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12/12/2007

Pourquoi Victor Hugo a-t-il fini par plaire à tout le monde ?

Devenir consensuel est le drame que redoute tout auteur, car c'est le toboggan irrémédiable vers l'oubli, au mieux prestigieux, au pire indifférent. Victor Hugo en est-il arrivé là ? Est-il tombé à ce point ? Non, je ne crois pas. Et pourtant, il plaît un peu à tout le monde, ou du moins il est rare qu'il dérange ceux à qui il ne parle plus.
 
Qu'est-il donc arrivé ? Que s'est-il passé ?
 
L'effet seulement du temps ? Le rabotage du rabâchage scolaire ? A-t-on trop appris "Mes deux filles" à l'âge de sept ans et "Les Djinns" à celui de douze ? Victor Hugo finit-il par se confondre avec l'ensemble de l'architecture institutionnelle de notre société ? Est-il finalement l'article 0, écrit à l'encre sympathique, de notre consitution ? Peut-être.
 
Est-il en fin de compte victime de son succès ?
 
Trop fort, Victor Hugo ?
 
Disons en tout cas qu'il y a, dans son oeuvre, de quoi plaire à tout le monde : les catholiques adorent ses premiers recueils et même encore les "Rayons et les ombres", véritable joyau de technique poétique où la métaphysique sage, presque vignyesque, se glisse par longues flâneries, et ils retrouvent même matière à contentement dans l'étrange et tardif recueil inachevé, époustouflant par éclairs, "La fin de Satan" ; les autres déistes goûtent la "bouche d'ombre" des "Contemplations", certains passages des "Travailleurs de la mer" voire de "93", ou même de "le légende des siècles" ; les anticléricaux raffolent du sulfureux Claude Frollo de "Notre-Dame de Paris" et ne voient dans le Monseigneur Myriel des "Misérables" qu'une dénonciation de la richesse de l'Église sans d'ailleurs examiner que débarrassée de ses dorures sulpiciennes, l'Église redevient tolérable (malgré lui) par le grand homme ; les conservateurs l'apprécient parce qu'il appartient au passé ; les progressistes, parce qu'il a voulu l'avenir ; les vieux, parce qu'il leur rappelle leur enfance ; les enfants parce qu'il est rythmé ; les anar parce qu'il a été chanté par Brassens (ah, la "légende de la nonne !") ; les humanistes parce qu'il a défendu inlassablement l'être humain contre la machine sociale ; les révolutionnaires parce qu'il a été indulgent pour les Communards ; les francs-maçons parce qu'il défendait la conscience ; les utopistes parce qu'il ne s'est jamais résigné... Bref, tout le monde, à un moment ou un autre, a l'occasion d'un coup de foudre pour Victor Hugo.
 
Et pourtant, que lit-on de lui ?
 
Les poèmes étudiés en classe ("la rose et l'infante" : "tout en ce monde est aux princes, hors le vent", "les Djinns" : "Murs, Villes, Port, Tout dort...", et quelques autres), les extraits du Lagarde et Michard ou équivalents, les pièces des classiques Hachette ou équivalents.
 
Qui lit encore Victor Hugo à l'âge adulte à part Jean-François Kahn et moi? 

19:40 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature, écriture, poésie, victor hugo | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Commentaires

J'ai lu récemment Notre-Dame-de-Paris, qui m'a enchanté par sa construction romanesque parfaite et ses descriptions pittoresques avides de métaphores romantiques, ainsi que Quatre-vingt-treize, dont le coup de théâtre final laisse un goût délicieusement amer et procure une source de réflexion très intéressante sur le sens du devoir et sur l'éternel conflit entre les valeurs supérieures et les intérêts humains.
Bref, ce qui est toujours aussi captivant, c'est la plume, l'imagination de Hugo, et son talent légendaire pour raconter des histoires immortelles.

Écrit par : Ledru-Rollin 2007 | 12/12/2007

Je m'apprête à relire Quatre-Vingt Treize! Et j'ai lu le premier livre des Misérables. D'ailleurs, j'ai été bouleversé, je parle stylistiquement, par le passage consacré à la description de l'échaffaud duquel va tomber la tête d'un condamné que Monseigneur Bienvenu vient de visiter.

Sinon, il est vrai que Victor Hugo, tout le monde en parle mais personne ne le lit vraiment!

Excellent article!

Nicolas

Écrit par : Nicolas Vinci | 12/12/2007

C'est devenu un monument.
Un monument on le respecte, il fait référence, on le visite occasionnellement mais l'important c'est qu'il existe.

Écrit par : Rosa | 12/12/2007

Tu sais ce que je pense de Victor Hugo, du piédestal qu'il a édifié à sa propre gloire toute sa vie, et de l'insupportable hugolâtrie de Jean-François Kahn...

Moi vivant, Victor Hugo ne fera jamais consensus, et s'il n'en reste qu'un pour critiquer les "Châtiments", "Histoire d'un crime", et "Napoléon le petit", je serais celui-là... ;-)

Amicalement, :-)

Hyarion, le démocrate anarcho-monarchiste.

Écrit par : Hyarion | 13/12/2007

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