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30/03/2007

Châteaubriand ? La voix des rêves oubliés.

Talleyrand a écrit : "M. de Châteaubriand croit qu'il devient sourd quand il n'entend plus parler de lui".

Il faut dire que le vicomte malouin est un zélateur frénétique du moi.

L'origine de ses ancêtres, il en parle au début des "Mémoires d'Outre-tombe", se perd dans la nuit des temps bretons. Il est probable qu'il faille la chercher dans le Xe siècle, voire auparavant, si l'on imagine que les Châteaubriand descendent des anciens comtes de Rennes, que l'on remonte jusqu'au IXe siècle.

Nantie de ce pesant stock d'armures, de heaumes, de gourdins, de lances et d'épées, la lignée cadette des Châteaubriand déchoit assez tôt. Elle s'étiole dans une collection douloureuse de siècles, jusqu'à ce que le père de notre auteur acquière la bosse du commerce.

Encore un qui s'est enrichi dans la traite négrière.

Redoré, il peut acheter un donjon imposant et ancien comme la Bretagne, la forteresse un peu lugubre de Combourg. Il y installe sa famille en alternance avec leur hôtel du vieux Saint-Malo.

François-René, dans cette famille restaurée, suit un cursus ordinaire qui le conduit dans l'armée juste avant la Révolution. Il ne brille guère, émigre au bon moment et là, comme d'autres (notamment, un peu plus tard que lui, le futur roi Louis-Philippe, seul de nos monarques à avoir traversé l'Atlantique), s'embarque pour l'Amérique.

Il y découvre les tribus amérindiennes, qu'il enrôle bientôt dans la cohorte littéraire française à travers un curieux ouvrage, les "Natchez", paru à Londres après son retour et sa blessure dans la triste armée de Coblentz, qui scelle la fin de sa brève carrière militaire.

L'arrivée de Bonaparte au pouvoir coïncide presque avec le deuil de sa mère. En 1800, il est en France et publie coup sur coup en trois ans Atala, René et le Génie du Christianisme. Les deux premiers plaisent au public ; le troisième au pouvoir. Il tient son passeport définitif pour la gloire.

Bien entendu, il ne tarde pas à se brouiller avec le régime. Élu à l'Académie française en 1811, il trouve le moyen d'égratigner Napoléon, qui lui défend de siéger sous la Coupole. Il se rapproche de Louis XVIII et on connaît la fameuse phrase qu'il a écrite au sujet de la soumission faite par Fouché au vieux roi sur le paillasson du retour :

"Je vis entrer le vice appuyé sur le bras du crime, M. de Talleyrand soutenu par M. Fouché. La vision infernale passa lentement devant moi... Le régicide venait jurer sa foi entre les mains du frère du roi défunt. L'évêque apostat était caution du serment". Un passage magnifique sur lequel on a fait toute une pièce, puis un film, voici quelques années : "Le Souper".

Il suit la valse un peu ridicule de Louis XVIII autour des Cent Jours : un pas en avant, deux pas en arrière, puis rentre dans les valises des Bourbon et prend aussitôt du galon ... qu'il perd assez vite pour s'être brouillé avec les chefs de la nouvelle majorité.

Il commence alors une longue carrière d'opposition aux régimes, entrecoupée de moments de responsabilités diverses qu'il marque de son tempérament tapageur.

À la fin des années 1810, il a la bonne idée d'accepter Victor Hugo pour une tâche de secrétaire plutôt brève mais symbolique.

Mais en 1830, il se renfrogne et se replie sur ses fabuleux "Mémoires d'Outre-Tombe" qu'il promet de ne publier qu'après sa mort et qui paraîtront ... avant. Les sujets d'argent ont toujours contrarié les projets des écrivains.

Il meurt octogénaire en 1848. Presque exact jumeau de Napoléon, il s'éteint alors que commence à paraître la silhouette de Napoléon III. Il n'aura pas eu le loisir de s'opposer à ce régime-là. C'aurait pourtant été une occasion de se rapprocher de Victor Hugo...

21:40 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : écriture, littérature, poésie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

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