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30/03/2009

Avant Hadopi : la vraie crise du cinéma.

Après un bon début d'année, le nombre des places vendues dans les cinémas, stable en moyenne, baisse énormément dans les régions et dans les cinémas indépendants. Dans le même temps, pour la première fois depuis très longtemps, il n'y a qu'un seul film français parmi les 10 premiers du classement des films sortis dans les douze derniers mois. Et d'ailleurs, il n'y a qu'un film (américain), dans le même classement, à avoir passé la barre des 5 millions d'entrées.

Il y a donc une série de films plus modestes qui ont obtenu des résultats commerciaux satisfaisants, sans plus.

Or il se trouve que, du point de vue des petites salles, une vraie locomotive rapporte bien plus que dix petits succès, et ce, pour une raison simple : ces salles ne passent qu'un film à la fois, tandis que les multiplexes en passent plusieurs. Paradoxalement, la "longue traîne" des films est nuisible à la "longue traîne" des salles.

Quoiqu'il en soit, l'Internet redevient le bouc-émissaire facile de ce trou d'air du cinéma. Et au lieu de se demander si les goûts du public n'auraient pas changé et si les moyens financiers du public n'auraient pas souffert, il est facile d'accuser l'hydre Internet et ses millions de têtes de pirates.

La vérité est que les films français n'intéressent guère le public français : en 2008, sorti du succès combiné des deux principaux succès (les Ch'tis et Astérix, 27 millions d'entrées à eux deux), les chiffres sont plutôt moyens, et cette tendance ne fait que s'accentuer en 2009, crise aidant. Pourquoi se forcer à aller voir des films qui ne sont pas intéressants ? Autant attendre qu'ils passent à la télé.

Ah au fait, à propos de la télé, le MIP (mais non, pas MIP MIP, mais le Marché International de Cannes) s'ouvre et quel est son sujet central ? La migration de la télé vers Internet. Tiens, tiens, en plein débat sur Hadopi, quelle coïncidence !

13:22 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : culture, cinéma, luc besson | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

16/02/2009

Filtrage (suite) le téléchargement dans la ligne de mire.

Je m'interrogeais récemment sur la notion d'"illégal" invoquée par Sarkozy pour contraindre les FAI à filtrer les sites "illégaux". D'une façon explicite, il s'agit de la pédopornographie. D'une façon implicite, du téléchargement illégal. Le cinéaste Luc Besson a en effet porté le fer ce week-end sur le thème sarkozyste contre les opérateurs d'Internet qui se rendent "complices" du téléchargement, ce qui a obligé un site canadien nommément désigné par lui, BeeMotion, à fermer, au moins temporairement.

14/06/2008

"Sagan".

Sagan est à peu près la jumelle de Bardot. Celle-ci est née fin 1934, celle-là avait vu le jour en 1935. Elles sont apparues à peu près en même temps, le milieu des années 1950, guidées par la même personne, Hélène Lazareff, fondatrice du magazine Elle et épouse de Pierre Lazareff, tout-puissant patron du quotidien alors souverain, "France-Soir". Bardot et Sagan sont filles d'industriels. L'une comme l'autre ont des attitudes d'enfants gâtées, et pourtant leur enfance est synonyme de guerre et d'Occupation. Toutes deux sont réputées avoir bousculé les conformismes de la vie bourgeoise par leur mode de vie, mais ont produit des oeuvres conformistes. Leur principale différence est que Bardot était belle et sensuelle, tandis que Sagan... euh...
 
Si l'on voulait aller plus loin dans cette comparaison, il faudrait énoncer l'impression que l'on a, que j'ai, qu'il y a, chez l'une comme chez l'autre, une profonde sévérité à l'encontre du genre humain. La défense des animaux chez Bardot est plus contre l'humain que pour l'animal. L'humain, coupable, forcément.
 
C'est un peu dans ce registre que se place Diane Kurys pour son portrait réussi de Françoise Sagan. L'écrivaine ne l'intéresse pas : ce qui touche Kurys chez Sagan, c'est son mode de vie, et en particulier son goût affiché pour les femmes, que la génération de Kurys (les baby-boomers) trouve avoir été révolutionnaire, avoir ouvert des portes jusque-là closes. En somme, tant pis si l'oeuvre est mineure et si elle plaît au public sans épater les professionnels : la vie vaut mieux que ça.
 
Mais si l'on admet ce point de vue, il faut dire aussi que, de la même façon que contre Bardot, on est très gêné par la mentalité de Sagan, que Kurys décrit comme incapable de la moindre considération pour autrui, même pour son propre fils. Pas un instant, elle ne s'émeut de la douleur de quelqu'un d'autre qu'elle-même, pas un instant, elle ne témoigne d'amitié, de tendresse. Sèche, froide, glaciale même, lucide, elle se sent seule, profondément, et décide de subir sa solitude en ne consacrant pas plus d'intérêt aux autres qu'elle n'accuse ceux-ci de lui en porter, même s'ils sont faibles. Il n'y a pas un mot sur la souffrance des gens.
 
En revanche, elle vit dans une opulence distraite, parfois dangereuse puisqu'elle dépense plus que ses ressources ne le lui permettraient en réalité.
 
Et finalement, il faut le dire, chez Bardot comme chez Sagan, ce qui semble prévaloir, ce sont les préjugés de leur milieu, la bourgeoisie aisée, immobile, parisienne. De là la superficialité revendiquée, la cérébralité de Sagan, la futilité de Bardot ; de là le cynisme de Sagan, le culte de l'animal chez Bardot. Toujours l'oeil froid sur l'être humain.
 
Et c'est donc sans doute ce qui a vraiment manqué à Sagan pour faire une oeuvre, puisqu'elle avait du talent : savoir s'émanciper tout à fait de l'esprit de son milieu, et cela d'une seule façon possible : par la compassion, par l'altruisme.
 
Ainsi Sagan, ne s'étant intéressée à personne, finit-elle finie, oubliée, seule vraiment, et transformée en objet sale, en animal encombrant.
 
Le film de Diane Kurys (qui parlait déjà de ses copines de classe il y a plus de trente ans dans le film "Diabolo Menthe" et qui, depuis, a produit quelques oeuvres très regardables) a d'abord été conçu pour la télévision et on nous dit que c'est Luc Besson qui a eu l'idée de le sortir au cinéma, il a bien fait.
 
Car même si l'on est un peu gêné au début par le côté légèrement précieux et figé de l'excès de reconstitution visuelle des années 1950, on redécouvre qu'une bonne biographie, avant d'être une étude des faits et gestes, est un portrait.
 
La composition de Sylvie Testud n'est pas dans le registre de l'inspiration, mais paraît impeccable, parfaite comme toujours chez cette actrice qui, par ailleurs, est devenue à son tour écrivaine.
 
Enfin, il vaut mieux se documenter un peu avant d'aller voir le film, surtout si l'on a moins de trente ans, pour pouvoir déchiffrer les personnages, tous oubliés aujourd'hui : Bernard Frank, Jacques Chazot (Pierre Palmade en douceur), Guy Schoeller, et quelques autres. La vie artistique parisienne des années 1960 reposait sur une élite mondaine qui n'a guère laissé de traces.