sarkozy pour récupérer des miettes de ce qu'il reste d'électorat de centre droit à Bayrou.

En effet, on sait que Morin a quitté le sillage de Bayrou pour se placer dans celui de Sarkozy dès les environs du 20 mars 2007. C'est le moment où il devait faire une conférence pour soutenir Bayrou devant les milieux d'affaires londoniens, et où il n'y est pas allé. Le 20 mars est le moment où, comme par hasard, Bayrou a commencé à stagner dans les sondages, et où l'on a su qu'il ne gagnerait pas. Très fidèle à ce qui a été la réalité de l'UDF pendant trente ans, Morin a été le premier à aller à la soupe. Il a attendu l'entre-deux-tours pour emmener avec lui le plus possible de députés.

C'est évidemment Rothschild, patron du cheval en France, qui a été le lien entre Sarkozy et Morin, puisque Morin, comme Bayrou, élève des chevaux. Et d'ailleurs, entre les deux tours, pour marquer la nouvelle situation politique, Sarkozy n'est pas allé inaugurer les chrysanthèmes à Épaignes : il s'est fait filmer à cheval à grand renfort de caméras de télévision...

Ce qui est curieux, dans cette affaire, c'est que les réseaux de Sarnez sont très liés aux intérêts équins, puisque son ex-mari est maire de Deauville après avoir dirigé la société de vente de yearlings à Deauville pendant plusieurs années, et que leur collaboration avec Bayrou a beaucoup aidé celui-ci d'abord auprès de feu Jean-Luc Lagardère (patron du cheval avant Rothschild) puis auprès de Rothschild. Il est vrai que Rothschild, lui, avait de solides raisons de soutenir Sarkozy, notamment par leur soutien commun à la cause de l'État d'Israël.

Cette fois, fin 2007, il ne restait plus qu'une poignée d'élus, quelques poignées de cadres, l'UDF était morte de sa belle mort. Mais le souhait de Michel Mercier (dont on disait déjà qu'il s'était rapproché de Sarkozy) et de Jean Arthuis aboutit à maintenir l'UDF sous tente à oxygène et sous respiration artificielle, Bayrou en étant le président avec une équipe resserrée où Arthuis gardait un pied (d'ailleurs légitime).

Lors de ce qui devait être l'avant-dernier congrès de l'UDF, nous avons décidé qu'à la fin de l'année 2010, un dernier congrès serait réuni, qui se prononcerait sur l'éventuelle absorption de l'UDF par le MoDem.

Agiter le spectre de l'UDF pour effrayer les électeurs de Bayrou

On comprend bien que la manœuvre actuelle a le double but d'une part, d'attirer à Sarkozy les électeurs de Bayrou effrayés par le glissement de leur parti du centre pur et dur vers la gauche, et d'autre part, de repousser vers la gauche (ou plutôt vers les Verts) les électeurs de Bayrou qui détestaient l'UDF et qui pensaient que le MoDem était un parti soit social-libéral, soit social-démocrate, soit social-écologiste, soit social-démocrate-écologiste.

Pour attirer le centre droit, on fait croire que le Nouveau Centre se rebelle, que c'est the return of 2006, quand Bayrou ne vota pas le budget de la droite. Seulement, dans le même temps que cette stratégie est organisée, elle est insupportable à ceux qui l'ont organisée : au NC qui l'assume mal, et à Sarkozy qui, tout en l'agitant d'une main, la retient de l'autre, de peur que l'artifice ne devienne la réalité et que quiconque ose lui faire de l'ombre.

J'ai dit pourquoi Giscard a accepté de se mêler à la mascarade. Tout ceci n'a guère de consistance et ne trompera pas grand monde, sauf quelques grand-mères un peu assoupies qui, de toutes façons, auraient voté Sarkozy au deuxième tour.

Voilà donc Bayrou avec sa doctrine flottante, son parti en pâte à modeler, sa stratégie douloureuse et l'océan qui tangue. Et moi, mine de rien, je m'aperçois que, après avoir traité des écolos, me voici ayant analysé (voire psychanalysé) les centristes. Diable, ça m'ennuierait beaucoup d'avoir à continuer à décrire le prisme électoral, d'autant plus que j'ai une intention assez faible de voter.

Quand au "Canard", je le remercie quand même d'avoir indiqué que la subvention accordée par la Ville de Paris au Stade Français, l'équipe de rugby parisienne, était en principe conditionnée par des séances éducatives dans les écoles des quartiers fauchés, ce qui s'est résumé à une séance (une seule) ... avec des écoles privées.

Mais j'aimerais bien cesser d'avoir l'impression de lire radio-Sarko en lisant les brèves de la deuxième page.