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24/11/2008

12000 Euros pour quelques tentes, 300 millions pour Tapie, cherchez l'erreur.

Ce matin, on a appris que la justice avait condamné le collectif "Droit au Logement" à 12000 Euros d'amende pour avoir planté quelques piquets de tente rue de la Banque, tout près de la Bourse, à Paris, et que pour un motif proche, le collectif les Don Quichotte s'était vu confisquer près de 200 tentes...

Somme toute, le pouvoir fait le ménage avant l'hiver pour éviter de se trouver exposé aux images récurrentes des petites toiles de tente qui émaillent les berges de la Seine et divers emplacements parisiens.

Oh, on réclame 12000 Euros à ceux qui n'ont rien, la gueusaille qui couche sous les ponts, mais on donne 300 millions à ceux qui ont tout, les Tapie et consorts, c'est une honte.

Allez, pour rester positifs, courons sur le site du Mois de l'Économie Sociale et Solidaire.

21:27 | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : dal, rue de la banque, don quichotte, tapie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Comment je suis devenu le dernier président des JDS de Paris.

C'est une note curieusement liée à l'actualité, que je fais en particulier pour ceux de mes lecteurs qui aiment que je leur fasse les "belles histoires de l'Oncle Paul" du centrisme et de la famille démocrate française.

En 1994, le Centre des Démocrates Sociaux (CDS) vivait ses dernières heures. Il était à bout de souffle après dix-huit ans d'existence, sa dynamique avait disparu avec son fondateur, Jean Lecanuet. L'année 1994 fut émaillée de non moins de deux congrès du CDS, le premier à Rouen, ville longtemps dirigée par Lecanuet, le deuxième à Paris porte de Vincennes, sur la pelouse de Reuilly.

La décrépitude du CDS avait commencé vers 1991-92 et je me souviens d'avoir vu pour la dernière fois Lecanuet, au tout début 1993, lors des voeux annuels du président du Sénat (Monory), très amaigri, frêle, soutenu par deux personnes. Il est mort peu de mois après, on m'a dit que c'était d'un cancer de la peau dû à un excès d'UV.

Au moment de la mort de Lecanuet, Bernard Bosson, jeune maire d'Annecy et fils du sénateur Charles Bosson, centriste historique, était le seul candidat déclaré à sa succession. Il y avait eu auparavant une tentative de Dominique Baudis, alors maire de Toulouse et ancien président des Jeunes Démocrates (modèle 1965), mais sans aboutissement réel, avec plutôt une balkanisation du mouvement. J'en parle peu, parce que c'était un moment où j'avais choisi de prendre mes distances.

Quoi qu'il en soit, dans l'été 1993, François Bayrou, qui recevait l'Université d'Été des JDS sur ses terres des Pyrénées Atlantiques (à Biarritz), s'aperçut que les conditions étaient réunies pour qu'il pût se présenter à son tour à la présidence du CDS. Il le fit peu après.

Au moment où il annonça son intention, Bosson faisait la quasi-unanimité, caracolant dans toutes les enquêtes, bref, c'était gagné d'avance pour lui.

Or le congrès avait été prévu de longue date pour se tenir à Rouen, au printemps 1994. Pour une raison que j'ignore, l'idée vint qu'il serait difficile de voter pour un nouveau président lors de ce congrès, sans doute en raison des élections européennes qui devaient avoir lieu en juin suivant et où Baudis serait en définitive tête de liste commune UDF-RPR. Bosson, qui avait toutes les cartes en mains, qui pouvait tout, commit la faute d'accepter ce report qui devait le placer en positio défensive pour les six mois suivants et, en définitive, le faire perdre.

Le congrès fut évidemment une mare aux grenouillages. Son moment le plus fort, dans mon souvenir, fut la montée à la tribune de Valéry Giscard d'Estaing, parce qu'il était détesté par la salle. Il traversa celle-ci de part en part, du fond jusqu'à la tribune, au milieu du silence glacial des 1500 délégués. Puis, parce que c'est un grand orateur, en quelques phrases où il s'exprimait sur Jean Lecanuet (mort depuis peu), VGE souleva un tonnerre d'applaudissements et il parvint ainsi à ressortir encore sous les applauddissements, un véritable tour de force.

Et pourtant, à l'automne, lorsqu'il m'est arrivé de dîner à la table de Bayrou au ministère de l'Éducation Nationale où se tenait son équipe de campagne (Bosson étant mieux implanté au siège du CDS), Bayrou nous a confié à quel point l'antagonisme avait été fort entre le grand bourgeois Giscard et le méritocrate Lecanuet, un choc culturel.

Entre-temps, j'avais dirigé l'équipe qui répondait au courrier de la liste conduite par Baudis pour la campagne européenne de juin 1994. Là, nous avions gagné, avec d'ailleurs difficulté, et j'avais pu constater la constitution d'une ligue des gérontes de l'UDF (VGE, Monory et Barre) autour de la candidature de Chirac pour l'élection présidentielle qui devait avoir lieu l'année suivante.

Bosson, lui, était très engagé auprès de Balladur, ainsi que le président de la fédération CDS de Paris, le conseiller de Paris et neveu de Jacques Barrot, Jean-Charles de Vincenti. Les balladuriens se groupaient donc autour de Bosson, c'était logique. cela avait la conséquence de fournir à l'adversaire de Bosson le réseau de ceux qui penchaient plutôt pour Chirac.

L'Université d'Été des JDS eut lieu au Pradet, dans les hauts du Var, cette année-là. L'équipe sortante des JDS, conduite par Jean-Luc Moudenc, ne s'en occupa guère et l'équipe entrante n'avait pas encore été élue. Comme j'avais organisé plusieurs universités d'été quelques énnées plus tôt, je pris (sans mandat) la chose en mains et je me revois, en juillet 1994, tout seul (la secrétaire Chantal Renaud était en vacances), il faisait très chaud, portant des cartons entiers de lettres à l'Assemblée Nationale, d'où elles étaient expédiées sous le timbre de plusieurs députés (il me semble que c'est Jean-Christophe Lagarde qui, comme numéro 2 de l'équipe sortante et encore je crois assistant parlementaire, finit par organiser cette expédition).

De ce fait, après la campagne européenne, je me retrouvais au milieu des événements. C'est à l'Université d'Été que nous avons élu Christian Bartholmé (qui vient de se manifester à moi sur Facebook) dernier président des JDS. Il était pour Bosson et pour Balladur, comme d'ailleurs Lagarde et la plupart des présents.

C'est le moment où j'ai scellé mon deal avec Claude Goasguen, par l'entremise d'un jeune du XIIe qui se nommait Pierre-Alexandre Kropp. Goasguen soutenait Chirac (dont il était proche) et Bayrou avec lequel il avait fait ses premières armes comme JDS (lui aussi) quinze ans plus tôt. Retrouvant mon président des JDS Éric Azière, je me suis ainsi retrouvé intégré à l'équipe de campagne de Bayrou et je venais plusieurs fois par semaine prendre le courrier reçu par Bayrou (émanant de militants), auquel je répondais en utilisant les textes et discours de Bayrou. J'avais fait ça pour Baudis aux Européennes (avec trois collaboratrices) et je continuais seul pour Bayrou.

Cette campagne dura près de trois mois et j'en garde une foule de souvenirs chaleureux.

Parmi eux, cette réunion avec Bayrou dans la grande salle du rez-de-chaussée qui donne sur le jardin intérieur du ministère, où Bayrou rencontrait les vingt ou trente cadres JDS qui le soutenaient.

- Alors, pour la présidentielle, vous allez voter pour qui ?

- Pour Balladur.

- Pour Balladur.

(Le CDS avait choisi de soutenir officiellement Balladur et les jeunes, très anti-chiraquiens, étaient presque tous sur cette ligne, Bayrou lui-même soutenait officiellement Balladur qui était son chef de gouvernement).

- Pour Balladur.

- Pour Balladur.

La parole vint à moi, le dernier :

- Pour Chirac.

Silence.

- Eh bien, vois-tu, me dit-il, si j'ai choisi de soutenir Balladur, c'est pour éviter que la porte se referme sur la candidature unique.

Au passage, on voit la clairvoyance de Bayrou pour qui Chirac (qui était pourtant au fond du trou dans les sondages) restait le favori de l'élection et Balladur celui qui permettait d'éviter la candidature unique et stalinienne d'un monolithe de la droite et du centre droit.

Or c'était paradoxal car, dans le même temps, Balladur annonçait que, s'il était élu, il rassemblerait l'UDF et le RPR dans un seul parti (ce que Chirac fera plus tard sous le nom d'UMP avec ceux de l'UDF qui le rejoindront, la majorité des élus), cependant que Chirac garantissait que, s'il était élu, il laisserait existence et pleine autonomie à l'UDF, ce qu'il a d'ailleurs fait.

On voit à quel point les choses étaient confuses et on se battait à front renversé.

Ce débat de structure soulignait la péremption du format CDS. Et, lors du congrès qui eut lieu en terre chiraquienne , à Paris, à la fin de l'année 1994, l'avenir se formulait à travers lui : Bosson voulait un grand parti de droite et du centre droit (voter pour lui revenait à créer une CDU à la française, ancrée à droite) sous la houlette de Balladur ; Bayrou voulait un grand parti occupant l'espace central, qui aille de Balladur à Jacques Delors. Dans les deux cas, le CDS, comme tel, était appelé à se fondre dans un mouvement plus large.

Ce congrès rassemblait des délégués des fédérations départementales (à la manière de ce qu'on vient de voir au congrès socialiste de Reims). La veille du vote, les deux maîtres ès réseaux, Yves Pozzo di Borgo et Éric Azière, avaient pronostiqué l'un que Bayrou aurait 667 voix, l'autre qu'il en aurait 664, il en eut, si ma mémoire est bonne, 661, qui représentèrent 57 % des délégués, nous avions gagné.

Vint l'élection municipale. Suivant mon deal avec Goasguen, je fus élu adjoint au maire du XVIe arrondissement et celui qui m'avait permis d'arriver là, Kropp, devint conseiller du XIIe arrondissement.

Puis il fallut préparer le congrès par lequel le CDS devait se fondre dans une entité (à peine) plus grande, Force Démocrate.

La situation des bossono-balladuriens à Paris devenait très inconfortable par la double pression des chiraquiens et des bayrouistes. Ils finirent par jeter l'éponge et par quitter le CDS, vers septembre 1995 si ma mémoire est bonne.

Jean-Manuel Hue s'en alla donc, quittant la présidence des JDS de Paris, et emmenant la quasi-totalité des cadres et le plus grand nombre des adhérents de la fédération. De ce bureau fédéral décimé, il restait deux vices-présidents et moi, qui en étais devenu membre de droit par le fait de l'élection, et quatre autres, dont Kropp.

Il y eut une réunion pour pourvoir à l'intérim en attendant le congrès. Elle eut lieu dans un très petit bureau du rez-de-chaussée de l'aile du ministère de l'intérieur que Goasguen avait prise pour son éphémère ministère de la Réforme de l'État. Hervé Bénessiano, aujourd'hui premier adjoint au maire du XVIIe arrondissement et depuis toujours bras droit de Goasguen (et accessoirement mon premier président des JDS de Paris quand j'ai adhéré en 1981), présidait la séance.

Les deux vices-présidents revendiquaient la présidence intérimaire et se chamaillèrent un certain temps. le premier, Vincent C, était le jeune de service du VIIe arrondissement (sous la houlette de Pozzo), le deuxième, Philippe Chaumont, était du XIVe que Goasguen venait de quitter pour rallier le XVIe arrondissement en vue de prendre une circonscription législative (ce qu'il fit en 1997).

Comme il était impossible de mettre les deux vice-présidents d'accord l'un avec l'autre et comme il n'existait aucune disposition permettant de trancher entre eux, j'ai fini par proposer que, puisque j'étais le plus ancien dans le grade le plus élevé (comme on dit dans l'armée), j'assumerais l'intérim, le temps de participer au congrès fondateur du nouveau parti, après quoi j'organiserais sous trois mois une AG où serait élue l'équipe dirigeante du nouveau mouvement de jeunes à Paris.

Je sentis que Kropp et les trois autres membres de base du bureau étaient soulagés par cette proposition. Les deux vice- restèrent cois un instant, puis commencèrent à mettre mon intégrité en cause.

Là, c'était trop, je tapai du poing sur la table, j'indiquai que j'assumerais l'intérim avec le titre de coordinateur , que l'un des membres non-titrés serait secrétaire, l'autre trésorier (fonctions statutaires) et que tous les autres seraient vice-présidents. Quelqu'un avait une objection ?

Non. Ils n'osèrent pas.

Le nouveau secrétaire émit l'idée qu'il vaudrait mieux que je prenne quand même le titre de président et ne fut pas contredit.

Tout le monde signa le PV que nous allâmes aussitôt déposer à la préfecture.

Voilà comment je suis devenu le dernier président des JDS de Paris, en un temps lointain, l'automne 1995, dont je me souviens avec plaisir maintenant que je suis entièrement tourné vers l'avenir avec Quitterie Delmas.

L'entreprise citoyenne.

Dans les années 1990, l'expression "entreprise citoyenne" a fleuri. Ce fut non pas une tarte à la crème, mais un sujet récurrent. L'idée centrale du concept est d'associer l'entreprise et l'éthique. Il s'agit d'éthique sociale comme d'éthique environnementale. Ce concept assez large survit et s'épanouit, jusqu'à fonctionner par antiphrase.

Pourtant, il existe une vraie catégorie d'entreprises responsables qui combinent les diverses éthiques que l'on peut rattacher à l'entreprise citoyenne : celles de l'économie sociale et solidaire dont il est question dans l'excellente note d'hier soir de Quitterie Delmas.

23/11/2008

Démocratie interne : mission impossible ?

L'aboutissement du vote du Parti Socialiste des deux dernières semaines est profondément paradoxal : d'un côté, c'est un extraordinaire exercice de démocratie interne, à faire pâlir tous les militants sincères de la planète ; mais de l'autre côté, c'est une prodigieuse catastrophe qui semble comme un cas d'école de ce qu'il ne faut pas faire, et comme la démonstration jusqu'à l'absurde (sinon par l'absurde) de la fragilité de la méthode démocratique.

Tripotages en tous genres et dans tous les camps rivalisent avec soupçons, menaces, coups bas, bref, c'est la foire d'empoigne.

D'un côté, on a vu le premier secrétaire ségoléniste du PS des Bouches-du-Rhône dissoudre les sections qui n'avaient pas voté pour sa motion lors du premier scrutin, juste avant le congrès (en quelque sorte lors du tour de chauffe), de l'autre le blogueur Marc Vasseur, partisan de Pierre Larrouturou au premier tour et de Ségolène Royal au second, empêché de se présenter aux élections internes, et tous les soupçons se porter sur le vote de ce département. De partout, on voit maintenant surgir des erreurs de décompte, 30 voix de plus pour l'une ici, 30 pour l'autre là.

Il n'y a guère qu'à Paris, où Bertrand Delanoë est minoritaire et où dans sa propre section du XVIIIe arrondissement, Royal était en tête au premier tour, qu'à Paris donc que les choses semblent avoir été un peu plus transparentes. Encore est-ce au détriment du maire et alors que l'ex-premier fédéral, Patrick Bloche, avait dû "manger son chapeau" de l'alliance MoDem aux dernières municipales.

Quoi qu'il en soit, le PS donne un spectacle indigne de l'un des grands partis de notre démocratie. Quitterie Delmas y a vu à juste titre un symptôme d'une démocratie souffrante, non pas celle seulement de ce parti, mais celle du pays tout entier.

Nous, au Mouvement Démocrate, nous nous sommes bien gardés de nous gargariser sur ce point, et notre modestie paraît raisonnable.

Mais tout de même, la question se pose : la démocratie interne, sereine et sincère, en conscience, est-elle impossible dans les partis politiques français ? Je veux croire que non, je veux croire que nous pouvons entendre la voix de la raison et de la démocratie, et la voix du vivre ensemble, Quitterie Delmas.

22/11/2008

Quitterie : de vraies primaires au MoDem ?

Quitterie Delmas répond à une question de la salle lors du café politique d'Aujourd'hui Autrement, mercredi 19 novembre 2008 : comment faire de la politique autrement ?

Elle s'exprime sur la promesse du Mouvement Démocrate. Cette promesse, nous l'avons tous faite ensemble. Sera-t-elle tenue ? Et, par exemple, y aura-t-il de vraies primaires pour les élections ?

(Je rappelle que tout ça s'est passé à l'Imprévu, 35, rue Didot, dans le XIVe arrondissement de Paris).

 

22:56 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : modem, primaires, quitterie delmas, élections | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

De la nature du pouvoir présidentiel.

Il faut relire la phrase de Victor Hugo que j'ai inscrite dans ma colonne de gauche : "Là où la connaissance n’est que chez un homme, la monarchie s’impose. Là où elle est dans un groupe d’hommes, elle doit faire place à l’aristocratie. Et quand tous ont accès aux lumières du savoir, alors le temps est venu de la démocratie".

Monarchie, aristocratie, démocratie, ou, si l'on veut, monarchie, oligarchie, démocratie.

On distingue dans cette phrase trois acteurs : le chef de l'État, les oligarques (càd le parlement, les grands corps de l'État, les 200 familles chères à Herriot, les grands groupes industriels, ceux qui détiennent le pouvoir dans les différentes sphères élevées de la société, la Cour en d'autres temps...), le peuple.

La IIIe et la IVe républiques, par certains côtés, étaient des oligarchies : le peuple votait pour ses représentants et avait peu son mot à dire sur le contenu des décisions politiques, que les représentants avaient tendance à confisquer. Les milieux d'affaires et les milieux parlementaires dirigeaient tout sans qu'on y pût réellement distinguer un ascendant, sauf dans des circonstances exceptionnelles ; la guerre de 14-18 "couronna" Clémenceau, mais la domination de celui-ci déplut et il ne put jamais, ensuite, parvenir à se faire désigner président de la république par ses pairs, qui lui préférèrent Deschanel puis, après que ce dernier fut reconnu fou, Millerand.

L'oligarchie a beaucoup d'inconvénients, notamment celui de tenir le peuple à l'écart des décisions jugées trop complexes pour lui. Elle trouve  commode de laisser le peuple dans l'ignorance au lieu de tenter de l'élever vers la connaissance de la réalité des décisions politiques. Les "amis du Cac 40" de Sarkozy incarnent parfaitement ce travers oligarchique.

Le peuple a fini par se lasser d'être écarté des décisions politiques. Et c'est là qu'est réapparu un artifice issu du XIXe siècle : le régime plébiscitaire. La logique est simple : puisque les oligarques sont à la fois les hiérarques des systèmes claniques locaux et ceux des entités économiques qui ont tendance à pressurer les gens au travail, il faut que quelqu'un se charge de mater ces hobereaux et, miracle, le sauveur qui peut le faire, c'est le président de la république, qui va rendre le vrai pouvoir au peuple en l'asseyant sur des consultations populaires fréquentes, des plébiscites, par lesquels le peuple pourra dire périodiquement s'il approuve la conduite du chef de l'État. Main dans la main, le "monarque" républicain, César en quelque sorte, et le peuple pourront tenir la dragée haute aux petits marquis du système.

Il se trouve que ce scénario était déjà une fiction à l'époque où le plébiscite était pratiqué (sous de Gaulle, un référendum par an sauf les années d'élections générales), mais la fonction plébiscitaire des référendums elle-même a disparu le jour où de Gaulle, renvoyé par un plébiscite, a pris sa retraite, en 1969. Dès lors, il ne reste du dispositif que le monarque républicain, de plus en plus monarque et de moins en moins républicain, puisqu'il ne cherche plus guère la voix du peuple.

Alors, évidemment, pour relancer l'esprit républicain, il est tentant de réclamer purement et simplement le retour au régime d'assemblée. Hélas, celui-ci a révélé sa nature oligarchique. Il faut donc inventer autre chose, où certes le président soit moins omnipotent, mais où les parlementaires soient plus ancrés que jadis dans le peuple.

C'est, je crois, à cette quadrature du cercle qu'il faut s'attaquer en adoptant l'idée d'un nouveau travail vers la VIe république avec Quitterie Delmas.

La disparition programmée du socialisme à la française est-elle une bonne nouvelle ?

En huit jours, le Parti Socialiste est passé de l'état gélatineux à l'état gazeux. Il s'est volatilisé. Dispersé façon puzzle.

Est-ce vraiment une bonne nouvelle ?

Tout d'abord, il faut noter que l'État, en tant qu'acteur de la gestion nationale, en sort affaibli, ce qui n'est pas une bonne nouvelle. Je suis allé en 2002 dans un pays où il n'y avait plus du tout d'État, Haïti, eh bien, c'est invivable (mis de côté le fait que la misère ambiante est insoutenable).

Mais pour creuser plus profondément, je dois dire que le principe central du socialisme à la française explique la chute du parti censé le porter : depuis Zola, écrivain socialiste s'il en fut, on sait que le socialisme politique français est gouverné par le principe de l'intérêt, analyse de la société où tout n'est qu'appétit, et donc chaque acteur socialiste sait qu'il doit se gouverner selon son propre intérêt. C'est comme ça. Et bien entendu, l'intérêt individuel venant toujours à se heurter à l'intérêt collectif, l'aboutissement ne peut être que la SFIO, dont le fantôme se nomme Parti Socialiste. La chute est inscrite dans les gènes du socialisme à la française.

La tendance individualiste est poussée jusqu'à l'extrême dans la situation actuelle où une (très courte) majorité de socialistes choisit de se bunkeriser sur son périmètre balkanisé où chaque fraction se bunkerise à son tour.

Il y a eu trois grandes époques du socialisme français à la tête de l'État (donc sans compter les origines ni le personnage exceptionnel qu'a été Jaurès qui mérite mieux que le miroir qu'en donne le socialisme d'aujourd'hui) : la première, juste avant guerre, c'était le Front Populaire, nationalisations de certains monopoles ou d'entités liées à la souveraineté nationale (SNCF, Banque de France) ; la deuxième, juste après la guerre, avec l'ensemble des forces politiques issues de la Résistance, ce furent les grandes réformes sociales que la droite actuelle combat ; la troisième... mais qu'en reste-t-il ? ce fut 1981, là encore des innovations utiles, au milieu d'un fatras d'excès et d'un désquilibre des finances publiques qui n'a jamais pu être résorbé depuis.

Des trois périodes, celle qui conservera la plus grande aura historique, c'est la seconde. Pourquoi ? Parce qu'elle n'est pas enfermée dans l'image d'un prétendu sauveur, mais que, au contraire, elle représente l'union de gens de bonne volonté, débarrassés de leurs intérêts propres et conflictuels, engagés au service de l'intérêt général.

Voilà donc l'objectif à poursuivre : se libérer du principe paternel incarné dans les institutions par le président de la République, donner bien plus de pouvoirs au parlement, aux initiatives collectives, inventer une république qui remette les gens en réseaux, qui les retisse, ce pourrait être notre idée de la VIe république.

12:52 | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : ps, socialisme, état, modem, 6e république | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Hadopi : un rapport complètement à charge ?

L'actualité m'a rendu difficile de placer cette référence, mais je vous invite vivement à lire l'excellent dossier ici, l'histoire d'une authentique manipulation à fin parfaitement mercantile, qui rend le silence des sénateurs de tout poil ou leur vote particulièrement douloureux, pour ne pas dire plus.

03:21 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : hadopi | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

21/11/2008

Quitterie : crise du PS, symptôme de crise de société.

Échange entre Christian Honoré et Quitterie Delmas sur la crise du PS lors du café politique d'Aujourd'hui Autrement mercredi 19. Pour Quitterie, la crise du PS est symptomatique de la crise de l'ensemble des appareils politiques et, d'autre part, d'une crise de société plus profonde, d'une crise de l'engagement politique dont les conséquences sont incalculables.

EDIT le 22 novembre à 3h 24 : les résultats (ou les non-résultats) du vote des adhérents du Parti Socialiste illustrent parfaitement l'étendue de la crise qui a gagné l'ensemble de notre monde politique et qui justifie que l'on se prenne à parler de nouveau de VIe république comme le fait Quitterie.

 

Quitterie : consommer est un acte politique.

Lénine a écrit "Tout est politique". Et depuis ce temps-là, le débat fait rage entre ceux qui pensent comme lui (sans forcément savoir qu'il a été le premier à formuler cette idée) et ceux qui pensent que non, tout n'est pas politique, qu'on ne peut établir une chaîne de causalité suffisante, ou bien que la consommation est un acte contingent, de nature organique. La plupart des gens, d'ailleurs, ne se posent pas la question et consomment comme ils votent, sans réfléchir, dans le confort du prêt-à-vivre comme du prêt-à-penser.

Une dame, qui penche d'ailleurs du côté de l'UMP et ne s'en cache pas, interpelle Quitterie sur une phrase qu'elle a prononcée (dans une vidéo précédente), sur le fait que consommer est un acte politique. Elle sous-entend que nous, les bobos du MoDem, on ne s'intéresse pas aux gens qui ont du mal à boucler leurs fins de mois. Quitterie, avec pudeur, évoque sa propre vie de salariée qui compte ses sous, puis revient à la charge, soutenue d'ailleurs par Jonathan Denis, président d'Aujourd'hui Autrement et organisateur du café politique, et par GuillaumeD, prof et blogueur.

Une autre dame relance le débat à propos des téléphones portables.

C'est la vidéo qui m'a donné le plus de fil à retordre, le débat était entrecoupé de digressions. Un montage complexe, donc, mais je crois qu'il rend un compte honnête du débat.

 

Ils ont parlé aussi.

Bien entendu, il n'est pas question de ne rendre compte que des propos de Quitterie Delmas lors de ce café démocrate. D'une part, soyons fair-play, donnons la parole au "radical" UMP Christian Honoré ; de l'autre, donnons-la à l'organisateur, Jonathan Denis.

Christian Honoré dit des choses souvent justes, dommage que son affiliation à l'UMP creuse un fossé entre ses paroles et les actes qu'il cautionne. Sur le rôle des élus, il a raison, mais une part de son discours est un peu stéréotypée : les élus doivent être au service des gens. Si seulement c'était vrai... Enfin, on ne l'a pas mentionné, il travaille (m'a-t-on dit) pour Brice Hortefeux et c'est par respect pour Jonathan que le débat n'a pas été ouvert sur cet aspect de la réalité.

 

Jonathan Denis a repris la structure Aujourd'hui Autrement après que Jean-Luc Romero y a jeté l'éponge. Il a été conseiller régional (radical) et, depuis que Corinne Lepage l'y a incité, il est tenté de repiquer au jeu, comme on le verra dans la dernière vidéo de la soirée. Il adopte un discours résolument bayroucompatible et fustige Karoutchi (son ancien président de groupe), Edvige et Vanneste, un panier complet.

 

20/11/2008

Quitterie : le pouvoir de l'humanisme est dans la société civile et dans l'Internet.

Voici la deuxième intervention de Quitterie lors du café politique d'Aujourd'hui Autrement. Elle y souligne tout le pouvoir des citoyens et de la société civile, comme celui d'Internet, donc l'impact va croissant.

Je complète la liste des personnes vues hier soir, en ajoutant les liens. Il était plus de quatre heures du matin lorsque j'ai rédigé ma note et je demande l'indulgence. J'ai mis en gras les oubliés.

"Au passage, on aperçoit Éric Mainville, blogueur de Crise dans les Médias, et puis nos amis du MoDem, outre Virginie Votier : GuillaumeD, Jérôme Charré, MIP, plus tard arriveront Benjamin Sauzay, Michel Hinard, Karima Bouache, Gaëlle Filliat, tous blogueurs, et puis Fabrice Hauet, Fabien Neveu, Franck Vautier, et d'autres."

Voici la deuxième vidéo :

 

Quitterie ? Royal, c'est royal !

Mais non, je ne suis pas en train d'indiquer la préférence de Quitterie pour le PS : je qualifie la prestation qu'elle a donnée ce soir. Royale.

J'ai presque une heure et demi d'images prises ce soir lors du café politique d'Aujourd'hui Autrement. Voici la première livraison, l'intervention  initiale de Quitterie. C'est Jonathan Denis qui préside et anime la soirée. Il a succédé à Jean-Luc Romero à la tête d'Aujourd'hui Autrement, un parti politique très sensible à certains sujets de société.

Au passage, on aperçoit Éric Mainville, blogueur de Crise dans les Médias, et puis nos amis du MoDem : GuillaumeD, Jérôme Charré, MIP, plus tard arriveront Bejamin Sauzay, Michel Hinard, Karima Bouache, tous blogueurs, et puis Fabrice Hauet, Fabien Neveu, Franck Vautier, et d'autres.

Très intéressant débat, en voici donc le début :

 

19/11/2008

Quitterie Delmas ce soir pour changer la politique demain.

Répondant à l'invitation de Jonathan Denis, président d'Aujourd'hui Autrement, Quitterie Delmas participera ce soir à un débat avec Jonathan Denis et avec Christian Honoré, responsable du Parti Radical à Paris.

Prochain café citoyen d'Aujourd'hui, Autrement

"Peut-on changer la politique pour demain ?"

Invités :
- Jonathan Denis, président du parti politique Aujourd’hui, Autrement
- Quitterie Delmas, déléguée nationale du Mouvement Démocrate
- Christian Honoré, responsable du Parti Radical Valoisien (Paris 18ème)

Le mercredi 19 novembre de 19h30 à 21h
Au café L’Imprévu, 35 rue Didot / Place Flora Tristan, Paris 14ème (Métro Pernety)

J'y assisterai et je tâcherai d'en passer de bonnes images vidéo ici même dès demain.

JDS : la nostalgie n'est plus ce qu'elle était.

Jean-Roch Sergent fut l'un de nos jeunes du Centre des Démocrates Sociaux, le parti dont François Bayrou faisait partie aussi, voici une bonne quinzaine d'années. Il fut l'un de nos Jeunes Démocrates Sociaux, JDS.

Il a eu l'idée d'organiser un dîner d'anciens adhérents de ce mouvement de jeunes qui a laissé de bons souvenirs à ceux qui y ont milité, en particulier sous la présidence d'Éric Azière.

Je donne ici une photo qui date du début 1987, où l'on reconnaît, de droite à gauche, après Régis N (dont j'ignore l'éventuelle activité politique), Jean-Manuel Hue, alors président des JDS de Paris, maintenant adjoint au maire du XVe arrondissement et (m'a-t-on dit ce soir) peintre, François d'Aubert, l'un des libéraux qui se manifestaient dans la précampagne de Raymond Barre (et qui vient de perdre la mairie de Laval), Éric Azière, votre serviteur (plus de vingt ans de moins... j'en avais 22), et Bruno d'I., ami d'Éric et alors adhérent.

JDS 1987.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour dire la vérité, nous n'étions que quinze pour ce dîner qui a eu lieu ce mardi soir, ce qui fait peu en regard des milliers de personnes concernées, mais c'est peut-être un début. Deux anciens présidents étaient présents : Éric Azière et Jean-Christophe Lagarde. Il y a eu sept présidents des JDS : François Bordry 1976-1979 (frère de Pierre Bordry longtemps dircab d'Alain Poher président du Sénat, et aujourd'hui patron de l'autorité anti-dopage, François Bordry dirigea les Voies Navigables de France après avoir quitté les services de la Commission de Bruxelles sous certaines rumeurs), Yves Pozzo di Borgo 1979-1982 (aujourd'hui sénateur Nouveau Centre de Paris), Jean-Pierre Abelin 1982-1986 (député de la Vienne 1978-1981 et depuis 1986, député européen 1984-1986), Éric Azière 1986-1991 (chargé des élections au MoDem et conseiller régional d'Île de France), puis j'ai un peu perdu le fil des dates, il y eut encore Jean-Luc Moudenc (désormais ancien maire de Toulouse), Christian Bartholme (dont on a un peu perdu la trace) et Jean-Christophe Lagarde, qui éteignit la lumière en sortant du dernier congrès des JDS pour inaugurer le premier des Jeunes Démocrates (modèle Force Démocrate, fin 1995, congrès de Lyon).

Sur les quinze que nous avons été pour ce dîner, les dates d'adhésion variaient : 1976 (Fanny Rousseau), 1978 (Éric Azière), 1981 (moi),  1983 ou 1985 (Christophe Quarez), 1987, 1988, 1993, 1994 et même 1995...

Six sont adhérents du MoDem (Éric Azière et son épouse, Fanny Rousseau, Christophe Quarez, Sophie Jacquest, moi), cinq  du Nouveau Centre (Jean-Christophe Lagarde, Hervé List, Alban Nizou, Franck Pissochet, Dominique Moyse), un est à l'UMP et contribue à l'animation du Chêne, le réseau gaulliste de Michèle Alliot-Marie (Frédéric Garcia, 1987), un autre est au Parti Radical et de ce fait affilié à l'UMP (Sébastien Creusot, qui a adhéré de justesse en 1995), les deux autres n'ont plus d'attache partisane (Yann-Cédric Quéro et Jean-Roch Sergent), Jean-Roch considérant que la famille centriste divisée a vocation à se ressouder un jour, ce que je ne crois pas.

Nous avons gardé de nos années militantes de bons souvenirs : on a bien rigolé. De fait, ce soir, à quatorze, on a descendu dix bouteilles de rouge et une bouteille de blanc, plus quelques bières et kirs.

Nous étions plus jeunes, nous avions quinze ou vingt ans de moins, les temps étaient différents aussi, nous avons eu plaisir à nous retrouver, pleins de ces souvenirs,  dès lors qu'il n'a pas été question de politique. Car alors... si nous avons parlé de politique...

Jean-Christophe Lagarde sait ce que j'ai écrit sur lui. Trop d'honneur.

Il n'aime pas ce que j'ai écrit sur lui. Quelle flatterie...

Il croit que la maison centriste divisée se rassemblera un jour pour le porter à la présidence de la république. Sûrement pas.

Quand il avait dix-huit ans, je l'ai écrit, on voyait déjà que la politique était ou serait son métier, qu'il était fait pour cela. C'était remarquable. Il a fait son chemin, assistant parlementaire puis, m'a-t-on dit, lié au groupe Air France, puis, ayant placé son ami Vincent Capo-Canellas auprès du maire centriste du Bourget, il put, de là, trouver une base logistique qui lui servit à ravir la mairie de Drancy (un nom resté douloureux depuis 1944, mais il n'y peut rien) aux communistes, et de là la circonscription législative. Il a bien joué, en tandem avec l'UMP caméléon Éric Raoult.

Mais jamais, pas un seul instant, durant toutes les années où je l'ai côtoyé, je n'ai senti en lui autre chose que l'instinct du pouvoir. Il veut gravir encore les échelons de l'État, mais pour quoi faire ? On doit lui accorder de n'avoir pas choisi la facilité en se fixant Drancy pour objectif, mais je n'ai jamais senti en lui d'autre motivation que sa propre carrière, son propre cheminement.

Ce soir, je l'ai entendu dire "... c'est pour cela que j'ai tué Nicole Rivoire". Je ne connais pas Nicole Rivoire, qui fut présidente de l'UDF puis du MoDem en Seine-Saint-Denis (le 9-3) et maire d'une des communes de ce département jusqu'en mars dernier. Je ne la connais pas, mais qu'a notre pays à faire de gens dont l'activité est de "tuer" d'autres maires au lieu de s'occuper des difficultés d'un département qui n'en manque pas ?

C'est pour cette indignité, pour cette absence de vergogne, que nos concitoyens jugent sévèrement la politique, et ils ont raison. J'ignore si Lagarde croit vraiment dans le rassemblement des centres, mais il peut compter sur moi pour m'y opposer.

Pour le reste, que dire ?

J'ai longtemps été nostalgique de ces années de jeunesse, mais une vérité nouvelle m'a guéri de ma nostalgie en me proposant la fraîcheur d'un engagement réel, sincère, tourné vers le futur, et cette vérité, elle est incarnée par Quitterie Delmas.

18/11/2008

Bal tragique à Thionville : 577 morts.

En décidant de faire observer une minute de silence par les 577 députés de l'Assemblée nationale pour la mort du député Demange, l'UMP a transformé un fait-divers tragique en affaire politique.

Autant dire tout de suite que je n'approuve en rien les qualificatifs d'assassin, ni même de meurtrier, que j'ai vu fleurir sur la Toile. En vérité, personne n'est capable de dire si l'homme qui a tué l'a fait en ayant sa raison, ou s'il l'a fait dans un état de démence, même momentanée. D'un point de vue pénal, non seulement il est innocent (puisqu'il ne peut être ni jugé ni condamné), mais en plus, il est impossible de dire s'il aurait été coupable.

Heureusement pour les fils de sa victime, la responsabilité civile, elle, n'a pas besoin de l'"intention criminelle" pour établir une causalité et ouvrir droit à indemnisation, ça ne remplace pas une mère, mais c'est déjà ça.

Revenons un instant sur la fonction exonératrice de responsabilité pénale qu'a la démence. Le principe de droit est simple et existe depuis plus de deux mille ans, car il figurait déjà en toutes lettres dans le droit romain : pour qu'un acte devienne délictueux ou criminel, il faut que celui ou celle qui le commet ait l'intention de commettre non seulement l'acte, mais le délit ou le crime que va produire l'acte. Il y a là une condition d'intention, l'anima, qui est cardinale. S'il n'y a pas l'anima, il n'y a ni crime ni délit. Ce qui appelle deux remarques : la première, c'est que l'absence de discernement est exonératoire. L'enfant en bas âge et l'imbécile sont incapables pénalement (ils le sont d'ailleurs civilement, sauf pour certaines formes de responsabilité qu'il est un peu long d'énumérer). La deuxième remarque : la démence est tout aussi exonératoire, puisqu'elle fausse le discernement, elle est incompatible avec la formation et avec la formulation d'une intention.

C'est justement parce qu'il s'attaquait à ce fondement historique (et deux fois millénaire) du droit de la responsablité pénale, que le gouvernement a été critiqué lorsqu'il a voulu criminaliser les déments.

Et c'est donc un paradoxe de voir les mêmes qui fustigeaient cette dérive, qui aujourd'hui, jettent du meurtrier ou de l'assassin à la face du député mort Demange, même un avocat et blogueur aussi éminent et remarquable que Maître Éolas, c'est tout dire.

Cela étant, quand le même Maître Éolas s'en prend à la majorité, la même qui a voulu criminaliser les déments, au motif que, par sa minute de silence, elle honore un homme que par ailleurs elle déclarerait coupable, il a raison.

Car c'est la même majorité qui invoque à tout instant le droit des victimes, et qui, par sa minute de silence, insulte les deux victimes vivantes que sont les enfants de la morte.

Une dernière remarque, qui ne doit pas donner à penser que j'envisage une seule seconde une thèse complotiste : je trouve singulier que cette histoire arrive juste au moment où Noir Désir (Bertrand Cantat) fait son retour. Il y a de curieuses collisions de l'actualité.

En tout cas, c'est bien la minute de silence qu'il fallait fustiger, merci Quitterie.

16:04 | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : demange, ump, blogosphère, quitterie delmas | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

L'envahissement de la vie par la fonction élective.

À la suite des notes de Quitterie, de Guillaume, de l'Hérétique, de Quitterie encore, je voudrais préciser un point.

J'ai rebondi sur le facteur psychologique évoqué par Quitterie dans sa première note, celle d'hier soir, parce qu'elle avait raison de souligner l'extravagante pression qu'exerce la politique sur ses acteurs. Il ne s'agit pas d'excuser un individu qui semble avoir agi dans un état de démence (mais adhérer à l'UMP n'est-il pas déjà un signe de démence ? OK je blague). Il a perdu la tête (Ira furor brevis est) et sa folie a fait une victime morte et aux moins deux vivantes : les enfants de la morte.

J'ai rebondi sur le rappel fait par Quitterie de la pression psychologique, parce qu'on n'en parle jamais et que c'est un fait très fort, très présent. Ségolène Royal, dans le livre post-présidentielle, rappelait qu'en 1974, il a fallu près d'un an à François Mitterrand pour pouvoir de nouveau s'exprimer en public. En 1988, ce fut Chirac qui, durant des mois, tituba, groggy par sa défaite, cherchant une rampe où s'appuyer. Et chacun a constaté que François Bayrou a été sonné pendant plusieurs mois après le brutal sevrage qu'a constitué son arrêt au premier tour.

Un ex-conseiller de Paris UDF (devenu MoDem), que je connais bien, m'a confié, dans le courant du printemps 2008, après les municipales, qu'il éprouvait ce sentiment de vide depuis quelques semaines qu'il n'était plus élu au conseil de Paris. Il était pourtant encore conseiller régional...

Il y a donc bien un facteur psychologique négligé. Sans doute cet homme avait-il une prédisposition à commettre les actes qu'il a commis, mais d'autres l'ont aussi, qui ne les commettent pas. La situation crée peut-être l'ouverture, le passage, qui projette l'homme encore sain dans la démence.

Je suis désolé de dire que, de mon point de vue, sous réserve d'info supplémentaire, cet homme n'est pas coupable. Il ne suffit pas qu'il y ait une victime pour qu'il y ait un coupable.

Cela étant, on aurait sans doute pu épargner à la victime la minute solennelle de silence, qui ressemble un peu à une autoabsolution du monde politique. Larmes de crocodile.

17/11/2008

Vers une VIe république ?

Dans sa note (excellente) de ce soir, Quitterie Delmas s'appuie sur le drame du Dr Demange, député UMP de Moselle, qui vient de tuer sa maîtresse puis de se suicider, après avoir perdu en mars dernier la mairie de Thionville, qu'il dirigeait depuis 1995. Elle évoque la pression psychologique considérable que subissent les élus, et avant eux les candidats, et avant eux les militants, pour tracer un chemin, percer, exitser, puis durer. Et elle appelle à une réforme institutionnelle profonde qui améliorerait l'engagement politique et qui, ainsi, deviendrait une pierre blanche sur le chemin de la VIe république.

Je voudrais très modestement apporter mon témoignage sur l'état d'esprit scandaleux qui règne dans la politique française.

Après quatorze ans de militantisme intense, après avoir occupé toutes sortes de postes et assumé toutes sortes de fonctions, j'ai été élu en 1995 dans mon arrondissement de Paris (le XVIe), grâce non pas à la qualité de mon engagement, mais grâce d'une part à un renvoi d'ascenseur de Jean-Luc Moudenc (devenu ex-maire de Toulouse entre-temps) en 1994, et surtout grâce au choix de soutenir Chirac plutôt que Balladur lors de la présidentielle, en 1995 également.

Comme mon deal avec Goasguen le prévoyait, je suis devenu adjoint au maire du XVIe, Pierre-Christian Taittinger. On ne m'avait aucunement préparé, ça va de soi, à la gestion municipale, et comme j'étais à la fois le plus jeune et le moins sportif, on m'a nommé à la Jeunesse et aux Sports. J'ai eu beau faire observer que mes compétences et mes penchants... ceci... celà... rien n'y a fait : la délégation Jeunesse et Sports était UDF, celles que je souhaitais étaient RPR. Bienvenue au royaume d'Ubu.

Très inexpérimenté, j'ai travaillé double. Il faut le dire, c'est une fonction à temps plein : le XVIe compte plus de 150 000 habitants et, pour mon domaine d'action, Roland Garros, le Parc des Princes, Jean Bouin (pour les amateurs de rugby), Coubertin (pour ceux de judo et d'escrime), le siège national du Stade Français, d'importantes installations dans le Bois de Boulogne, et des dizaines de milliers d'adhérents dans les clubs de quartier qui vont de la pêche à la mouche jusqu'au football. J'ai épluché les dossiers, compris (je crois) les enjeux, consacré des temps infinis à négocier des budgets, bref, fait ce qui m'apparaissait juste mais que ne font pas en général les adjoints qui préfèrent toucher leur indeminté à la fin du mois et laisser la machine politico-administrative travailler à leur place.

Au bout d'un peu plus de cinq ans de ce régime (mal payé, à peu près le SMIC, ce qui explique que les élus soient tentés de...), mon maire m'a invité ainsi que certains élus à un déjeuner un peu spécial à l'issue de la visite qu'il rendait chaque année avec nous à la paroisse Sainte-Jeanne de Chantal, près de Boulogne-Billancourt.

Il nous offrit non pas un bol de ciguë, mais quelques bouteilles tirées de sa cave, un château Cheval Blanc 1955 (un très grand vin d'une très grande année). Et tous ceux qui se trouvaient à ce déjeuner avec lui étaient aussi ceux qui ne figureraient pas sur sa liste la fois suivante, selon la négociation qu'il avait faite avec les partis politiques en présence.

Mais il ne nous l'avait pas dit. Et jamais l'UDF d'alors ne me le dit non plus : ils avaient eu besoin de ma place pour quelqu'un d'autre.

Et pendant des semaines, je continuai à faire tout ce que je croyais possible, honnête et juste pour ne pas subir l'injustice dont j'ignorais le décret inexorable. Mais finalement, je ne fus pas sur cette liste (ni sur une autre). Et pas une fois, on ne prit un téléphone pour m'en parler, des gens que je connaissais pourtant depuis longtemps, preque des amis. Pas une fois avant, pas une fois après. Rien.

Quand je vécus le désert, le vide, qui succédait à six ans de "Monsieur le Maire" et d'écharpe tricolore, à six ans de bagarres pour des budgets et contre des pratiques léonines, quand je fus la tête dans le cul, il n'y en eut pas un pour me tendre la main, parce que c'est un métier de minables.

Un métier qui ne devrait pas en être un, d'ailleurs.

Et quand, à son tour, notre chère Quitterie Delmas subit la plus affreuse des injustices en n'étant pas investie pour les législatives du printemps 2007, j'avoue que j'ai été heureux, profondément heureux, que nous soyons si nombreux à lui témoigner notre affection et notre soutien, lors des tout premiers cafés démocrates.

Aujourd'hui, il n'est pas question qu'une telle injustice la frappe de nouveau.

J'irai au café citoyen organisé par Aujourd'hui Autrement, mercredi soir, et je soutiendrai son appel pour une réforme de la fonction d'élu et, plus largement, pour l'instauration d'une VIe république.

Des choix historiques.

L'émergence historique de l'occident, et son apport à la civilisation universelle, s'est faite par la philosophie, par l'historicité et par le discernement de la réalité et du fantasme. L'évolution que je mentionnais dans l'une de mes notes du week-end, autour du storytelling et de l'utilisation des narrations et des mythes pour la gestion des foules et des groupes, est celle qui depuis maintenant des années, vise à faire régresser notre civilisation vers les temps lointains où le fantasme occupait le centre de notre univers mental collectif.

Il en a fallu, du temps, des siècles, des efforts, des combats, pour installer la réalité sur la première marche du podium. Et tout cela, par la folie de quelques marchands en quête de poudre d'or, serait anéanti...

La substitution du discours à la réalité, la substitution de la pulsion à la pensée, sont des dangers pires que tous ceux qu'il nous ait été donné d'affronter.

Or la méthode politique adoptée par nos dirigeants appartient à ce mouvement régressif. Le contrôle étroit des moyens d'information qu'elle suppose est un lent poison qui, goutte à goutte, asphyxie notre univers, car il remplace l'intelligence par la bêtise. Il nous jette dans le chaos informe de la fantasmagorie.

Comprendre est le moyen que nous avons de progresser, d'améliorer, de nous améliorer. Si l'on efface le mot comprendre, il ne reste que le mot craindre et le mot obéir.

C'est pourquoi le choix que nous ferons lors de chacun de nos prochains votes est un choix historique. C'est le choix de la réalité, celui qui peut rétablir une société qui tienne debout, perfectible certes, mais vivante, ou bien le choix du mensonge érigé en système, avec la mort pour enveloppe.

La France, depuis de longues années, souffre d'une forme de dépression collective qui se manifeste comme une névrose. La technique de communication et l'anéantissement de l'information organisés par le pouvoir sarkozyste ont pour effet de dissocier totalement le discours et le commentaire, de la réalité, c'est une sorte de nouvelle langue de bois. Mais en intercalant en permanence la "vérité autorisée" (autorisée par eux) entre la réalité et le peuple, ils finiront par fausser profondément notre perception de la réalité, par la distordre, et la névrose se changera en psychose, une terrible maladie collective et, en réalité, un mal de civilisation, d'un péril immense.

C'est pourquoi nous avons le devoir, en Amérique, en Europe et ailleurs, de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour remettre la réalité au centre de notre univers mental collectif, au centre du débat politique. Nous le ferons.

19:54 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : politique | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Ce n'est pas que cela nous fasse forcément plaisir.

Ils sont marrants, les socialistes. Pas d'alliance avec les démocrates... Et pendant ce temps-là, les fauchés peuvent crever la bouche ouverte et la droite la plus infecte qu'on ait eue en cent ans mettre en place son programme ? Ils sont marrants, tout de même.

Et ils croient que cela nous fait plaisir, à nous, de nous farcir leurs farces et attrapes ?

Seulement voilà : la stratégie de Sarkozy consiste à faire en sorte que les formations qui s'opposent à lui ne puissent pas se parler ni se coaliser contre lui (un peu comme les motions socialistes ce week-end à Reims). Alors nous démocrates, nous savons bien que, même si Bayrou passe devant eux et affronte Sarkozy au second tour de la prochaine présidentielle, il va bien falloir qu'on discute et qu'on définisse des points communs pour battre la droite.

Si on l'avait fait en mars 2007, c'est Bayrou qui aurait été au second tour en avril et Sarkozy ne serait pas président aujourd'hui.

12:48 | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : politique, ps, modem, alliances | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook