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22/10/2008

Quelques mauvaises idées pour une triste soirée.

Dans le film "La bandera", il y a, à un moment, une explication très franche, dans la nuit, entre un colonel (je crois que c'est Pierre Renoir qui l'interprète) et un subalterne, trouffion ou sous-officier (il me semble que c'est Gabin). Et leur conversation se conclut par cette réplique admirable, parce que Gabin s'était vanté de pouvoir tuer le colonel en question : le colonel inflige dix jours d'arrêt à Gabin...

- ... cinq jours pour vous être vanté de pouvoir tuer votre colonel, cinq jours pour ne pas l'avoir fait quand vous en aviez l'occasion.

C'est pour un semblable "chiche" que je n'ai pu finalement assister au café démocrate européen autour de Quitterie Delmas (enfin, tout de même pas pour tuer un colonel, je vous rassure).

Puisque ma soirée en est gâchée, je voudrais vous livrer quelques réflexions sur l'état de candidat et de responsable politique.

Une candidature à une élection est une chose importante. Bien sûr, chaque candidat sait que c'est une chose importante pour lui, mais ça l'est aussi pour d'autres. Il y a d'abord ses amis, ses partisans, ceux qui le soutiennent, tous ceux par exemple qui ont un engagement affectif dans l'écurie qui court sous la casaque orange et qui espèrent que leur candidat sera un bon candidat, qu'il va faire gagner leur écurie, qu'il sera digne et efficace, brillant et inventif, qu'il aura de la chance, et enfin qu'ils seront fiers de lui ou d'elle. Chaque candidat doit donc garder à l'esprit cet espoir qu'il incarne, et tout ce qu'il doit de résultat (ou à tout le moins de moyens) aux autres, que chaque bourde qu'il commet fera mal à des quantités d'autres personnes qui investissent leur temps et leur affect sur lui (ou elle).

De la même façon, une candidature est une chose importante pour les électeurs. Un parti honore les électeurs s'il leur envoie un candidat crédible, bien préparé, solidement armé et susceptible de jouer un rôle réel dans le débat naturel qu'occasionne toute élection. Les candidats, là encore, doivent intégrer dans leur comportement et dans leur vie la place singulière qu'ils vont occuper le temps d'une campagne et qui peut les mener à des fonctions éminentes de gestion et/ou de délibération.

Chaque candidat doit donc s'imprégner de l'idée que, à tout instant, parce qu'il est candidat (ou qu'il va l'être), il est placé sous les feux de la rampe et chaque chose qu'il dit ou fait pourra désormais être utilisée contre lui, comme on dit dans d'autres circonstances.

Bien entendu, cette réalité de Damoclès (si j'ose dire) ne doit pas l'inhiber, mais tout au contraire le porter, le nourrir, parce qu'il (ou elle) est désormais en représentation, ce qui n'est qu'une façon de se conduire à laquelle une bonne (ou une mauvaise) éducation et un peu d'entraînement préparent tout naturellement.

Mais tout de même, le candidat doit apprendre à élaguer son discours, non pas des choses trop personnelles, mais de celles qui peuvent inutilement faire grief. C'est là la préparation la plus nécessaire et la plus contraignante, mais je crois qu'une bonne habitude de langage se prend vite et qu'après tout, cette manière de s'exprimer relève aussi tout simplement d'une bonne hygiène de vie, parce que nous sommes tous, finalement, en représentation à longueur de journée, et qu'être adulte et responsable, c'est l'assumer.

Commentaires

Je partage assez ton point de vue, même si on pourrait débattre d'un mot clé, il me semble, dans ton argumentaire : faire "inutilement" grief

Écrit par : Claudio Pirrone | 22/10/2008

"Mais tout de même, le candidat doit apprendre à élaguer son discours, non pas des choses trop personnelles, mais de celles qui peuvent inutilement faire grief."

Voilà une reflexion TRES intéressante mais qui a ses travers.
Qu'on le veuille ou non, dans un scrutin uninominal, la personnalité de l'individu pèse beaucoup.
L'obliger à élaguer son discours et ses propos en général a l'avantage qu'on ne tend pas le baton pour se faire battre, mais aussi un inconvénient : celui de lisser la personne de ses aspérités.
George Freche (voir le billet du CDM), s'il se présentait pour la première fois aurait, aujourd'hui, beaucoup de difficultés pour être élu.
Beaucoup de blogueurs risqueraient de voir ressortir des billets écrits à des instants T de leur vie.
Imagine Farid Taha candidat demain aux législatives.

C'est ce que je reproche un peu à Quitterie dont le discours est devenu très "convenu".

C'est un des cotés qui me fatiguent le plus dans notre démocratie. Ce passage obligé...

Écrit par : KaG | 22/10/2008

t'es au cachot et t'as la connexion???
;-)

(je n'ai pas tout compris à la raison de ton absence mais je suis d'accord avec les commentaires: le reste est très intéressant)

Écrit par : GuillaumeD | 22/10/2008

Tant qu'a gacher une soirée pourquoi ne pas soutenir Besancenot pour une fois !

http://e-boo.fr/post/2008/10/23/Stop-taser

Écrit par : e-boo | 23/10/2008

@ e-boo

Votre intéressante note vaut mieux que d'y associer Besancenot.

Écrit par : Hervé Torchet | 23/10/2008

@ Claudio et KaG

Le mot important est "inutilement", c'est-à-dire qu'il n'est pas interdit de faire grief à autrui, mais il faut que ce soit à dessein, que cela ait un sens politique en consonance avec une campagne. Je laisse KaG libre de son opinion sur l'expression de Quitterie, parce que Quitterie, pour être candidate (et je souhaite qu'elle le soit en juin prochain), exprime elle-même le besoin d'un cadrage pré-campagne pour se peaufiner.

Écrit par : Hervé Torchet | 23/10/2008

En phase aussi avec cet article.

Après le bréviaire du militant, le bréviaire du candidat...? ;-)

Écrit par : florent | 23/10/2008

Je suis un peu géné par ce billet, je crains que ce ne soit pas une bonne chose, ni pour l'électorat, ni pour les militants, ni pour les hommes (et... femmes) politiques eux-mêmes que d'avoir une vision totalitaire de ce qu'ils sont.
Ce sont des êtres humains, avec leurs qualités, leurs défauts, leurs manies, leurs vices (et il n'y a pas qu'au FMI que ça soit vrai), leurs limites, mais aussi leur grandeur...comme chacun d'entre nous.
Personnellement, l'homme politique dont je suis proche, viens de me jouer un sale tour en me décrédibilisant vis à vis d'une association dont je suis membre, même pas par calcul mais tout simplement par flemme.
Bon, ça m'agace mais je n'en fais pas une histoire...

Écrit par : Jean Marie | 23/10/2008

' Chassez le naturel, il revient au galop'
Le colonel punit son subalterne, mais les généraux punissent-ils?

Écrit par : Martine | 23/10/2008

Très jolie note. Je suis d'accord à la fois avec Kag (quoique lui, je n'ai tjrs pas compris cette manie de s'entendre avec tout le monde : en disant ce qu'on pense, c'est impossible) et Jean-Marie (moi j'aime la profondeur, quitte à ce qu'elle soit sombre).
As-tu déjà été candidat ? Pardon de te poser la question, tout le monde doit le savoir sauf moi... Je me rends compte que je suis souvent out ;-)

Écrit par : LCDM | 23/10/2008

@ LCDM

J'ai été élu 18e sur une liste et adjoint au maire de mon arrondissement, ce qui m'a imprégné de la puissante nécessité de la parole "autorisée", on ne parle pas pour dire n'importe quoi, tout mot est lourd de conséquences possibles. On s'y habitue assez vite.

Écrit par : Hervé Torchet | 23/10/2008

@ Hervé

C'est donc ce que j'avais compris. Par conséquent je peut dire que nos visions, sur ce point, sont parfaitement en consonance. Ce qui implique deux corollaires. Porter grief, pour utiliser tes mots, ça ne se fait jamais à la légère ("on ne parle pas pour dire n'importe quoi, tout mot est lourd de conséquences possibles") mais également on n'avoue jamais, à l'avance, les objectifs réels (je parle au pluriel car un bon dessin a souvent plusieurs objectifs à la fois) d'une telle action.

Ce qui implique le fait qu'un vrai bon dessin soit très mal compris par la majorité. C'est quelque chose que le politique, au delà de candidat ou pas, doit intégrer et accepter. Car cette incompréhension est le levier qui permet aux objectifs d'être atteints.

Sur Quitterie : le fait qu'elle ressent ce besoin est un signe d'intélligence

Écrit par : Claudio Pirrone | 23/10/2008

L'idée qu'il faille "élaguer son discours" pour un responsable politique du MoDem en campagne me parait saugrenue. En effet, comme tu le dis toi même, c'est le meilleur moyen pour ce responsable de tomber dans l'apprentissage, le formalisme, et perdre tout naturel. Du coup, il devient l'homme (ou la femme) d'un parti.
Je préfère l'idée inverse : un parti qui se met au service des hommes et des femmes qui s'engagent en politique.
Mais peut-être est-ce impossible? Qu'en penses-tu?

Écrit par : GuiGrou | 23/10/2008

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