03/03/2009
"Slumdog millionaire" : Gavroche chez Jean-Pierre Foucault.
Le film multioscarisé méritait-il l'engouement qu'il a suscité ? Je ne trouve pas. Car ceux qui ont cru faire une sorte de bonne action compassionnelle envers l'effrayante misère indienne se sont laissés avoir par un tour de passe-passe télévisuel.
Bien sûr, on voit dans "Slumdog millionaire" les océans d'immondices sur lesquels des dizaines de millions d'enfants de toutes les parties pauvres du monde vivent. J'en ai vu en Haïti, c'est indescriptible, cela valait mieux en tout cas que la carte postale fournie par Danny Boyle qui n'effleure qu'à peine son sujet.
Bien sûr aussi, on voit et on découvre dans ce film l'Inde nouvelle, celle qui se développe et qui, à l'emplacement de ses gigantesques bidonvilles, édifie (avec de l'argent douteux) des gratte-ciel. Ainsi Bombay devient-il Mumbai comme s'il suffisait de changer le nom des choses pour les changer tout à fait.
Une Inde qui se souvient du temps où ses gamins miséreux, misérables, (ont-ils subitement cessé de le faire ?) mendiaient dans les rues et chapardaient dans les couloirs.
Mais ce qu'on découvre surtout, c'est la télévision. Que le pivot du film soit l'émission mondialement connue "Qui veut gagner des millions ?" en dit assez long sur l'imposture. Et quand on voit, vers la fin, dans un superbe effet de manche, que dans le moindre bistrot, sur le moindre tas d'ordures, au coin de la moindre rue, tous les pauvres sont tournés vers leur écran de télévision où l'un d'entre eux, subitement, va passer de l'autre côté, et devenir millionaire, et quand on voit toute leur joie, comme si l'entrée de l'un, un sur des millions, dans le camp de ceux qui peuvent se payer des millions de gens, on se dit "Voilà où il nous a menés : il nous a montré la misère mais ouf, c'est fini, tout rentre dans l'ordre, ce n'était qu'un mauvais rêve, le pauvre devient riche et les pauvres sont contents, dormez en paix, braves gens, vive les riches".
Eh bien non.
Non, je ne peux pas plus me faire avoir par cette émission de télévision en Inde qu'ailleurs. Tout ceci est un odieux mensonge, et il faudrait brûler ce film.
Sauf que...
Sauf qu'il y a cette extraordinaire histoire d'amour, éperdue, incontrôlable, sublime.
Et on sort ivre d'amour, en se disant "si vous aimez une femme, n'abandonnez jamais, avancez toujours".
Il faudra que je raconte tout ça à Quitterie.
19:40 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : culture, cinéma, gavroche, inde, jean-pierre foucaukt, télévision, bombay, mumbai | | del.icio.us | | Digg | Facebook