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27/06/2008

Opération modernisation = non-cumul : "le localisme, une exception française", France Forum.

Notre ami Werner Büchner signalait ce matin un article de la revue France Forum (qui partage les locaux de la rue de l'Université avec le MoDem), qu'il n'avait pas et qu'on lui avait antérieurement signalé.
 
Il se trouve que je suis abonné à France Forum et que j'ai reçu, ce matin même, le nouveau numéro de cette revue de réflexion de grande qualité. Outre un intéressant article de Jean-Marie Daillet sur l'Amérique et la laïcité, on y trouve en effet une étude très juste de Jean-Pierre Prévost sur le fonctionnement de la démocratie française, sur l'enjeu local comme aboutissement réel des efforts des élus nationaux, par un pur et simple mécanisme qu'il décrit avec efficacité.
 
Il conclut en focalisant (à juste titre) ses critiques sur le mode d'élection du Sénat, qui crée un véritable "suffrage censitaire". On voit d'ailleurs que c'est sur ce point unique que le Sénat concentre son barguignage avec l'Élysée : constitutionnaliser le mode d'élection des sénateurs, pérenniser à tout jamais le scandaleux déni de démocratie que constitue leur scrutin électif.
 
En s'attaquant au cumul des mandats, c'est donc bien à la racine du mal français le plus aigu, que nous nous en prenons, pourrais-je ajouter. C'est véritable oeuvre au nerf même de la démocratie.
 
Hélas, il se montre bien pessimiste : "Mais qui osera proposer l'élection au suffrage universel (direct) des membres de la seconde assemblée dans le cadre régional en même temps qu'un renforcement de ses pouvoirs ?
 
"Cela supposerait bein entendu d'autres réformes à commencer par l'interdiction absolue du cumul des mandats qui favorise la confiscation des pouvoirs par un petit nombre d'élus, l'apparition d'une nouvelle génération d'élus locaux, administrateurs plus que politiciens, et la disparition des assemblées départementales sous leur forme actuelle. Autant rêver, n'est-ce pas !"
 
En tout cas, si l'on constitutionnalise le mode d'élection des sénateurs, on saura définitivement qu'on ne peut plus améliorer les institutions françaises sans changer de république : il faudra glisser à la VIe république. Plus encore : il deviendra difficile de le faire sans passer par ce terrible moment, porteur de tant de dangers et d'incertitudes : une révolution.

23/06/2008

Opération modernisation = non-cumul : débat effarant au Sénat.

Il était question vendredi du cumul des fonctions de ministre et d'élu local. Des amendements proposaient d'étendre aux ministres les incompatibilités édictées pour les parlementaires. Je ne résiste pas à l'effarement de retranscrire la totalité de ce débat, dont le niveau (hors les interventions de Badinter) a été d'un niveau scandaleux de médiocrité. Le voici :
 
"M. le président. - Amendement n°179, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC.

Avant l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le premier alinéa de l'article 23 de la Constitution, le mot : « parlementaire » est remplacé par le mot : « électif ».

Mme Éliane Assassi.  - En étendant le régime d'incompatibilité gouvernementale à certaines fonctions exécutives locales, le gouvernement Jospin, en 1997, a réalisé un progrès que les gouvernements de droite n'ont pas remis en cause. Nous proposons d'écrire la règle dans la Constitution même. La commission Balladur a recommandé qu'un membre du gouvernement n'exerce pas de mandat local. Madame le Garde des sceaux, vous êtes bien placée pour savoir que les fonctions ministérielles demandent qu'on s'y consacre à plein temps !

M. le président.  - Amendement n°364, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.

Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article 23 de la Constitution est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les fonctions de membre de Gouvernement sont incompatibles avec l'exercice de tout mandat parlementaire, la présidence d'un exécutif ou d'une assemblée d'une des collectivités territoriales mentionnées à l'article 72, les fonctions de maire, toute fonction de représentation professionnelle à caractère national, tout emploi public et toute activité professionnelle.

« Un membre du Gouvernement ne peut exercer qu'un seul mandat électif au sein d'une assemblée territoriale. »

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Nous allons dans le même sens. Le Président de la République lui-même, dans la lettre de mission au Premier ministre, s'est prononcé pour la limitation des cumuls, la commission Balladur l'a dit aussi, pourquoi le consensus a-t-il disparu ? Les fonctions de ministre demandent trop de temps pour être compatibles avec la gestion d'une collectivité, en particulier d'une commune de plus de 20 000 habitants. Les membres du gouvernement obtiennent un parachute avec cette réforme, ils seront assurés de retrouver leurs mandats s'ils quittent le gouvernement : c'est une garantie suffisante.

M. Alain Gournac.  - Et Mme Voynet ?

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Elle est cosignataire, donc décidée à cette règle !

M. le président.  - Amendement n°429, présenté par M. Frimat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le premier alinéa de l'article 23 de la Constitution, le mot : « parlementaire » est remplacé par le mot : « électif ».

M. Bernard Frimat.  - Les fonctions ministérielles demandent qu'on s'y consacre à temps plein, même en cette période où le travail précaire et le mi-temps se développent. L'opinion publique comprend très bien qu'on ne peut plus être ministre trois jours par semaine et maire d'une grande ville les autres jours. Le Président de la République et la commission Balladur se sont prononcés dans ce sens, pourquoi y renoncer ?

Monsieur Karoutchi, nous ne sommes pas fermés à la discussion, comme vous le prétendez. Nous avons dit, depuis le début, que nous écouterions le Gouvernement et ce que nous entendons, c'est qu'il ne change rien de ses positions ! Le fait que les ministres se consacrent pleinement à leurs fonctions, cela va pourtant dans le sens de la modernisation ! La décentralisation a considérablement accru les missions, les responsabilités des exécutifs locaux, nous le savons tous. Alors, limitons davantage les cumuls sans, de grâce, s'accuser de tel ou tel cas personnel ! Et la limitation du cumul, à notre avis, doit s'appliquer aussi aux parlementaires. C'est peut-être un déchirement pour certains, nous devrons peut-être consentir des délais, mais il faudra bien y venir, l'opinion le demande !

M. le président.  - Amendement n°430, présenté par M. Frimat et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le premier alinéa de l'article 23 de la Constitution, après les mots : « mandat parlementaire, », sont insérés les mots : « de tout mandat de maire dans une commune de plus de 3 500 habitants, de toute fonction de président de conseil général ou de conseil régional, de toute fonction exécutive au sein d'un établissement public de coopération intercommunale, ».

M. Bernard Frimat.  - Repli.

M. le président.  - Amendement n°431, présenté par M. Frimat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article 23 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Les incompatibilités applicables aux membres du Parlement le sont également aux membres du Gouvernement. »

M. Bernard Frimat.  - Repli.

M. Christian Cointat, au nom de la commission.  - Ces amendements limitent le cumul des fonctions ministérielles, voire parlementaires, avec l'exercice de responsabilités locales. La révision constitutionnelle n'aborde pas le sujet, puisqu'elle ne modifie pas l'article 23 de la Constitution. Chacun convient, bien sûr, que les ministres doivent disposer du temps nécessaire à l'exercice de leurs responsabilités gouvernementales. L'expérience montre qu'ils y parviennent très bien en conservant leurs responsabilités locales, et qu'ils en tirent même grand avantage : leur ancrage au terrain est essentiel, c'est l'exercice du mandat local qui les fait coller à la réalité. Quant à l'extension de ces incompatibilités au mandat parlementaire, l'amendement n°431 exigerait qu'on toilette d'abord plusieurs textes qui renvoient à des fonctions obsolètes. Avis défavorable aux amendements n°s179, 364, 429, 430 et 431.

Mme Rachida Dati, Garde des sceaux.  - Les Français reprochent à leurs gouvernants d'être éloignés de leurs préoccupations, l'exercice d'un mandat local va dans le sens du rapprochement.

Le Gouvernement n'est pas favorable à l'interdiction pure et simple. Distinguer selon la taille des communes ne lui paraît pas plus pertinent. Les maires des petites communes sont très sollicités : ils ne peuvent s'appuyer, comme les maires des grandes villes, sur une administration.

Dans beaucoup de démocraties, un parlementaire qui devient ministre le demeure. Notre Constitution, pour des raisons qui tiennent à l'histoire, interdit formellement le cumul de ces deux fonctions. Pour le reste, laissons aux électeurs le soin de trancher : quand on n'est pas capable d'exercer à la fois un mandat national et un mandat local, ils le font savoir !

M. Robert Badinter.  - Quand on est ministre de la République, ce qui est un grand honneur, les citoyens considèrent avec raison que l'on doit tout son temps au Gouvernement de la France et que l'on ne peut pas se consacrer, en même temps, à une fraction du territoire national.

M. Josselin de Rohan.  - Et Defferre ?

M. Robert Badinter.  - Le cumul est un mal français. Admettre qu'un ministre en exercice, qui devrait s'employer sans discontinuer, surtout en un temps où l'Europe se construit, à remplir ses fonctions, consacre une partie de son temps à gérer une collectivité locale, c'est leur jeter le gant à la face.

Voulez-vous que je vous dise ce qu'ils pensent ? Que la seule chose qui intéresse ceux qui occupent des responsabilités nationales, c'est leur carrière, qui se joue sur le terrain ! Ce n'est pas sans raison que tous les comités ont préconisé l'interdiction. Je le répète, c'est un défi que vous lancez aux citoyens !

M. Alain Gournac.  - N'exagérons pas !

M. Josselin de Rohan.  - Et Mauroy ?

M. Robert Badinter.  - Ils considèrent qu'un ministre doit s'atteler à sa tâche matin, midi et soir ! Ils ne croient pas au surhomme !

M. Alain Gournac.  - Calmez-vous !

M. Josselin de Rohan.  - La gauche a-t-elle des leçons à donner en cette matière ?

M. Robert Badinter.  - Jamais, monsieur de Rohan, je n'ai cumulé les fonctions !

M. Alain Gournac.  - Peut-être n'étiez-vous pas assez proche du peuple...

M. Robert Badinter.  - Écoutez bien le nom que donnent les Français à ceux qui se livrent à cette double activité : des cumulards ! Je vous les laisse !

M. Josselin de Rohan.  - Comme Mme Voynet ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur.  - Efforçons-nous de garder la mesure ! J'ai toujours pensé qu'il ne fallait pas cumuler des fonctions que l'on ne peut pas assumer. (M. Michel Charasse approuve)

Quand on exerce des mandats locaux, on renonce à autre chose. Je respecte d'autant plus votre position, monsieur Badinter, que vous vous l'appliquez à vous-même.

M. Josselin de Rohan.  - Toute la gauche n'est pas comme lui...

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur.  - Ne me dites pas que des ministres, voire des Premiers ministres, n'ont pas pleinement assumé des mandats locaux d'importance. Je connais certain maire de Lille, qui siège aujourd'hui parmi nous et pour lequel j'ai beaucoup de respect, dont on ne peut pas dire qu'il ait occupé ses fonctions de Premier ministre à mi-temps.

M. Josselin de Rohan.  - Et Gaston ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur.  - Et Gaston Defferre, en effet ? Et Laurent Fabius ? (« Très bien ! » à droite)

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur.  - Gardons-nous donc des choix radicaux.

M. Alain Gournac.  - Et Voynet ?

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Elle n'est pas ministre !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur.  - Lorsque le non cumul a été imposé aux ministres, que n'a-t-on pas vu ! Ils n'étaient plus maires, mais ils restaient premier adjoint et continuaient d'occuper leur bureau !

Il n'est pas bon d'interférer sur ces questions : à chacun de se déterminer en conscience, et aux citoyens de juger si un ministre s'occupe bien de leur ville ou de leur département. Et la même chose vaut pour les parlementaires : l'aggravation de la charge de travail liée à la décentralisation devrait inciter certains à ne pas occuper certaines fonctions.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga.  - Écoutez nos compatriotes. Ils n'ont plus que le mot cumulard à la bouche.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur.  - Faux !

Mme Monique Cerisier-ben Guiga.  - Ils ne croient pas au surhomme ! Qu'avons-nous constaté durant la campagne municipale ? Un grand vide dans les ministères. Vouliez-vous, comme parlementaire, obtenir une réponse à un courrier ou à une question écrite ? Néant ! Hors même ces circonstances exceptionnelles, l'absence d'un ministre plusieurs jours par semaine laisse ses responsabilités aux mains de ses collaborateurs, qui, quelles que soient leurs qualités, ne sont pas habilités à prendre des décisions qui engagent la responsabilité de l'État.

Un ministre ne tient à garder son mandat que pour assurer son avenir politique, quand l'intermède ministériel sera achevé. Sans compter qu'il existe un conflit d'intérêt entre mandat national et mandat local : que d'implantations n'a-t-on pas vues dans certaines villes, au seul motif que le ministre en exercice a confondu l'intérêt de l'État et celui de sa ville ! (Applaudissements sur plusieurs bancs à gauche)

M. David Assouline.  - Nous débattons d'un sujet qui, dans le débat public, depuis quelques années, est devenu de plus en plus consensuel. Après Lionel Jospin, qui en a le premier imposé la pratique, l'actuel Président de la République lui-même a déclaré qu'il le souhaitait (Mme la Garde des sceaux le conteste)

Pourquoi cet énervement ? Précisément, je crois, parce que l'on touche à une réforme consensuelle, en faveur de laquelle le comité Balladur s'est prononcé à l'unanimité. Dépassant les clivages politiques, elle est placée sous les feux de la rampe. Son adoption signerait une vraie modernisation de la Constitution. Le cumul des mandats est une survivance archaïque : il fait de nous une exception en Europe.

Sur ce sujet très concret, vous auriez pu faire un pas vers nous. Mais une fois de plus, vous ne le faites pas ! Où est votre volonté de modernisation de notre démocratie ? A mesure que vous claquez les portes, vos véritables intentions s'éclairent.

Mme Nathalie Goulet.  - Il faudra bien un jour en venir aussi à la question de la présidence des exécutifs des EPCI.

Il est bon que le Parlement ait le courage de se saisir de la question du cumul. Cela dit, aux dernières élections régionales, on a vu des présidents de région devoir céder la place... Sans doute est-ce là le signe que l'on peut faire confiance aux électeurs.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Cet échange d'invectives entre ceux qui ont eu souventes fois le pouvoir ne me semble pas à la hauteur. Car des cumulards, on peut en trouver dans chaque famille politique.

Le comité Balladur s'est saisi du problème, répondant en cela à l'ordre de mission du Président de la République. Ne le suivrez-vous donc pas cette fois-ci ? C'est regrettable, pour une fois, car vous vous privez là d'un moyen de renouvellement et d'élargissement du personnel politique salutaire.

La classe politique qui se perpétue de père en fils, ça commence à lasser les citoyens.

M. Dominique Braye.  - Ils sont élus.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Le cumul d'un portefeuille ministériel et d'un mandat exécutif provoque des conflits d'intérêts. Édicter une règle absolue dissuaderait ceux qui ne sont pas sages.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Je rappelle que nous parlons du cumul des fonctions de ministre et d'élu et, je regrette, monsieur Gournac, Mme Voynet ne cumulait pas quand elle était ministre.

M. le président.  - Evitons les interpellations entre collègues !

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - J'ai moi-même été interpellée, je ne fais que répondre ! S'il y a des cumuls, c'est qu'ils ne sont pas illégaux : cela n'existerait pas s'il y avait une loi. Vous êtes plusieurs à cumuler...

M. Dominique Braye.  - Mme Voynet n'a pas respecté ses engagements, c'est pire !

M. le président.  - Laissez parler l'oratrice !

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Pour ma part, je n'ai jamais cumulé.

M. Christian Cambon.  - Vous ne pouvez peut-être pas vous faire élire au scrutin uninominal...

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Il est dommage que certains cumulent, et parfois depuis trente ou quarante ans : il y a aussi un cumul dans le temps. (Vives interruptions à droite)

M. Dominique Braye.  - Vous parlez aussi pour plusieurs de vos collègues !

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Il doit quand même être possible de s'exprimer ici !

M. le président.  - Poursuivons le débat !

M. Michel Charasse.  - Le sujet du cumul passionne, on le voit, mais il peut facilement conduire à une certaine démagogie. Même si je ne suis pas d'accord avec lui sur ce point, ce qui est rare, je respecte le président Badinter car il fait ce qu'il dit et dit ce qu'il fait. En revanche, je trouve insupportable les donneurs de leçons qui ameutent l'opinion contre le cumul mais se jettent sur tout ce qui passe. (Marques d'approbation à droite)

A la demande du groupe UMP, les amendements n°s179 et 429 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 329
Nombre de suffrages exprimés 328
Majorité absolue des suffrages exprimés 165
Pour l'adoption 126
Contre 202

Les amendements n°s179 et 429 ne sont pas adoptés."

 

21/06/2008

Opération modernisation = non-cumul : j'ai signé la pétition.

Vous avez certainement déjà signé la pétition dont Werner Büchner assume la charge, comme Quitterie Delmas l'a suggéré aujourd'hui, mais si ce n'est pas encore fait, vous pouvez courir Signer ici ! 
 
Les explications sont sur le blog de Quitterie et celui de Werner, il fait bien trop chaud pour que je me fende d'une longue dissertation. C'est l'heure du farniente devant un bon film. Vous me conseillez quoi ? 

Opération modernisation = non-cumul : qui est allé au colloque ?

Il y avait, la semaine dernière un très intéressant colloque sur le cumul des mandats, organisé par Sciences Po Bordeaux. Il ne s'agit pas d'une opération politique, évidemment, mais il serait diablement utile de se procurer un compt-rendu de cette session dont je vous livre le texte de présentation :
 
Le cumul des mandats : anciennes pratiques, nouveaux enjeux

Journée d’études organisée par l’Ecole Doctorale de Science Politique de Bordeaux en partenariat avec l’Association Française de Science Politique (GRPP et ArP)

Comité d’organisation : Ségolène Dauga, Julien Dewoghélaëre et Julien Navarro
Comité scientifique : Martial Foucault, Abel François, Eric Kerrouche, Raul Magni Berton, Julien Navarro et Pierre Sadran
Date : 17 juin 2008
Lieu : Institut d’Etudes Politiques de Bordeaux
Contact : cumuldesmandats@yahoo.fr

Les récentes élections municipales montrent que la question du cumul des mandats garde toute son actualité. Malgré les lois adoptées en 2001 et 2002 pour en encadrer la pratique, le cumul n’a pas connu de reflux significatif. La figure du député-maire et celle du sénateur-maire continuent de dominer la vie politique française et, avec la multiplication des strates de gouvernement, il faut en outre désormais compter avec le cumul de fonctions intercommunales, départementales et européennes et, de manière moins visible, avecl’exercice de fonctions non électives.

Si le cumul des mandats fait partie des « serpents de mer » de la vie politique française, son étude par la science politique reste très lacunaire. Au-delà des commentaires plus ou moins intéressés sur l’opportunité de cette pratique et sur les moyens de la limiter, force est de constater la persistance d’un véritable déficit d’analyses informées et systématiques sur le sujet. Afin de combler cette lacune, il convient d’explorer le phénomène du cumul des mandats dans ses multiples dimensions.

Il faut en premier lieu circonscrire le problème. Qu’est-ce que le cumul des mandats ? Pour répondre à cette question, il faut tout autant explorer la voie socio-historique (comment le cumul des mandats s’est-il constitué en phénomène sociopolitique dans le temps ?) que comparative (s’agit-il d’un phénomène strictement hexagonal ? quelles formes emprunte-t-il ailleurs ?). Définir le cumul des mandats c’est aussi s’interroger sur la multitude de ses formes : cumul en grappe, cumul des fonctions électives et non-électives,cumul vertical, cumul horizontal, cumul dans le temps, etc.

Un deuxième enjeu spécifique pour la science politique consiste à s’interroger sur les effets du cumul des mandats et, de manière connexe, à sa reproduction. Le cumul des mandats est-il un atout dans la compétition politique ? Fait-il obstacle à l’émergence d’une concurrence crédible ? Quelles ressources, y compris financières, procure-t-il ? Quelles sont les stratégies déployées par les acteurs pour se constituer un « portefeuille de mandats » ? Quelles sont les conséquences du cumul des mandats pour l’exercice du métier politique ? Les cumulants sont-ils moins efficaces compte tenu du manque de temps et de la dispersion des moyens ou parviennent-ils au contraire à réaliser des économies d’échelle et à maximiser les bénéfices de chaque niveau institutionnel ?

A travers la thématique du cumul des mandats, c’est aussi la sociologie du personnel politique que l’on peut interroger. A première vue, le cumul traduit une accumulation des positions de pouvoir par un nombre limité de personnes. Quels sont les acteurs politiques qui parviennent ainsi à cumuler un grand nombre de mandats ? Le cumul résulte-t-il d’un lent processus d’accumulation ou est-il constitué dès le début d’une carrière politique ? La féminisation – très relative – du personnel politique modifie-t-elle la pratique du cumul des mandats ? Quels sont les effets du cumul pour les équilibres inter-institutionnels et, en particulier, pour le rôle de parlementaire ?

Ce sont quelques unes des questions que l’on se propose d’explorer lors d’une journée d’études organisée par l’Ecole Doctorale de Science Politique de Bordeaux en partenariat avec le Groupe Argent et Politique et le Groupe de Recherche sur les Parlements et les Parlementaires (AFSP). Trois axes de réflexion sont privilégiés : les acteurs et les territoires du cumul, sa dimension financière et son articulation à lagouvernance multi-niveaux.


Programme

9h00 Accueil des participants
Allocution de Pierre Sadran (Sciences Po Bordeaux)
9h30 Le cumul des mandats : acteurs et territoires sous la présidence de Jacques Palard (SPIRIT, CNRS)
Guillaume Marrel (Université d’Avignon) : Le cumul des mandats électifs sous la Quatrième République

Ségolène Dauga (SPIRIT, Sciences Po Bordeaux) : Le cumul des mandats au prisme du genre : le cas des nouvelles entrantes en politique professionnelle
Sébastien Vignon (CURRAP, Université d’Amiens) : Le cumul des mandats chez les élus ruraux : entre gratification et gestion des tensions

Discutant : Raul Magni Berton (Sciences Po Bordeaux)
12h30 Pause déjeuner
14h00 Cumul des mandats et compétition électorale

sous la présidence de Claude Sorbets (SPIRIT, CNRS)
Martial Foucault (Université de Montréal et EUI) et Abel François (LaRGE, Université Robert Schuman) : Que vaut un mandat ? Le cumul des mandats dans les relations financières entre candidats et partis politiques
Eric Phélippeau (GAP, Université Paris Nanterre) et Pascal Ragouet (Université Bordeaux II) : Cumul de mandats, accumulation de capital économique et performance électorale
Discutant : Pierre Lefébure (Sciences Po Bordeaux)


16h00
Le cumul dans la gouvernance multi-niveaux sous la présidence de Pierre Sadran (Sciences Po Bordeaux)
Jean-Benoit Pilet (Centre d’étude de la vie politique, Université Libre de Bruxelles) : Le cumul des mandats dans un pays aux niveaux de pouvoir multiples. Le cas de la Belgique


Julien Navarro (SPIRIT, Sciences Po Bordeaux) : Le cumul des mandats au Parlement européen : causes nationales, conséquences européennes
Discutant : Eric Kerrouche (SPIRIT, CNRS)


17h45
Fin des travaux
 
Par ailleurs, je vous reommande tout particulièrement la note de Quitterie Delmas d'aujourd'hui, plus que prometteuse. 

15/06/2008

Modernisation = non cumul des mandats : question d'argent ?

Lors de la dernière République des Blogs, j'ai un peu bavardé avec Alex de Melun, assistant parlementaire d'un député UMP et blogueur. En rôdant dans la blogosphère, je m'aperçois qu'il a donné en novembre dernier un très intéressant point de vue sur le cumul des mandats, qu'il conclut en indiquant qu'il est favorable au mandat unique.
 
Pour lui, le nerf de l'affaire est bien la rémunération des élus.
 
De fait, l'activité politique consiste essentiellement en un réseautage permanent. Obtenir un mandat indemnisé revient à se faire rémunérer pour tisser des réseaux personnels. En obtenir deux permet d'y gagner à la fois en crédibilité et en revenu, donc en efficacité autant qu'en confort. Si bien qu'au lieu que l'engagement au service de tous soit un moment de la vie de chaque citoyen (selon l'expression de Quitterie Delmas), ce n'est qu'un parcours personnel, le fil d'une vie, un curriculum comme un autre.
 
Alex de Melun propose de rémunérer mieux les petits maires, le débat sur sa note est de bonne qualité.
 
Par ailleurs, je note que Jérôme Charré (dont j'attends d'autres travaux avec impatience), dans son compte-rendu d'une après-midi de séance du congrès de Cap 21, rend compte d'un débat qui y eu lieu sur le cumul des mandats, dont la prohibition est écartée par Corinne Lepage, avec les mêmes arguments que François Bayrou d'ailleurs...

11/06/2008

Opération modernisation = non-cumul : l'élu, la fonction et le statut.

Trente-six mille communes, des milliers de structures intercommunales, cent départements, vingt-deux régions métropolitaines, un certain nombre Outremer, des collectivités à tous les étages, un demi-million d'élus, et huit ou dix fois plus de fonctionnaires de l'État, du secteur public hospitalier et des collectivités locales : voici les facteurs institutionnels et humains de l'action publique, chargée de gérer une enveloppe budgétaire globale sans doute supérieure à 750 milliards d'Euros, la moitié du PIB (au passage, je signale qu'en termes de PIB, la France est redevenue n°5 mondial en raison de la chute du sterling).
 
Or il y a une curiosité dans ce tableau : les élus et les personnels ont la même préoccupation dialectique : leur rôle devrait se caractériser par leur fonction, mais il se définit surtout par leur statut. Le fonctionnaire (fonction ! publique) est en fait défini, selon la jurisprudence administrative, par son statut. On peut être agent public de fait si l'on s'est trouvé par circonstance dans la position de remplir une mission de service public, voire si l'on est salarié d'une collectivité publique, mais pour être fonctionnaire, il faut en avoir un statut. Il y a une définition purement corporative du fonctionnaire.
 
Et comme s'il s'agissait d'une nature sociologique française profonde, le même mal a gagné l'élu, qui finit par se définir non par ce qu'il fait, mais par ce qu'il est : on EST un élu. On EST maire, maire-adjoint (on ne dit pas "adjoint au maire", ça fait subalterne, tandis que maire-adjoint, c'est déjà un maire, j'ai d'ailleurs entendu des responsables associatifs me présenter à leurs membres comme "notre maire", autrement dit "celui des maires qui s'occupe de nous autres, des sports"), conseiller général, député, ministre. D'ailleurs, en fonction de ce statut, le protocole organise la traduction physique de chaque titre : comme sous l'Ancien Régime, chacun a sa place. Seulement (et c'est une amélioration), en principe, les places tournent. Je dis "en principe" car, de même que les fonctionnaires, les élus ont tendance à considérer que s'ils intègrent la corporation, s'ils deviennent élu, c'est pour toujours, pour y rester, pour y faire au moins leur trou, voire plus.
 
Mais pour justifier d'y rester, il vaut mieux pouvoir dire qu'on y a été utile. Et c'est là que la question protocolaire devient centrale : un préfet ne reçoit pas lui-même le maire d'une trop petite commune (sauf événement particulier), le maire est reçu par son directeur de cabinet (dircab) ou un autre subalterne, parfois très subalterne. Un conseiller général, lui, voit s'ouvrir beaucoup de portes devant lui, il n'a aucune difficulté à accéder au sous-préfet, mais pour le préfet, c'est plus difficile.
 
Et ainsi de suite...
 
Et c'est pourquoi le maire d'une petite commune, imbriquée dans une communauté de communes, n'aura de cesse d'acquérir une casquette plus galonnée pour avoir accès à un gradé plus élevé de la hiérarchie de l'État, ou d'un consortium économique, d'ailleurs. Quand on est maire de Sableville, on a envie de devenir conseiller général de Plageville, député de la 3e du département du Littoral, ou sénateur.
 
Et à chaque fois, on le fait pour exercer sa fonction, mais sans se rendre compte du glissement qui fait qu'on confisque une fonction pour en exercer une autre.
 
Voilà le mécanisme parfaitement pernicieux qui fait qu'en France, pour obtenir les bonnes grâces de l'État, il faut cumuler.
 
Ne cherchons pas ailleurs la raison de cette spécificité française que constitue le cumul des mandats : c'est la dépendance des collectivités locales à l'égard de l'État qui en est responsable. Ce qui est local étant humilié éprouve le besoin de se grandir pour devenir un interlocuteur plus crédible. S'il y avait plus (ou encore moins) de liberté locale, il y aurait moins de cumul.
 
Bon, évidemment, je pourrais aussi insinuer que pour certains, la fonction élective est le moyen de prélever des commissions sur des marchés publics, que pour d'autres elle représente la pure griserie du pouvoir dont il faut accaparer le plus de leviers possibles, mais il me semble que ma note est déjà assez longue comme ça et je m'en voudrais d'encourir les foudres de Quitterie Delmas qui a lancé l'opération...
 
Voici donc mon remède : moins de collectivités locales, avec des missions plus claires, un périmètre mieux défini et des moyens plus autonomes.
 
Et vous ?