02/09/2009
Pourquoi la BNF doit résister à Google.
La Bibliothèque Nationale de France (BNF) annonce qu'elle est en pourparlers avec Google pour la numérisation de ses fonds. Tollé dans le monde scientifique, le ministre temporise, la commission européenne annonce qu'elle est aussi en négociation avec Google sur ce même sujet, et on se demande de quoi elle se mêle.
Je ne parlerai pas ici des autres grandes bibliothèques publiques européennes, dont je n'utilise pas les fonds numérisés. Je connais en revanche bien le fonds Gallica de la BNF, dont je suis usager régulier. Je connais aussi le service Google, car il m'arrive de le rencontrer en cherchant sur Internet.
Le premier constat est évident : la qualité du service proposé par Gallica est infiniment supérieure à celle du service Google. L'indexation des contenus, la présentation, la souplesse, la capacité de prise en charge en deux formats (tiff ou pdf), la rapidité et la simplicité du téléchargement... Et sur Gallica, on ne me propose pas de courir acheter ce volume introuvable que je consulte : la consultation et le téléchargement sur Gallica sont des outils scientifiques, pas des annexes d'une boutique.
Si j'ajoute ce qu'on dit, qui est que les numérisateurs de Google abîment fortement les ouvrages en les manipulant, qu'ils ne sont pas toujours exhaustifs (d'autant moins qu'ils ne comprennent rien à ce qu'ils photographient), que la quantité y est nettement au détriment de la qualité, j'avoue que je préfère que la BNF aille à son rythme, qui est celui d'offrir la qualité d'excellence scientifique qui est son domaine et son univers, laissant le reste au brigandage organisé qui se nomme Google.
Je ne dis pas ça parce qu'au bout de six mois, je n'ai toujours pas reçu le premier centime de Google Adsense (d'abord, on m'annonçait que je serais payé quand j'aurais atteint 10 Euros de chiffre d'affaires publicitaire, puis quand ce serait 70 Euros, j'en suis à presque 40 en six mois - il est vrai que mon blog s'est fortement ralenti - et je n'ai toujours rien reçu), car même si j'étais grassement payé par Google, je ne pourrais que constater que, s'il est vrai que Google propose des conditions en apparence très avantageuses pour ses services, il est évident que les contreparties seront exorbitantes, et qu'on parlera vite d'un épouvantable gâchis qui aura abîmé à la fois les collectiions et l'image de marque de la BNF.
Enfin, il faut le dire : le dépôt légal, qui existe depuis le XVIe siècle, est le nerf même du service public du livre, la numérisation est une étape historique pour ces ouvrages, elle entre dans la substance même du dépôt légal, elle en est le prolongement, elle doit appartenir à la BNF elle-même et être gérée au plus près du service public, la numérisation actuelle est satisfaisante, si plus de moyens peuvent l'accélérer, je vote pour plus de moyens, quitte à lever des fonds auprès du public.
Enfin, il me semble indispensable d'amender le principe du dépôt légal pour les ouvrages déposés quotidiennement : mes livres, les vôtres, ceux que les éditeurs produisent, ainsi que l'ensemble des publications sur papier (sans parler évidemment de celles qui demeurent à l'état numérique) sont numérisés. Dans quelques jours, c'est un fichier PDF que je vais fournir à mon imprimeur. Eh bien, si l'on prescrivait que ce fichier PDF, je le fournisse à la BNF avec le dépôt légal des livres imprimés, on gagnerait beaucoup de temps pour l'avenir. Voilà je crois, une vraie décision, utile, pour éloigner les marchands du temple.
07:22 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : culture, bnf, numérisation, google | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Commentaires
Très intéressant et largement de bon sens.
Écrit par : Claudio Pirrone | 02/09/2009
Qu'est-ce qui vous empêchez de la faire de votre propre chef pour les livres que vous écrivez (bien sur après accord de votre éditeur) ?
Écrit par : Eric Marroule | 03/09/2009
@ EM
Il faut que soit prévu un protocole de classement par la BNF, sans lequel ils ne sauront pas quoi faire de mon Cd rom.
Écrit par : Hervé Torchet | 03/09/2009
Je vous rejoins totalement sur le manque de qualité de la numérisation google. J'ai rencontré le cas d'une dame qui cherchait quel type d'arme était une "bache d'armes". En fait il s'agissait d'une information prise sur google book qui avait transformé hache d'armes en bache d'armes lors de la numérisation des vieux caractères d'imprimerie.
Écrit par : yvon le ny | 12/09/2009
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