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15/11/2014

Le Centre entre éternel retour et "inception"

Sans remonter trop loin dans le temps, sans même envisager en détail la division des Démocrates français en deux familles politiques, l'une alliée du pouvoir pompidolo-chabaniste, l'autre y opposée, l'élection de Jean-Christophe Lagarde à la tête de l'UDI me renvoie personnellement aux événements de 1994 et au débat qui conduisait le CDS alors agonisant vers deux formes d'obsèques qui s'opposaient.

J'ai déjà eu l'occasion d'évoquer succinctement ce débat. Il fut celui du congrès du CDS de l'automne 1994 : d'un côté, Bernard Bosson soutenait une vision qui insérait le CDS dans une "CDU à la française", càd dans un grand parti de droite. De l'autre, Bayrou voulait une majorité centrale autour d'un parti allant "de Balladur à Jacques Delors". Cette différence de géométrie politique entre une hémiplégie et un parti central se retrouve aujourd'hui par l'accession de Lagarde à la présidence de son parti de centre droit.

Que l'on ne s'y trompe pas : il y a bel et bien une ambition présidentielle chez Lagarde, comme il me l'a dit dès 2008. Chez un animal politique de sa trempe, cette ambition doit être prise au sérieux. Mais chez lui, sa réalisation passe nécessairement par une acceptation de la bipolarisation, son objectif devenant de prendre le contrôle de la droite. Il y a donc un (au moins un) adversaire à tuer. Cela tombe bien, car Lagarde est un tueur.

Il n'était pas président des jeunes centristes (JDS) de son département. Il s'est donc arrangé pour expédier (grâce à Bernard Bosson) le titulaire du poste à un emploi en Savoie, loin, très loin, de la Seine-Saint-Denis, son département. Il prit ainsi la présidence convoitée. Quelques années plus tard, il se retrouva, grâce à un efficace travail de réseau, numéro 2 du mouvement national JDS, le congrès approchait, il s'employa à pourvoir son numéro 1 (Christian Bartholmé) de ce qui lui manquait le plus : un emploi. Un emploi très, très prenant. La place se libérait.

Il tuait alors dans la douceur. Il tua bien entendu les communistes dans sa ville, et s'active à les éliminer de Bobigny. Il tua aussi la présidente du MoDem naissant de son département, une maire dont il ne se posa pas la question de l'utilité à ses citoyens. Elle le gênait, il l'élimina. Il a tué son rival, l'autre bras droit de Borloo devenu récemment maire de Nancy, et qui, hier encore, rivalisait avec lui autour du chef. Bref, la liste de petites victimes commence à devenir plus consistante.

Au passage, notons qu'il n'a pas toujours fait de bons choix, les affaires de Bobigny sont, pour l'une, assez risible et, pour l'autre, très vilaine; mettant en scène Bartholmé, qu'il a repêché une fois de plus.

Seulement voilà, être président de la république en respectant les règles actuelles, c'est se condamner à l'inutilité. J'ai toujours trouvé stupide les gens de droite qui aboyaient contre les gens de gauche, et réciproquement. L'été dernier, je bavardais avec un ami dont les connaissances sur les méandres de la Bretagne médiévale m'épatent toujours. Il me parla des francs-maçons, comme si j'étais affilié à une obédience. L'imagination travaille. J'indiquai que j'étais profane et que, tout compte fait, je m'en tiendrais à ce choix, parce que je veux pouvoir continuer à dire du bien des francs-maçons dans une église, comme de dire du bien de l'Église devant un franc-maçon. C'est ma liberté à moi, irrépressible.

Et, tout compte fait aussi, le choix originel de soutien à Bayrou que j'ai fait en 1994, celui qui mène à faire travailler ensemble des gens de droite modérée, du centre et de gauche modérée, me motivera, si l'occasion m'en est donnée, à voter pour lui, sur ce principe et sur cette base particuliers. De ce point de vue, je peux dire que l'élection de Lagarde signe l'échec de l'effort de Borloo pour rassembler les centres.

Mais on n'en est pas là. D'ailleurs, ce court texte n'est que mon opinion, celle d'un homme qui vient d'atteindre le demi-siècle, qui a consacré trois décennies à l'engagement politique, et qui s'en est définitivement détourné pour se consacrer à l'Histoire et à la Littérature.

Je mets la dernière main à mon prochain ouvrage qui n'a rien à voir avec tous ces sujets au fond futiles, et, excusez-moi, j'y retourne !

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Commentaires

- Jego avait fait sa mue en choisissant cette position d'un centre "pivot" coopérant avec des compétences, plutôt que vassale donc prisonnier des idées d'un camp. Son origine politique personnelle, lui a coûté sa crédibilité à incarner cette position.
Ça en dit long sur le personnel politique du centre, prisonnier lui aussi mais de lui-même, et de sa vision étriquée : si tu n'as pas toujours été centriste, c'est que tu n'es pas centriste ! Quelle hauteur de vue... Mais surtout : quelle tristesse d'imaginer un être humain incapable de changement, quel cynisme de ne voir dans le changement d'un être humain qu'un froid calcul de tactique personnelle au service de ses intérêt propre ! Effet mirroir peut-être ?!?
- je note que tu désignes les francs maçons en tant que personnes ("dire du bien des francs-maçons") et que tu évoques l'Eglise dans une dimension désincarnée d'institution ("dire du bien de l'Eglise"), il y a là un alignement qu'il faudra opérer, sinon la position sera difficilement tenable

Écrit par : Gatbois | 15/11/2014

@ Grégoire

Exacte dernière observation, je me la suis faite après avoir terminé ce texte. Disons "devant des francs-maçons en situation officielle". Mais la position en soi compte moins que ce qu'elle suggère. J'aurais pu parler de dire du bien d'un chat dans une souricière.

Certains détournements des idéaux de l'Église sont aussi révoltants que certains détournement des idéaux maçonniques par des réseaux mafieux.

Écrit par : Hervé Torchet | 15/11/2014

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