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07/07/2007

Le découvreur oublié de l’Australie était breton.

Louis XVI adorait parrainer des expéditions d’exploration maritime. Il y consacrait un fort budget qui donne l’occasion de rappeler que son règne est l’une des deux périodes de l’Histoire où la France disposa de la première flotte de guerre du monde.

Parmi les capitaines dont le nom survit, on connaît bien entendu Kerguélen, celui qui a donné son nom à l’archipel de l’océan Indien où la Marine nationale entretient l’une de ses bases les plus méridionales et les plus excentrées.

Ce Kerguélen, originaire de Quimper, était par ailleurs un franc-maçon engagé dans la loge quimpéroise où il retrouvait la plupart des officiers de justice locaux et une bonne part de la noblesse, surtout des cadets.

Parmi ses lieutenants liés à ce double milieu maçonnique et quimpérois figurait un personnage absolument méconnu dont le patronyme avait pourtant toutes les qualités pour inspirer Dumas : Alleno de Saint-Alouarn.

Ce Saint-Alouarn, particulièrement obstiné, poursuivit une exploration jusqu’à une terre jusque-là inconnue, qui ne recevrait que plus tard le nom d’Australie.

Pour tout savoir sur lui, on peut lire un bel album rédigé par son descendant Tudgual de Kerros (qui ne s’attarde guère sur ses préférences philosophiques) aux éditions “Les Portes du Large“, une parfaite lecture de vacances.

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06/07/2007

Bretagne : le centre à reconstruire.


Longtemps, le centre fut incarné en Bretagne par Pierre Méhaignerie, le maire de Vitré.

C’était alors, pour le centre, le temps des héritiers : Méhaignerie fils et successeur de son père, Barrot fils et successeur de son père, Bosson fils et successeur de son père, Baudis fils et successeur de son père, et combien d’autres.

Tous ces héritiers sont depuis lors passés à l’UMP.

Méhaignerie, lorsqu’il dirigeait la formation centriste (CDS) dans l’UDF, s’employait à noyauter la Bretagne. Le résultat de ses efforts fut … la disparition progressive du centre de la carte électorale bretonne, sauf dans son propre département, l’Ille-et-Vilaine où, au contraire, ce furent les gaullistes qui perdirent sans cesse du terrain.

Au moment où Méhaignerie quitta le centre pour passer à droite, le centre était majoritaire à lui seul en Ille-et-Vilaine.

Mais l’addition de ce centre et de la droite dans l’UMP fait qu’aujourd’hui, le département est … à gauche.

Il y a donc beaucoup à reconstruire et une vraie place pour le MoDem.

En vérité, ce qui a perdu Méhaignerie, c’est probablement l’argent, l’affaire de la construction du pont de l’île de Ré quand il était ministre de l’Équipement, et plus encore les curieux flux financiers qu’il a organisés avec l’argent de son parti, qui lui ont valu condamnation par la justice, une condamnation amnistiée avant même son prononcé.

Le côté sympathique du personnage résidait dans son rêve d’inventer une formation politique rien que pour la Bretagne. Il voulait en effet un parti régional, dans la logique agro-catho des héritiers du MRP, sans affiliation à une formation parisienne.

Il n’est pas parvenu à ce résultat, mais a désormais la haute main sur l’UMP bretonne.

Aujourd’hui, il ne reste plus qu’une poignée de députés de cette formation. Deux en Ille-et-Vilaine sont d’anciens centristes : lui-même et le maire de Saint-Malo, René Couanau. Un aussi dans le Morbihan est le vétéran de l’Assemblée Nationale, non le plus ancien mais le plus vieux : Loïc Bouvard, un ancien d’Air France père de six enfants (on dit qu’il ne s’est fait réélire que pour transmettre sa circonscription à un plus jeune UMP plus à droite). Dans le Finistère, les deux députés UMP restants sont plus à droite aussi, comme les autres du Morbihan. Il n’y en a aucun dans les Côtes d’Armor.

En Loire-Atlantique, département de la Bretagne historique, on se rappelle que Michel Hunault vient de passer au Nouveau Centre.

Les résultats électoraux du MoDem ont déçu en général après le beau score réalisé par François Bayrou dans la région. Douze ou treize pour cent ont été ici des scores courants pour des candidats du MoDem. Quelques-uns ont fait moins, comme Isabelle Le Bal à Quimper, d’autres ont brillé plus, comme Michel Canévet, maire et conseiller général, qui atteignait déjà dix-huit et demi lorsque Bayrou culminait à six virgule huit, et qui s’est haussé jusqu’à dix-neuf et demi. Bien entendu, mention spéciale pour Thierry Benoît, l’unique député métropolitain du MoDem hors des Pyérénées-Atlantiques.

Pour les municipales, il faudra trouver de bons candidats mais le terrain est prometteur : nombreuses sont les petites communes où Bayrou est arrivé en tête au premier tour de la présidentielle.

Dans les principales villes, l’électorat du MoDem sera décisif et tout le jeu pour les candidats consistera à coller au plus près de ces électeurs. L’effort ne sera pas toujours faible, en particulier pour une partie des anciens cadres de l’UDF habitués à vivoter comme force d’appoint de l’UMP : ils devront jouer leur carte jusqu’au bout sans tabou et ce sera pour eux une révolution culturelle qu’on leur souhaite de pouvoir assumer.

Il faudra donc leur fournir un outil programmatique simple et puissant, des valeurs fortes à défendre et à incarner.

Nantis de ces calculs et de leur score, ils devraient faire monter une génération nouvelle dans les conseils municipaux et produire un ou deux sénateurs en complément de Philippe Nogrix, à moins que Sarkozy ne réforme l’élection du Sénat d’ici là, mais comme on dit, ceci est une autre histoire.

05/07/2007

Vu de Bretagne.

Vue de Bretagne, l’actualité parisienne est lointaine.

Ici, l’offensive du pouvoir contre les gendarmes prend un tour très local : on ferme deux gendarmeries au motif de leur vétusté.

Bien entendu, le tissu social en souffre : encore des services publics qui désertent la campagne, ces deux postes de gendarmes se trouvaient dans les dernières parties vraiment rurales du Finistère.

On commente aussi le choix du rectorat pour l’implantation de l’IUFM : ce sera Brest et non Quimper. Le grand port militaire n’en finit plus de profiter de la présidence du département pour déshabiller le chef-lieu rival.

Le grand sujet qui a fait la une est surtout la création du parc régional maritime au large des côtes, autour des îles d’Ouessant et de Sein. Repoussée jusqu’après les élections pour ne pas effaroucher une population que l’on croit hostile au projet, cette initiative satisfait les amis de la nature maritime et inquiète tous les autres en menaçant le prix des terrains, une réalité à laquelle on est très sensible sur les côtes où les tarifs commencent à devenir intéressants.

Voilà donc quelques nouvelles d’ici.
 
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La république des chats.

L’endroit où je me trouve est une vieille maison, les murs datent du seizième siècle, légèrement remaniés au dix-neuvième.

À cette seconde époque, la vocation des lieux a changé : jusque-là, c’était un manoir ; à partir du milieu du dix-neuvième, c’est devenu une métairie. C’est mon quadrisaïeul qui a organisé cette mutation.

Il en résulte que la maison s’accompagne d’une vaste grange (articulée autour d’un four à pains antérieur) et d’une plus modeste crèche qui attendent des travaux d’aménagement.
 
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Pour lutter contre l’encombrante population des rongeurs, nous avons créé une patrouille active de chats. Ces petits personnages miaulants n’entrent pas dans la maison et vivent dehors ou dans les bâtiments agricoles toute l’année.

Leur présence nous permet de faire une véritable sociologie de la vie des chats en troupeau.
 
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Il y a une douzaine d’adultes : dix femelles, un mâle et un jeune mâle. Chaque année, le mâle, âgé de deux ans, est remplacé par le jeune mâle et celui-ci par un plus jeune. La vocation des mâles est de protéger le gynécée.

Ils y procréent d’ailleurs gaillardement, mais ne sont pas les seuls : d’autres matous du voisinage se manifestent régulièrement et confèrent leurs caractéristiques aux nouvelles générations qui naissent les unes après les autres.

L’élevage des chatons est hybride : parfois, les femelles surveillent très jalousement leur progéniture. Parfois, au contraire, elles en adoptent une gestion collaborative : les femelles se relaient pour garder et allaiter la jeune classe pêle-mêle, toutes familles confondues.
 
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Il est rare de passer devant un buisson sans entendre le couinement d’un chaton à partir de juin. Cependant, le troupeau se régule : il n’y a pas plus de deux ou trois individus supplémentaires par an, juste assez pour compenser les pertes dues aux maladies et aux combats contre les chiens et les belettes.

On imagine donc que la sélection darwinienne fonctionne à plein régime.

L’efficacité est garantie : dans un rayon de quatre-vingts mètres autour de la maison, on ne constate pas une souris, pas un rat, pas une taupe, pas un lapin, rien qu’un chat puisse manger. C’est un moyen naturel et imparable de nettoyer le jardin.

Pour les pelouses, les hôtes sont plus encombrants, mais bien beaux : nous accueillons des chevaux. Les champs deviennent des pâtures. Fort joli spectacle. De surcroît, le crottin de cheval est un excellent engrais et nous récoltons des kilos et des kilos de champignons (rosés des prés) chaque année.
 
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Et je résiste à la tentation d’aller découper un steak dans le flanc d’un de ces animaux. C’est pourtant délicieux, la viande de cheval.

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04/07/2007

Lefebvre Utile (LU) et parlement inutile (PI).

L’annonce de la vente des biscuiteries LU à un géant américain le jour même du discours d’investiture de François Fillon rappelle que Nicolas Sarkozy a de nombreux cadeaux à faire à ses commanditaires américains.

Il arrive que certains hommes de pouvoir vendent leur âme au diable pour leur carrière mais l’âme que Sarkozy a vendue, c’est la nôtre, celle de la France.

Quoiqu’il en soit, on est forcé de reconnaître que Fillon ne déçoit pas : il est aussi ennuyeux que prévu.

Sa phrase sur le couple présidentiel doit pratiquement être prise au premier degré. D’une part, parce que Fillon a été introduit en politique par Joël Le Theulle, homosexuel très explicite, mais aussi parce que c’est à une véritable démonstration par l’exemple de toutes les théories psychologiques que les deux hommes (Sarkozy et lui) se livrent depuis le 6 mai : tout masochiste cherche son sadique, tout sadique cherche son masochiste et les deux se sont incontestablement trouvés, Fillon le masochiste et Sarkozy le sadique.

En témoigne d’ailleurs la facétie qui a consisté à envoyer Fillon faire sa première visite officielle en compagnie du député Christian Vanneste qui a été condamné pour propos homophobes.

Après Sarkozy et Cécilia, Royal et Hollande, voici donc le troisième couple diabolique de l’année : Sarkozy et Fillon. Astiquez vos cuirs et vos latex.

Au milieu de cette danse des sept voiles, François Bayrou, le pouce gauche toujours dans le plâtre, a paru s’ennuyer ferme lors de la séance du vote d’investiture. La couverture de sa présence par la télévision a été sans surprise non plus : nulle.

Qu’a-t-il fait ? Qu’a-t-il voté ? Pas un mot. Ses sept millions d’électeurs jugeront.

On a en revanche revu l’inénarrable Maurice Leroy, toujours aussi inspiré, expliquer avec son aplomb habituel que le premier ministre a été désigné pour appliquer la politique pour laquelle sa majorité a été élue.

Il ne cherche pas à être bien noté par le petit président de la république inspirateur universel de toutes les politiques, celui-là. Sans doute pour tenter de garder notre sympathie mais c’est curieux, quand il parle, je n’ai plus envie de rire, c’est comme pour Santini, quelque chose ne passe pas.

Hollande, lui, m’a piqué mon mot : omniprésident. J’aurais dû le déposer à l’INPI.

Oh, je les plains, les députés. Ils n’ont jamais été aussi factices, jamais aussi réduits à leur fonction de super-élu local. Le parlement est élu pour obéir, ils le savent. Peut-on monter au calvaire sans pleurer ?

Les grands groupes financiers, eux, se frottent les mains : ils s’apprêtent à traire le PI. La France est bien leur vache à lait.

La préparation de la naissance du MoDem devrait nous consoler. Espérons.

01/07/2007

Jean-Luc Moudenc : comment ne pas perdre la mairie de Toulouse.

Jean-Luc Moudenc est issu d’un milieu modeste. Lorsque j’ai fait sa connaissance, en 1986, il résidait à Toulouse, chemin de Ramelet-Moundi, Les Toulousains jugeront.

Il a adhéré au Centre des Démocrates Sociaux en 1977. Il était alors âgé de seize ou dix-sept ans.

Ce parti avait été créé l’année précédente par la réunion du Centre Démocrate de Jean Lecanuet et du Centre Démocratie et Progrès (CDP) de Jacques Duhamel. Le CDP était issu d’une fraction du Centre Démocrate (essentiellement des parlementaires) qui, entre les deux tours de l’élection présidentielle de 1969, avait rejoint le camp de Georges Pompidou contre le propre candidat du Centre Démocrate, Alain Poher.

Lecanuet, qui avait entre-temps tenté l’aventure du Mouvement Réformateur avec les Radicaux de Jean-Jacques Servan Schreiber, avait pris en 1976 la présidence du nouveau parti et prendrait celle du nouveau conglomérat englobant aussi les Radicaux, les Sociaux-Démocrates et les Républicains Indépendants, l’année suivante : ce serait l’Union pour la Démocratie Française (UDF).

Lorsque j’ai fait sa connaissance, dans l’été 1986 donc, en Ardèche lors d’une Université d’Été, Jean-Luc Moudenc était déjà silencieux et compassé comme un cardinal. Il adoptait le ton qui fait qu’on le croit toujours à mi-voix. Ce qui frappait en lui était son nez.

On pouvait croire que Rostand avait écrit sa pièce Cyrano pour lui. Son appendice nasal le précédait partout de très loin.

Nanti de cette excroissance, Moudenc promenait son sourire sénatorial et sa silhouette calme au milieu d’une escouade de ses jeunes, dans une atmosphère très gaie et plutôt folle.

Doué pour les conquêtes de structure, il s’était constitué un réseau d’amis et d’affidés en prenant le contrôle de la mutuelle toulousaine des étudiants de droite et du centre. Il s’agissait du système SME-, concurrent minoritaire de la puissante MNEF.

Les SME, contrairement à la MNEF, formaient un réseau d’entités indépendantes regroupées selon un principe confédéral : le vrai pouvoir y était local. Je me souviens de la SMEREP, la mienne, celle des étudiants parisiens, mais on connaissait aussi la SMEBA, la SMESO etc.

À travers sa SME, il bénéficiait donc d’une logistique et d’une hiérarchie capable de détecter et de fidéliser des militants.

En 1984, Moudenc avait rencontré un jeune chirurgien, Philippe Douste-Blazy, qui faisait partie des talents prometteurs du jeune centre toulousain.

La ville était tenue par le vieux Pierre Baudis. Lorsque je notais que c’était un centriste presque historique, puisqu’il gouvernait sous cette étiquette dans les années 1960, Jean-Luc me corrigeait : Baudis roulait pour le centre républicain, et non pour le centre démocrate, et cette nuance changeait tout, car sous-entendu dans démocrate, il fallait lire démocrate-chrétien. Jean-Luc Moudenc s’épanouissait dans un milieu démocrate-chrétien, forcément minoritaire dans une ville longtemps marquée par le radicalisme.

En 1986, au congrès de Metz, nous élûmes notre bureau national des jeunes centristes (JDS). Deux listes se confrontaient : l’une, conduite par Éric Azière qui aujourd’hui gère les investitures pour Bayrou, l’autre menée par un autre Toulousain, Jean-Luc Forget, celui-là même qui vient de se présenter  sous l’étiquette MoDem contre Moudenc aux législatives toulousaines.

Sans figurer sur la liste d’Azière, j’y étais affilié, car il avait été prévu que je prendrais les fonctions du permanent de la structure sous la casquette de Délégué général national.

Il devint assez vite évident que nous allions gagner. Que non seulement nous allions gagner, mais que notre victoire serait écrasante (elle l’a été : 83%).

C’est alors que l’unique député jeune du parti, un certain François Bayrou, est intervenu auprès de nous : il ne supportait pas que, alors que nous militions tous dans le même mouvement, défendant les mêmes idées, nous puissions en venir à l’affrontement du suffrage. Il voulait DÉJÀ faire travailler ensemble des gens qui s’opposaient les uns aux autres.

Il demandait donc que nous fusionnassions les deux listes en une seule.

Le nombre de candidats était fixe et le scrutin prévoyait la victoire entière d’une liste bloquée. Autrement dit, Bayrou voyait juste : si nous voulions intégrer les autres à nos travaux, il fallait le faire avant le vote car après, ce serait trop tard.

Seulement le nombre de candidats sur chaque liste était limité et pour faire entrer l’un d’eux, il fallait aussi que l’un des nôtres s’effaçât. Et logiquement, puisque la tête de l’autre liste était toulousaine, il fallait que ce fût notre Toulousain qui lui cédât la place.

Jean-Luc Moudenc se retrouvait donc sur la sellette.

Les amis d’Azière se réunirent, votèrent, et décidèrent de maintenir leur liste telle quelle, de rester solidaire et d’aller au vote. C’était un signe d’amitié pour Moudenc.

Et c’est ainsi que j’ai fait partie de la même équipe de jeunes que lui pendant plusieurs années.

Lorsqu’Éric Azière, atteint par la limite d’âge, dut se retirer en 1991, je participai à diverses réunions qui précédèrent la candidature de Jean-Luc à la présidence des jeunes centristes, sans d’ailleurs m’y impliquer trop ouvertement en raison de la situation interne de la fédération de Paris : le candidat adverse de Moudenc n’était autre que Jean-Manuel Hue, aujourd’hui adjoint au maire du XVe arrondissement de Paris et alors président des jeunes centristes parisiens (j’étais son vice-président).

Jean-Luc Moudenc fut élu et cette position lui permit d’affermir ses bases toulousaines : il devint conseiller général, l’un des adjoints en vue de Baudis.

Il se présentait comme un conseiller très proche de celui-ci. Lors de la campagne européenne de 1994, Baudis codirigeait la liste d’union UDF-RPR avec Hélène Carrère d’Encausse.

Un hasard m’a amené à postuler pour rendre service à l’équipe de campagne et Jean-Luc, qui était le collaborateur politique attitré de Baudis, ne manqua pas l’occasion de me renvoyer l’ascenseur du soutien que je lui avais exprimé trois ans plus tôt.

Je devins ainsi le chef ( !) de l’équipe qui répondait au courrier reçu par les candidats.

C’était un poste politique, assez en vue, un geste élégant de sa part.

J’avais d’ailleurs une bonne image de Baudis, dont la belle-sœur et assistante parlementaire avait été une de mes chaleureuses relations à l’époque où j’avais moi-même été assistant.

Je m’engageai donc à fond dans cette campagne en oubliant qu’elle souffrait de la proximité avec la prochaine présidentielle. Et je fus reconnaissant envers Jean-Luc, dont je n’oublie pas la fidélité.

Quoiqu’il en fût, je mesurais tout ce qu’il faisait pour Baudis.

Il avait aussi contribué à l’élection de son ami Douste-Blazy à la mairie de Lourdes. L’un des jeunes toulousains, Thierry Dupuis, s’était même retrouvé chef de cabinet de Douste. Au moment d’une sombre affaire de parking et de pots de vin, Thierry Dupuis, que je connaissais bien et qui, c’est vrai, avait toujours été sujet à des états d’âme, fut retrouvé mort, et l’enquête conclut qu’il s’était suicidé d’un coup de fusil de chasse.

On sait quelles ont été les autres raisons qui ont poussé Douste à quitter Lourdes pour revenir à Toulouse ; la première de celles-ci était le départ de Baudis, empêtré dans une sombre histoire par des accusations lancées par une prostituée, histoire à laquelle j’avoue n’avoir pas cru un instant étant donné d’autres échos que j’avais sur Baudis.

Bref, Baudis partant, il lui fallait un remplaçant, Douste ne se sentait plus bien à Lourdes, ville d’ailleurs petite pour ses vastes appétits, et hantée par un personnage dérangé dont l’obsession consistait à lui planter un poignard entre les omoplates pour une raison qu’on a toujours ignorée.

Douste se voyait bien à Toulouse et Moudenc fut l’artisan de l’opération.

Il y gagna encore en influence locale.

Et quand Douste-Blazy, ministre, dut démissionner, Moudenc devint maire.

Je l’ai croisé pendant la récente campagne présidentielle, sur le point de rencontrer Bayrou. Il m’a paru figé, imprégné par la solennité, le copain s’effaçait derrière le magistrat municipal. Il est devenu une personnalité et se conduit comme tel. La fonction fait l’homme.

Il me confia alors le bonheur que représentait pour lui l’exercice de ce mandat de maire, pour lui, l’enfant d’une famille modeste.

Il ajouta que, désormais, son plus grand rêve, c’était de “continuer“.

Mais sur son blog, durant la campagne législative, j’ai lu que lorsqu’un de ses administrés l’interrogeait pour savoir si “en se rasant le matin“ il songeait à devenir ministre, Jean-Luc laissait clairement paraître son désir d’escalader cette marche-là.

Encore aurait-il fallu qu’il devînt député.

Or dans cette ville, Toulouse, Toulouse qui a longtemps voté à gauche aux présidentielles et qui tolérait que Baudis se fût rapproché de la droite parce que c’était Baudis, dans cette ville, donc, la gauche est redevenue majoritaire.

Jean-Luc Moudenc semble ne l’avoir pas compris.

Sa fidélité à l’UMP qu’il a rejointe en abandonnant ses amis centristes est devenue contreproductive.

Il aurait sans doute dû le comprendre avant l’élection. Mais il était si absorbé par l’idée d’empêcher Douste de revenir, qu’il ne l’a pas vu.

Il en sort évidemment affaibli.

On dit même que Baudis voudrait reprendre sa mairie.

Alors ? Quelle autre solution avait-il, Jean-Luc ?

Sans doute se rapprocher de Bayrou. Jouer l’option centriste pour endiguer les deux tentations. Or il n’est pas allé aussi loin.

Résultat : il risque perdre sa ville. Mauvaise pioche. Ce serait dommage pour lui.