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10/06/2010

Notre république.

Le débat a été ouvert par Marianne reprenant un commentaire de François Bayrou sur un article de Jean-François Kahn sur son blog.

J'ai écrit moi-même que depuis bientôt trente ans que je vote, j'ai toujours voté le plus au centre possible. Il n'a jamais été question pour moi de voter pour la droite en tant que telle et la gauche ... m'a toujours donné envie de voter au centre, du moins le plus au centre possible, car il y avait toujours quelque chose qui me chagrinait dans la gauche, dans cette gauche dont beaucoup d'idéaux sont les miens.

En mars 1983, j'ai voté aux municipales à Combrit, mon port d'attache breton, un vote avec préférence et panachage, disons que ça ne compte pas. J'avais dix-huit ans et quatre mois.

Passons aux présidentielles de 1988 : au premier tour, j'ai voté pour Raymond Barre, l'État impartial et la sagesse budgétaire. Au deuxième tour, j'ai voté Mitterrand, Chirac restant engoncé dans les principes du tandem Pasqua-Madelin.

En 1995, j'ai fait la campagne de Jacques Chirac dès le premier tour. De toute évidence, il était plus autoritaire mais moins réactionnaire que Balladur, et Jospin était trop américanophile, ce qui s'est d'ailleurs vu dans sa politique à partir de 1997.

En 2002, Bayrou au premier et Chirac au deuxième.

En 2007, Bayrou au premier et Royal au deuxième.

Je fais partie de cet électorat qui n'a pas de parti pris, qui est capable de voter pour ce qui lui semble le plus proche de l'intérêt général, se résignant à un choix éventuel, qui reste en somme à convaincre pour la droite ou la gauche ou qui, mieux encore, espère ce que Kahn a nommé, d'un mot heureux, une politique qui soit devant.

Liberté, égalité, fraternité

Bayrou, dans son commentaire devenu article, évoque l'identité démocrate représentée par le Parti Démocrate américain (souvenir d'une stratégie élaborée avec Clinton et Prodi voici plus de quinze ans), son équivalent indien (je suppose qu'il s'agit du Parti du Congrès, les héritiers de Gandhi et de Nehru, mais je ne vois pas le mot démocrate) et son homologue japonais. Selon Bayrou, la référence française de ce courant mondiale est ... républicaine. Hum. Bon, disons que l'ancrage dans une vision mondiale est une idée constructive et laissons l'approfondissement de l'exégèse à ceux qu'elle intéressera.

Pour nous Français (il faut bien que nous fassions avec ce que nous sommes et nous manquerions à notre devoir dans le concert mondial si nous l'oubliions), la question remonte à Clovis. Lorsque Clovis devient le patron d'une partie des maîtres de la Gaule, l'essentiel des monarques européens pratique une sorte très anticipatrice de calvinisme qu'on appelle l'arianisme qui a l'avantage ou l'inconvénient de justifier le pouvoir monarchique au détriment de l'égalité des citoyens.

Clovis est soutenu par deux archevêques seulement : celui de Tours et celui de Reims, qui sont dans le camp de l'évêque de Rome qui deviendra le pape. Clovis élimine les Ariens (à ne pas confondre avec les Aryens) et installe la primauté de Rome en Occident, y compris un certain nombre de principes fondateurs de l'idéologie occidentale, dont le libre-arbitre. Pendant des siècles, y compris du temps de Charlemagne, la France sera liée à Rome par ces actes fondateurs.

Au passage, je signale à mes amis bretons qu'il est plus que vraisemblable que, du temps de Clovis, la Bretagne armoricaine n'y était pas, qu'elle s'épanouissait dans un autre monde chrétien avec les Gallois et les Corniques, et peut-être les Irlandais.

Lorsque la monarchie espagnole devient cumularde au point de se lier avec les Habsbourg d'Autriche, vers 1500, la France, dont les relations avec le Saint-Siège n'ont pas toujours été de tout repos, mais qui a assumé la primauté aux Croisades, se retrouve reléguée au second rang, pour un peu plus d'un siècle.

Elle inaugure alors ses relations avec ce qu'on nomme la Sublime Porte, l'empire turc.

François Ier, qui invente cette politique, inaugure aussi la monarchie absolue et nationalise le clergé : il soumet l'état-civil aux lois de l'État, et s'il en confie la tenue aux gens d'Église, c'est par délégation de service public, les clercs d'Église sont agents de l'État, la majorité de leur chiffre d'affaires provient de jurislations étatiques. La théorie dite du gallicanisme (antérieure) trouverait son plein sens si les guerres de religion, peu après François Ier, ne la reléguaient pas au second plan jusqu'au XVIIe siècle.

Le rôle de France "fille aînée de l'Église" dure finalement, cahin-caha, jusqu'à la Révolution française.

Il faut être conscient que le rôle historique de la France pendant près de mille trois cents ans est intimement lié à cette notion de "fille aînée". La France est celle par qui l'Église de Rome est accouchée d'elle-même.

En y renonçant en 1789, la France a donc fait un acte historique d'importance millénaire, qui a d'ailleurs réjoui  notamment les protestants parce qu'il affaiblissait Rome.

Les principes refondateurs, liberté, égalité, propriété, sont devenus en 1848 liberté, égalité, fraternité. Ce sont les principes de notre république.

Des polémiques

C'est écrit dans la belle langue française du XVIIIe siècle : la liberté consiste à faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. Tout, ce n'est pas rien. Tout, c'est ce qu'en termes classiques nous nommerions la licence. Dans une certaine sphère, la liberté est un absolu : tout. Sa seule limite, mais quelle limite, est "ce qui ne nuit pas à autrui". Or ce qui nuit à autrui est ce qu'on nomme en droit ce qui "fait grief" à autrui. Ce qui fait grief est ce qui engage la responsabilité juridique. La liberté a pour limite la responsabilité. La dialectique liberté/responsabilité est la première composante de notre identié républicaine.

L'égalité est une notion beaucoup plus ambiguë, dont la traduction textuelle est quasi-sybilline : égaux en droits. Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. L'égalité juridique, le principe d'égalité de naissance, l'égalité de condition, c'est un principe d'émancipation, dont la limite est recherchée par d'autres conceptions répiublicaines. Liberté formelle ou liberté réelle est ainsi un thème central de la pensée marxiste au XXe siècle. Et plus récemment, l'idée de la discrimination positive comme moyen d'atteindre à une égalité moins formelle et plus réelle nous a prouvé que les conceptions américaine et soviétique étaient moins opposées qu'elles ne le prétendaient. En fait, le complément de la défintion du principe d'égalité se trouve dans un passage de la déclaration des droits de l'homme de 1789 : les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune. Voilà une source inépuisable de réflexion sur la dialectique qui unit et oppose l'individu à la Société.

Sans la fraternité, la liberté et l'égalité sont deux tyrannies symétriques. La liberté qu'on impose est une tyrannie ("on n'enseigne pas la liberté à la pointe des baïonnettes", écrivait quelqu'un sous la Révolution française, quelqu'un que Bush aurait dû lire). L'égalité qu'on impose, tovaritch, est une autre tyrannie. La fraternité est l'élan de conscience, basé sur la sincérité, sans lequel la liberté et l'égalité sont vouées l'une au néolibéralisme, l'autre au goulag.

Le lien de ces trois valeurs entre elles est le ciment de notre conception de la vie en Société.

Deux autres notions se sont agglomrées à la devise républicaine : la laïcité et l'unité.

La laïcité est devenue la valeur la plus polémique de toutes, pour la double raison que le modèle dominant anglo-saxon n'est pas laïque et que l'interprétation de la laïcité a longtemps été une hostilité viscérale à l'encontre de l'Église catholique romaine.

En fait, les choses sont moins simples qu'il n'y paraît. La laïcité est un principe plus général de neutralité de l'État, de distinction du public et du privé, qui a des conséquences sur la séparation des vies privée et publique de nos dirigeants, et sur la répartition des rôles entre Société civile et État. Si on l'exprime d'une façon contemporaine, nous dirons que la laïcité est l'indépendance des décisions politiques à l'endroit des lobbys, l'Église catholique, directement concernée, est ici un lobby comme un autre, une conception particulière qui voudrait imposer ses vues aux décisions publiques de même que les producteurs de maïs voudraient que l'État ne mange que du maïs.

En pratique, la laïcité française, organisée par la loi de 1905, a permis à l'Église de France de s'extraire du gallicanisme et d'éviter que le clergé ne soit nommé par le pouvoir politique au lieu de l'être par Rome, cependant que l'entretien et l'usage des édifices de cultes étaient garantis par l'État.

Aujourd'hui, la laöcité est encore plus polémique, parce qu'elle est vue par certains musulmans pratiquants comme un moyen de brimer leur culte.

L'unité ("La France est une république indivisible") est la dernière valeur polémique, mes amis bretons pourront en témoigner, et de fait, si j'admire et revendique l'esprit républicain comme étant le mien, je suis amené à reconnaître que la Bretagne a subi de nombreuses injustices qio n'ont pas encore été réparées.

La république est une construction éthique et humaine fondée sur le trio indissoluble de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. Au fond, le reste est inutile bavardage.

24/09/2008

Larcher désigné par l'UMP.

Gérard Larcher vient d'être désigné candidat de l'UMP à la présidence du Sénat. L'Histoire dira si c'est un vrai échec de Sarkozy. Compte-tenu des discours des trois impétrants, c'est en tout cas un succès pour la laïcité.

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13/09/2008

Curieux, personne n'a été choqué.

Le pape a dit une messe sur la voie publique.

Et alors ? me direz-vous.

Bof, mais j'ai le vague souvenir que ces sortes de choses étaient plus que limitées par la loi de 1905. Moi qui croyais que Sarkozy avait promis de ne pas toucher à la loi de 1905. Alain Bauer va encore se faire remonter les bretelles de tablier...

En 1998, c'est dans un hippodrome, une enceinte close quoique publique, que Jean-Paul II était venu invoquer les mânes de Clovis. À ma connaissance, c'est la première fois depuis 1905 qu'un pape dit la messe sur la voie publique à Paris. Et personne n'a bronché.

21:59 | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : laïcité, pape, benoît xvi, invalides | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

11/06/2008

Laïcité : un peu d'histoire.

J'ai été frappé, ces jours derniers, de lire sous la plume de certains de nos amis une lecture de certains aspects de la laïcité qui contredit la réalité historique de la laïcité en France, ouvrant la question de ce qui caractérise désormais le droit de croire et de ne pas croire.
 
Tahar Houhou par exemple, s'interrogeait sur la sanction pénale subie par un desservant de mosquée (un imam) parce que celui-ci avait célébré un mariage religieux alors que le mariage civil n'avait pas été célébré. Alors voici l'histoire de l'état-civil en France, qui permet de comprendre un peu mieux les enjeux juridiques et sociaux de l'affaire :
 
Au Moyen Âge, la célébration des mariages était le fait de l'Église catholique. Il n'y avait pas encore de protestants et les juifs étaient rares, voire bannis. L'aspect civil des choses ne concernait que la tranche la plus élevée de la population, qui accompagnait la cérémonie religieuse d'un contrat notarié qui prenait effet à la date du mariage religieux.
 
Le XVIe siècle a opéré sur cette réalité une véritable révolution : l'édit de Villers-Cotterêt a purement et simplement nationalisé l'état-civil en prescrivant les formes de la tenue des registres par les desservants des paroisses. C'est à partir de ce jour-là que le mariage a cessé d'être un pur contrat pour entrer dans le domaine à la fois du service public et de l'administration judiciaire : désormais, le juge de l'état des personnes n'est plus seulement celui du droit canon, comme au Moyen Âge, mais celui de l'État, le sénéchal ou président du présidial, à qui a succédé finalement le président du tribunal de grande instance (TGI), justice du roi, puis de la République.
 
Cette dépossession de l'église s'est accélérée quand Louis XIV a prescrit qu'un deuxième exemplaire des registre paroissiaux serait tenu et déposé au greffe du présidial, comme aujourd'hui à celui du TGI.
 
Enfin, la Révolution a ôté la délégation de service public dont bénéficiaient les prêtres pour confier la célébration de l'acte civil, seul reconnu par la Société, à un laïc, officier d'état-civil. J'ai été officier d'état-civil pendant six ans et j'ai célébré 647 mariages, dont une assez faible proportion était suivie par un mariage religieux.
 
L'idée est que l'individu n'est pas entièrement propriétaire de lui-même ni de sa famille. C'est au nom de la même idée que les parents peuvent être déchus de leurs droits parentaux si l'intérêt de l'enfant l'impose.
 
Comme je l'ai répété 647 fois, le mariage est d'abord, et avant tout, une institution de la Société, qui ne devrait avoir aucun rapport, de mon point de vue, avec la religion, car on ne voit guère le rôle d'un dieu dans tout ça.
 
Cependant, il a été prévu que les gens qui le souhaiteraient pourraient continuer à se marier religieusement, un mariage en stuc, à condition expresse que le vrai mariage, civil, ait été célébré antérieurement.
 
Tahar Houhou se demandait ce que la Société avait à voir avec ça et ajoutait que, de son point de vue, si les gens avaient envie de se marier religieusement, et seulement religieusement, on ne voit pas pourquoi la Société les en empêcherait. La réponse, là encore, est historique : le système qu'il préconise, celui où le mariage civil et le mariage religieux coexistent sans se superposer (le mariage religieux valant aussi pour un mariage civil), ce système, donc, existe : c'est celui qui prévaut au Royaume-Uni, un pays qui ne connaît pas la séparation des églises et de l'état.
 
Donc les choses sont claires : une vraie laïcité rend le mariage religieux superfétatoire, purement privé, inopposable en droit civil sauf scories de droit.
 
Et c'est là qu'il faut parler de la tendance la plus récente en matière matrimoniale : la recontractualisation du mariage, l'envie pour les conjoints d'expulser la Société du contrat qu'ils passent entre eux. Cette tendance est l'écho de l'érosion de l'État, son image, son autorité. Elle a ici clairement l'inconvénient de faire peser un poids nouveau sur notre modèle de laïcité, dont on découvre pourtant chaque jour qu'il a fait ses preuves.

01:25 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : laïcité, histoire | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

20/02/2008

La franc-maçonnerie, la laïcité, la France en elle-même.

L'affaire Clearstream se loge décidément partout. Lorsqu'en lisant la notice d'Alain Bauer sur wikipedia, on apprend que les locaux de Bauer ont été perquisitionnés par les services de Sarkozy police dans le cadre de l'affaire Clearstream 2 en 2006 en raison d'info que ledit Bauer aurait détenues, on finit par se demander ce qui a ensuite poussé ledit Bauer à devenir le conseiller spécial du président Sarkozy.
 
Car Alain Bauer est à l'origine un rocardien, on parlait de lui en bien voici près d'une vingtaine d'années chez les jeunes du CDS. Il était, avec déjà Manual Valls si ma mémoire est bonne, l'un des plus prometteurs de l'entourage de Rocard.
 
Le voici chez Sarkozy.
 
Et, apprend-on par l'Express, c'est lui qui a organisé en janvier la rencontre d'une "troika" de grands-maîtres du Grand Orient avec le président Sarkodieusard.
 
Je précise que je ne suis pas moi-même enrôlé dans l'une des obédiences maçoniques (dont je ne sais que des choses superficielles) et qu'on ne doit pas voir dans mon texte un brûlot revanchard de maçon enragé.
 
Car le Grand Orient bruisse, les compas cliquettent, les tabiiers crissent, les maillets s'entrechoquent : un ex-grand-maître du Grand Orient est proche conseiller du président qui se montre décidé à froisser le parchemin inviolable de la loi de 1905 !
 
Il faut comprendre que la laïcité est une pierre angulaire de la plupart des obédiences maçonniques. Pour le Grand Orient, c'est plus que ça, c'est le pilier de l'édifice : enlevez-le et il ne reste plus grand chose. Car la personnalité du Grand Orient français, qui en fait une forme aiguë d'"exception française", est d'avoir rageusement biffé de ses statuts toute référence à ce que les autres maçons nomment l'"Être Suprème", dont le nom dit peut-être quelque chose à ceux qui se souviennent de la Révolution française et du culte de l'Être Suprême, quand on voulut remplacer Dieu par sa version 2.0, celle justement des maçons.
 
Le Grand Orient a voulu la laïcité dans sa forme la plus intransigeante. Il a veillé à la loi de 1905.
 
Or c'est aujourd'hui l'obédience maçonnique la plus nombreuse (et de loin) en France, même si elle ne regroupe pas à elle seule la majorité des maçons français.
 
Pourquoi faire cette note, moi que ces initiés ne concernent que de loin ? J'aurais pu me contenter de reparler de la laïcité en général.
 
C'est que, d'abord, le débat qui a opposé Bayrou à Xavier Bertrand dans le cadre de l'émission d'Arlette Chabot prend un autre sens si l'on songe que ledit Xavier Bertrand, surpris par un "coming-out" organisé par "L'Express", a depuis lors admis qu'il était lui-même engagé dans le Grand Orient. Voir un catholique pratiquant donner des leçons de laïcité à un frère du Grand Orient est une surprise à laquelle sans doute le petit père Combes ne se serait pas attendu (quoiqu'après tout, l'Église a souscrit au compromis de 1905 qui n'avait pas que des inconvénients pour elle).
 
Mais aussi parce qu'après tout, quand on pense la même chose sur un sujet, il est bon de le dire.
 
La remise en cause des principes laïcs ouvrirait une phase de trouble profond dont personne en France ne sortirait gagnant.
 
Le succès de l'appel de Marianne est tonitruant : le numéro de l'hebdomadaire est épuisé, l'article sur le net en est à plus de 100 000 visites pour sa première mouture et 30 000 pour la seconde. Même si Maurice (dit Momo) Leroy en a retiré sa signature avec lâcheté, cet appel se joint aux presque 100 000 signatures déjà de la pétition de l'appel laïque.
 
En somme, on a réveillé le dragon endormi.
 
Faudra-t-il faire encore monter la pression sur Sarkonoît XVI ?
 
Soyons-y prêts. Il en va de notre conception du pouvoir, de l'être humain et de la liberté. 

19/02/2008

Laïcité : Bayrou avait raison.

Sarkozy s'en est pris aux instituteurs et au rôle de l'État. La preuve (avec en prime Quitterie Delmas à l'arrière-plan) est au bout du film :

 

 
Comme d'habitude, c'est Bayrou qui dit la vérité. 

11/02/2008

Le pouvoir et la société.

La laïcité a subi un coup très rude ... en Turquie. L'autorisation du voile pseudo-islamique (qui n'est qu'un étendard politique à alibi religieux, ce qu'il y a de pire) dans les universités où il était jusque-là interdit est un signal de l'offensive qui se lève dans l'État d'Europe et d'Asie le plus laïc.
 
Le voile est un moyen pour une doctrine politique de "marquer son territoire" humain et visuel. L'objectif est de prendre le contrôle d'une société entière en lui imposant pas à pas sa marque.
 
Prendre le contrôle de la société est toujours l'objectif central d'un mouvement politique ambitieux. Car c'est dans la société que les choses se passent, pas dans les dorures du pouvoir.
 
Dorénavant, c'est la société turque elle-même qui va devoir réagir à la pression non pas de l'islamisation, mais d'une islamisation par une doctrine oppressive qui se veut une lecture de l'islam et qui n'est qu'un moyen de pouvoir absolu et sanguinaire, issu des universités coraniques d'Arabie Séoudite. C'est la montagne d'argent que nous versons pour notre pétrole qui les nourrit, raison d'ailleurs de lutter contre l'emploi des énergies fossiles, mais de toutes façons, c'est à la société, à toutes les sociétés de réagir par elles-mêmes.
 
Invitée hier soir par France 3, considérée comme une invitée "plus exceptionnelle" que François Bayrou par France Info, l'ex-députée néerlandaise qui cherche l'asile politique en France a tenu des propos particulièrement graves sur l'islam, considérant en somme que pour les musulmans, le seul bon chrétien est un chrétien mort, ce qui est contraire au coran.
 
En ouverture d'une émission sur la laïcité, cette phrase est restée sans démenti. Et pourtant, il s'agit bel et bien d'une incitation à la haine. Si cette femme est menacée dans son pays, j'ai l'impression qu'elle n'a à s'en prendre qu'à elle-même.
 
L'archevêque de Canterbury aurait mieux fait de se taire aussi quand il a déclaré qu'il fallait intégrer certains passages de la charia dans le droit positif britannique, provocation dangereuse on s'en doute.
 
On nous force à la haine d'un côté, on nous embrigade de l'autre. Plus que jamais, résistons, dans la société, car c'est de la société, et d'elle seulement, que peut monter le cri qui fera reculer le pouvoir au seuil de ses dérives.

02/02/2008

Laïc.

La France, république laïque, "ne reconnaît ni ne subventionne aucun culte". Telle est la position d'équilibre sur laquelle notre pays s'est fixé depuis plus d'un siècle et qui a été ratifiée à une très large majorité par le peuple français, par référendum, avec la constitution de la Ve république.

On doit comprendre qu'il ne s'agit pas là d'une position de principe antireligieuse, mais d'une neutralité fondamentale. La chose publique et le fait religieux sont étrangers l'un à l'autre.

Ainsi était-il alors mis fin au régime concordataire qui, durant le siècle précédent, avait régi les relations des Églises et de l'État. Selon ce précédent dispositif, les clergés des différentes confessions étaient rémunérés par l'État mais, de ce fait, soumis à approbation des autorités politiques. Ils étaient en quelque sorte fonctionnarisés. La loi de 1905 est une privatisation des religions.

L'Église catholique se rallia à ce compromis qui lui rendait sa liberté d'organisation (désormais le clergé et lui seul préside aux désignations des desservants) tout en lui garantissant l'usage de lieux de culte dont l'entretien ne lui incombait pas.

Seul, depuis lors, le régime de Vichy a tenté de remettre en cause le compromis historique. Seul, jusqu'à l'arrivée de Nicolas Sarkozy, petit-fils de Pétain de ce point de vue-là.

En vérité, le débat sur la laïcité et son avenir au XXIe siècle a commencé avec les travaux de la commission Giscard d'Estaing pour l'élaboration d'un nouveau traité européen, que nous rêvions de voir s'élever jusqu'à l'ambition constitutionnelle. La France de Chirac, fidèle à elle-même de ce point de vue-là, fit obstacle à l'inscription des racines chrétiennes de l'Europe dans le texte. Les rédacteurs du traité de LIsbonne ont enfoncé un coin dans ce succès en réintroduisant non pas les racines chrétiennes, mais les racines religieuses, qui n'ont rien à faire dans une constitution.

Et il y avait plusieurs dispositions du traité rejeté en 2005 qui entretenaient de terribles ambiguïtés en matière de statut des religions. Parmi elles, certaines ont été levées dans le sens défavorable à la laïcité.

J'ai voté oui au traité de 2005, pour faire progresser l'Europe, pour que l'élan ne se brise pas, mais avec l'anxiété de ces doutes. Aujourd'hui, le doute n'existe plus, on entraîne la construction européenne sur un terrain dangereux. 

Pour toutes ces raisons, alors qu'on lance un appel à venir défendre la laïcité lundi à Versailles, j'irai. 

28/12/2007

La grande marmite où bouillonnent les ténèbres.

De Tartuffozy qui se rend au Vatican en compagnie de sa troisième belle-mère pour faire un discours-brûlot contre la laïcité héritée du compromis historique de 1905 à l'assassinat de Benazir Bhutto, la fin d'année 2007 ressemble à celles qui l'ont précédée : un bouillonnement noir, un remugle d'obscurantisme soulevant une nappe de ténèbres. Et partout, l'odeur du sang qui suinte.
 
On mesure au passage l'erreur stratégique commise par les États-Unis : le point névralgique aujourd'hui, ce n'est pas l'Irak, ce n'est même pas l'Iran, mais bien le sulfureux Pakistan dont les services secrets sont infiltrés par les islamistes et dont le moindre hoquet peut jeter des ogives nucléaires à la fois sur le Proche Orient et sur l'Asie.
 
Le Pakistan, on le lit ces jours-ci, a une frontière longue et perméable au nord avec l'Afghanistan, théâtre d'une énième tragédie guerrière, échec autrefois des Anglais relaté par Kipling, échec ensuite des Soviétiques, échec maintenant des Américains et de l'OTAN. L'Afghanistan imprenable, intenable, insaisissable, magnifique sous la plume de Kessel, héroïque sous les bombes, fou et tragique sous l'emprise de sa culture de drogue et de son délire religieux, l'Afghanistan au bord d'un nouveau chaos. Venu du Pakistan.
 
Le Pakistan a une frontière très longue aussi avec l'Iran qui tremble rien qu'à l'idée que les Pakistanais l'envahissent. Quelle résistance, lui sans arme atomique, pourrait-il leur opposer ?
 
Et si, comme je l'ai écrit maintes et maintes fois déjà voici des semaines et des mois, et si la bombe iranienne était un facteur de paix et de stabilité dans la région ?
 
Qui est le plus fou ? Le mollah iranien ou l'islamiste pakistanais ? À votre avis ?
 
Quand j'étais lycéen (ou plutôt collégien), voici une trentaine d'années, le Pakistan comptait 80 millions d'habitants. Aujourd'hui, le double. Dans le même temps, les États-Unis sont passés de 210 à 300 millions "seulement", la France de 53 à 64 millions. Bouillonnement de chair dans les ténèbres.
 
Chacun s'est incliné devant la dépouille de Benazir Bhutto qui laisse Musharraf seul face aux islamistes. Seul rempart peut-être. Rempart ? Peut-être.
 
Décidément, quels crimes on peut commettre au nom de la religion et comme a été sage le compromis historique de 1905 qui a réglé les rapports des religions et de l'État... 

21:30 | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : religion, pakistan, bhutto, islam, laïcité | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook