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24/09/2015

2e registre d'État-civil : encore un coup contre les magistrats ?

Le projet de loi intitulé "pour une justice du XXIe siècle" introduit sans doute de bonnes réformes, mais il en est une qui entre indubitablement dans la catégorie des fausses bonnes idées, comme le démontre le bon article ici : il s'agit de la suppression du deuxième registre d'État-civil dans les mairies qui adoptent une méthode informatisée de gérer l'État-civil. On le comprend, il s'agit d'inciter les mairies à adopter cette méthode en la valorisant comme signe de modernité, en faire en quelque sorte un must.

Seulement voilà : il y a une chose que tous les usagers de l'informatique connaissent : c'est le principe de la sauvegarde. J'ai maintenant plusieurs disques durs externes sur lesquels je sauvegarde les milliers de photos de documents que je prends chaque année pour mes livres historiques. Pour un service d'État-civil, à long terme, le registre sur papier constitue cette sauvegarde. Et conserver cette sauvegarde sur le même site que l'original informatique revient évidemment à diviser par deux l'efficacité de la sauvegarde. Mes aïeux sont originaires vers 1650 d'une localité ardennaise nommé Sery. Lors de la guerre de 1914-18, l'un des deux exemplaires des registres paroissiaux d'état-civil fut entièrement détruit. Il remontait à 1601. Celui qui reste ne commence qu'en 1723. Bien heureux qu'il en reste un, sinon, à la recherche de mes racines, je n'aurais plus rien du tout.

Vous allez me dire : y'a qu'à envoyer tout cela dans le cloud, mais chacun sait désormais que, pour toutes les informations sensibles, internet est une passoire, aussi vulnérable à l'altération des données qu'à leur destruction pure et simple. Le changement de format et la consignation sur papier offre des garanties supérieures, d'autant plus qu'elle se fait en double. Or quoi de plus sensible que l'État-civil ? Qu'est-ce qui doit être plus protégé que l'état des personnes ? Rien, surtout à une époque où l'on a érigé l'usurpation d'identité en délit correctionnel lourdement puni.

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Et enfin, il ne faut pas négliger un aspect plus politique de l'affaire : le deuxième registre est déposé depuis 1667 au greffe du tribunal local (sous l'Ancien Régime, c'était le présidial, aujourd'hui c'est le Tribunal de Grande Instance ou TGI). Cela n'a pas été décidé par hasard : les communes gèrent l'état-civil par délégation de l'État. Le maire n'est en rien gardien du droit et de l'état des personnes, il n'en est que le dépositaire. Celui qui, en revanche, est gardien de l'état des personnes, de leur identité, de leur nationalité, c'est le président du TGI. Or le pouvoir politique, l'actuel comme le précédent, ne cesse de rogner les prérogatives de la Justice, tout en intervenant d'ailleurs sans cesse auprès d'elle. Pour beaucoup de nos responsables politiques, le seul bon juge est le juge qui obéit au doigt et à l'œil. Supprimer le deuxième registre, c'est déchoir encore un peu le magistrat, avant de transférer probablement ses responsabilités à une instance tenue par la pieuvre mortifère des énarques. Plus encore que la remise en cause d'une institution pluriséculaire qui fonctionne bien, c'est ce nouveau coup de canif à l'institution judiciaire qui est inacceptable.

15:13 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : justice, état-civil, sery, internet, mairie, tgi, présidial | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

30/10/2009

Affaires de "suicides" et autres fantômes judiciaires surgis du passé.

EDIT : vous pouvez aller prolonger le débat sur cet article sur AgoraVox.

Le renvoi de Jacques Chirac en correctionnelle, hier, n'est pas un événement mineur, c'est peut-être le deuxième grand moment de la carrière de l'ancien président de la république. Comme cela a très justement été noté, seuls deux autres chefs de l'État français ont été jugés avant lui (les deux ont d'ailleurs été condamnés) : Louis XVI et le maréchal Pétain. Louis XVI, en aidant les États-Unis d'Amérique à s'affranchir de la tutelle coloniale britannique, avait pourtant donné un coup de pouce décisif à la libération du monde (avant que les États-Unis n'inversent le miroir). Pétain, lui, était le symbole de ce que la IIIe répubique avait fait de mieux : la dissolution des empires germaniques et la victoire de 1918, le maréchal lui-même ayant eu la solide réputation de prêter une attention maniaque et humaniste au sort de ses soldats.

Le procès de Louis XVI signifia la mort de la monarchie absolue, celui de Pétain emporta la fin de la IIIe république, il n'y aurait pas de retour au statu quo ante 1940, la Libération se voulait révolution. Fins de régime, procès des chefs, le renvoi de Chirac en correctionnelle sonne donc comme le glas de la Ve république.

Comment naissent et meurent les républiques

La IIIe république est née en plusieurs temps, après 1870, sur un ciment : reprendre l'Alsace et la Moselle à l'Allemagne, effacer la tache de la défaite de 1870, laver la France de l'échec militaire en prouvant qu'il appartenait au régime et non à la Nation. Après la victoire de 1918 (une victoire française, puisque la France avait conduit les alliés à la victoire, grâce aux généralissimes français et à la stratégie française), la IIIe république aurait pu s'arrêter, mission accomplie, et passer la main à une suivante. Mais sa victoire elle-même ne rendait pas sa fin logique, alors que sa victoire était en fait sa fin dans tous les sens de ce terme. Après 1918, la IIIe république s'est donc survécu, jusqu'à sa fin tragique en 1940, il faut savoir partir au bon moment, sinon...

La mission de la IVe république fut de traduire en lois et en autres dispositifs publics les principes élaborés dans et par la Résistance. L'ensemble des forces politiques résistantes, même des pétainistes repentis, avait participé à cette élaboration dans la clandestinité, long travail de régénérescence de la république française entrepris par des politiques, des philosophes, des théoriciens et des praticiens, gens de bonne volonté, venus de toutes les strates de la société. L'ensemble des principes fut mis en pratique tôt après la guerre, la IVe république fut encore chargée de la reconstruction, qu'elle fit dans un tourbillon politique qui étourdit à peu près tout le monde. Mais la Résistance n'avait pas posé la question coloniale et la question coloniale ne cessa de se poser à la IVe république, jusqu'à la tuer. L'autre question qui n'avait pas été posée par la Résistance était celle d'un monde où la France ne participerait plus au concert des puissances de premier rang, ce qui n'avait jamais été vu depuis près de mille ans. Cette question se posa en 1956, lorsque l'Union Soviétique menaça d'employer l'arme nucléaire pour interrompre l'opération franco-britannique sur le canal de Suez en Égypte, et lorsque les États-Unis refusèrent d'accorder la protection de leur "parapluie nucléaire" aux Français et aux Britanniques contre les Soviétiques. Pour la première fois depuis le traité de Verdun en 843, la France n'était plus maîtresse de son destin. Ce fut donc à la Ve république de régler le double problème des colonies et de la place de la France dans le monde nouveau.

Elle fit tout cela, dans des conditions d'ailleurs difficiles, les Américains ne considérèrent par exemple l'arme nucléaire française comme "un fait" qu'après la mort du général de Gaulle.

Et la république se survécut, puisqu'elle avait atteint ses objectifs. Et puis, soudain, sans qu'on s'en rende compte, une nuit d'octobre, en 1979, la Ve république est morte.

L'affaire Boulin et les sales manies et manières de la Ve république

Remettons-nous dans le contexte : en 1979, Valéry Giscard d'Estaing est président de la république depuis cinq ans. C'est un surdoué : député à trente ans, secrétaire d'État à trente-trois, ministre des finances à trente-cinq, d'ailleurs inamovible (ou presque) aux finances pendant plus de dix ans, fait inouï, et réel co-créateur de la gestion publique made in Ve république, et finalement président de cette république à quarante-huit ans.

VGE a été élu en 1974 avec le socle électoral des centristes réformateurs de Jean Lecanuet et Jean-Jacques Servan-Schreiber, avec aussi l'aide de Jacques Chirac (alors ministre de l'Intérieur, une position décisive puisque c'est lui qui a établi les résultats définitifs de l'élection et travaillé à celle-ci avec les Renseignements généraux), et d'une partie de l'entourage du défunt président Pompidou (Garaud et Juillet). Son adversaire à droite avait été Jacques Chaban-Delmas, l'homme de la Nouvelle Société, porteur de la part gaulliste des idéaux de la Résistance, honni par les pompidoliens les plus conservateurs. En 1976, Chirac avait rompu avec son allié devenu président, puis s'était emparé du parti gaulliste, l'UDR, qu'il avait rebaptisé RPR en référence au premier parti gaulliste, le RPF. Depuis ce temps, le RPR et l'UDF giscardienne étaient en guerre sourde mais permanente.

En juin 1979, Giscard avait remporté une éclatante victoire sur Chirac aux élections européennes. Si l'on suit la thèse développée par les proches de Robert Boulin, une partie des gaullistes historiques avait alors entrepris (sous la houlette sans doute de Chaban, président de l'Assemblée Nationale) de se rapprocher de Giscard : Robert Boulin pourrait devenir premier ministre de celui-ci, le RPR éclaterait, les gaullistes de l'idéal reprendraient leur liberté et ce serait la fin du chemin pour Chirac.

C'est alors qu'à l'initiative certainement des réseaux chiraquiens, le "Canard Enchaîné" reçut des documents qui mettaient Boulin en cause dans une sombre affaire immobilière à Ramatuelle, et les publia, ce qui était son devoir, après avoir vérifié leur contenu selon les principes journalistiques. La tempête se leva sur Boulin, qui parut y faire face, sa défense est d'ailleurs assez limpide dans la vidéo rappelée par l'excellent dossier que Bakchich a rassemblé sur cette affaire.

La mort de la Ve république... en 1979

Soudain, coup de tonnerre : Boulin était retrouvé suicidé au petit matin, le 29 octobre 1979, dans un étang. Il faut écouter l'une des vidéos rassemblées par Bakchich, celle où Chaban-Delmas réagit à la mort de Boulin devant les députés : quand il prononce le mot "ASSASSINAT", on voit bien ce qui est en filigrane, la certitude qu'il a que Robert Boulin a été assassiné.

Depuis cette époque, le doute n'a cessé de s'amonceler sur la version officielle, qui ne tient plus guère la route. Selon des échos que j'en ai eus ailleurs que dans la presse, la famille de Boulin est certaine de l'assassinat, propose un modus operandi et indique volontiers des noms de maîtres d'œuvre de l'affaire, qui, selon elle, auraient été "couverts" par Chirac. C'est d'ailleurs ce que suggère l'une des interviews de la fille de Boulin. L'un de ces maîtres d'œuvre aurait alors été lui-même député de la république.

Peu importe alors que le coupable s'appelle Roland ou Charles, peu importe que Boulin ait ou non reçu un coup de pelle en travers de la face, ce qui ressort, c'est que ceux qui ont su la réalité des faits ne peuvent en avoir été intacts. Quand on disait en 1986 que Chaban (de nouveau président de l'Assemblée Nationale) était "un ami personnel" de Mitterrand (qui d'ailleurs s'appuyait fort sur Delors, ancien collaborateur de Chaban), et quand en 1987, Raymond Barre, dans l'intimité du huis-clos avec le bureau national des jeunes centristes (JDS) nous glissa que la "mise en coupe réglée de l'État" était "pire" par le RPR que par le PS, on peut voir ce qu'ils suggéraient, au-delà de la simple vendetta personnelle.  D'ailleurs, après le premier adjoint de Boulin, ce fut le fils de Mitterrand qui devint maire de Libourne, en 1989. Il est vrai qu'alors, ni Grossouvre ni Bérégovoy n'étaient morts, et qu'aucun doute de cette sorte ne planait sur le président Mitterrand.

D'autres hypothèses que politique courent parmi ceux qui penchent pour l'assassinat de Boulin. On a aussi parlé d'affaires plus crapuleuses, peut-être par contre-feu. De toutes façons, l'ombre du Service d'Action Civique (le SAC, barbouzage gaulliste mêlé d'histoires mafieuses et corses, né contre l'OAS) planait.

Et le fait qu'on ait pu tuer d'une manière aussi sauvage un important ministre de la république, et qu'on ait pu le faire en toute impunité, est ce qui, probablement, a emporté la fin de l'élan de la Ve république, puisque le ver s'y lovait à l'intérieur même du fruit, dans le mouvement-père de la république, parmi les gaullistes*.

C'est d'ailleurs ce qui est flagrant : la plupart des affaires judiciaires qui sont sorties, de celles qui sont allées en justice, jusqu'au prétoire, ont concerné de ces gaullistes, ou plutôt pompidoliens, de mauvaises mœurs, qu'il s'agisse de Pasqua ou de Chirac ou de leurs proches. Pourtant, on dit qu'en son temps, feu Michel Poniatowski (giscardien du premier cercle) était surnommé "le flingueur" (en raison d'un fort taux de mortalité, notamment parmi les ministres et anciens ministres de l'entourage giscardien, à son époque, les gens sont si mauvaise langue), et on ne sait pas bien quoi dire concernant des personnalités du PS comme Gaston Defferre, si longtemps maire de Marseille, avec lequel Mendès avait eu la funeste idée de s'allier pour la présidentielle de 1969.

Que dire de Chirac aujourd'hui ?

Dans notre combat pour écarter les principes politiques incarnés par Sarkozy du pouvoir, nous avons pris l'habitude de considérer que le passé de Chirac comptait moins que la victoire contre notre adversaire commun. Il faut dire que si la vérité sur l'affaire Boulin se faisait jour, on serait plus facilement enclin à fermer les yeux sur une stratégie de conquête du pouvoir qui a, selon le mot juste de Barre, mis l'État en "coupe réglée" pendant des décennies.

Du temps de Chirac, dans les années 1980 et jusqu'au début des années 1990, la Ville de Paris présentait un budget excédentaire d'un milliard de Francs par an. Un milliard. C'était un milliard d'argent de poche pour le maire Chirac, et comme celui-ci est d'un naturel empathique, il n'hésitait pas à en faire profiter des quantités de gens : électeurs de Corrèze, journalistes, réseaux divers, barbouzes de tous échelons, communautés, fils de, cadres sportifs, trouvaient des emplois pas toujours douteux auprès de la Ville.

Le tas d'or de la taxe professionnelle permettait à la Ville de jeter l'argent par les fenêtres, mais au fond, en dehors des prébendes, la Ville n'était pas mal gérée, le ratio dépenses/actions était bon, grâce à l'ingéniosité de Juppé. On peut discuter en revanche de la multiplication effarante des programmes immobiliers et regretter le très mauvais goût (ou plutôt l'absence de goût) de Chirac dans ce domaine. Il y a d'autres points faibles dans la gestion chiraquienne (le retard d'équipements en crèches, par exemple), et évidemment l'étrangeté des relations de la Ville avec de très nombreux fournisseurs et maîtres d'œuvres ne peut que frapper. Qu'on se souvienne d'ailleurs des marchés truqués d'Île de France, dont l'Hôtel de Ville de Paris était l'épicentre et qui ont éclaboussé l'ensemble des partis politiques alors actifs.

Il faudrait en fait, pour examiner le cas Chirac, faire une balance des qualités de sa gestion et des moyens qu'il a employés pour conquérir et conserver ses responsabilités publiques. C'est ainsi que raisonne Victor Hugo dans sa dernière œuvre-clef, "Quatre-Vingt-Treize", lorsqu'il fait dire à Danton, en 1793 : "c'est vrai, j'ai vendu mon ventre, mais j'ai sauvé la France".

Chirac a-t-il sauvé la France ? Il a au moins sauvé notre honneur en 2003, en commanditant ou endossant le refus opposé par Villepin aux pressions anglo-américaines pour l'invasion de l'Irak.

Et pour le reste ? Le condamner lui sans condamner les autres fait-il de lui un bouc-émissaire ? C'est vrai, mais est-ce suffisant pour l'exempter de ses responsabilités propres ?

Disons les choses carrément : il est vrai que sa relaxe prouverait définitivement qu'en politique, tout est permis, seul le résultat compte, mais condamner un ancien président rejaillit forcément sur ceux qui l'ont élu. Nous l'avons élu et réélu. Sommes-nous donc moins coupables que lui, alors que nous savions ?

Se passer des politiques

La vraie solution est simple : pour n'avoir pas à douter des politiques, faire en sorte de ne pas lier son sort au leur, suivre son chemin, prendre soi-même sa vie en charge. C'est désormais la vraie façon de résister.

* EDIT : j'ajoute ici un lien pour approfondir la compréhension de l'affaire Boulin.

07/10/2009

Comme Internet fait peur.

Sur cette vidéo de Bakchich à propos d'une révélation de Bakchich Hebdo sur d'éventuelles commissions perçues par Nabozy dans des ventes de frégates et autres constructions militaires navales, suivez le regard de certains des avocats interrogés, et lisez leur frayeur d'Internet. Aucune caméra de télévision ne leur donnerait la même angoisse instinctive.

 

30/09/2009

De toutes façons, Polanski doit être condamné.

J'avais eu d'abord l'intention de produire un deuxième article sur l'affaire Polanski, qui aurait été intitulé "On a retrouvé Javert, il est procureur en Californie". On se souvient que Javert, dans Les Misérables, est cet ancien maton de bagne, devenu policier, qui, règlement, règlement, continue à vouloir emprisonner Valjean pour le vol d'une pièce de 5 Francs, des années après, alors qu'entre-temps, Valjean est devenu Madeleine et a créé des quantités d'emplois et d'institutions philanthropiques. Javert incarne la Justice aveugle et rigide, à laquelle s'oppose l'effort de la conscience.

Seulement, à force de demander la clémence, on finit imperceptiblement par oublier le centre du sujet. Et le centre du sujet, c'est que Polanski reconnaît avoir eu une relation ignoble avec une jeune fille, et qu'il s'est dérobé au moment du prononcé de la sentence. Je vais ici expliquer en quoi la condamnation est nécessaire, en quoi l'enjeu dépasse de très loin la simple affaire de mœurs, et en quoi finalement, la clémence doit s'imposer à travers même la condamnation, car tout un chacun a droit au rachat et au pardon. Ce sera aussi l'occasion de réfléchir sur la Justice, au moment où le président de la république est sorti de sa fonction en exerçant une pression directe et publique sur le tribunal, un tribunal d'ailleurs tenu en suspicion par l'opinion publique dans l'affaire Clearstream.

Enjeu politique

Il faut le dire, les arguments qui ont volé de toutes parts dans les milieux cinématographiques mondiaux sont indécents pour des gens qui, par ailleurs, réclament la plus grande sévérité contre les internautes qui téléchargent des œuvres sur Internet. On croit parfois rêver en lisant que les grands artistes seraient au-dessus des lois. Ce serait vrai, à la rigueur, s'il s'était agi d'une affaire de fraude fiscale ou d'insulte à agent, mais on en est loin, très loin. Au fond, le plus ironique aurait été que Polanski fût recherché trente ans plus tard pour une affaire de téléchargement illégal... Qu'auraient-ils dit, tous ces beaux esprits ? Bon, Internet n'existait pas vraiment en 1977, mais quand même.

Or si je trouve parfaitement justifié que les internautes et blogueurs s'en soient pris, en termes parfois très vifs, aux soutiens de Polanski, je trouve que leur propre attitude est incohérente : si les internautes réclament l'indulgence pour le téléchargement, il faut qu'ils l'accordent à d'autres qu'eux-mêmes, non pas en donnant l'absolution à Polanski, mais en acceptant simplement de considérer les différents arguments que je présenterai un peu plus loin, qui justifient à la fois la condamnation et le pardon.

La position de Daniel Cohn-Bendit, par exemple, m'a paru profondément incohérente : s'il invoque la clémence pour ses écrits (répugnants) de jeunesse, il faut qu'il l'accorde aussi à Polanski, sinon on va penser qu'il éprouve le besoin de se dédouaner au détriment d'autrui. En revanche, à contre-emploi, Luc Besson est très cohérent en réclamant la sévérité à la fois contre les internautes et contre Polanski, et de ce fait, se trouve sur le même front que ceux qu'il combat, ce qui prouve que le manichéisme n'est pas de rigueur.

Hélas, la colère est si vive contre un pouvoir politique dont le plan de mise au pas d'Internet est si évident, qu'on ne retiendra pas Internet de s'en venger contre les suppôts artistes liés à ce pouvoir.

L'histoire de Polanski

Il faut rappeler que Polanski est un survivant du ghetto de Cracovie, ce que je ne souhaite à personne (même à mon pire ennemi). Il faut rappeler ensuite qu'il a perdu sa première femme et leur enfant dans des conditions effroyables, un assassinat fou, et qu'à l'époque des faits, il était considéré comme le diable par beaucoup d'Américains, à cause de son film Rosemary's Baby. D'après ce que j'ai entendu hier soir dans la bouche de Gisèle Halimi (qui, en dehors du fait qu'elle a été l'avocate du divorce de mes parents, est réputée pour défendre la cause des femmes), il a été désespéré par le double assassinat de ses proches, au bord du suicide, et c'est donc un homme qui a plongé depuis longtemps dans toutes formes, notamment psychotropes, d'autodestruction qui s'est retrouvé dans la situation du crime odieux qu'il semble avoir commis. Je n'ai pas lu ses Mémoires, mais il y relate à l'envi l'atmosphère très malsaine de Hollywood en ce temps, et ses propres frasques.

Il faut aussi ajouter que, déjà en odeur de soufre, Polanski a lourdement aggravé son cas dans l'opinion locale quand il a sorti l'un de ses chefs-d'oeuvres, Chinatown, en 1974. Ce film insiste sur les tares humaines à travers l'inceste entre autres, et dévoile (en l'extrayant d'un livre) un scandale politico-financier, certes présenté comme vieux alors de quarante ans, mais qui a bien dû éclabousser les institutions californiennes, qui ont certainement cherché ensuite à s'en venger.

D'ailleurs, c'est l'année suivante que Polanski a obtenu la nationalité française, tournant à Paris un film, Le Locataire, sorti en 1976. Et tout montre l'acharnement des juges contre lui au cours de l'affaire, très largement au-delà des souhaits de la victime, qui s'est toujours déclarée suffisamment lavée de l'horreur qu'elle avait subie (et dont par ailleurs on devrait examiner des impérities autour d'elle).

Ensuite, dans cette affaire, Polanski a suivi la procédure américaine : il a accepté de plaider coupable de relation avec une mineure, mais refusé la qualification de viol, indemnisant sa victime et recevant la promesse de cette qualification de détournement de mineure au lieu de celle de viol. Seulement, au moment d'aller à l'audience, son avocat lui a indiqué que le juge n'avait pas l'intention de suivre le procureur. Menacé de perpète, Polanski a préféré prendre la tangente. On se demande s'il ne s'attendait pas à ce genre d'événements et si son obtention de la nationalité française n'était pas pour lui une précaution, mais évidemment, cette réflexion ne le blanchit pas en elle-même, car ce pourrait aussi bien être contre les conséquences du dérèglement de sa vie que contre celles des pressions des pouvoirs californiens (n'oublions pas que l'Amérique est le pays de toutes les mafias) qu'il aurait pris cette précaution.

Et depuis trente ans, après avoir continué à aimer les femmes jeunes mais majeures, puis en avoir épousé une qui, à force, est moins jeune, et après en avoir eu deux enfants, changé sa vie (selon Danièle Thompson qui le connaît bien), s"être amendé autant que possible, avoir fait un certain nombre de films, parfois très bons, Polanski a fait un film bouleversant, un réel chef-d'œuvre, Le Pianiste, qui a obtenu l'Oscar à Hollywwod, un Oscar qu'il n'a pas pu aller chercher...

La corporation cinématographique contre l'institution judiciaire

L'idée s'est alors fait jour dans le cinéma qu'il fallait permettre à Polanski de revenir en Californie. On enregistra un témoignage vidéo de sa victime qui, âgée de 45 ans, a fait sa vie et n'a pas l'intention de rouvrir ce dossier qui n'est pas drôle pour elle, sans doute, et qui de toutes façons, est liée à Polanski par le pacte fait à l'époque et qui lui a certainement procuré une indemnisation substantielle (ce qui, vu de l'extérieur, n'efface rien, mais on ne peut pas se mettre à la place des gens, d'autant moins qu'on ignore le détail des circonstances qui ont conduit au drame).

On peut par conséquent trouver significatif que ce soit justement en se rendant à un festival de cinéma que Polanski ait été interpellé : c'est en quelque sorte la réponse rigoureuse de la justice aux aspirations du cinéma. La loi est la loi, elle doit même être "la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse", dit la Déclaration de 1789. Et c'est vrai.

Mais tout de même, il y a des années que le mandat d'amener contre Polanski traîne sur les bureaux de toutes les polices du monde, y compris la police suisse, et que Polanki se promène tranquillement partout, même et surtout en Suisse, et qu'il y a donc une forme d'injustice à ce que ce pays change subitement, sans le prévenir, la doctrine qu'il avait adoptée à son endroit.

Il faut dire qu'entre-temps, la Suisse a été placée sur la liste noire des États-Unis et que, de ce fait, les pouvoirs suisses pouvaient éprouver le besoin de se refaire une virginité aux yeux des autorités américaines, ce qu'ils ont pu faire au détriment de Polanski, sacrifié, comme je l'ai écrit lundi, sur l'autel du sacro-saint paradis fiscal suisse.

Tout être humain a droit au rachat

Parmi les condamnations véhémentes que j'ai lues sur la Toile, il y avait qu'on ne devait pas accorder de prescription aux violeurs, et aux violeurs pédophiles en particulier. C'est, je crois, ce que décide le droit helvétique. Il se trouve que personne n'invoque la prescription. Il n'y a pas de prescription, comme l'a justement noté Éolas. La question, de mon point de vue, est différente : est-il impossible de se racheter d'un crime dont la victime s'estime réparée ?

Quelle est la fonction de la punition et de la prison ? S'agit-il d'éliminer, de punir, de faire un exemple, ou de corriger ? S'il s'agit de corriger, ne doit-on pas examiner ce qu'a été la vie de Polanski depuis cette époque ? A-t-il récidivé ? Non. La punition et sa menace n'ont-elles pas, au contraire, agi en profondeur sur lui pour le conduire à s'amender ? C'est ce qu'on peut penser. La prison pourrait-elle aujourd'hui le corriger plus ?

Qui peut sérieusement le prétendre ?

Alors on a, d'un côté, le fait que la peine serait inefficace, et de l'autre côté celui que l'on a envie de lutter contre la maltraitance féminine (mais Nadine Trintignant a signé la pétition) et de ne pas lénifier le viol, qui est un crime abominable, ni la pédophilie, qui est un délit odieux, c'est hélas vrai.

Que faire ?

Se souvenir que toute peine est individuelle, que le juge ne considère que les faits et l'effet de sa décision sur la victime et sur le coupable. C'est pourquoi Polanski doit être condamné, il doit l'être, parce qu'il a commis un acte odieux. Mais on doit tenir compte des efforts qu'il a faits pour se racheter, vis à vis de sa victime bien sûr, mais aussi vis à vis de la Société. Et à ceux qui prétendent qu'il faut l'envoyer en taule pour l'exemple, je ne peux que répondre : si vous ne donnez pas aux criminels l'espoir de se racheter, autant les condamner directement à mort. Comme ça, imprescriptibilité générale, peine de mort automatique, on aura vite supprimé l'espèce humaine, qui n'est qu'un ramassis de délinquants, il faut quand même le rappeler. Comme dit l'autre, "que celui qui n'a jamais fauté lui jette la première pierre".

Donc une condamnation, pour que chacun sache effectivement que ses forfaits peuvent le poursuivre longtemps, et qu'il lui faudra œuvrer beaucoup et longuement s'il veut s'en racheter. Mais soit la dispense de peine, soit des activités d'intérêt général en substitution, soit le sursis, sachant qu'à 76 ans, il a peu de risque de récidive, et une amende pour s'être dérobé à la justice en 1977, me paraîtraient un châtiment à la fois efficace et équitable.

La Justice est-elle aveugle ?

Enfin, le côté irréel de cette arrestation au bout de trente ans doit nous secouer. Quand même, quand le procureur Javert de Californie nous explique sans sourciller que cela a été long d'avoir Polanski parce que Polanski était en fuite, on a envie de lui rétorquer "C'est vrai qu'il se cachait dans des grottes et qu'il diffusait ses films sous le nom de Polanski, Roman, au lieu de Roman Polanski". Allons, c'est ridicule. On n'a pas affaire à un criminel nazi réfugié aux États-Unis en Argentine sous un faux nom. Véritablement, les tartuffes sont de sortie. La justice n'en sort pas grandie.

Et c'est donc étonnant de s'apercevoir que cette mascarade pathétique se joue au moment où le président français vient de se rendre coupable de forfaiture en exerçant une pression directe et publique sur un tribunal pénal dans une instance à laquelle il est partie à titre personnel, ce qui redouble la forfaiture.

Et c'est étonnant aussi que tous ces événements soient concomitants avec un sondage (hum) qui souligne les doutes que l'opinion aurait sur l'impartialité des juges du procès Clearstream (cependant que Chirac obtient un non-lieu du Parquet qui, contrairement aux juges de Clearstream, dépend organiquement du pouvoir).

Vraiment, on est presque étonné qu'il ne se soit pas encore trouvé de mauvaise langue sur Internet pour crier au complot contre la crédibilité de l'institution judiciaire...

Alors, avant que cette vague de suspicion-là se soit levée, disons vite qu'il doit être vrai que la Justice est aveugle, car si elle ne l'était pas, elle irait au cinéma, et elle y aurait vu Le Pianiste, et elle aurait accordé, enfin, le pardon.

Mais j'aime trop les femmes, et une jeune femme en particulier, dont je sais que les jolis yeux verts vont lire cette page, pour ne pas conclure autrement. Sachons accorder le pardon, et permettons que l'on puisse se racheter. Et ne laissons pas banaliser le viol, ni maltraiter les femmes.

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29/09/2009

Ce que l'affaire Polanski enseigne sur Hadopi.

Bien entendu, le texte qui va suivre ne vise aucunement à légitimer l'acte commis par Roman Polanski voici plus de trente ans, mais à comprendre le piège dans lequel certains dispositifs judiciaires peuvent placer les éventuels justiciables. L'acte délictueux en lui-même (l'acte sexuel avec une mineure âgée de 13 ans) est inexcusable sauf circonstances vraiment exceptionnelles, mais les faits ne sont pas ceux que l'on nous a servis d'abord.

Le piège du plaider coupable

Selon la version qui traîne beaucoup, notamment sur Internet, Polanski aurait drogué et violé une toute jeune fille. Dit comme cela, c'est ignoble, on clame "Renvoyez-le à ses juges ! qu'il aille croupir !" Mais selon une autre version que l'on commence à entendre, la mère de la jeune fille aurait poussé Polanski à faire des photos de sa fille dans une situation que l'on imagine, à peu près comme cela a été le cas pour Brooke Shields à la même époque, sauf que... une fois l'acte commis, voici Polanski dans un piège : il ne peut nier, il a commmis l'irréparable. Pour sortir d'une situation dans laquelle il se sent piégé, ce qu'il est en effet, Polanski peut aller au procès, dont le résultat est aléatoire, ou transiger avec sa victime et avec la justice, ce qui l'oblige à plaider coupable. La gravité de la peine est l'un des éléments substantiels de la transaction avec la justice. Pour obtenir une peine relativement légère, Polanski accepte de plaider coupable et d'indemniser sa victime dont la mère semble pourtant aussi coupable que lui.

Désormais, quoiqu'il arrive, le voici dans la nasse de la culpabilité. Et lorsqu'il sent que la peine va dépasser la durée pour laquelle il a transigé, il préfère s'enfuir. Le piège s'est refermé sur lui. Trente ans plus tard, un procureur, sans doute en mal de notoriété, va agiter la nasse. Polanski est arrêté par les autorités d'une Suisse qui cherche désespérément à se refaire une virginité aux yeux des États-Unis. On va sacrifier Polanski sur l'autel du sacro-saint paradis fiscal helvétique.

J'avoue que cette seconde version me paraît plus vraisemblable que la première, et finalement, cette affaire de piège s'est répétée plus tard contre Michael Jackson, sans succès automatique, puisqu'il a payé une fois et gagné l'autre. Dans la dernière, le gamin qui avait accusé Jackson a reconnu après sa mort que ses accusations étaient fausses.

Ainsi, dans le dispositif Hadopi, y a-t-il de petits ruisseaux qui peuvent composer de grandes rivières judiciaires. On dit "mais l'Hadopi qui constate n'incrimine pas", sauf que ses constatations créent une présomption de culpabilité. On dit ensuite "Mais la procédure d'ordonnance judiciaire est légère et n'aboutit pas à une condamnation pénale" sauf qu'elle est optionnelle dans le dispositif, entre les seules mains de la partie civile, d'une part, et du procureur qui agit sur instruction politique d'autre part. La procédure enclenchée par la constatation de la prétendue infraction peut, sans aucune preuve autre, mener le justiciable en correctionnelle, avec très lourde amende et surtout prison à la clef. Et la constatation faite par la commission de l'Hadopi fait foi jusqu'à preuve du contraire, il y a bien toujours une présomption de culpabilité, dont le justiciable peut n'avoir aucun moyen de se libérer.

Ainsi, le raisonnement que l'on nous sert à propos d'Hadopi est-il celui qui a piégé Polanski : "Vous pouvez accepter le dispositif judiciaire, car, c'est promis, la peine sera légère". Or en justice comme ailleurs, et l'affaire Polanski le démontre, les promesses n'engagent que ceux qui les entendent. Et le législateur, lui, ne peut valablement se contenter d'une promesse de l'autorité politique devenue maîtresse des poursuites judiciaires : il est là, au contraire, pour fixer les règles qui offrent au justiciable des garanties de défense équitable et la clarté métronomique de la loi pénale, non pas l'aléatoire de la bonne volonté du pouvoir politique. En matière pénale, s'il y a pouvoir discrétionnaire valide, c'est toujours dans le sens de l'allégement de la pénalité, jamais dans celui de son alourdissement. C'est en quoi le texte Hadopi 2 est aussi liberticide que l'était Hadopi 1 avant censure par le conseil constitutionnel.

Voilà ce qu'enseigne l'affaire Polanski, le piège du plaider coupable, sur le texte Hadopi 2, le piège de la présomption de culpabilité.

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29/05/2009

Après la libération de Coupat, il reste des embastillés

J'étais avec Quitterie à Sarcelles, ce soir de novembre où des inconnus, à Villiers-le-Bel (commune voisine), ont fait feu au milieu de l'émeute sur des policiers qui en sont morts. Je me souviendrai toute ma vie de l'arrivée du regretté Ali Menzel (suppléant de la candidature de Jean-Michel Cadiot pour le Mouvement Démocrate), affolé, effondré, expliquant ce qui se passait dans sa ville et dans son quartier, comme il essayait de ramener le calme.

Il y aura toujours une part d'ombre sur les circonstances qui ont coûté la vie aux deux jeunes de Villies-le-Bel dont les émeutes voulaient dénoncer l'injustice.

Et quelques semaines plus tard, en février 2008, dans des conditions scandaleuses et tonitruantes (on était en pleine campagne pour les élections municipales et cantonales), d'autres jeunes étaient arrêtés. Quinze mois plus tard, alors que leurs dossiers semblent vides, quatre d'entre eux sont toujours sous les verrous.

Il y a déjà longtemps que les défenseurs des droits de l'homme dénoncent l'abus de la détention provisoire et préventive par la justice française. Ce cas est particulièrement flagrant, il l'est d'autant plus que personne ne parle jamais de ces pauvres gamins. La libération de Coupat en est l'occasion. Dès l'arrestation de celui-ci, Quitterie avait fait le lien entre les deux affaires. C'est ce que vient de faire aussi un chroniqueur du site Rue 89. Réclamons la libération des jeunes de Villiers-le-Bel.

12/05/2009

Soutien à Mediapart.

À l'heure où j'écris, Edwy Plenel et l'équipe de Mediapart doivent être au palais de justice de Paris pour répondre du contenu d'un article sur un établissement financier, qui me paraît relever du journalisme pur et simple. Défense de la liberté de la presse, donc, et soutien pour Mediapart.

10:47 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : médias, justice, edwy plenel, mediapart | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

24/10/2008

Journal des magistrats en colère.

La justice est en colère contre la garde des sceaux, en colère contre la façon dont le pouvoir gère la justice, en colère... et dire que Bayrou avait proposé de créer un réel troisième pouvoir, de faire désigner le garde des sceaux selon une procédure adhoc, lui garantissant l'indépendance...

Voici en tout cas l'un des plus célèbres blogs de France, l'un de ceux qui donnent sa noblesse au blogging, transformé en bureau des pleurs et des colères des magistrats. Fait exceptionnel, le nom même du blog change pour l'occasion. Maître eolas est devenu le "journal des magistrats en colère". Et cela mérite lecture.

08/10/2008

Du pognon pour la justice !

Une étude montre ces jours-ci que la France consacre moitié moins d'argent par habitant à son service public de la justice que l'Allemagne. Faut-il rappeler que, lors de la dernière campagne présidentielle, Bayrou proposait d'ériger réellement la justice en pouvoir, le garde des sceaux indépendant du gouvernement ?

On mesure chaque jour à quel oint cette mesure serait nécessaire et, bien entendu, tout commencerait par la justice.

19:13 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : justice, budget, bayrou | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

03/10/2008

Dati irrecevable.

Dommage : Rachida Dati n'aura pas à faire la preuve de son MBA ni des affirmations qui l'entouraient. L'avocat poursuivi pour l'avoir mise en doute a été exempté de l'instance, la plainte de la garde des sceaux jugée irrecevable par le tribunal de La Réunion. La plainte était une pression inacceptable sur un avocat, mais elle donnait l'occasion de fouiner. Finalement, la justice (avec juste raison légale, à mon avis) botte en touche. Dommage, on aurait bien rigolé.

13:27 | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : justice, rachida dati | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

06/08/2008

Tapie, Taiwan : c'est Noël en été... pour les puissants.

On comprend bien pourquoi Sarkozy a demandé la suppression du droit de grâce collectif pour le président de la république lors de la réformette des institutions : il n'en a pas besoin.

Après Tapie indemnisé dans des conditions particulièrement scandaleuses, voici que s'efface l'ardoise un peu sanglante des frégates de Taiwan. Évidemment, on fait tout cela en été. C'est donc bien pour des raisons éthiques que le pouvoir agit en toute occasion... et bien entendu, le fait que ce soit l'infortuné juge van Ruymbeke, mis en cause dans l'affaire Clearstream par l'actuel président de la république, ne peut en aucun cas être rapproché de ce blanchiment mirifique, digne de la tornade blanche.

Faites ce que vous voulez, moi je vais acheter le nouvel emblème de la république française : des bananes.

18:13 | Lien permanent | Commentaires (25) | Tags : justice, tapie, frégates de taiwan | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

07/01/2008

Rétention des condamnés à quinze ans : la barbarie judiciaire.

Depuis des décennies, peut-être des siècles, depuis au moins Voltaire, on est persuadé en France que la justice marche d'un pas sûr vers la civilisation chaque fois qu'elle s'éloigne des idées sommaires et des procédures discrétionnaires et cruelles.
 
Depuis des décennies, et certainement des siècles, on sait qu'il vaut mieux innocenter un coupable que condamner un innocent.
 
Or c'est tout l'inverse que se propose de faire demain la majorité parlementaire : il s'agit désormais de maintenir des condamnés en détention perpétuelle (la perpétuité réelle) sur un simple soupçon. Ce n'est pas encore une lettre de cachet, mais cela en prend le chemin.
 
À ce compte-là, certainement, Sade aurait passé toute sa vie à la Santé comme il l'a passée à la Bastille.
 
Voyons de quoi il s'agit : lorsqu'un délinquant sexuel qui s'est dévoyé sur un mineur est condamné à quinze ans de réclusion au moins, une commission d'experts peut décider que, lorsqu'il aura terminé sa peine, eh bien ... il n'aura pas terminé sa peine.
 
Il serait plus simple d'autoriser la perpétuité réelle. Mais on sait, car la justice a progressé, elle, elle a réfléchi et étudié, elle, on sait que la perpétuité réelle est une peine pire que la mort, car elle livre le condamné au désespoir sans limite. Elle s'enfonce donc dans la barbarie, et ce sans le moindre bénéfice pour la société, car tout au contraire, le but de la prison doit être de réinsérer les délinquants, de leur offrir l'espoir d'une rédemption, d'une vie meilleure, accomplie.
 
Il s'agit là, on s'en doute, d'un vieux débat, celui qui depuis des décennies, oppose la conception d'une rétention punitive (croyant dans la vertu exemplaire de la punition) à celui celle d'une rétention réformatrice. La rétention-élimination contre la rétention-soin.
 
Le paradoxe de ce dispositif, c'est qu'il combine les deux critères, puisque la rétention consécutive à la peine a un objectif officiel de ... soin.
 
Mais alors, à quoi ont donc servi les quinze années de détention antérieure ? À rien ?
 
Le taux de récidive, dans ce domaine, est égal à 1 %. Va-t-on le réduire ? Et à quel prix ? Le remède ne sera-t-il pas pire que le mal ?
 

21:05 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : politique, justice, rétention, pédophiles | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

28/06/2007

Réforme de la carte judiciaire : préserver la vraie Bretagne ?

Le gouvernement a lancé une réforme de la carte judiciaire pour, officiellement, rationnaliser l'implantation des juridictions de façon à faire des économies.
 
On pourrait objecter que la justice de France a moins besoin d'économies que d'indépendances et de moyens supplémentaires, tant il semble que notre pays soit à la traîne des grandes démocraties sur ce point comme sur d'autres.
 
Il m'a seulement paru utile de rappeler au passage que la Bretagne historique est encore le cadre de la cour d'appel de Rennes qui englobe, comme je viens de le signaler, la Loire-Atlantique.
 
En voici la carte issue du site gouvernemental dédié à la réforme de la justice :
 
http://www.carte-judiciaire.justice.gouv.fr/index.php?rubrique=10352&ssrubrique=10390 réforme
 
Toucher à ce ressort juridictionnel d'appel au moment où les voix sont de plus en plus nombreuses en Loire-Atlantique pour demander le rattachement de ce département à la région administrative et politique de Bretagne serait un très grave coup porté aux Bretons et à leur unité.

14:45 | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : Bretagne, justice, réforme de la justice | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook