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28/11/2009

L'arnaque des ONG et la tartufferie climatique.

Il n'y a rien que je déteste plus que de recevoir des leçons de la part de gens qui ne sont pas exemplaires, pas plus que moi en tout cas.

L'objet de la présente note n'est en rien de remettre en cause les constatations du GIEC ni de contester l'hypothèse d'une cause principalement humaine du réchauffement climatique de la planète terre. Ce sont choses bien trop compliquées pour mon niveau, je ne peux que déplorer que, depuis vingt ans que le GIEC existe, ses conclusions aient surtout servi à brider la croissance des pays autres que les États-Unis, alors même que les États-Unis sont le premier pollueur mondial, notamment en gaz à effet de serre. De toutes façons, limiter la production de CO2 est une bonne idée, il faut désormais que ce soit fait de façon équitable.

Non, l'objet de la présente note est de dénoncer, non plus le greenwashing, mais le green business pseudo-associatif et le climate business actuel, qui masque mal la vérité des intérêts qui s'y expriment : les organisations non gouvernementales (ONG) sont de véritables PME, parfois même des multinationales (pour les plus grandes comme MSF et Médecins du Monde), et très souvent, leur but est surtout financier. La liste des rédacteurs de l'Ultimatum climatique est, de ce point de vue, exemplaire, je devrais dire contre-exemplaire.

Les signataires de l'Ultimatum climatique

Entre écoblanchiment et collecte de fonds à la limite de l'escroquerie, les signataires de l'Ultimatum climatique sont une belle brochette de grigous. Passons-les en revue.

Greenpeace. L'organisation est née aux États-Unis mais, alors que les États-Unis sont de très loin le premier pollueur mondial, aucune activité marquante de Greenpeace depuis plus de trente ans n'a concerné les États-Unis. Quant à Greenpeace France, cette organisation a pour activité principale la collecte de fonds. On peut lui donner acte de la transparence avec laquelle elle explique tout benoîtement que seuls 56 % des dons collectés sont utilisés poiur ses activités de terrain. Encore faudrait-il creuser un peu ce chiffre, qui intègre probablement des dépenses de fonctionnement ordinaires. Les 44 % autres sont répartis en deux enveloppes : 33 % pour la collecte de dons, 11 % pour le fonctionnement proprement dit. C'est donc si dur de récolter des dons ? Soulignons au passage que ce ne sont pas de petites sommes, puisque le budget de Greenpeace France s'élève à 9 millions d'Euros, dont 3 millions consacrés à la collecte de dons, sans compter qu'en vérité toute campagne d'opinion montée par Greenpeace n'est finalement qu'une opération de collecte de fonds. On se demande si cet argent ne serait pas mieux utilisé à éradiquer le paludisme dans le Tiers-Monde. Bref, si la Sécurité Sociale avait des frais de fonctionnement de 44 %, tout le monde hurlerait au scandale. mais du moment que ce sont des gens qui se dévouent à sauver le climat, tout va bien. Hum.

Le WWF France. J'avoue que je suis très peiné d'écrire ce paragraphe, car j'ai beaucoup de sympathie a priori pour le WWF. Mais quand je regarde sa page de partenaires, j'ai envie de pleurer : Carrefour, Castorama, Center Parcs. Si cela n'est pas de l'écoblanchiment, qu'est-ce qui le sera ? Carrefour est quand même une usine de malbouffe et de surconsommation. Mais pas de problème pour le WWF, l'argent n'a pas d'odeur. Vraiment ?

Action contre la faim. À peu près la même remarque que pour le WWF en consultant sa page de partenariats. Chacun sait qu'Air France est une grande entreprise écologique, et que la BNP, si chère au président Sarkozy, n'a aucune filiale dans un paradis fiscal, qu'elle pratique des taux d'intérêt tout à fait convenables et que tout va très bien, Mme la marquise. Du reste, comme le rappelle cette très intéressante étude, Action contre la faim a eu de véritables problèmes et un gros scandale voici peu d'années et le moins que l'on puisse dire, c'est que le doute subsiste. La signature de l'Ultimatum climatique lui accorde-t-elle une nouvelle virginité ?

Care France. Cette branche française d'une multinationale humanitaire fait du partenariat avec les régions un véritable fonds de commerce. Pour elle, se manifester dans le jeu politique à quelques mois des régionales est évidemment une façon d'intervenir sur ses futurs donateurs institutionnels... Si l'on lit la liste de ses partenariats régionaux, qui sont ciblés par action, on verra d'ailleurs que ces partenariats sont politiquement connotés : la municipalité communiste de Saint-Denis près de Paris intervient pour aider Cuba, le département des Hauts-de-Seine est tout réjoui de glisser un œil dans la très secrète Birmanie communiste à l'occasion d'un accident climatique. Mais tout cela n'est que pure coïncidence. Quant aux régions concernées, ce sont déjà cinq régions. Un hors d'œuvre ?

La FIDH (Fédération Internationale des Droits de l'Homme). Cette organisation déjà ancienne publie ses comptes, mais dans une assez profonde opacité. On y trouve, comme ressources, cinq lignes comptables dont le sens est parfois ésotérique : cotisations (jusqu'ici tout va bien), subventions et dons reçus (le gros de la troupe : environ 75 % du total des ressources), dons et manifestations, Liberté et solidarité, les Amis de la FIDH. Le mot dons apparaît deux fois, on suppose qu'il y a d'un côté les dons spontanés, de l'autre les dons reçus à l'occasion de manifestations. Seulement voilà : dans ce total, on ne voit pas le montant des subventions publiques, et c'est très mal, car tout le monde sait que la FIDH est fortement subventionnée par l'État pour certaines de ses actions de terrain. Donc opacité, opacité suspecte.

La Fondation Nicolas Hulot est un véritable cas d'école de l'écoblanchiment. La page des quatre partenaires fondateurs ressemble au portrait de groupe des Dalton : Averell Dalton, c'est l'EDF, dont chacun sait que les centrales nucléaires sont un modèle environnemental universellement claironné, William Dalton, ce sont les hôtels Ibis, qui paraît-il tâchent d'écoblanchir leur béton et leur malbouffe, Jack Dalton c'est L"Oréal, dont l'activité chimique n'a évidemment aucun rapport avec la pollution, ni avec les shampoings Ushuaïa. Joe Dalton, enfin, c'est évidemment TF1, la plus grande usine de crétinisation d'Europe. Un véritable modèle, ou contre-modèle, à enseigner dans les écoles tant qu'il en restera. Écœurant.

Les Amis de la Terre. On se demande ce qu'ils foutent là-dedans, sinon offrir une légitimité aux autres. Par ailleurs, ils ne publient pas leurs comptes, ou du moins pas sur leur site, et c'est dommage, car on est forcé de les taxer d'opacité.

Médecins du Monde (MDM). Là, on est dans le charity business à très grande échelle, où s'entremêlent barbouzages, subventions publiques et écoblanchiment, avec tout de même, heureusement, de vraies actions de terrain, dont on voudrait qu'elles soient plutôt prises en charge par de vraies institutions désintéressées. Parmi les fondations partenaires de MDM, on retrouve Air France et L'Oréal (tiens, tiens). Parmi les entreprises, le meilleur et le pire (le meilleur le crédit coopératif, le pire la Société Générale) et l'inévitable Air France, au milieu desquels se glisse le site Soliland, dont il a été remarqué lors d'une récente table ronde animée par Quitterie Delmas pour Babyloan que sa raison sociale elle-même était l'écoblanchiment, ce qu'on retrouve dans un autre partenaire, Solidaripresse. Enfin, parmi les institutions, on trouve évidemment le gouvernement français, son homologue néerlandais et la Commission Européenne, de quoi afficher respectabilité et crédibilité. On peut savoir gré à MDM de jouer la transparence, qui est un gage de sincérité, mais on a le droit de redouter que cette transparence ne dissimule un surcroît de duplicité. Le procès du charity business n'est plus à faire.

Oxfam France. Cette branche française d'une organisation née il n'y a pas si longtemps au Royaume-Uni pratique une forme d'insincérité comptable absolument révoltante. En vérité, on est ici à la limite de l'escroquerie. En effet, si l'on lit les comptes qu'elle a publiés d'un œil distrait, tout va bien, mais si l'on y regarde d'un peu plus près, aïe. Lisons les chiffres. Le total des ressources d'Oxfam France se monte à environ un million deux cent mille Euros. Un tiers de ce budget provient d'une dotation de la maison-mère, Oxfam international. Le budget réel d'Oxfam France se monte donc à environ 800 000 Euros. Sur ces 800 000 Euros, 377 000 sont affectés à la collecte de dons, soit environ 47 % ! Près de la moitié de ce que les gens en France donnent à Oxfam est utilisé pour la recherche de nouveaux donateurs. On peut réellement dire que l'activité principale d'Oxfam France est la collecte de fonds. En fait, les dons accordés à Oxfam France ne servent qu'à permettre à Oxfam international de s'implanter en France et d'y conquérir une part de marché, une part du marché des dons... Et sl'on ajoute les frais de fonctionnement, le total des frais de structure dépasse les 500 000 Euros, soit plus de 60 % du total. Oui, vous avez bien lu : les donateurs d'Oxfam voient leurs dons utilisés à moins de 40 % pour les buts affichés de cette organisation. Seule la dotation d'Oxfam International permet de masquer ce scandale et d'afficher un bilan largement consacré aux actions de terrain... Pas de doute, pour Oxfam, signer l'Ultimatum climatique n'est pas une façon de lutter pour l'amélioration du monde, mais une façon de travailler sa notoriété et son image en France. Le fait qu'Oxfam international soit majoritairement tributaire des suventions européennes a d'ailleurs été noté, ce qui crée le doute sur la sincérité de ses engagements.

Le Réseau Action Climat semble n'être que le réseau des réseaux déjà recensés par ailleurs, qualités et défauts inclus. Ses comptes indiquent que son petit budget provient à plus de 80 % de subventions, sans qu'on sache par qui ces subventions lui sont allouées. On est tenté de parler à la fois d'endogamie et d'opacité.

Pour le Secours Catholique, Caritas, j'ai envie de dire comme pour Les Amis de la Terre : qu'est-ce qu'ils font là ? Mais il faut tout de même noter qu'ils appartiennent à la catégorie du charity business, et qu'évidemment ils ne sont exempts d'aucun des doutes qui planent sur cette activité économique qui peut exploiter autant ses bénévoles que ses donateurs. Par ailleurs, j'ai eu beau chercher dans leur vaste site (qui a dû leur coûter cher), je n'ai pas trouvé de bilan comptable, si bien que je suis forcé de parler d'opacité. Enfin, si pour eux, la signature de l'Ultimatum climatique a pour effet indirect de signaler leur soutien aux listes écologistes pour les élections régionales, il faut tout de même remarquer qu'en contestant le leadership du Parti Socialiste en France et dans les régions les listes écolo combattent aussi le vieux frère ennemi du Secours Catholique : le Secours Populaire, dont les liens avec la gauche ancienne sont connus. Alors, si c'est pour vider une vieille querelle de rivalité, ego te absolvo. Hum.

La politique française en filigrane

Accessoirement, en signant l'Ultimatum climatique, les organisations susmentionnées paraissent donner un soutien explicite au président de la république dans une vaste opération de communication qu'il mène en vue du sommet de Copenhague.

Mais là n'est pas pour moi l'essentiel. L'essentiel est que si l'Ultimatum climatique sert de base de légitimité conceptuelle et de valeurs (sinon d'idées) aux listes écolo pour les élections de mars prochain, force est de constater que le jury d'honneur convoqué pour conforter la légitimité écolo ne semble guère en mesure de refléter autre chose que l'image d'une assemblée de mœurs économiques douteuses et de calculs vénaux prononcés.

C'est pourquoi lorsque j'entends les Verts rugir ces jours-ci contre Bayrou, j'avoue que ça me donnerait presque envie de revoter pour celui-ci : car lui, au moins, ne fait pas semblant de prêcher la vertu.

Tartuffes sont les Verts qui accusent Bayrou de leur voler... de leur voler quoi, d'ailleurs ? le pain de la bouche, leur fonds de commerce écolo, car c'est bien de quoi il s'agit : Bayrou a voulu leur dérober leur fonds de commerce. Tartuffes qui reprochaient à Bayrou de piétiner la démocratie au Mouvement Démocrate et qui ne sont pas capables de la pratiquer chez eux. Comment, voilà des gens qui, lorsqu'ils ont accueilli la candidature du "parachuté" Meirieu n'ont même pas été capables de voter à bulletin secret ? Allez, on fait ça vite fait, à mains levées... c'est tellement plus commode pour ratifier des décisions qui viennent non pas de la base, mais d'en haut, dans la plus parfaite verticalité jupitérienne. Que reprochait-on à Bayrou, déjà ? ça ? C'est vrai. Mais alors, ils ne font pas mieux que ce qu'ils lui reprochaient.

Et pas question de primaires dans ces listes écolo, non, comme chez Bayrou, les têtes de listes sont recrutées sur casting pour passer à la télé, vous imaginez bien qu'on ne va pas demander aux adhérents (pouah ! fi !) de concourir et de venir menacer le débauchage qu'on a eu tant de peine à réaliser ! Les stars, c'est tellement mieux que les gens ordinaires, que les vertueux anonymes qui devraient pourtant être la sève de la démocratie. Hum.

Et parmi ces têtes de listes, comme est transparente l'envie d'en finir avec l'encombrant MoDem : Bayrou a plein de profs ? Bon, on va lui sortir l'arme lourde. Et qu'est-ce que l'arme lourde ? Croyez-vous que ce cerait un prof de ZEP qui viendrait témoigner de sa tâche héroïque et anonyme ? Que nenni ! On va prendre une star, oui une star, quelqu'un qui depuis trente ans incarne toute la pensée pédagogique dominante. L'arme atomique. Bayrou a eu un ancien dircab de Mauroy ? Qu'à cela ne tienne, on en a aussi : après le banquier Peyrelevade, voici Robert Lion, qui a été, vous ne devinerez pas, patron de Greepeace France. Bon Dieu, mais il fallait y penser ! Au passage, avec un ancien dircab de premier ministre comme patron, on mesure la très grande indépendance des ONG françaises... Il est vrai que le président de la Croix-Rouge est un ancien ministre UMP.

Allons, tout ça n'est pas sérieux. Dans l'ensemble, je rejoins l'analyse de Bernard Stiegler dans le dernier numéro papier de Bakchich Hebdo (EDIT : on peut la retrouver ) : je suis fatigué de constater que les politiques ont renoncé à la réflexion doctrinale, au travail de fond, et qu'ils ne se concentrent plus que sur leur égo, leurs rivalités personnelles et les effets d'annonce, avec le but évident non pas de s'adresser à la conscience ni à l'intelligence des électeurs, mais de travailler leur inconscient, ou pour mieux dire, de manipuler leur inconscient.

Je ne suis pas du tout sûr de voter en mars prochain, mais il y a une chose dont je suis certain : je ne voterai pas pour ceux qui font la même chose que ceux qu'ils conspuent, tout en prétendant faire le contraire. La sincérité, l'authenticité, la cohérence, la transparence, sont toujours parmi les maîtres-mots de mes aspirations politiques, à côté du rêve un peu fou que les politiques fassent leur métier en informant les gens des enjeux réels des décisions politiques, en s'adressant à leur intelligence et à leur conscience.