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07/09/2015

Réfugiés : l'impasse syrienne

Une photo bouleversante a soulevé une vague légitime d'émotion dans le monde et a imposé à tous le principe de l'accueil des Syriens qui fuient leur pays vers l'Europe. La confusion de vocabulaire qui entoure leur fuite montre toute la douloureuse ambiguïté de la situation : tantôt on parle de migrants, tantôt de réfugiés. C'est qu'à l'instar des Arméniens de l'après 1915, il semble que les Syriens évadés ne puissent cultiver aucun espoir de rentrer jamais chez eux. L'avenir syrien est bloqué. Ce blocage est d'ailleurs l'un des terreaux sur lesquels prospère l'organisation État Islamique.

Rappelons-nous la dernière campagne présidentielle française et la vague d'indignation qu'avait soulevée chez nous la photo du Bachar El Assad reçu avec cordialité par Nicolas Sarkozy à l'Élysée à Paris. Étant donné l'atmosphère sanglante et atroce qui entoure le régime syrien, il était logique, et conforme aux promesses implicites de la campagne, que la France fasse tout ce qu'elle peut pour faire tomber M. Assad. De là la décision de bombarder Damas.

Mais il y avait eu l'erreur libyenne commise par la précédente majorité et il parut tout à coup que nous allions faire à Damas la même faute historique que celle qui a été commise à Tripoli. Puis les autorités russes manifestèrent leur volonté intraitable de conserver leur base militaire en Syrie, qui était le meilleur garant de l'avenir du régime de M. Assad.

Du coup, si Assad ne pouvait tomber, il fallait se concentrer sur son principal adversaire, l'EI, dont les exactions, en particulier contre les minorités religieuses, se multipliaient.

Aujourd'hui, nous en sommes là : impossibilité de faire tomber Assad, nécessité d'abattre l'EI, alliance avec les Kurdes et attitude plus qu'ambiguë de la Turquie. Pour la Turquie, la présence russe à sa frontière sud est un échec historique multiséculaire, et la perspective d'une indépendance kurde représenterait un retour en arrière par rapport au conflit de 1921-22 que la toute jeune république kémaliste emporta contre les Occidentaux.

On retrouve décidément "l'Orient compliqué" dont parlait de Gaulle.

Il ne fait pas de doute que nous viendrons à bout de l'EI. Cela se fera avec patience, en asséchant d'abord une à une ses sources de financement. Ce qu'il faudrait bombarder, ce sont ses installations pétrolières, soit dit en passant. Une fois le fruit mûr, il faudra le cueillir.

Mais nous ne pouvons franchir deux lignes jaunes : la première serait que les Occidentaux interviennent eux-mêmes sur le terrain, car cela reviendrait à rouvrir la question coloniale et envenimerait le conflit pour au moins des décennies, la deuxième serait de se montrer trop gourmand. M. Assad a gagné, hélas, le droit au maintien pour une génération.

Crac_des_chevaliers_syria.jpg

Et de ce fait, il est évident que nous ne pourrons pas renvoyer en Syrie des gens qui risqueraient d'y être massacrés et torturés par un régime qui n'est, objectivement, pas acceptable. La confusion sémantique entre réfugiés et migrants a donc tout son sens, elle traduit la réalité. À l'instar des Arméniens d'autrefois, ces réfugiés syriens, chrétiens ou non, sont bel et bien des migrants.

(photo : merci Wikipedia)

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