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31/03/2012

Impostures de fin de campagne

Non, la France n'est pas hantée par des hordes de terroristes enturbannés et masqués qui, dans l'ombre, prépareraient des égorgements géants. L'horrible manipulation orchestrée autour de la mise à mort de Mohamed Merah est l'une des abominations les plus épouvantables que j'aie vues depuis que je suis adulte et citoyen. J'en suis au bord de l'écœurement.

Soyons sérieux : les failles font de ce dossier l'un des plus répugnants de l'histoire de la Ve république, d'autant plus répugnant que des enfants sont morts. Et la revendication politique de cette manipulation grossière couronne l'événement dans son ignominie : que démontrerait-il s'il n'avait pas été organisé avec soin ? l'incapacité du pouvoir actuel à juguler les mouvements contre lesquels il a afffirmé pendant cinq ans avoir fait tous les efforts. Ni plus, ni moins. Et s'il est vrai que les scores finaux des candidats de droite et du centre fussent ceux promis par les sondages actuels le 22 avril, nous devrions en rougir de honte, nous, la France, nos responsables politiques et médiatiques, car il y aurait là le plus grand des déshonneurs avec la victoire idéologique de l'extrême droite et l'affaissement moral de nos élites et de notre peuple réduit à une veulerie intellectuelle que seul le matraquage médiatique pourrait excuser en partie.

Imposture, donc. Double imposture, car cette diversion abjecte exonère le pouvoir de la lourde responsabilité qui est la sienne dans l'aggravation de la situation budgétaire et financière de notre pays depuis son installation. Il y a certes eu des efforts notables faits en 2011, mais après combien de dépenses aberrantes engagées sans aucune considération pour l'avenir ? Et combien de dépenses nouvelles déjà promises par un candidat indifférent au sort de la population française ?

François Bayrou garde son avenir et le nôtre entre ses mains, mais le reste du monde politique devrait s'apprêter à rougir s'il est incapable d'imposer le verdict de la réalité à l'abjection et au déshonneur de la magouille sanglante.

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30/03/2012

Reconstruire

En marge de l'actuelle campagne présidentielle, il y a, pour le centre, la perspective de la reconstruction. Celle-ci ne va pas de soi. Bien entendu, si Bayrou gagne, tout est simple, mais s'il ne gagne pas, et a fortiori s'il ne dépasse pas le premier tour, il y a un goulot d'étranglement sur ce qu'il dira du second tour, et un autre sur les législatives. Les élus qui l'ont rejoint récemment se contenteront-ils d'une position neutre de sa part entre les deux tours ou préféreront-ils qu'il opte pour l'un ou l'autre candidat ? Et quid d'une stratégie pour les législatives ? accords de second tour ? avec qui ?

Tout cela nourrit la gamberge des sympathisants de Bayrou que j'ai en ce moment au bout du fil en participant à la cellule téléphonique au siège de campagne. Personnellement, ces questions de second tour ne m'agitent pas, car en 1988, la consigne donnée par Raymond Barre entre les deux tours n'a pas été suivie par la majorité de ses électeurs, et nul n'en est mort, ni lui ni eux.

Le deuxième goulot sera évidemment les législatives. Là, Bayrou pourra-t-il demander aux députés qui l'ont rejoint de prendre le risque de la triangulaire ? A-t-il les moyens de négocier leur salut sans cela avec l'un ou l'autre camp ? Et comment conserver un centre incluant des adhérents issus des centres droit et gauche ? Voilà de quoi cogiter, on le comprend, en se remémorant le vers célèbre "Heureux qui, comme Ulysse...". Peut-être, d'ailleurs, si l'on penche un peu plus à droite qu'à d'autres moments, certains retours (même sur un pied modeste) rassureraient-ils l'aile gauche.

François, Marielle, et tous les autres, le sort de nos idées repose sur votre talent et sur votre inspiration, et personnellement, j'ai confiance dans votre capacité, et je crois que les bayrouistes, inquiets de la pression infligée à notre candidat par les médias et par nos adversaires, gardent une confiance intacte, eux aussi, ils savent qu'il suffit d'une mince étincelle pour, demain, gagner.

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27/03/2012

Le rassemblement

J'extrais du verbatim du discours de Bayrou au Zénith, dimanche, le calendrier qu'il s'est fixé pour le premier semestre de sa présidence :

"Le 10 juin, jour du premier tour des élections législatives, les Français voteront par référendum la loi de moralisation de notre démocratie.

Le 17 juin, les Français donneront une majorité à l’oeuvre de redressement et d’unité nationale.

Avant le 14 juillet, le gouvernement préparera une loi de finances rectificative qui portera en particulier sur des économies dans le fonctionnement de l’État, la création d’un point de TVA et l’abaissement des niches fiscales.

Avant le 14 juillet, il créera la possibilité d’un emploi sans charges pour toutes les entreprises de moins de 50 salariés.

Avant le 14 juillet, je mettrai en place le Commissariat aux stratégies de production et je lancerai la réflexion, filière par filière, avec les entreprises, les représentants des salariés et tous les acteurs du financement de l’économie.

Exceptionnellement, il n’y aura pas de vacances parlementaires et le Parlement siègera pendant tout l’été.

Le Parlement, pendant la session extraordinaire, préparera une loi-cadre sur le « produire en France » et se prononcera sur un texte portant diverses mesures d’urgence : en particulier, la suppression de la caution pour les locataires et la création d’une mutuelle obligatoire pour les risques locatifs et, dans le domaine de la santé, l’autorité indépendante chargée de l’alerte.

Durant l’été, je lancerai le Grenelle de l’éducation dont les conclusions me seront rendues avant la fin de l’année 2012.

À l’automne, après discussion approfondie avec les partenaires sociaux, un grand projet de loi sociale sera débattu au Parlement, en même temps que le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il permettra entre autres la participation des salariés aux conseils d’administration et aux comités de rémunération des entreprises. La loi visera à limiter le recours aux CDD et au temps partiel abusif et à supprimer les freins à la création d’emploi. Je proposerai que soit soumis aux partenaires sociaux l’idée d’un contrat de travail unique fondé sur une consolidation progressive des droits.

Branche par branche, je demanderai aux partenaires sociaux que soient examinées des propositions adaptées et nouvelles afin d’augmenter le pouvoir d’achat des salariés.

Durant cette session parlementaire, le gouvernement soumettra également au Parlement une loi sur la presse qui traitera de l’indépendance des médias, particulièrement des médias publics, de la protection des sources, des droits et devoirs des journalistes...

Pour soutenir les associations et reconnaitre leur rôle irremplaçable dans la société, j’ouvrirai la possibilité de bourses d’engagement, offertes en contrepartie d’un engagement de jeunes ou de seniors, la validation des acquis de l’expérience et je définirai un cadre juridique de l’emploi bénévole.

Je ferai enfin voter avant la fin de l’année 2012 une loi sur l’égalité hommes- femmes, qui traitera de la parité politique, de l’égalité salariale, des violences conjugales.

Dès la fin de 2012, le paysage de la France aura changé. Les conditions du redressement seront réunies."

Voilà de quoi lancer en effet une nouvelle étape pour le pays, par le rassemblement, un message d'espoir.

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26/03/2012

Désobéir

Il y a une longue tradition de liberté en France, pays dont on a longtemps chanté l'humeur frondeuse. Et de Gaulle, aussi bien dans les brumes glauques de 1940 que dans celles du coup d'Alger de 1961, a su s'appuyer sur la capacité des Français à résister aux ordres injustes ou illégaux. La résistance à l'oppression fait partie de nos droits imprescriptibles et, de ce fait, un personnage investi d'une autorité publique a le droit et même le devoir de désobéir à un ordre manifestement illégal de sa hiérarchie.

En n'interrompant pas sa campagne électorale au soir de la tuerie de Toulouse, François Bayrou a désobéi. La droite lui en a d'ailleurs fait le reproche et c'est cet acte d'insoumission, bien plus que les paroles qu'il a prononcées à Grenoble, qui lui a valu les récriminations d'Alain Juppé. Il faut dire que celui-ci se souvenait avec encore une certaine douleur au fondement d'un jour où, à Toulouse, Bayrou s'était invité au congrès fondateur de l'UMP pour y exprimer, déjà, sa désobéissance au nom du droit à la pensée libre  "Si nous pensons tous la même chose, c'est que nous ne pensons plus rien".

Il en fallait, du courage, hier, pour venir au Zénith, pour désobéir ainsi à la pression sondagière et médiatique, et à l'injonction d'un Sarkozy que le retour de Bayrou inquiète. Mais ils étaient là, ils étaient tous là, vous, nous, tous, en ordre de bataille, mobilisés pour une cause plus grande qu'eux-mêmes, et si, bien entedu, vous pouvez allez écouter tout le discours de Bayrou sur le site de campagne, je vous invite à lire les 25 phrases relevées par Rue89, elles me semblent refléter assez bien l'esprit de cet après-midi où nous avons sacrifié un peu de notre soleil pour beaucoup de notre liberté.

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24/03/2012

Une campagne électorale réussie

Nous sommes entrés dans le dernier mois du premier tour de la campagne présidentielle. Peut-être ce premier tour sera-t-il décisif, c'est du moins ce qu'annoncent les sondages d'intentions de votes, avec un second tour Sarkozy-Hollande joué d'avance. Espérons que la raison triomphera et portera Bayrou vers les cimes que lui prédisent toutes les enquêtes d'opinion autres que celles des intentions de votes. Quoi qu'il en soit, voici quelques réflexions qui me viennent en cette fin de ma dernière campagne présidentielle.

Une campagne, c'est d'abord un concept. Le changement dans la continuité (VGE 1974), La force tranquille (Mitterrand 1981), La France unie (Mitterrand 1988), la France pour tous (Chirac 1995), Ensemble, tout devient possible (Sarkozy 2007). Le dernier de la liste est d'ailleurs le moins net, le moins explicite, l'Ordre juste de Ségolène Royal avait un peu plus de tenue, mais comme c'était un oxymore, il n'a pas pris.

Beaucoup de gens qui travaillent sur la politique confondent concept et slogan. Ceux qui croient qu'un slogan peut faire une campagne se trompent gravement. Un concept peut soutenir toute une campagne, un slogan s'usera vite.

Ce concept peut se ramifier en thèmes, mais il faut se méfier des concepts-gigognes, intellectuellement satisfaisants, trop satisfaisants, car il versent facilement dans l'artifice et dans l'effet facile. La campagne de Montebourg lors des primaires du PS illustrait parfaitement cette facilité, ramenant tout à la (dé)mondialisation, comme dans une pièce de Molière où le diagnostic médical revient invariable : "Le poumon, vous dis-je". Trop de cohérence aboutit à la gesticulation. Il faut laisser les concepts respirer, il doit se glisser de l'imagination de l'électeur entre les lignes, faute de quoi on cesse de le surprendre et donc de l'intéresser.

En revanche, la litanie des thèmes, leur chapelet, se doit de s'égrener avec sens du rythme, et si l'on donne tous ses thèmes dès le début de sa campagne, on se condamne à se répéter, ce qui finit par devenir inaudible.

Le rythme, c'est le second axe crucial d'une campagne. Temps forts, temps faibles, pauses, rebonds, silences (relatifs), coups de gueule, tout ceci peut être planifié avec souplesse d'avance. La préméditation est essentielle, on compose ses séquences de campagne comme une équipe municipale : il faut un représentant des gueulards, un des zoophiles, un des pêcheurs à la ligne. Il faut aussi des points d'orgue médiatiques (Bayrou a été très fort sur ce point en 2007 et il parvint à imposer ses thèmes à l'agenda médiatique de la campagne). Il faut enfin des flacons de vitriol conservés au frais jusqu'aux derniers instants, car nos campages électorales se jouent à la fois de plus en plus tôt et de plus en plus tard.

Nous sommes d'ailleurs, comme l'a justement rappelé Bayrou voici quelques jours, dans la période électrique de la campagne, où un mot de travers peut faire bondir un candidat ou lui coûter plusisurs points d'un coup. Chacun se souvient de l'erreur tactique de Bayrou en 2009, et il est évident que l'actuelle stratégie très en défense de Bayrou est juste et pertinente, en attendant que, tel un trois-quarts centre au rugby ou un avant-centre au football, il aperçoive l'ouverture pour s'y glisser et aller planter une banderille dans l'échine de l'élection, une banderille qui ne peut évidemment pas être une attaque contre un autre candidat, ni autre chose qu'une idée géniale qui, par exemple, révélera à une forte partie de l'électorat un désir inconscient, ou quelque chose comme ça, en somme un thème profondément ancré dans notre mentalité commune. Un concept. Neuf. Et ravageur dans le bon sens du terme.

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22/03/2012

Bayrou aussi populaire que le Père Noël

Dans le classement des personnalités les plus populaires, il y a Nicolas Hulot, qu'on ne voit plus jamais, et Jacques Chirac, qui est apparemment gâteux. Puis il y a François Bayrou. Dans dix minutes, on va nous expliquer qu'il guérit les écrouelles, et de ce point de vue-là (de celui-là seulement) on se croirait revenu en 2007, où les gens avaient l'impression qu'il possédait le pouvoir de lévitation, qu'il était doté de l'ubiquité et que, tel le roi mythique Argos, il avait cent yeux. Étrange paradoxe pour un candidat qui, par ailleurs, plafonne dans les sondages officiels (même si nous savons, nous, que ceux-ci le sous-estiment).

Au fond, Bayrou devrait peut-être faire comme Gandhi, se promener vêtu d'un drap entortillé, boire de l'eau de pluie et parler aux oiseaux, il finirait de fignoler sa réputation de mage chaldéen et de prophète (comme l'a d'ailleurs qualifié l'hebdomadaire Le Point).

Ce qui est regrettable, c'est que l'atmosphère irréelle qui entoure de plus en plus la candidature de Bayrou contribue à estomper la terrible réalité dont notre pays est affligé. Cette terrible réalité, ce n'est évidemment ni la surabondance de viande rituelle, ni la prolifération de commandos fanatiques (dont la mise à mort donne en ce moment lieu à une mise en scène rituelle de bouc-émissaire), mais l'état des finances publiques, de notre productiion industrielle, manufacturière, agroalimentaire, numérique et autre. Mais sur les vrais sujets, le silence complice des grands candidats s'est abattu.

Il paraît que Mélenchon a estimé hier soir que toute l'affaire de Toulouse et Montauban était une manipulation gouvernementale. Sans doute conforte--t-il ainsi son électorat bobo et naïf, qui oublie que le maître de Mélenchon, Trotsky, est celui qui a mené, dans la jeune Union Soviétique, l'une des répressions les plus affreusement impitoyables de l'Histoire. Le vote Mélenchon a pris, ces jours-ci, un tour de vote de la bonne conscience (parce qu'il s'attaque aux banques), alors qu'il ne mérite pas un instant ce qualificatif. On a les maîtres qu'on peut : pour Mélenchon, c'est Trotsky, pour Bayrou c'est Gandhi. Il n'y a pas photo.

Il semble que le courage de François Hollande ne le rende pas populaire, même s'il bénéficie toujours du rejet de Sarkozy. Tout cela, le rejet, l'impopularité, la crédibilité du PS, celle de l'UMP, les coups de gueule de Mélenchon, la panthéonisation de Bayrou, donne l'impression d'une campagne bloquée, et en carton-pâte, une triste campagne, pas à la hauteur des terribles enjeux de l'époque. Mais peut-être est-ce justement sa façon de ressembler à l'époque, hélas.

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16/03/2012

En hommage à Pierre Schoendoerffer

Les lecteurs de mon blog s'attendent-ils à ce que je rendre hommage au grand cinéaste et écrivain Pierre Schoendoerffer, mort jeudi matin ? Voici pourquoi ils le doivent.

D'abord, n'en déplaise à ceux qui, comme Christophe Honoré, ont jugé bon, paraît-il, d'attaquer le cinéaste alors que sa dépouille n'était pas encore froide, Schoendoerffer a écrit et réalisé le plus grand film de guerre français du XXe siècle, et je crois encore inégalé jusqu'ici, joignant le témoignage direct à la méditation humaniste : "La 317e section" est un film rare, tourné sans budget mais avec des comédiens accrochés à la vérité de leurs personnages qui, comme Bruno Cremer et Jacques Perrin, y ont trouvé un véritable chemin personnel. Je mentionne ce film, mais le "Crabe Tambour", livre et film récompensés, aurait suffi à la gloire de n'importe qui, c'est un second choix qui vaut parmi les meilleurs premiers.

Ensuite, parce que Pierre Schoendoerffer faisait partie de ma famille proche, sa femme (maintenant sa veuve) est la sœur de ma mère, et en pensant à eux, la foule des souvenirs d'enfance se presse dans ma tête, chez mes grands-parents en Bretagne, ou plus tard les courses sur la plage de Combrit à l'aube en groupe suivies d'un petit-déjeuner roboratif.  Ma mère tapant les romans de son beau-frère à la machine et y joignant ses commentaires de première lectrice. Plus tard encore les déjeuners chez ma grand-mère à Paris, chaque jour, pendant des mois, pendant qu'il écrivait "Là-haut", moi entre une matinée et une après-midi de lycée, ma grand-mère vissée au journal de Mourousi, lui commentant les info d'un ton ironique et allègre, toujours agacé par la bêtise, mais ne proférant jamais aucun jugement autre que méditatif ou métaphysique sur les actions des politiques, sur le fil de l'actualité et sur les terribles violences qui n'ont jamais cessé d'ensanglanter le monde.

Bien sûr, il y a des gens qui vont trouver des motifs de lui en vouloir, de juger ses œuvres et d'y trouver les germes de ceci ou de cela, trouver qu'il a défendu le colonialisme, trouver qu'il a défendu des putschistes, trouver que si Le Pen adore (paraît-il) ses films, il doit bien y avoir une raison pernicieuse, que si Gérard Longuet préside les obsèques, il doit bien y avoir une vilaine anguille sous roche. Tous ces gens-là sans doute ont raison quand ils sont de bonne foi, oubliant d'ailleurs au passage que Pierre fut aussi l'ami de Kessel, puis décoré par Mitterrand aussi bien que par Chirac, mais je crois sincèrement que désormais le travail de la postérité, qui commence, révélera que les quelques romans et les quelques films qu'il a écrits et réalisés sont et resteront à l'image de l'homme que j'ai connu : emplis d'une interrogation sur l'immensité du monde, sur la fragilité de l'homme, sur le poids du destin et sur le message biblique (en bon protestant alsacien qu'il n'avait jamais cessé d'être, lui qui vantait les homélies des recteurs catholiques bretons), et aussi sur l'espoir finalement déçu et inconsolable de l'impossible aventure humaine.

C'est à cela (et à cela seulement) que je pense, au lendemain de sa mort et quelques jours avant ses obsèques qui seront, je l'espère, une occasion de paix et de méditation, le tout dernier hommage rendu à l'homme connu et le premier à celui que la postérité s'apprête à révéler.

 

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15/03/2012

L'enjeu de la présidentielle

Il apparaît clairement que l'enjeu de la présidentielle d'avril et mai prochains (qui approche), c'est d'éliminer le sortant le plus certainement et au mieux. Dans ces deux critères de certitude et d'efficacité se cachent toutes les questions que l'électorat se pose et qui expliquent des flottements de l'opinion.

Quand on dit "certainement", on va au plus virulent, qui est aujourd'hui Mélenchon, lequel Mélenchon récupère pleinement la dimension protestateire de ce scrutin, abandonnée à la fois par Le Pen et par Bayrou. Le Pen a fait jusqu'ici une campagne très en demi-teinte, marquée par des erreurs de néophyte. Il semble qu'il soit un peu tard pour qu'elle redresse la barre et il est possible que les sondages la surestiment un peu (sauf que, évidemment, la forte abstention a toujours profité, depuis trente ans, au vote frontiste). Mélenchon profite aussi de la très grande colère partagée par la population contre le système bancaire et financier. Là encore, Bayrou a renoncé à cette protestation. Le communisme punitif s'épanouit donc dans une critique frontale du système dont il a beau jeu de dénoncer la rapacité.

Mais quand on dit certainement, on dit aussi Hollande, puisque le candidat du PS garde toujours une avance très confortable dans les sondages : parmi ceux qui peuvent mettre fin à la dangereuse expérience sarkozyste, il est de loin le mieux placé. S'il baisse un peu dans les récents sondages, c'est en fonction du second critère : "au mieux".

Toutes les enquêtes d'opinion montrent que Bayrou a présenté le programme que l'électorat juge le plus adapté à la situation. Mais quand on l'a vu rejoint par d'ex-sarkozystes, l'électorat s'est méfié. Avec le temps, il se méfie moins, et il admet la sincérité de notre candidat, ce qui explique la solidité de son socle électoral. Et par ailleurs, un électorat de droite, avec prudence, a commencé à se reporter sur lui à la fois pour sanctionner le pouvoir sortant et pour pousser la solution alternative qu'il juge la plus proche de ses préoccupations.

La stratégie de Sarkozt, au milieu de tout cela, est claire : siphonner autant que possible l'électorat sur sa propre droite de façon à assurer son ticket pour le second tour. Ensuite, on fera avec les moyens dont on disposera. Or ces moyens sont assez pauvres : on ménage le centre pour récupérer le maximum de ses électeurs et on favorise Mélenchon pour pousser au maximum la tension entre le centre et celui-ci dans la cristallisation d'une majorité autour du Parti Socialiste. On voit que la stratégie sarkozyste fait abstraction du fait que le moteur de l'élection est d'éliminer son champion coûte que coûte.

La stratégie du PS passe aussi par la case "j'assure mon ticket pour le second tour" et "je ménage le centre". Les insatisfactions que cause cette stratégie à l'électorat sont pour le moment exprimées par Mélenchon.

Tel est actuellement le sens pris par l'élection, selon les sondages. Mais si l'on ne voit guère de rebond possible de Le Pen, si l'on peut imaginer que Mélenchon parvienne à égaler le relatif record de Georges Marchais en 1981 (15,3%, mais je crois perso qu'il est dans une bulle sondagière), on sent que Bayrou en a encore sous le pied, aussi bien parmi l'électorat de droite que parmi l'électorat de centre gauche. Il y a en effet un enjeu dans l'enjeu.

Si l'enjeu global du scrutin est l'élimination finale de Sarkozy, il y a un enjeu intermédiaire qui causerait un grand soulagement : l'élimination de Sarkozy dès le premier tour. Or pour qu'elle ait lieu, il n'existe qu'une solution satisfaisante, l'électorat le sent bien : pousser Bayrou. C'est ce qui fera sans doute une bonne partie de sa dynamique de fin de campagne.

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11/03/2012

Avec ou sans vaseline ?

Parmi les menteurs, en politique, il y a ceux qui t'enculent sans vaseline et ceux qui t'enculent avec. Les premiers n'y vont ni par quatre chemins, ni de main morte, les seconds savent y mettre les formes et t'entubent avec le sourire. Les premiers mentent froidement et brutalement, on le sent, les autres le font avec tant de délicatesse et en y mettant si bien les formes, qu'il faut faire un effort pour s'en apercevoir. En ce moment, il semble que celui que Bayrou a désigné comme le candidat de la division le fasse plutôt sans, et celui de l'illusion, avec. Seulement moi, désolé, je n'ai pas envie de me faire enculer du tout.

Et dans les soubresauts du congrès radical d'hier, j'ai un peu de mal à faire le tri. Y a-t-il eu une palinodie, un jeu de dupes pour faire croire un moment que l'on pourrait ne pas soutenir Sarkozy, puis, après le discours d'aujourd'hui, se jeter dans ses bras comme s'il n'avait rien dit ni fait pendant les cinq dernières années ? Y a-t-il eu seulement une de ces broncas qui visent à emplir les sébilles ? Y a-t-il eu enfin un sursaut de conscience de la part du parti qui a installé la république en France ? Les événements le diront. Merci en tout cas à Didier Bariani d'avoir mis tant de talent à réveiller l'authentique fibre radicale au service de la candidature du centre.

Quoi qu'il puisse être dit, je ne serai, pour ma part, pas dupe de prétendues évolutions éthiques de l'actuelle majorité. Il m'importe peu que les dirigeants du cercle de jeux Concorde soient passés de chez M. Sarkozy à chez M. Hollande. Le nom de M. Devedjian avait été prononcé lorsqu'ils étaient chez le premier, celui de M. Pupponi l'est maintenant qu'ils sont chez le second. Et ces deux hommes sont toujours en place, prêts à servir. Non, les derniers jours ont répété l'obsession xénophobe qui dévore les psychismes inquiétants de MM. Guéant et Sarkozy. C'est cela qui fera que, dans un pays où 60% des gens sont favorables au vote des étrangers aux scrutins locaux, le président Sarkozy n'a aucune chance d'être réélu, quel que soit le nombre des TGV qu'il affrète et des militants qu'il convoque (en les insultant d'ailleurs) à Villepinte. C'est cela qui fait que parmi les gens de droite républicaine que je connais, il s'en trouve de plus en plus à lui préférer un candidat qui sépare ses activités sexuelles de ses activités politiques : François Bayrou.

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09/03/2012

De l'après Sarkozy à l'après Hollande ?

C'est avec beaucoup de fermeté que Bayrou a répondu hier soir dans l'émission "Des paroles et des actes" sur France 2 à un journaliste qui l'interrogeait sur ses relations avec Sarkozy et Hollande. "Je ne veux pas me rallier à Hollande, je veux battre Hollande, c'est clair ?" Oui, c'est clair, et quand Bayrou a précisé ensuite que son objectif restait de battre l'un au premier tour et l'autre au second, c'était parfaitement clair aussi.

Juppé a donné une tonalité particulière à cette prise de position, ce matin, en prenant acte de l'échec de la candidature Sarkozy et en se plaçant déjà dans l'après-Sarkozy. Qu'il en soit remercié au passage, tant l'omerta est puissante, ces jours-ci, chez les politiques. En annonçant qu'il y aurait un congrès de l'UMP à l'automne, Juppé a clairement dit que le président sortant ne peut plus espérer être réélu. Et il en tire les conclusions nécessaires sur la suite des événements.

On peut d'ailleurs noter que Jean-Antoine Giansily, un autre chiraquien pur sucre, a pris position, lui, pour la candidature de Bayrou, à la fois pour ses qualités intrinsèques et pour ce qu'elle permet d'éviter. Il semble donc que le glacier UMP se soit mis en mouvement et le fait que Bayrou veuille supprimer la "niche Copé" (l'une des plus onéreuses pour l'État) ne doit pas non plus être oublié quand on réfléchit à ce qui se passe dans la galaxie UMP, étant donné que ledit Copé est le patron de ladite UMP sous la férule du président sortant.

L'après-Sarkozy a donc bien commencé, les grandes manœuvres s'ouvrent, les deux mois de campagne présidentielle qui restent vont être marquées par ce mouvement, n'en ayons aucun doute. Et l'après-Hollande ?

J'ai été très frappé d'entendre Manuel Valls, hier soir, capituler sur deux points essentiels : le premier est que, comme homme du centre (le centre gauche pour ce qui le concerne), il est habitué à dire ce qu'il pense lui. Les porte-paroles de la campagne de Bayrou, lorsqu'ils s'expriment, indiquent toujours leur propre pensée, il leur arrive de donner celle de Bayrou au passage, mais c'est d'abord la leur qu'ils disent. Valls, hier soir, confronté à ses contradictions par la citation que Bayrou a faite de plusieurs de ses propos, a dû admettre qu'il n'était plus qu'un colleur d'affiche, un robot réduit à débiter le programme d'un candidat, un programme qu'au fond de lui, on le voit bien, il désapprouve (parce que, et c'est le deuxième point, il collectionne les promesses intenables), et que par ailleurs, on n'a pas besoin de lui pour connaître, vu qu'il suffirait de se connecter au site du candidat pour le trouver mot pour mot. D'ailleurs, Valls n'a pas exclu de travailler avec la majorité de Bayrou si celui-ci est élu.

Un autre qui, cette semaine, a exprimé des doutes sur le programme de Hollande, c'est Laurent Fabius, qui, paraît-il (je l'ai lu sans le voir, je l'avoue, et si c'est faux, détrompez-moi), a indiqué qu'il soutenait Hollande avant tout par discipline de parti, ce qui écarte l'option du choix personnel. Cette précision de l'ancien plus jeune premier ministre de France n'est pas innocente : dans la période du gouvernement Jospin, il y a deux périodes : la première avec DSK aux finances est mauvaise et laisse filer, la deuxième avec Fabius aux finances tente de rétablir les comptes publics. Et d'ailleurs, Migaud, le successeur du regretté Séguin à la tête de la cour des Comptes, est en général qualifié de "proche de Laurent Fabius", or le rapport de la cour des Comptes reprend parfois mot pour mot les analyses et propositions de Bayrou en matière budgétaire et financière.

Il y a donc une effervescence ces jours-ci, nourrie de l'insatisfaction d'une campagne qui tourne mal, entre un candidat sortant totalement carbonisé et un candidat favori qui n'est que la vitrine d'un parti clientéliste. La montée de Bayrou, perceptible dans les sondages d'intention de vote, sonne finalement comme un espoir chez beaucoup de gens de bonne volonté de sortir de l'impasse et de remettre notre pays sur les rails de l'équilibre et du développement pour le pouvoir d'achat, pour l'emploi, pour le succès de ses innovations, pour la fidélité à ses valeurs, pour l'intégrité de son renom, et pour l'avenir de ses générations présentes et futures. L'union nationale pourrait permettre aux équipes partisanes de se ressourcer, de se débarrasser d'élus parfois indélicats. En douceur et sans douleur, il se prépare peut-être, dans la grande marmite politique, une formidable révolution.

 

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