Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

« 2012-09 | Page d'accueil | 2012-11 »

27/10/2012

Observations sur internet et l'Histoire de l'écriture

Je travaille en ce moment sur un projet de média sur internet et mes réflexions m'ont conduit à une synthèse qu'il m'a paru utile de faire partager à mes lecteurs.


Historiquement, l'écriture commence par des tablettes, des pages de terre indépendantes les unes les autres. Ce stade dure plusieurs millénaires. Ensuite viennent les rouleaux, comme la Torah des synagogues. L'écriture sur papyrus est en principe un rouleau. Au Moyen Âge, on écrit souvent (mais pas toujours) sur rouleau de parchemin. Le mot "rôle" (dans le sens de rôle d'imposition) vient de ce stade du rouleau. L'invention de l'imprimerie met fin au règne du rouleau et rappelle la présentation en tablettes, mais en reliant les tablettes les unes aux autres dans une structure qui peut en inclure des centaines (des milliers si l'on évoque une collection de volumes).


Le passage du rouleau au livre broché a des implications considérables. D'abord, on passe du cercle au rectangle, or le cercle est un emblème solaire et divin, cependant que le rectangle a des significations symboliques ou inconscientes toutes différentes. Ensuite, parce que le principe du rouleau symbolise l'infini. C'est la tapisserie de Pénélope. Tandis que le livre est un espace par nature fini, composé d'espaces eux-mêmes par nature finis. Dans les BD, Goscinny construit ses scénarii planche par planche, chacune est une narration en soi.

 

Internet, c'est la revanche du rouleau sur le livre. Le déroulant de l'écran est un rouleau et, pour la première fois, ce rouleau, s'il a un commencement, peut n'avoir pas de fin connue. il peut se croire infini, ou du moins perpétuel. Ce rouleau est cependant subverti par l'arborescence de la structure de la Toile, qui permet la survie de la tablette mésopotamienne dans les replis du papyrus égyptien. Internet devient ainsi la synthèse de toutes les formes d'écriture connue.

11:14 | Lien permanent | Commentaires (6) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

24/10/2012

Louis-Philippe, le roi "normal"

Lorsque Louis-Philippe devint roi des Français, en 1830, il décida de faire exactement le contraire de ce que son prédécesseur avait tenté : au lieu de rétablir donc la monarchie absolue, il irait au bout de la logique de 1792, il incarnerait une monarchie constitutionnelle et parlementaire, et même, il pousserait un peu plus loin encore avec une sorte de mélange de monarchie et de république. Ce mélange fut synthétisé par le vocable de "roi-citoyen".

En cela, il se montrait fidèle à l'esprit de son père, Philippe d'Orléans surnommé Philippe Égalité, qui avait plusieurs fois exprimé sa volonté de désacraliser la monarchie alors dirigée par son cousin Louis XVI, par exemple en faisant construire les "galeries du Palais Royal", un véritable temple de la consommation de l'époque, innovation scandaleuse pour le premier cousin du roi, appelé à lui succéder si ses fils et ses frères venaient à périr, ou à être renversés, ce qui finit par arriver, donc, à son dernier frère Charles X, un peu aidé par la foule des "Trois Glorieuses" de juillet 1830.

Le roi-citoyen Louis-Philippe Ier troqua son sceptre contre un parapluie. Il allait parfois à pied dans Paris et entendait débarrasser la cour de son empois et de son décorum. Il avait été le seul représentant de la famille ci-devant royale aux batailles de la jeune République de la fin 1792, Valmy et Jemmappes, puis s'était résigné à émigrer au Royaume-Uni et aux États-Unis, d'où il avait ramené un esprit incisif et très politique que l'on trouve dans ses Mémoires rédigés en 1801. Surtout, il en avait ramené cette idée du "roi-citoyen", que Lafayette l'aida à mettre en œuvre en 1830.

Outre le parapluie symbolique (forcément inventé lors du séjour à Londres, climat aidant), la monarchie de Louis-Philippe se caractérisa par son libéralisme, refus de la censure de la presse, ouverture de la science, progrès économique... C'est une époque que j'aime personnellement beaucoup, parce qu'elle s'exprime dans la plus grande génération littéraire que la France ait connue, la génération de 1830, Victor Hugo, Balzac, Alexandre Dumas, Lamartine, Vigny, Musset, et quelques autres, la génération romantique, aussi romantique que le régime nouveau se voulait prosaïque.

Le libéralisme du régime est incarné par un homme qui professe le "juste milieu", et qui dirige le gouvernement pendant près de la moitié du règne de Louis-Philippe. Le protestant François Guizot est célèbre pour une citation qu'on lui attribue et qu'en général on tronque : "Enrichissez-vous", qui serait en fait "Enrichissez-vous par le travail..." et par je ne sais plus quoi. J'ai eu un portrait de Guizot chez moi pendant des années, qui avait été peint sur le modèle par un de mes ancêtres peintre, ce n'était pas un marrant.

Il y avait cependant un péché de jeunesse dans ce régime dont les qualités de gouvernement restent manifestes avec le recul dont l'Histoire dispose. Ce péché, c'était le scrutin censitaire. Marqué jusqu'au bout par le système britannique, Louis-Philippe ne comprenait pas que l'aspiration du peuple à la démocratie dépassait de loin le stade parlementaire de 1792. Le roi-citoyen, son régime reposant sur le suffrage des riches, n'était que le roi-bourgeois, honni à la fois des aristocrates et des républicains, des premiers parce que bourgeois, des autres parce que roi. Sa bonne gestion et sa gouvernance prudentielle ne lui servaient à rien, puisque, privé d'expression, le peuple les ignorait. C'est ce qui fit que la durée du régime fut émaillée par des émeutes, Victor Hugo a raconté celles de 1832 dans "Les Misérables".

Il tomba finalement de lui-même, par peur, en 1848, et fut remplacé au bout de quatre ans par une autre tentative de créer une autre forme de monarchie non seulement constitutionnelle, mais quasi-républicaine, le Second Empire, un pouvoir plus fort, mais appuyé sur le suffrage universel masculin, une monarchie plébiscitaire, qui, malgré des succès économiques initiaux, finit par échouer aussi.

Lorsqu'avant la dernière présidentielle, j'entendais Daniel Cohn-Bendit dire que, pour lui, le président de la république devait être un citoyen comme les autres, et développer de ce fait une vision très scandinave de la fonction présidentielle, je pensais au roi-citoyen, au roi-bourgeois des années 1830, et lorsque François Hollande évoquait le concept de président "normal", je trouvais qu'il y avait de l'écho.

En son temps, Valéry Giscard d'Estaing, issu de la tradition libérale, avait tenté (assez maladroitement) de retrouver l'inspiration qui, au début du régime de 1830, avait rendu Louis-Philippe assez populaire dans l'opinion parisienne. Il avait renoncé à la voiture présidentielle pour parcourir les Champs-Élysée à pied, il s'invitait chez les gens, il recevait les éboueurs. Tout cela échoua, comme la tentative de Louis-Philippe. Finalement, il n'y eut que le régime d'assemblée de la IIIe république qui y parvint, avant la guerre de 1914, et cela dans le contexte particulier de l'Union Sacrée vers la revanche qui fut prise, enfin, en 1918.

Or finalement, on s'est aperçu que, dans l'esprit de Hollande, "normal" désignait avant tout ce qui pouvait, d'une manière décisive, l'opposer à son prédécesseur, de même que l'hyperactivité de Sarkozy fut dictée par sa volonté de trancher avec les défauts de la fin de règne de son prédécesseur. Cette similitude de tournure d'esprit des deux derniers présidents fait d'ailleurs beaucoup contre la cote de popularité de l'actuel, car elle installe le peuple dans l'idée qu'il n'est sensible qu'à son image, comme son prédécesseur, au lieu de se concentrer sur les effets de la gestion de l'État, sur les résultats. Ce qui manquait le plus à Sarkozy, c'étaient les résultats, et c'est sur ce point et sur ce point seulement, que doivent se concentrer les efforts du président pour se démarquer de son prédécesseur.

Pour aller au bout de la comparaison historique, il est assez curieux que les trombes d'eau qui tombaient sur Paris le jour de l'installation de Hollande aient fait que l'objet symbolique de son entrée en fonction était le même que pour Louis-Philippe : un parapluie. Or aujourd'hui comme en 1848, un parapluie ne suffit pas à transformer un régime inefficace en régime efficace, il est vrai que le président actuel, si son gouvernement tangue, a pu exprimer certaines de ses propres qualités pour corriger son image. Ce n'est pas quelqu'un que l'on prendra à ... ouvrir le parapluie.

16:10 | Lien permanent | Commentaires (1) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

22/10/2012

Lettre ouverte à Arnaud Montebourg

Cher Arnaud Montebourg,

Degemer Mad à Quimper et merci d'être le troisième, après l'équipe de France de football et François Bayrou, à souligner la qualité de la production cronouaillaise. Il faut pourtant que je vous dise quelque chose.

Je suis un petit entrepreneur, je vends des livres, des livres rares, d'un peu meilleure qualité matérielle et donc d'un prix légèrement plus élevé, que la moyenne. Mon activité est extrêmement sensible à la conjoncture. Quand l'argent circule, je vends bien, quand il circule mal, je vends peu, et quand il ne circule pas du tout, je ne vends pas du tout. Or c'est ce qui se passe en ce moment : je ne vends pas du tout.

Et je connais des artistes dont le chiffre d'affaires est aussi plat que possible, et d'autres, bref, cela ne va pas.

Il est évident que la hausse constante des impôts dessèche les vaisseaux sanguins de l'économie. Elle est un fil rouge commun à tous les pouvoirs depuis des décennies, il n'y a pas moyen que l'État soit plus économe. On n'arrête pas de leur dire de baisser les dépenses et eux, ils n'arrêtent pas d'augmenter les impôts, entends-je partout.

Comprenez-moi bien, cher Arnaud Montebourg, je n'ai rien contre les impôts, je les trouve légitimes, je ne supporte pas les fraudeurs. Mais si l'on veut que l'économie tourne, ce n'est ni Wall Street, ni la City, ni les îles Caïman, qu'il faut rassurer, mais bien au contraire l'argent qui dort dans nos lessiveuses, ici, chez nous.

Et donc, cher Monsieur le Ministre, j'ai une proposition à vous faire, qui ne coûterait rien, pas un centime, à l'État, et qui pourrait permettre de contribuer à rétablir les comptes de l'État sans coûter non plus un centime de plus au contribuable.

Pourquoi ne pas reprendre l'idée de François Bayrou d'un label facultatif, basé sur le volontariat, indiquant un pourcentage du "produit en France" de chaque produit vendu en France qui le souhaite. De cette façon, le consommateur qui le peut et qui le souhaite pourrait, par sa consommation, contribuer à rétablir l'équilibre des comptes publics en alimentant indirectement les caisses de l'État, ce qui soulagerait l'impôt. Tout le monde y serait gagnant.

On le fait ?

Merci d'avance.

Veuillez croire, cher Arnaud Montebourg, à ma haute considération.

Hervé Torchet

08:00 | Lien permanent | Commentaires (3) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

14/10/2012

Les contreparties de la rigueur

Enfin, la gauche a compris qu'il fallait rétablir les comptes publics, merci à François Hollande. Cependant, on attend encore la baisse des dépenses de la Sécu (10 milliards p ex sur les médocs si on suit les Prs Even et Debré) et des collectivités locales. Et puis, il faut bien le dire, sans le volet "reconstruire la production en France", celui du rétablissement des comptes va forcément susciter la frustration. L'effort est certes mieux partagé que ne l'aurait voulu l'ancien président, mais ce n'est pas suffisant. Il faut des contreparties pour l'avenir.

17:50 | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook