Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

16/12/2009

Triple "Pan sur le bec" au "Canard" (UDF en plus).

Il est très rare que je dise du mal de la presse écrite, de la presse en général, et des gens en général. Pour la presse écrite, je risquerais d'empiéter sur le territoire de l'excellent Éric de Crise dans les Médias (le lien est dans la marge, colonne de droite, mais je ne le fais pas ici, car autrement Wikio et son précieux classement le pénaliseraient...).

Cependant, aujourd'hui, je dois souffler dans les bronches du volatile, du volubile canard, car trop, c'est trop.

Dès la une, "Le Canard" enchaîne : un sujet sur les impôts sur les sociétés du Cac 40, qui en paient très peu. Pas un mot de la revue Alternatives Économiques qui avait sorti ce scoop, sur lequel j'avais fait une partie de mon article (rédigé après un conseil de Quitterie sur son blog) ici même dès le ... 15 novembre, voici plus d'un mois !

Ensuite, à l'intérieur, un long article de Didier Hassoux (qu'il m'est arrivé de rencontrer au siège du "Canard") sur la réouverture du cercle de jeux Concorde. Étant donné le nombre d'articles sortis depuis des mois sur Bakchich sur ce sujet, il me semble que la moindre des choses aurait été de citer au moins ce site, voire sa version papier, Bakchich Hebdo, qui persiste dans les kiosques (aidé depuis peu par Isabelle Adjani).

Enfin, il y a l'affaire Tapie vs Club Med. On nous explique que Bernard Tapie a fait pression sur les cours de cette entreprise (née sous une forme quasi-coopérative, si ma mémoire est bonne, et devenue ordinaire) pour racheter une proportion non négligeable de son capital, et faire ainsi pression sur l'équipe dirigeante emmenée par Henri (alias Riton) Giscard d'Estaing, l'un des fils de l'ancien président VGE. Les cours du Club sont remontés, et Tapie a revendu ses parts avec moult bénéfice. Que le "Canard" trouve le moyen de donner cette info sans faire le lien avec le fait que VGE soit depuis lors descendu de son olympe et du château d'Estaing pour souffleter les actuels dirigeants d'une UDF qui n'est plus qu'un fantôme, relève d'une cécité dont le "Canard" ne se vante habituellement pas. Tapie a quand même juré la mort politique de Bayrou qui l'a abondamment dénoncé lors de son indemnisation étrange par l'État sur décision politique.

Il n'est pas question pour moi de défendre Bayrou, il est bien assez grand pour le faire tout seul et, comme je l'ai écrit, je suis perplexe sur mon éventuel vote de mars prochain, mais la double imposture de ceux qui se réclament d'une marque commerciale UDF (a-t-on vu qu'un parti politique soit une échoppe ? c'est bien une idée de maquereaux politiques faisandés) et d'une prétendue idyllique UDF nimbée des paillettes de la perfection politique et morale, cette double imposture m'agace, et, moi qui suis adhérent de l'UDF presque depuis son origine, je crois utile de dénoncer l'imposture en rétablissant certaines vérités.

L'UDF, une usurpation, déjà

Dans les années 1960, le Sénat a incarné la résistance à la mainmise du parti présidentiel sur tous les rouages de l'État, rouages politiques en particulier. Gaston Monnerville a incarné le Sénat durant la première décennie de la Ve république avec fermeté et calme. Lorsqu'il a fallu le remplacer, en 1968, il y a eu un très grand nombre de tours de scrutin, et finalement, c'est Alain Poher qui est sorti des urnes.

Alain Poher n'était déjà plus un homme jeune, il était né avant la guerre de 1914-18. On l'a traité de falot et d'un certain nombre d'autres noms d'oiseaux, mais on doit inscrire à son actif la ratification, pendant sa seconde présidence de la république par intérim, en 1974, la Convention Européenne des Droits de l'Homme (CEDH), que la France avait refusé de ratifier jusque-là (on croit rêver). Il ne put la faire ratifier complètement, et dut maintenir une réserve, la peine de mort n'était pas abolie. Après son abolition en 1981, la Convention fut enfin pleinement ratifiée.

La ligne politique qui fit élire Poher président du Sénat en 1968 était complexe. Elle préfigura en fait ce qui allait devenir l'UDF. En 1971, les démocrates de Lecanuet et les radicaux de Jean-Jacques Servan-Schreiber (JJSS), qui en étaient le pivot, se rapprochèrent dans une première confédération, le Mouvement Réformateur. D'eux se rapprochèrent quelques socialistes qui désapprouvaient l'Union de la Gauche et l'alliance du PS avec le PCF (ils finirent dans le Parti Social Démocrate, le PSD, de Max Lejeune puis d'André Santini). Lors de l'élection présidentielle de 1974, cet axe s'élargit : il y avait déjà quelques indépendants (CNI) qui s'étaient rapprochés de Lecanuet dans les années 1960, et ce furent les indépendants de l'intérieur de la majorité présidentielle sortante, les Républicains Indépendants qui, avec Giscard, rejoignirent la coalition.

Giscard faisait ainsi au centre à peu près ce que Mitterrand avait fait à la gauche au congrès d'Épinay : il arrivait avec très peu de militants, encore moins d'électeurs, mais offrait sa dynamique personnelle pour la conquête du pouvoir, et prenait, minoritaire, la tête de la troupe. Les réformateurs avaient un capital électoral supérieur à 15 % (que Bayrou n'a curieusement jamais réussi à reconstituer depuis la présidentielle de 2007), les RI représentaient peut-être 3 ou 5 %, la fronde des 44 députés autour de Chirac amenait probablement les 5 ou 6 points qui ont fait la différence contre Jacques Chaban-Delmas, rival de VGE au premier tour.

Après la victoire de Giscard, seuls les réformateurs et les RI restèrent dans le camp de Giscard, Chirac retourna à son UDR qu'il changea bientôt en RPR en 1976. Le changement de sigle choisi par Chirac et ses amis fut probablement une erreur : en créant l'UDF en 1978, Giscard et les siens parurent retrouver le fil de la légitimité présidentielle. La plupart des électeurs sont très peu attentifs à l'actualité politique et les info leur tombent très lentement dans l'oreille. C'est ainsi qu'il faut concevoir la naissance de l'UDF comme une usurpation, une habile récupération de sigle (de l'UDR à l'UDF).

Un livre sortit, officiellement signé par Giscard, et intitulé "Démocratie Française", qui permit de faire comprendre que l'Union pour la Démocratie Française (UDF) était le parti présidentiel.

L'UDF de Giscard et Lecanuet est morte en 1998, vendue au Front National

Dans un premier temps, la récupération fonctionna plutôt bien. Les élections européennes de 1979 virent la déroute du RPR chiraquien et le triomphe de l'UDF giscardienne, emmenée par Simone Veil. Ce fut pourtant son unique succès, car dans les trente ans qui ont suivi, l'UDF est allée de défaite en déroute et son territoire s'est réduit comme peau de chagrin, jusqu'au maintien sous tente à oxygène organisé par le congrès de Villepinte en décembre 2007.

Dans les années 1980, pourtant, l'UDF porte beau : elle détient une forte majorité de conseils généraux et la présidence du Sénat. Peu à peu, miette par miette, Chirac va grignoter tout cela. Vers 1985, Raymond Barre s'impose comme le candidat naturel de l'UDF. On oublie sa phrase malheureuse et suspecte sur l'attentat antisémite de la rue Copernic, en 1980, et on voit qu'il a laissé les finances de l'État redressées et l'industrie prête pour les restructurations que les nationalisations de 1981 ont permis d'accélérer.

En mars 1986, l'UDF et le RPR font chambre à part pour les législatives qui se jouent à la proportionnelle. Catastrophe : le RPR devance l'UDF et l'addition des sièges du RPR et de l'UDF n'a qu'une voix de majorité à l'Assemblée Nationale. Barre va-t-il voter la confiance à Chirac qui sera pourtant son rival à la présidentielle ? Il fait l'erreur de la voter. Je me souviens d'avoir pensé dès cette époque-là qu'il avait tort. En fait, la hiérarchie de la présidentielle se mettait en place : Barre serait devancé au premier tour par Chirac, et ce dernier le serait au second par Mitterrand, dont il acceptait de devenir le subalterne en devenant son premier ministre. Le seul que le vote arrangeait était Mitterrand, et probablement Rocard.

Toujours est-il qu'on vit à l'occasion de la présidentielle de 1988 se dessiner la vraie et laide nature de l'UDF : en début de campagne, en 1986 et 1987, tout le monde, parmi les élites de l'UDF, pouvait se croire "premier-ministrable", mais à mesure que la campagne se déroulait et que la liste des premiers-ministres potentiels de Barre se raccourcissait, les élites en question, quitte à négocier un gros ministère, trouvaient plus rentables de le négocier avec Chirac, qui avait forcément plus de raison de se décarcasser pour obtenir leurs voix.

Le PSD d'André Santini, liens corses obligent, n'eut même jamais l'idée de soutenir Barre. Les autres composantes de l'UDF se délitèrent progressivement. Il faut dire que l'UDF n'était pas un parti politique, mais une confédération de partis. On disait la "nébuleuse" centriste, tant s'y multipliaient les formations, clubs et autres réseaux. Ses dirigeants n'avaient aucun patriotisme de parti. Ils développaient un patriotisme de réseau, souvent transpartisan. La disparition du MRP, par exemple, au début de la Ve république, avait essaimé ses élus un peu partout : Maurice Schumann (à ne pas confondre avec Robert Schuman) avait fait partie des jeunes de Marc Sangnier, comme Marc Bécam qui fut ensuite maire RPR de Quimper. Robert Schwint, inamovible maire PS de Besançon durant une période très longue, venait lui aussi du MRP. Et bien entendu, ce qui restait des cadres du MRP avait servi de soubassement à la création du Centre Démocrate par Jean Lecanuet en 1963. Ces liens de réseaux étaient infiniment plus précieux aux gens de l'UDF que leur propre parti.

Chirac s'emparait aussi des collectivités locales, une par une : tel maire UDF était maintenu en poste à condition d'accepter de céder des délégations-clefs au RPR. La sanction, s'il refusait, était qu'il perdait sa ville, fût-ce au profit de la gauche : depuis 1981, on savait que Chirac pratiquait la politique du pire. De surcroît, il tenait les finances des agriculteurs et la FNSEA, ce qui lui permettait de grignoter la majorité absolue de l'intergroupe UDF au Sénat. Enfin, il avait offert des prébendes aux leaders centristes : parmi les pensionnés de la Ville de Paris, on trouvait par exemple le nom de Lecanuet.

L'élection de René Monory à la succession d'Alain Poher, devenu aveugle et quasi-grabataire, en 1992, fut le dernier feu d'une confédération dont la crise des régionales de 1998 précipita la fin.

La fin de la première UDF, le rôle de Pasqua et du Front National

Lors de l'élection présidentielle de 1995, Giscard, Barre et Monory s'étaient rassemblés pour soutenir la candidature de Chirac. Le soutien de celui-ci à l'adoption du traité de Maestricht, en 1992, avait probablement été le prix de ces ralliements, ou du moins, la preuve. En face de Chirac, le vrai adversaire n'était pas Balladur, mais Pasqua.

En effet, on disait que le fils de Pasqua était très proche des réseaux du Front National (FN), et que, si le FN avait son siège dans les Hauts-de-Seine, ce n'était pas par hasard, car, indirectement mais massivement, le FN était soutenu par le conseil général de ce département, dont le président n'était autre que Charles Pasqua. De fait, Paul Graziani (autre corse) et Pasqua dominaient le département depuis 1982, date à laquelle les lois de décentralisation lui avaient conféré l'énorme budget que chacun connaît aujourd'hui. Le FN ayant prospéré à partir de 1983, on peut imaginer le lien de cause à effet que les gens faisaient.

Pasqua avait essayé de s'emparer de la présidence du Sénat en 1992, peut-être avec l'aide de Pierre Bordry, alors directeur de cabinet du fantomatique Poher, mais Monory avait réussi à conserver le poste à l'UDF.

Le ralliement des principaux leaders historiques de l'UDF à la candidature de Chirac de 1995, pendant que la jeune génération, de Bayrou à Léotard en passant par presque tous les autres, s'enrôlait chez Balladur, scella la première fin de l'UDF, qui était désormais incapable de présenter un candidat à l'élection présidentielle.

Le divorce fut consommé en 1998 : les élections régionales, à la proportionnelle intégrale, virent des majorités relatives de la droite RPR-UDF dans trois régions, qui ne pouvaient aboutir à des présidences de régions de droite qu'avec les voix des élus du FN. C'était le cas en Picardie, en Rhône-Alpes et en Languedoc-Roussillon. La composante libérale de l'UDF accepta les voix du FN (sauf les modérés emmenés par Léotard et Robien, qui découpa sa carte de son parti en direct à la télé), cependant que la composante centriste les refusa (sauf Charles Baur en Picardie et Claude Goasguen), ainsi que les radicaux.

Dans la foulée, l'intergroupe UDF perdit la majorité absolue au Sénat, et le chiraquien (merde, je ne me rappelle plus son nom, ni même sa gueule) succéda à Monory (au grand dam de Pasqua, qui aurait bien profité de la disparition de l'UDF pour placer l'un des siens à la tête de la Haute Assemblée, vu qu'il se préparait à une candidature présidentielle en 2002, pour laquelle il avait tout fait pour rendre le FN incontournable et lui-même seul allié possible du FN, seul donc à pouvoir faire gagner ce qu'il nommait la droite au second tour en 2002...).

L'UDF, la première, la vraie, était morte. Il en restait un rogaton, encore présentable en terme d'élus, mais retrognolé, qui devint la Nouvelle UDF.

La nouvelle UDF, l'honneur retrouvé des centristes

En ayant pour fait originaire le refus d'alliance avec le FN, les centristes de la Nouvelle UDF pouvaient marcher le front haut. Mais la dynamique née en 1978 s'était entièrement brisée, et la réalité politique ne pouvait manquer de les rappeler à la modestie. En 1999, l'élection européenne présenta deux droites à égalité, et le centre doit en difficulté. On ne sait pas si Séguin a délibérément sabordé sa campagne euroipéenne pour aider son ex-allié Pasqua qui s'y présentait contre lui, ni si Sarkozy a joué entièrement le jeu, mais le résultat est que le RPR, réparti en deux listes, dépassait deux fois 10 %, proche des scores du FN et de l'UDF nouvelle emmenée par Bayrou.

J'étais alors élu du XVIe arrondissement de Paris et, bureau de vote par bureau de vote, j'avais constaté qu'une partie des électeurs de l'UDF, dès ce moment-là, s'était portée sur la liste écolo emmenée par Daniel Cohn-Bendit (DCB). La porosité des deux électorats était très nette, ce que DCB a su exploiter lors des dernières élections européennes en 2009, qu'il tente de prolonger aux régionales de 2010 (mais la situation est-elle la même ?). Ce n'était donc pas sottement que Bayrou avait tenu à doter son Force Démocrate (successeur du CDS en 1995) d'une vraie aile écologiste.

Le trop faible score de Bayrou aux Européennes passa, parce que les élus n'avaient pas de solution de repli. Mais le score de Bayrou à la présidentielle de 2002 fut encore pire, et la création de l'UMP à cette même époque offrit l'occasion à la plupart d'entre eux de quitter le navire qui faisait eau de toutes parts. Outre quelques indécrottables bayrouistes ou centristes utopiques, et quelques députés émanant de systèmes locaux très efficaces, ne restèrent là que ceux des élus qui souffraient, disons-le, d'une chiracophobie aiguë. Ces mêmes chiracophobes sont la majeure partie de ceux qui, dès avant le premier tour de l'élection de 2007, ont rejoint Sarkozy, qui avait réussi à faire la peau à Chirac.

Entre-temps, l'idée était venue à Bayrou, ou à son entourage, de tourner casaque. Je me souviens d'une conversation avec Éric Azière, qui est proche de Marielle de Sarnez, ce devait être en 2005, au stade Jean Bouin à Paris. Il traçait les perspectives d'avenir, j'en mesurais mal les conséquences à cette époque : désormais, le parti de centre droit serait l'UMP (putain, qu'est-ce que ce serait s'ils étaient l'extrême droite !), et Bayrou... eh bien, ce n'est que plus tard que j'ai entendu parler de "stratégie à l'Italienne". Il s'agissait de se calquer sur une méthode qui avait permis à Romano Prodi de prendre le pouvoir par une vaste coalition allant du centre chrétien jusqu'à une gauche très à gauche, très très à gauche. L'idée du Parti Libéral Démocrate anglais (qui, du centre, déborde la gauche par la gauche) rejoignait la même stratégie, mutatis mutandis, ou du moins offrait une variante possible du même esprit.

Le passage de Bayrou à gauche ne pouvait se faire sans étapes. La création du Mouvement Démocrate fut la première de ces étapes.

L'avant-dernier congrès de l'UDF à Villepinte et la création du Mouvement Démocrate (MoDem)

L'UMP détenant le Sénat et Chirac tenant la FNSEA, la légitimité historique héritée de la première UDF avait tout à fait disparu : Chirac avait fait gagner l'Europe (grande idée commune de la nébuleuse UDF) au référendum de 1992, la décentralisation (autre grande idée commune) avait été organisée par Mitterrand et la bipolarisation avait peu à peu gagné la vie politique jusque dans les communes de taille modeste. Les réseaux démocrates-chrétiens, radicaux-socialistes, ou autres, avaient perdu leur socle sociologique naturel. Il ne restait donc plus rien de cette première UDF.

Giscard lui-même s'était éloigné pour une raison tout à fait futile : Bayrou avait refusé de prendre une de ses maîtresses (dont on disait qu'elle avait un enfant de lui) sur sa liste des Européennes de 1999.

La présidentielle du printemps 2007 s'était faite encore sur l'étiquette UDF, mais les députés avaient quitté le navire bayrouiste entre les deux tours. Au passage, toujours à propos du "Canard" d'aujourd'hui, lorsqu'on prête à Sarkozy la phrase qu'Hervé Morin a attendu l'entre-deux-tours pour rejoindre l'escadre sarkozyste, le "Canard" ne me paraît guère critique. Soit ses info sont fausses, soit (ce qui est plus probable), il entre dans le jeu de la manœuvre tentée par Sarkozy pour récupérer des miettes de ce qu'il reste d'électorat de centre droit à Bayrou.

En effet, on sait que Morin a quitté le sillage de Bayrou pour se placer dans celui de Sarkozy dès les environs du 20 mars 2007. C'est le moment où il devait faire une conférence pour soutenir Bayrou devant les milieux d'affaires londoniens, et où il n'y est pas allé. Le 20 mars est le moment où, comme par hasard, Bayrou a commencé à stagner dans les sondages, et où l'on a su qu'il ne gagnerait pas. Très fidèle à ce qui a été la réalité de l'UDF pendant trente ans, Morin a été le premier à aller à la soupe. Il a attendu l'entre-deux-tours pour emmener avec lui le plus possible de députés.

C'est évidemment Rothschild, patron du cheval en France, qui a été le lien entre Sarkozy et Morin, puisque Morin, comme Bayrou, élève des chevaux. Et d'ailleurs, entre les deux tours, pour marquer la nouvelle situation politique, Sarkozy n'est pas allé inaugurer les chrysanthèmes à Épaignes : il s'est fait filmer à cheval à grand renfort de caméras de télévision...

Ce qui est curieux, dans cette affaire, c'est que les réseaux de Sarnez sont très liés aux intérêts équins, puisque son ex-mari est maire de Deauville après avoir dirigé la société de vente de yearlings à Deauville pendant plusieurs années, et que leur collaboration avec Bayrou a beaucoup aidé celui-ci d'abord auprès de feu Jean-Luc Lagardère (patron du cheval avant Rothschild) puis auprès de Rothschild. Il est vrai que Rothschild, lui, avait de solides raisons de soutenir Sarkozy, notamment par leur soutien commun à la cause de l'État d'Israël.

Cette fois, fin 2007, il ne restait plus qu'une poignée d'élus, quelques poignées de cadres, l'UDF était morte de sa belle mort. Mais le souhait de Michel Mercier (dont on disait déjà qu'il s'était rapproché de Sarkozy) et de Jean Arthuis aboutit à maintenir l'UDF sous tente à oxygène et sous respiration artificielle, Bayrou en étant le président avec une équipe resserrée où Arthuis gardait un pied (d'ailleurs légitime).

Lors de ce qui devait être l'avant-dernier congrès de l'UDF, nous avons décidé qu'à la fin de l'année 2010, un dernier congrès serait réuni, qui se prononcerait sur l'éventuelle absorption de l'UDF par le MoDem.

Agiter le spectre de l'UDF pour effrayer les électeurs de Bayrou

On comprend bien que la manœuvre actuelle a le double but d'une part, d'attirer à Sarkozy les électeurs de Bayrou effrayés par le glissement de leur parti du centre pur et dur vers la gauche, et d'autre part, de repousser vers la gauche (ou plutôt vers les Verts) les électeurs de Bayrou qui détestaient l'UDF et qui pensaient que le MoDem était un parti soit social-libéral, soit social-démocrate, soit social-écologiste, soit social-démocrate-écologiste.

Pour attirer le centre droit, on fait croire que le Nouveau Centre se rebelle, que c'est the return of 2006, quand Bayrou ne vota pas le budget de la droite. Seulement, dans le même temps que cette stratégie est organisée, elle est insupportable à ceux qui l'ont organisée : au NC qui l'assume mal, et à Sarkozy qui, tout en l'agitant d'une main, la retient de l'autre, de peur que l'artifice ne devienne la réalité et que quiconque ose lui faire de l'ombre.

J'ai dit pourquoi Giscard a accepté de se mêler à la mascarade. Tout ceci n'a guère de consistance et ne trompera pas grand monde, sauf quelques grand-mères un peu assoupies qui, de toutes façons, auraient voté Sarkozy au deuxième tour.

Voilà donc Bayrou avec sa doctrine flottante, son parti en pâte à modeler, sa stratégie douloureuse et l'océan qui tangue. Et moi, mine de rien, je m'aperçois que, après avoir traité des écolos, me voici ayant analysé (voire psychanalysé) les centristes. Diable, ça m'ennuierait beaucoup d'avoir à continuer à décrire le prisme électoral, d'autant plus que j'ai une intention assez faible de voter.

Quand au "Canard", je le remercie quand même d'avoir indiqué que la subvention accordée par la Ville de Paris au Stade Français, l'équipe de rugby parisienne, était en principe conditionnée par des séances éducatives dans les écoles des quartiers fauchés, ce qui s'est résumé à une séance (une seule) ... avec des écoles privées.

Mais j'aimerais bien cesser d'avoir l'impression de lire radio-Sarko en lisant les brèves de la deuxième page.

23/09/2009

Internet est-il la couveuse de la presse nouvelle ? (Bakchich).

La presse se meurt, la presse est morte. Car toute presse est comme l'herbe, comme la fleur des champs... dirait Bossuet.

Or voici que toute la presse ne meurt pas : le Canard Enchaîné prospère, lui qui n'a jamais eu la moindre pub et n'a jamais vécu que sur son contenu. Et d'Internet naissent, un par un, des titres débarrassés des logiques publicitaires et destinés à ne vivre que par leur contenu. "Vendredi" est né sur l'idée d'un effet miroir de la Toile (il paraît qu'ils préparent une nouvelle formule), "Siné Hebdo" est né sur un coup de sang et devient un vrai hebdo satirique après plus d'un an d'existence, et puisque c'est ainsi que la presse peut vivre, les journalistes du site Bakchich.info ont décidé de lancer un "Bakchich Hebdo qui, matériellement, ressemble beaucoup à Siné Hebdo. Longue vie à lui.

Et puisque c'est le journaliste Daniel Carton qui occupe la première colonne de la deuxième de couverture, c'est l'occasion de revoir l'excellent entretien de l'été 2007, Daniel Carton et Quitterie :

 

09/12/2008

Le traitement de l'information.

Pourquoi les médias se laissent-ils faire ?

Quitterie Delmas dénonce ce soir à juste titre l'esprit moutonnier et la soumission des médias au point de vue unique énoncé par les autorités politiques. Pourquoi tant de conformismes ? Pourquoi si peu d'investigations ? Pourquoi accepter d'être les jouets, les instruments, du pouvoir ?

C'est un autre aspect sous lequel la question de France Télévisions et de son indépendance mérite d'être vu, quoiqu'il ne concerne pas que la télévision, mais l'ensemble des médias, publics et privés confondus, ce qui est donc en partie un autre sujet que ma note de ce matin.

30/11/2008

Internet les rend-il fous ?

L'information circule un peu, pas assez, on la retrouve aujourd'hui sur le nouvel agrégateur Aaaliens (non ce n'est pas un site d'Eeextra-terrestres) : l'Italie songe à étouffer purement et simplement Internet sous le régime de la presse qui, en Italie, impose une déclaration préalable. Les blogs ne faisant pas cette déclaration sont de facto illégaux.

À lire, donc, comme une perle de plus sur la couronne de la bêtise et de la malveillance de la part paléolithique du monde politique.

26/11/2008

La polémique sur le "Canard Enchaîné".

Avec la parution d'un livre cosigné par Laurent Valdiguié, patron de Paris-Match, le "Canard enchaîné" fait l'objet d'une polémique ces jours-ci. Je n'ai pas lu le livre, j'ai lu en revanche les dénégations pas toutes précises (et pour cause, s'agissant notamment de la protection de ses sources, le Canard ne pourrait démentir vraiment qu'en citant ses vraies sources, ce qu'il ne peut faire) qui figurent à la une de l'hebdomadaire satirique. Il me paraît nécessaire de formuler les mises au point suivantes :

- depuis des décennies, le Canard est alimenté par des sources proches de ceux que cet hebdomadaire épingle. Rivalités d'entourages sont l'occasion de "vendre" des info au Canard. Ce qui vaut à l'échelle des cabinets ministériels vaut aussi entre les ministres, tel qui voudrait Matignon va s'employer à "fuiter" le plus possible au désavantage de son rival, et ainsi de suite.

- il y a deux types d'informateur du "Canard" : les réguliers et les occasionnels. Les réguliers doivent bien y trouver un avantage (pour certains, ce n'est heureusement qu'un avantage moral : la vérité). Les occasionnels ne sont pas toujours mûs par des motifs très nobles. Charles Pasqua (qui s'y connaît) a traité jadis le "Canard" de feuille de chantage, car un informateur occasionnel, qui donne la moitié de son info au "Canard", se réserve évidemment le droit de donner l'autre moitié, à moins que...

- certaines enquêtes du "Canard Enchaîné" sont irremplaçables dans la momification de l'info que connaît la France en ce moment, cet hebdo est l'un  des derniers à faire encore de telles enquêtes.

Alors bien entendu, à partir du moment où la majorité des fuites, structurellement, émanent du gouvernement ou de l'Élysée, la question de la manipulation se pose. Seulement voilà : le patron de Paris-Match qui dénonce l'éventuelle collusion du "Canard Enchaîné" avec Sarkozy, c'est l'hôpital qui se moque de la charité...

Et rien que pour ça, ses accusations sont louches.

21/05/2008

L'indépendance de la presse commence par celle de l'AFP.

L'Agence France Presse (AFP) est née indirectement de la nationalisation de la partie information de l'agence Havas. C'est la raison pour laquelle Bolloré, actionnaire de référence d'Havas, aurait bien aimé mettre la main sur elle. De là peut-être les tentatives de déstabilisation dont elle fait l'objet.
 
Sa création fait partie des innovations utopiques de la Libération, en 1944, un temps où, dans le sillage des projets du Conseil National de la Résistance, le service public était érigé en véritable idéal de réalité, éthique, impartial, libre, tourné vers l'intérêt général.
 
Toutes notions à peu près étrangères aux amis de Sarkozy.
 
L'AFP, comme d'autres médias, a été durement attaquée par celui-ci ces dernières semaines. C'est pourquoi elle appelle à un rassemblement devant ses locaux, cet après-midi à 15 heures. Je crois que j'irai faire un tour.

10:04 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, presse, indépendance, afp, ump, sarkozy | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

10/05/2008

Indépendance de la presse : les journalistes entre eux.

Décidément, le site "Bakchich" dérange. est-ce la fait d'avoir gagné son procès en diffamation contre David Douillet ? Est-ce celui de révéler quelques affaires douteuses de la majorité actuelle (et pas seulement, d'ailleurs) ? Voici qu'on apprend qu'une journaliste de Bakchich s'est vue retirer son accréditation à l'Assemblée Nationale au motif qu'elle avait mis "mal à l'aise" la ministre des finances, Marie-Chantal Lagarde. Lagarde a des vapeurs, c'est la presse qui trinque. Ou bien est-ce le président de la République qui, ayant oublié Bakchich dans sa diatribe de l'Élysée, a trouvé moyen de réparer cet oubli coupable ?
 
Pour la peine, allez donc faire le quiz de "Bakchich" : sa conclusion est édifiante. 

09:27 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : information, presse, liberté, bakchich | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

10/04/2008

Solidarité avec les journalistes du "Monde".

Au moment où les journalistes du "Monde" se préparent à lutter contre une stratégie que beaucoup jugent suicidaire (je rappelle les propos de Patrick Roger que j'ai relatés dans une précédente note il n'y a pas si longtemps), contre des licenciements en nombre, je tiens à réaffirmer mon entier soutien à la presse en général, à la tradition journalistique que beaucoup de journalistes du "Monde" veillent à faire vivre.
 
Solidaire. 

19:19 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : information, presse, liberté, journalistes | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

21/02/2008

Quelque chose en lui de Britney Spears.

Juste un titre pour signaler un article à la fois affligeant, désopilant et humiliant sur Betapolitique et sur le président Sarkopathe, en qui un journal anglo-saxon voit même "quelque chose de Britney Spears", la pauvre.

18/01/2008

Niger : les deux journalistes en liberté sous caution.

On sait l'histoire de ces deux journalistes qui, au Niger, pour faire leur métier, ont triché avec une autorisation de déplacement pour aller dans une zone interdite par les autorités. Les deux hommes incarcérés viennent d'être libérés sous caution

12:04 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : presse, liberté, niger | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

15/10/2007

Liberté de la presse : une pétition.

Ce n'est pas du corporatisme, mais la défense de l'une de nos libertés fondamentales : les journalistes, les cinq centrales syndicales de journalistes, les sociétés des journalistes aussi, tout le monde journalistique se lève pour réclamer des garanties. Outre une pétition, un rassemblement est prévu le 5 novembre. Pour plus d'info, le point rouge de la Télé Libre.
 
Oh, on peut dire que c'est leur faute, qu'ils n'ont qu'à produire une meilleure info et qu'alors leurs canards se vendront mieux, je ne crois plus que ce soit vrai. Bien sûr, ce cercle vicieux existe et il est soigneusement entretenu par les décideurs de la presse, possesseurs des journaux, financiers mouillés en politique, mais les journalistes sont ici victimes d'une logique économique pervertie et non complices, sauf exception de certains directeurs de rédaction et de certains journaleux encartés. La vérité est que les journaux sont des rouages d'une logique financière et politique, très "à la française", dans un état trop puissant, où tout émane de la cour du monarque pseudo-républicain. Détenus par les amis du pouvoir, ils ont pour mission d'obéir au pouvoir et de respecter les codes d'un système qui a choisi son organisation, y compris sa propre (et sage) contestation.
 
On a cru qu'Internet suffirait à compenser cette lacune. La dernière campagne présidentielle a prouvé que la pluralité des moyens d'info perdurerait et qu'Internet s'ajoute à la presse sans l'éliminer, qu'elle crée une nouvelle branche de presse.
 
Il est vrai que la presse payante est en très grave crise, que les gratuits et Internet n'y sont pas pour rien, ce qui crée une réalité irréversible et en partie réjouissante et prometteuse de perspectives nouvelles pour la profession, mais la télévision, elle, se porte bien et le scandale y est permanent. Soutenons donc les efforts des journalistes, une profession qui bouge.

30/07/2007

Présomption d’innocence : une régression de plus.


Le « Télégramme » est un journal parmi d’autres, une écharde de l’arbre des quotidiens du groupe Dassault après en avoir été une du groupe Hersant. La direction opérationnelle de cette publication ordinaire est assumée par les héritiers de ses fondateurs, les frères Coudurier.

Sur place, en Bretagne, Ouest-France a la réputation d’être lu par la gauche et cette forme de la gauche que constitue pour la vraie droite le centre droit et le centre. Les réac raffolent du « Télégramme » qui n’est pourtant qu’une publication un peu plus laïque qu’Ouest-France, avec une ligne éditoriale ondoyante, orientée vers Sarkozy comme presque toute la presse écrite depuis deux ans.

Ce journal ne mériterait aucun commentaire s’il ne venait de consacrer toute sa une, d’un coup, à la photo d’un tyran déchu, surchargé d’une formule sans appel : « La chute de “Néron“ ». Néron est, une phrase le signale un peu plus bas, le surnom donné, paraît-il, par Mme Chirac à Dominique de Villepin.

Voici donc Villepin tombé.

Quand ?

Jamais.

Eh non : il vient d’être mis en examen et, pour autant que l’on ait compris les événements récents, c’est en résultat de ses propres manœuvres qu’il l’a été : il avait refusé de s’exprimer avant d’avoir pris connaissance de son dossier ; or pour avoir cette connaissance, il fallait qu’il fût en examen. C’est une règle de procédure qui a conduit d’autres personnalités à la même solution dans le passé ; donc rien d’extrême.

D’ailleurs, même s’il avait subi cette inculpation, Villepin n’aurait pas été coupable pour autant ; voilà le principe de la présomption d’innocence : tant qu’un juge ne l’a pas déclaré coupable, cet homme est innocent.

Où donc est sa chute ?

À la une du « Télégramme ».

C’est un pur scandale. Une honte. Notre presse n’en finit pas de se vautrer dans sa propre boue.

Quant au fond de l’affaire, on doit remarquer que la petite affaire, celle de la dénonciation calomnieuse (une scène de mauvaise opérette, une guignolade pathétique), a complètement obéré la vraie, celle du rôle que pourrait effectivement jouer l’organisme Clearstream dans le blanchiment d’argent mafieux.

Reparlons de Denis Robert, n’oublions pas de nous étonner pour la millième fois de l’étrange acharnement qu’il subit de la part d’institutions de notre État français et interrogeons-nous sur la définition même d’une mafia : une collusion d’intérêts qui englobe des brigands « officiels » et toutes sortes d’infiltrés et de corrompus dans tous les rouages de l’État. Les acharnés contre Denis Robert seraient-ils aussi les infiltrés de la mafia dans l’État ?
Mais alors, se pourrait-il que fût vraie la rumeur qui court et qui affirme que, parmi les vrais mis en cause de la première affaire Clearstream (celle dont un jour Villepin ministre a été informé par un esprit attentif), il y ait eu de ces fameux hauts fonctionnaires qui entrent dans la définition même de l’organisation mafieuse ?

Et dès lors, la défense de Villepin, qui a indiscutablement mis en branle une mécanique d’enquête parallèle aux institutions normales de l’État, cette défense ne serait-elle pas justifiée et pertinente ?

Et si c’était vrai ?

Et s’il avait vraiment contourné les voies ordinaires pour éviter que son enquête ne passât par les mains de ceux qui avaient pour but évident de la combattre ?

Pourquoi cet aspect de l’affaire n’est-il jamais évoqué ?

Je n’ai pas d’actions chez Villepin, je n’aurais certainement pas voté pour lui s’il avait été candidat à la présidence, mais je trouve indigne de notre république, et tout à fait suspect, que l’on ne s’exprime qu’à charge contre lui.

La dénonciation calomnieuse de Sarkozy est l’une des anecdotes politiques les plus pitoyables que j’aie lues et entendues. La manie du « général » Rondot de garder des traces (authentiques ? - pourquoi pose-t-on si rarement cette question ?) de ses conversations officieuses, l’effervescence primesautière de M. Gergorin qui se proclame corbeau, puis accuse (sa parole…) Villepin d’avoir nourri sa correspondance, après avoir été l’un des rouages d’un prétendu complot aberrant et puéril, invraisemblable à ce point de ridicule, mais prétendument monté par le même Villepin, tout cela est digne d’un roman pour tout petits enfants tordus.

Et peut-on croire que Sarkozy n’ait rien su ? Bien sûr que si, il savait, dit-on par ailleurs. Alors, et si c’était lui qui avait tendu un piège à Villepin en lui soufflant (faisant souffler) l’idée de cette machination grotesque ? Et si c’était lui qui avait poussé la roue vers le précipice ?

Après tout, tout est possible.

C’est pourquoi, dans cette nébulosité persistante, la prudence devrait inspirer nos journalistes et si leurs employeurs n’étaient pas mus par la plus manifeste servilité et ne les incitaient à trahir leur mission de militants de l’info, ce serait un grand repos.

Je voudrais qu’ils s’intéressent un peu plus à la vraie affaire Clerstream et un peu moins à la pantalonnade qui déshonore notre classe politique depuis des mois.

22/06/2007

Liberté de l'intelligence.

Les dernières affaires relatives au contrôle des médias et le débat autour de l'entretien accordé par Daniel Carton à Quitterie Delmas renvoient à la même question : un commentateur peut-il être libre et impartial ?
 
Il doit l'être. C'est son obligation, sauf dans ce qu'on nomme la presse d'opinion.
 
Mais cette impartialité n'est-elle pas un leurre ?
 
Voilà un sujet de bac philo par excellence.
 
Rappelons-nous les termes juridiques qui peuvent nous guider dans ce domaine. Parmi les textes juridiques relatifs à l'expression de la volonté qui est la manifestation de la liberté de l'individu en société, on parle volontiers, depuis le code Napoléon, de "consentement libre et éclairé".
 
Ce consentement libre suppose par exemple que le jour d'un mariage, le fiancé ne porte aucune arme qui puisse suggérer qu'il exerce une contrainte sur la fiancée.
 
Ce consentement éclairé renvoie à deux miroirs : celui qui reçoit et celui qui émet.
 
Éclairé suppose que l'on soit d'abord éclairable. C'est au nom de cette notion que les incapables mentaux sont écartés des actes juridiques parfois les plus élémentaires (sauf d'ailleurs du vote), c'est aussi au nom de cette notion qu'une personne qui n'a pas toute sa tête au moment de commettre un forfait doit en être jugée innocente. Un amoureux passionné qui tue un rival, on le sait, a longtemps obtenu l'indulgence des jurys, même si aujourd'hui le caractère français est devenu plus prosaïque et moins perméable aux exaltations du romantisme, comme beaucoup d'illusions se sont enfuies sur l'état amoureux et ses stades.
 
Éclairé suppose aussi que l'on ait reçu la formation ou l'information nécessaire à la balance du jugement. Un marchand de voitures qui ne signalerait pas que le véhicule qu'il vend est une occasion et non une première main n'éclairerait pas son client. On note au passage que, dans les années 1990, le devoir d'informer a beaucoup augmenté pour les médecins (et surtout les chirurgiens) et les avocats, dont le rôle expose particulièrement les clients et patients.
 
Pour en revenir à nos journalistes, on voit bien que leur mission est donc d'éclairer ce qui est obscur. Ils doivent donner aux citoyens les info qui permettent à ceux-ci d'évaluer hommes et situations en connaissance de cause, les info que, d'où ils sont, les citoyens ne sont pas en mesure d'obtenir seuls, même grâce à l'outil qu'est désormais Internet.
 
Or pour donner ces info, il faut qu'ils les recueillent et pour qu'ils les recueillent, il faut qu'ils en aient l'envie et la liberté.
 
S'ils sont liés par des connivences d'intérêts au pouvoir politique, par exemple, auront-ils envie de dénicher les bonnes info ?
 
Et s'ils sont soumis au pouvoir politique ou économique, en auront-ils la liberté ?
 
Ceux qui défendent le système actuel d'endogamie entre les différents milieux de pouvoir le font presque toujours avec un argument qu'ils jugent imparable : l'impartialité, ça n'existe pas ; tout journaliste est forcément partisan, il pense et son opinion influe sur ce qu'il rapporte.
 
On a beau rétorquer que, si partisan soit-il, un bon journaliste peut s'effacer devant son sujet car le seul critère qui le guide est, lui, parfaitement objectif : qu'est-ce qui est une info et qu'est-ce qui n'en est pas ?
 
Une info, ce n'est pas discutable. Il y a des info plus ou moins importantes, plus ou moins éclairantes, mais une info, ce n'est pas subjectif, ça correspond à des critères intangibles que toutes les écoles de presse enseignent et auxquels les journalistes devraient pouvoir être toujours fidèles.
 
Dès lors, la question de l'impartialité du journaliste ne se poserait pas et il serait absurde et injuste d'avoir écarté Alain Duhamel des émissions politiques de la chaîne France 2 s'il est un bon journaliste : sa matière n'est pas subjective.
 
Malheureusement, et c'est l'enjeu du livre de Daniel Carton, la conception objectiviste de l'info a peu cours en France dans le domaine politique, on l'a d'ailleurs bien vu lors de la récente campagne présidentielle.
 
Et ce qui est intéressant dans les critiques que les internautes ont adressées à l'interview sur AgoraVox, c'est que Quitterie Delmas était mal placée pour critiquer ce système puisqu'elle en fait partie et qu'elle y est active, l'existence même de l'interview étant invoquée comme preuve de cette activité.
 
On mesure alors le vertige que donne cette mise en abîme de la critique contestée au nom de son auteure.
 
Et cependant, ce qui reste, c'est bien le résultat : la presse a peu fait écho au livre de Daniel Carton et, en le faisant connaître, Quitterie Delmas a bien accompli son devoir de citoyenne, à la fois comme actrice de la politique et comme électrice. Elle a prouvé qu'elle n'était pas prisonnière de la branche sur laquelle on l'accusait d'être assise et qu'elle désignait aux dents de la tronçonneuse.
 
Elle a donc bien joué un rôle de journaliste. Elle a même réinventé l'origine et la substance de cette notion : comme le dit Daniel Carton dans l'interview, "le journaliste a pour mission d'instruire". C'est son rôle social. Sa fonction dans la démocratie.
 
C'est l'occasion pour moi de citer une fois de plus Victor Hugo lorsqu'il dit que "quand tous ont accès aux lumières du savoir, alors est venu le temps de la démocratie".
 
Je cite ce texte en général pour dire qu'il n'y a pas de démocratie sans militantisme du savoir ; il n'y en a pas non plus sans militantisme de l'information qui est l'autre face du savoir.
 
C'est cette même et juste vision militante que défend Daniel Carton et c'est également cette même vision que Quitterie Delmas a servie par son interview sur AgoraVox qui mérite bien son titre de "média citoyen", locution qui devrait être redondante et qui, hélas, ne l'est pas. 

21:28 | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : presse, liberté, quitterie delmas, politique | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Solidarité avec "Les Échos".

Nicolas Sarkozy a déjà exercé une emprise quasi-dictatoriale sur la presse et les médias pendant la récente élection présidentielle. Il manquait cependant un quotidien à son parterre : "Les Échos". Voici donc le groupe britannique propriétaire de ce journal qui le vend et, pour l'acheter, on retrouve Bernard Arnault. Sans commentaire.

J'exprime donc mon entière solidarité avec les journalistes des "Échos".

Il est urgent que soient restaurés les principes définis en 1944 par le Conseil national de la Résistance (CNR) pour garantir la liberté et l'indépendance de la presse.

Au passage, j'ai signé la pétition contre la suppression de l'émission Arrêt sur Image, une vraie émission de service public, sur France 5. 

12:50 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : presse, politique, économie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

09/02/2007

Charlie Hebdo.

Je m'aperçois que j'ai oublié de dire que je soutiens aussi Charlie Hebdo. Leur intention n'est pas contre l'Islam, mais pour la liberté, me semble-t-il, liberté de caricaturer même les religions. Et c'est en ce sens que je les appuie.

13:45 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : liberté, presse | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

03/02/2007

Pages Culture de "Marianne".

Si l'on se rappelle que Ceaucescu et Sarko avaient le même prénom, Nicolas, on sourira beaucoup à l'édito des pages culturelles de l'hebdomadaire "Marianne" cette semaine.

Joseph Macé-Scaron y épingle quelques ex-Nouveaux Philosophes, beaucoup moins nouveaux et plus du tout philosophes, qui soutiennent le candidat de droite à l'élection présidentielle : Glucksmann et Bruckner. Glucksmann soutenait Barre en 1988 ; s'il porte autant chance à son champion, la liberté peut dormir tranquille. Quant à Bruckner, il déshonore la pensée, mais à vrai dire, c'est toute la partie émergée de Grasset qui semble mobilisée, de gré ou de force, pour Sarko. Appartenance au groupe Lagardère oblige ? Mais alors, où est la liberté ? Où la liberté des auteurs ? Où la liberté de ceux qui incarnent l'idée même de la liberté ?

Revoici donc les plumes jonchant les pieds du trône. Revoici la pensée à genoux. Revoici l'idée prosternée. Revoici la littérature de courtisans avide de prébendes, qui (comme disait Hugo) "chatte aux pieds des forts, pour le faible est tigresse".

Revoici la honte qui fait que depuis cinquante ans, la littérature française n'existe plus.

Revoici la lâcheté, la soumission, la bassesse.

Et le lecteur, ligoté, impuissant, constate. Devra-t-il de nouveau durant des années avaler, se laisser gaver par d'indigestes auteurs sans vrai talent, par le simple fait que ces auteurs, ayant eu l'ignominieuse modestie de se placer dans la main des puissants, reçoivent en retour l'appui de tous les moyens médiatiques mobilisés pour eux comme ils le sont dans l'actuelle et scandaleuse campagne présidentielle ?

Tremble, lecteur.

Et cramponne-toi à la blogosphère : la liberté ne mourra pas.

13:55 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Blogosphère, liberté, presse | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook