06/12/2008
Télévision publique : la gauche de bonne volonté, mais déboussolée.
J'avoue que je n'étais pas d'accord avec l'article de Quitterie d'avant-hier sur le faible nombre de députés présents en séance lors du vote sur la nomination du président de France Télévisions par le président de la république EDIT : on peut lire d'ailleurs le compte qu'en rend Rubin Sfadj et la mise au point de Quitterie là.
En fait, je crois qu'elle n'a pas dit le fond de ce qu'elle pensait.
Je suis frappé, en écoutant les interviews données par le site Bakchich, de voir les députés socialistes si peu au fait de leur sujet. Une dame explique qu'il y a quinze ans, lorsqu'une partie de la gauche voulait supprimer la pub sur le service public, elle n'était pas députée, elle ne l'est que depuis 2007. Soit. Mais à en juger par ses cheveux gris, elle devait bien être déjà citoyenne, il y a quinze ans...
De même, un député un peu hagard explique que, bien entendu, si l'on consacrait de vrais moyens à l'audiovisuel public, la suppression de la pub serait une bonne chose. Ah bon ? Même avec un président de France Télévisions nommé et révoqué par le président de la république, à sa botte ? Autrement dit, il faudrait dépenser plus de redevance pour avoir le droit d'être sans cesse plus écrasé sous la propagande présidentielle ? N'y a-t-il pas comme un défaut ?
Franchement, c'est une belle fonction que celle de député, il en est peu de plus noble dans la république. Dommage.
Cela étant, construire le pluralisme dans l'audiovisuel public n'est pas une mince affaire. Du temps de l'Italie immuable, quand les gouvernements successifs se formaient autour de la démocratie-chrétienne, la solution trouvée avait été un système de dépouilles et de partage du gâteau : telle chaîne serait démocrate-chrétienne, telle autre de gauche etc. C'était avant Berlusconi. Était-ce vraiment la solution ?
En fait, le seul groupe (qui d'ailleurs fonctionne depuis toujours sans pub) qui ait jusqu'ici suscité l'approbation généralisée, c'est la BBC. Il faudrait l'examiner de plus près.
Enfin, la question de la pub n'est pas centrale. On sera surpris, si les moyens y sont, de voir que le public sera nombreux devant de vrais programmes de service public, et tant pis si le privé prend une part de la manne publicitaire, ce sont en fait surtout les autres médias, dont Internet, qui en bénéficieront.
Ce qui est central, c'est d'abord l'indépendance, l'appel de Marianne, d'une part, mais aussi la nomination du président, et on est presque surpris qu'aucun mauvais esprit ne se soit posé la question de savoir si, parmi les socialistes qui ne se sont pas mobilisés pour le vote de jeudi soir, il n'y en avait pas quelques-uns qui pensaient que, au fond, en cas d'alternance, la nomination du président de la télé par celui de la république n'était pas une si mauvaise chose.
Était-ce le sens implicite de la note de Quitterie ? Implicite... inconscient ? Qui sait ? EDIT : en tout cas, me voici subrepticement d'accord avec Quitterie.
12:08 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : médias, france télévisions, quitterie delmas | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Commentaires
Je ne peux que te répondre sur ton clin d'œil à l'Italie. Ce procédé, appelé de "lottizzazione" (lotissement ? en tout cas ça rend l'idée) était simplement honteux. Par ailleurs, j'en sais quelque chose car, indirectement, j'en paye le prix encore aujourd'hui, en France et au MoDem.
La "Une" était à la DC (démocratie-chrétienne)
La "Deux" au Socialistes de Craxi et Martelli (alliés de la DC et très copains avec Berlusconi)
La "Trois" était aux Communistes (opposition)
Quand, à cheval des années 80 et 90 le système politique devient incapable de répondre aux exigences des citoyens et quand il explose sous le poids des scandales de corruption ces chaines seront un frein considérable à la rénovation du système. Des fusils cathodiques pointés sur les adversaires (et parfois les petits alliés) politiques, ensuite contre la magistrature.
Je voudrais qu'on comprenne qu'on a pu se faire taxer de racistes (sic) simplement pour avoir dit que le même salaire n'offre pas les mêmes possibilités d'achat à Milan (où un café coutait 1€20 en 2003) où dans ma ville natale du fond de Calabre (où j'ai payé 70cts en 2007). Et qu'on n'a jamais pu se défendre.
Pour revenir à nos moutons français, le problème de la télé publique c'est qu'elle est ... publique, donc à nous tous : un conseil élu directement par les citoyens ? Pas sur qu'on ne retomberait pas dans le même travers, mais bon, au moins on aurait choisi.
No taxation without representation ... et si c'était ça le "bonheur" ?
Écrit par : Claudio Pirrone | 06/12/2008
La gauche de "bonne volonté" ???
Du rêve tout éveillé !
Le PS fait partie du système depuis trop longtemps, ils ont refusé de déposer une motion de censure contre cette mesure.
Tout simplement parce que c'est un "donnant-donnant", les uns détenant le pouvoir central, les autres le pouvoirs local, et ce que les journalistes appellent "l'alternance" et vendent comme telle, ce n'est que la permutation des uns aux postes des autres et vice-versa.
Ces gens ont fait les mêmes écoles, se connaissent et "dirigent" le pays sur le dos du "petit peuple" dont ils vivent grassement grâce aux indemnités en tout genre qu'ils se sont octroyés puisque ce sont eux qui font les lois...
Il faudrait arrêter de rêver :-)))
L'interview de Tapie dans le Marianne d'il y a 15 jours - page 57 - montre un peu comment les choses se passent sur le dos du "peuple", entre soi en quelque sorte, PS (PRG)- UMP confondus.
Je cite:
... chez mon ami, le député PS Claude Bartelone qui est toujours socialiste. [j'admire quand on sait comment Bartelone a manoeuvré...]
Tapie ajoute plus loin
...je dinais avec Brice Hortefeux qui me dit "Comment réagirait ton copain Kouchner si on lui proposait d'entrer au gouvernement?"...
c'est ainsi qu'un déjeuner à été organisé Place Beauvau, Sarkozy était toujours ministre de l'Intérieur. J'y étais. A la proposition, Kouchner a été très clair:
"Je soutiens S. Royal, je ne changerai pas de camp."
"Tu n'as pas compris" répond Sarko, je ne te demande pas ça. Continue à soutenir ta candidate, mais moi, si je suis élu, j'ai besoin d'un grand ministre des Affaires étrangères..."On verra bien", a terminé Kouchner
... personne n'a jamais rien su de ce déjeuner, ça n'a pas empêché Bernard de faire la campagne de S. Royal jusqu'au bout et de traper très violemment sur Sarkozy (!!!)
Question du journaliste:
On ne vous sent pourtant pas totalement résolu à renoncer à la politique
Si, j'y suis résolu. Sauf si F. Bayrou est, un jour, en situation de devenir Président de la République. Alors, oui, je n'hésiterai pas à refaire de la politique pour l'en empêcher
Rebelote, dans le Parisien Dimanche. Il déclare selon une dépêche AFP
"Martine Aubry, c'est, pour la gauche, la candidate idéale"
"On a tenté de la présenter comme la candidate d'un front anti-Royal. Faux. S'il y a un front, c'est un front contre quelqu'un proposant une stratégie perdante. Or les socialistes veulent gagner", affirme Bernard Tapie.
[Quelle HYPOCRISIE, lui l'ami de Sarkozy !!!]
L'ancien homme d'affaires épingle François Bayrou "dont le seul programme est de dire +je veux être président+ et qui pour cela utilise le registre populiste qui était hier celui de Le Pen". "Envisager une alliance avec lui est une erreur de stratégie totale", estime-t-il.
[J'admire le choix du mot "l'ancien homme d'affaires" et non "l'ancien repris de justice"]
"Je ne serai pas candidat aux élections européennes, qui que ce soit me le propose et où que ce soit", affirme enfin M. Tapie, écarté du Parti radical de gauche (PRG) après avoir apporté son soutien à Nicolas Sarkozy pendant la campagne présidentielle.
La "voix de son maître" dont il a reçu les millions pour pouvoir agir dans la politique, explique bien la stratégie de son "maître" et le pourquoi de ce cadeau:
1. Déclarer Martine Aubry comme "meilleure candidate PS", car elle n'a AUCUNE chance d'être élue. Les 35h restent en travers de la gorge de trop de gens. Elle n'est pas populaire et ne sera pas soutenue par l'ensemble hétéroclyte qu'elle dirige... DSK étant en embuscade.
2. Surtout tout faire pour éviter une alliance avec le MoDem, car ce serait la fin de Sarkozy - tout simplement à cause du potentiel de voix au niveau national.
3 Décrédibiliser F. Bayrou à chaque intervention en le comparant à Le Pen
4. Il a le culot de "conseiller" les Français sur ce qu'ils ont à penser:
"Martine Aubry meilleure candidate PS", "Bayrou populiste, Le Pen light", "Envisager une alliance avec lui est une erreur de stratégie totale"...
J'adore... C'est tellement gros. Il est tellement ridicule et enflé...
Publié sur
http://www.mediapart.fr/club/blog/etoile66/301108/l-objectif-politique-sarkozy-tapie-de-plus-en-plus-clair
Écrit par : Etoile66 | 06/12/2008
Merci pour le lien et pour cet excellent billet, avec lequel je suis largement en accord. Seule petite remarque : certes, la question de la pub n'est pas centrale sur le fond ; mais elle le devient dans un double contexte de crise économique (limitation des débouchés pour les annonceurs) et de poches trouées pour l'État (manque de ressources pour remplacer la pub). À bientôt !
Écrit par : Rubin | 07/12/2008
Les commentaires sont fermés.