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21/11/2015

L'état de droit, notre clef-de-voûte

Voici une semaine, la France se réveillait sonnée par le coup de tonnerre des attentats de Paris, l'assassinat collectif le plus sanglant depuis celui commis par des policiers au métro Charonne à la fin de la Guerre d'Algérie, voici plus de cinquante ans. Nous disions tous, samedi dernier : "c'est notre mode de vie qui est attaqué, n'en cédons rien". Le lendemain, le président de la République annonçait s'apprêter à céder tout, un peu par l'état d'urgence, beaucoup par une réforme constitutionnelle destinée à rendre juridiquement inattaquable ce qui est juridiquement inacceptable. De ce fait, il a donné satisfaction à nos adversaires, qui sont, il est vrai, soutenus par l'un de nos principaux clients. Pris en otages, nous nous sentons sombrer. Il faut donc réagir.

Contrairement à ce qui a été dit et répété, notre mode de vie ne se résume pas à la consommation de bière et de champagne. Sardou le chantait déjà il y a plus de quarante ans : "Y'en a qui pensent que le champagne sort des gargouilles de Notre-Dame". Seulement voilà, j'habite en France. Notre mode de vie, certes, est marqué par une futilité très française et, en particulier, très parisienne. Il y a, en France, une culture de la superficialité qui est très antérieure à la vogue de crétinisation qui sévit avec vigueur depuis dix ou vingt ans. Mais c'est aussi la France qui a engendré le plus socialement profond et le plus vigoureux de tous les poètes : Victor Hugo, qui est un peu le père spirituel de la République Française, l'un des hommes les moins superficiels que l'espèce humaine ait engendrés.

Et, surtout, c'est en France que s'est construite la théorisation de l'état de droit. Cela se fit lentement. D'abord, Fulbert de Chartres (encore lui) fit de l'être humain féodal un ensemble de liens juridiques qui faisait de l'abus de droit une infraction à l'ordre cosmique et divin. L'humain n'était pas seulement un sujet de droit, il incarnait plus : une âme encoconnée dans une pelote de droits certes contraignants mais aussi, comme tous les droits, protecteurs. Je passe sur les détails pour expliquer comme la Raison scientifique, notre fil conducteur national depuis mille ans, a fait de cette pelote de droits le moteur de notre émancipation collective, à l'inverse de ce qui s'est passé en Angleterre où l'émancipation s'est construite, selon le schéma décrit par Hugo : l'oligarchie, puis la démocratie. Nous sommes passés par une très courte période d'oligarchie politique pour atterrir un peu vite sur une démocratie imparfaite tempérée par un état de droit incomplet.

Hugo a résumé ce qui semblait être le chemin britannique vers la démocratie en y ajoutant (idée française) le savoir, donc la raison, comme moteur : "Là où la connaissance n’est que chez un homme, la monarchie s’impose. Là où elle est dans un groupe d’hommes, elle doit faire place à l’aristocratie. Et quand tous ont accès aux lumières du savoir, alors le temps est venu de la démocratie". C'est pourquoi l'école devait être gratuite et universelle pour asseoir la démocratie. Marquée par sa culture oligarchique plus développée que la nôtre, la démocratie anglaise n'a pas opté autant que nous pour l'école publique et ses universités sont restées élitistes, ce qui fait qu'elles sont mieux reconnues dans une société inégalitaire.

L'autre Français qui a théorisé le modèle britannique, c'est Montesquieu : "pour que l'on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que le pouvoir arrête le pouvoir". Cela se nomme la séparation des pouvoirs. Il y a, classiquement, trois pouvoirs : le pouvoir exécutif (président de la République, gouvernement, administrations de l'État), le pouvoir législatif (Assemblée Nationale, Sénat) et le pouvoir judiciaire (Tribunaux, cours d'appel, Cour de Cassation). Par malheur, la Révolution a rejeté la faculté pour le judiciaire de contrôler l'exécutif. Chacun sait à quel point les instructions judiciaires peuvent être instrumentalisées à des fins politiques malgré cela, mais la Révolution a instauré l'immunité judiciaire pour les parlementaires et un principe qui nuit beaucoup désormais à notre République, celui de la séparation des autorités administratives et judiciaires. Au nom de cette séparation, l'administration s'est dotée de sa propre justice, qui n'est rien d'autre qu'une justice d'exception, mais dont l'ambition est de plus en plus d'évincer la vraie justice, celle de l'ordre judiciaire. C'est l'un des principaux appétits qui fragilisent notre état de droit au moment où il devrait, au contraire, se renforcer.

Pourtant, nous avons réussi à façonner un vrai état de droit. Sa clef-de-voûte se situe dans son acte de naissance : la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen d'août 1789. Ensuite, peu à peu, pierre par pierre, l'édifice juridique s'est construit. Il a atteint un premier degré d'efficacité en 1971, lorsque le Conseil Constitutionnel a refusé d'entériner des mesures prises contre (déjà) le terrorisme. En 1974, le président par intérim proposa la ratification de la Convention Européenne des Droits de l'Homme au parlement, qui l'adopta, à une réserve près : la peine de mort fut maintenue. Elle ne disparut qu'en 1981, à l'initiative du Garde des Sceaux le plus important que la République ait eu : Robert Badinter.

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Décision après décision, depuis 1971, le Conseil Constitutionnel se bâtissait une jurisprudence et donnait corps à la pyramide juridique de hiérarchie des normes voulue par le constituant de 1958 : au sommet les principes de la Déclaration de 1789, puis le préambule de la constitution de 1946, puis la constitution elle-même, puis les conventions internationales, puis les lois ou certains décrets (pouvoir réglementaire autonome), puis le reste des décisions de l'administration. Enfin, il n'y a pas beaucoup d'années, tout cet édifice d'état de droit a été complété par l'instauration des Questions Prioritaires de Constitutionnalité (QPC), qui permettent à n'importe quel justiciable de déférer une loi au Conseil Constitutionnel, ce qui a l'avantage de permettre d'examiner la conformité à la constitution de lois qui lui sont antérieures.

Tout cet édifice puissant et sophistiqué fonctionne bien. Trop bien, sans doute, puisque l'exécutif, par un mélange d'inspirations qui sont toutes mauvaises, envisage de l'écorner d'un cran de déshonneur et d'ignominie. Première inspiration : les énarques veulent contrôler la justice, qui leur échappe pour le moment, et ils ne cessent de rogner les ailes du judiciaire en transférant ses compétences à l'administratif. Or c'est le principe même de la séparation des pouvoirs qui est en cause : la plupart des politiques sortent de l'ENA, ils ont déjà tout contrôle sur les administrations de l'État et sur les grandes entreprises qui, toutes, dépendent de décisions gouvernementales, et où ils sont souvent aux manettes, et leur solidarité de grand corps transversal de l'État se montre sans faille. On voit que leur ambition, assise sur la propension des partis politiques à assujettir l'État à leurs caprices, est la plus totale confusion des pouvoirs, qui nous ferait reculer de deux siècles et aboutirait à une paradoxale période oligarchique.

Deuxième inspiration : le délire des néoconservateurs. Ceux qui ont fait Guantanamo, Abou Ghrahib, et tant d'exploits marqués par une si profonde justice que le monde entier acclame les États-Unis. La France est désormais la proie des Néocons. Sarkozy les a invités chez nous, Valls les y maintient et les y épanouit. Hollande, comme toujours, soit par incompréhension, soit par faiblesse, soit par penchant, laisse faire.

Notre état de droit est donc menacé dans sa clef-de-voûte : le contrôle de constitutionnalité. On a même l'impression que la réforme de la Constitution est brandie comme une menace sur le Conseil Constitutionnel pour qu'il file doux. Cette menace n'a pas d'autre nom que la forfaiture.

Allons, il faut réagir. Il faut dire, et répéter, et rerépéter, que tout l'arsenal nécessaire est dans les lois (déjà parfois abusives) existantes, et que si les juges ne vont pas assez vite, c'est parce que nous n'en avons pas assez. Augmentons le nombre des juges antiterroristes, doublons-le, augmentons aussi les effectifs policiers qui leur sont adjoints, et toute l'efficacité nécessaire sera mobilisée.

On nous fait marcher vers un Guantanamo à la Française. "PAS EN MON NOM".

30/05/2015

Bienvenue au nouveau nom de l'UMP et à ses tôles à venir

Aujourd'hui, l'Union pour un Mouvement Populaire change de nom, contre l'avis de l'opinion publique.

Sans remonter très loin, examinons les changements de nom des partis politiques sous la Ve république : L'UNR, parti présidentiel, devient l'UDR avant les législatives de 1967. Elle se prend une tôle. La SFIO devient le PS en 1971 et se prend une tôle aux législatives suivantes en 1973 et à la présidentielle de 1974. Le Centre Démocrate et le Parti Radical adoptent l'étiquette des Réformateurs en 1971 et se prennent aussi une tôle en 1973. Les divers partis giscardiens changent de nom en 1976-77 et forment finalement l'UDF après les législatives de 1978. Ils se prennent une tôle à la présidentielle de 1981 et aux législatives qui suivent. L'UDR devient le RPR en 1976 et se prend des tôles à toutes les élections suivantes. Le RPR, enfin vainqueur, s'empresse de se transformer en UMP sous l'égide de Juppé, et manque de se prendre une tôle à la présidentielle suivante, miraculeusement sauvé par Le Pen et par Chevènement. L'UDF change de nom en 2007 en se prend une série mémorable de tôles. L'UMP, après avoir été enfin une fois victorieuse, s'empresse de changer de nom et...

Bienvenue donc au nouveau nom de l'UMP et aux tôles à venir.

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07/04/2015

Jean Germain : la dépression d'un battu

La mort soudaine du sénateur et ex-maire de Tours, Jean Germain, retrouvé mort près de chez lui avec une lettre d'adieu, rappelle que la vie politique n'est pas une activité comme les autres. Germain avait été battu voici tout juste un an aux élections municipales à la suite des révélations de l'affaire dite des "mariages chinois". Ce peut être une occasion de relire le billet de l'Hérétique sur l'affaire du député Demange en 2008, qui a quelques points communs inattendus avec celle du sénateur Germain, même si ce dernier n'est jamais tombé au degré d'infamie du premier.

Moi qui n'ai jamais été ni maire, ni député, je peux témoigner de l'intense cruauté qui s'attache à la sortie non souhaitée d'un mandat politique qui occupe toute votre vie. Lorsque j'ai terminé mon mandat d'adjoint au maire du XVIe arrondissement de Paris, en 2001, n'ayant pas été réinvesti par mon parti, l'UDF, et subissant l'attaque locale du député Goasguen, je suis entré dans un véritable trou noir. Les dernières semaines avant le vote avaient été sauvages. La meute des jaloux qui souhaitaient mon poste dans mon parti hurlait partout "sortez les sortants", ce que je vivais comme une injustice, ayant choisi de rester dans l'UDF alors que tous les autres élus de cette famille politique dans cet arrondissement avaient opté pour le parti de Madelin, Démocratie Libérale. Il me semblait que l'on reconnaissait mal la fidélité, sans parler de la qualité de mon travail d'élu, qui n'a jamais reçu aucune critique, sauf l'incident du mariage d'Emmanuel Petit dont j'ai parlé ailleurs, et qui ne concernait que le microcosme de la mairie.

Lorsque l'on cesse ses fonctions sans l'avoir souhaité, on porte en soi un vide immense. Un deuil. Personne ne vous téléphone. Personne n'exprime la moindre compassion. C'est le noir le plus total.

Encore n'ai-je exercé ces fonctions que pendant six ans. Et finalement, je suis heureux d'avoir opté pour un autre chemin, fermement assis sur la résolution de n'être plus jamais candidat à une élection politique.

Dans le cas du sénateur Germain, cette sidérante viduité s'est accompagnée d'une autre sidération : celle de se voir accusé dans l'affaire dite des "mariages chinois". Il s'agissait de mariages fictifs organisés par un tour-opérateur chinois, avec la coopération d'une société française dirigée par une adjointe de Germain. Le mélange des genres entre public et commercial était total, peut-être bénéficiait-il à la ville de Tours, cela n'est pas certain, mais on comprend que la justice ait mis son nez dans l'affaire.o-JEAN-GERMAIN-facebook.jpg

À la foudre de la perte de la mairie s'est donc ajoutée celle de cette accusation dont il a senti le poids et la crédibilité. Je ne peux pas me prononcer sur l'éventualité de la condamnation de Germain. Il est innocent pour toujours, puisqu'il n'a jamais été condamné. Il a payé cher cette innocence perpétuelle. S'il y a une mafia chinoise à l'autre bout de la chaîne, on peut d'ailleurs s'interroger sur la réalité du suicide, mais c'est une autre histoire, car la réalité de la dépression était lisible sur les traits du sénateur Germain depuis sa chute municipale dans les rares interviews télévisées disponibles.

Que les partis politiques, ces meutes en quête de charogne, daignent un jour se regarder dans un miroir. Qu'une main se tende vers un battu, qu'il y ait toujours un vrai ami pour ceux qu'emporte une perdition intérieure, et ils auront retrouvé un peu de la dignité qui leur manque si fort, et ils auront recouvré un peu du droit de recevoir le suffrage du peuple.

26/03/2015

UMP, PS, FN, c'est kifkif ?

Dimanche, les électeurs de France seront appelés à voter pour le second tour des élections départementales. On peut s'attendre à des records d'abstention. Pourtant, voter est un acte qui vient des tripes, un acte qui engage les viscères. Aimer ou détester un pouvoir politique fait partie de l'état naturel du citoyen. L'opacité de l'activité politique et les doutes multiples qui planent sur elle désamorcent le taux d'adrénaline que devrait produire le vote. De là sans doute la tentation de l'abstention.

Il faut dire aussi que lorsque l'on nous explique qu'un candidat qui appelle aux ratonnades, ou un candidat qui pense que le seul bon étranger est un étranger mort, eh bien, c'est la même chose qu'un candidat qui opère de mauvais choix économiques, sociaux et sociétaux, on ne donne pas non plus envie de voter, car cette idée est un pur scandale. C'est un danger extrême. Le fait que l'UMP ne soit pas capable de considérer qu'au minimum, les candidats qui appellent au meurtre doivent être battus coûte que coûte, ouvre devant la France un gouffre mortifère. Et lorsque Juppé estime qu'il a gagné contre Sarkozy, parce qu'il a obligé celui-ci à reconnaître que le MoDem peut faire partie de sa majorité de droite, j'ai envie de lui répondre qu'ils ont perdu tous les deux, et Juppé et Sarkozy, parce qu'ils n'ont pas su empêcher l'essentiel, et qu'ils n'ont pas su affirmer les valeurs les plus élémentaires de la démocratie, de la République et de l'humanisme.

Je sais bien que pour se défendre, la droite a raison de stigmatiser l'antisémitisme déguisé en antisionisme d'une partie des réseaux de la gauche ultra. Mais elle n'a pas été capable de sortir le nom d'un seul candidat du PS et de ses alliés présent au second tour qui ait personnellement lancé des appels au meurtre ou au lynchage. Tandis que ce que nous reprochons à des candidats d'extrême droite, ce sont leurs propres écrits publics. Le jour du vote, nous votons pour des candidats.

Il y a une faute morale dans le fait que l'UMP n'appelle pas à faire barrage au FN coûte que coûte. Il y a une faute historique pour l'UMP à ne pas faire barrage coûte que coûte à celles et ceux des candidats dont les propres déclarations ne conduisent qu'au meurtre de masse ou de détail.

C'est un débat que j'aurais avec Jean Ferrat aussi s'il était encore vivant s'il continuait à acclamer, parmi les grands noms de la France, celui de Robespierre ("Cet homme qui portait dans son nom son métier et son cœur", selon l'énorme expression de Victor Hugo dans "93", son métier, la robe, et son cœur, la pierre), car le rôle principal de Robespierre fut de guillotiner tous les autres révolutionnaires et son unique mérite l'incorruptibilité. Si le fait d'être incorruptible mène à faire guillotiner ses amis et des êtres aussi généreux et utiles que Desmoulins, on se demande s'il n'y a pas plus de mérite à se laisser corrompre, en fait. Heureusement, on peut être honnête sans dresser les poteaux de la Veuve sur la place de la Concorde. Mais on doit choisir ses références.

Donc pour ce second tour, ce que nous devons examiner, c'est le message personnel des candidats. Les appels au meurtre doivent être partout combattus coûte que coûte. S'il fallait voter pour un stalinien d'aujourd'hui (ils ne sont plus ceux d'hier) pour faire battre un FN qui a personnellement écrit qu'il faut descendre dans la rue pour y mener la chasse aux Arabes, je le ferais, j'irais jusque-là, qui serait la seule motivation de mon vote pour un stalinien, à condition bien entendu que le stalinien ne danse pas chaque soir dans la rue en chantant qu'il faut pendre tout le monde par les tripes à la porte des préfectures, cas où je ne voterais pas, mais où je déménagerais assez vite pour changer de circonscription, car se retrouver à avoir à choisir entre deux assassins en puissance, c'est déprimant.

On comprend que la gradation de la désapprobation inspirerait mon vote. Comme dit le vieil adage, au second tour, j'élimine. Il n'existe aucun cas où je voterais FN. On a vu le seul où je voterais stalinien. Je pourrais voter écolo, sauf pour quelques-uns qui sentent le soufre. Si j'habitais Notre-Dame des Landes, je ferais comme 36% des électeurs du premier tour, je voterais évidemment écolo, pour qu'y soit définitivement et officiellement abandonné le projet funeste d'aéroport. Je n'aurais aucun mal à voter UDI, j'ai beaucoup d'amis personnels dans cette famille politique. Et je reste encore plus proche de Bayrou et de ses amis du MoDem. Dans les face-à-face UMP-PS, j'essaierais de mettre de côté la politique nationale pour examiner d'abord les enjeux locaux.

La gestion des collectivités locales par le PS est en moyenne défectueuse. Cependant, il faut évaluer la crédibilité de l'UMP locale à faire mieux, ce qui n'est pas toujours gagné d'avance. Et parfois, à force d'entendre des UMP dire que FN et PS, c'est kifkif, on finit par trouver que certains UMP et le FN, c'est aussi kifkif, tandis que sur les sujets sociétaux, qui entrent en ligne de compte, le PS fait mieux que ces UMP simili FN. Dans ces affrontements locaux, j'appliquerais, si j'avais à voter en plusieurs endroits, la méthode résumée par Voltaire lorsqu'il décrivait le théâtre de Marivaux : "des œufs de mouche pesés dans des balances de toile d'araignée". Au microgramme près.

Il reste à dire un mot de la circonscription départementale où je vote. C'est un morceau du Finistère, département où le premier tour suggère un statu quo de majorité départementale à venir.  Il s'agit du "canton" de Plonéour-Lanvern. La situation n'y est pas facile pour les candidats qui représentent la droite. Je crois que ce binôme est fait de deux UDI, je ne les connais personnellement ni l'un ni l'autre. Je connais en revanche depuis longtemps le maire de Plonéour, Michel Canévet, depuis peu sénateur. J'avais même avec lui des relations plutôt cordiales. Mais son attitude et celle de certains de ses soutiens sont devenues étranges et ambiguës à mon endroit.

Ce binôme que je crois de centre droit a atteint le score de 35% au premier tour. En face, le total des voix des gauches atteint presque 35% aussi. Il y a eu un peu plus de 4% de régionalistes tendance "bonnets rouges" au premier tour et deux fois plus d'écolos. La gestion de l'écologie par le département a été plus que douteuse dans la dernière mandature, le choix d'installation de la centrale à gaz près de Brest est une aberration. Pour l'emporter, les centristes doivent donc trouver une alchimie d'âme bretonne et une vision agricole et environnementale aussi subtile que créative. Agriculteurs, bonnets rouges et écolos ont a priori beaucoup plus de divergences à aplanir que de conceptions communes, si bien que les amener sur le même vote est un exercice de synthèse stimulant. S'il y avait plus de temps pour y travailler, le sujet serait intéressant. Il ne reste plus que trois jours. Affaire à suivre.

08:51 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, bayrou, ump, ps, udi, fn, bretagne, finistère | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

09/12/2009

L'histoire de mon père (le cas Georges Frêche).

Sur Facebook, quelqu'un m'a adressé, voici quelque temps, une invitation à soutenir Georges Frêche pour sa réélection à la présidence de la région Languedoc-Roussillon. Comme la plupart de ces invitations, j'ai laissé celle-ci dormir dans un coin de mon compte. Et puis, voici quelques jours, j'ai éprouvé le besoin de prendre position, j'ai accepté cette invitation à soutenir la réélection de Frêche. Aussitôt, un de mes amis sur Facebook, un blogueur, s'est étonné (et même inquiété) de cette prise de position : on peut difficilement faire plus sulfureux que Frêche selon les canons habituels. Or il se trouve que, parmi les raisons qui m'ont fait agir, il y a le fait que Frêche et mon père sont devenus copains autour de 1973, et que cette circonstance a fait que j'ai eu une lecture très décalée des événements qui ont agité le tocsin de l'opprobre sur Frêche parmi les bien pensants. Voici donc l'histoire de mon père, c'est celle de la France aussi.

Un bourgeois, fils d'officier de marine

Mon père, Alain Torchet, est né fin 1933 à la clinique du Belvédère, un établissement chic de Boulogne-Billancourt, tout près de Paris. Son père, officier de marine, était alors attaché à l'état-major de la marine, place de la Concorde, à Paris, et avait du reste épousé la fille d'un ancien numéro deux de la Marine nationale (on l'appelle la Royale, avec un E à la fin contrairement à Ségolène), croix de guerre 1914-18.

Une enfance bourgeoise dans un quartier parisien aisé, puis à Toulon (port d'attache). Édouard Torchet, mon grand-père, est un père comme on les fait à cette époque : ne s'occupant absolument pas des enfants. Il se singularise surtout en accumulant les titres d'ingénieurs (dix-neuf en tout) et en se consacrant à d'innombrables calculs mathématiques. Suzanne, la mère, joue au bridge. Leurs quatre enfants sont livrés à eux-mêmes et passent pour une bande de garnements particulièrement turbulents.

La guerre s'abat sur leur enfance. Ils sont à Toulon, en zone dite libre. Dès la fin de l'été 1940, Édouard Torchet choisit la Résistance. Il entre dans un réseau militaire, Ceux De La Libération (CDLL), un réseau que j'ai lu être plutôt implanté dans l'armée de l'Air que dans la Marine, mais outre que je crois que les marins ont été assez peu résistants, Édouard avait obtenu une médaille d'or à l'expo universelle de Paris en 1937, pour ses recherches sur la stratosphère où les avions sont plus nombreux que les avisos.

Jusqu'en novembre 1942, Édouard met sa famille sous pression, il lui arrive de partir en mission pour la Résistance, et l'on raconte qu'une fois, sa fille, le sentant obscurément en danger, crut bon de glisser son pistolet de service dans sa valise, ce qui aurait pu lui coûter cher s'il avait tenté de traverser la Ligne de Démarcation avec...

En novembre 1942, Édouard, devenu capitaine de corvette, commande un petit bâtiment ancré dans le port de Toulon. Il refuse de le saborder, mais ne parvient pas à le sauver. Quelques semaines plus tard, il est rayé des cadres de la Marine. Il décide alors de se rendre à Paris, où la Résistance lui a trouvé une situation aux usines Citroën. Sa famille est envoyée au vert, dans le Tarn.

Un frère énarque

Après la Libération, ce sont des établissements scolaires privés, mais variables, aussi bien en qualité qu'en localisation. Dans la Sarthe, en Normandie, à Paris. Alain Torchet a deux frères aînés. Le plus aîné prend son baluchon un jour et part à l'aventure. Le second est tout l'inverse : un bosseur. Il "fait" Sciences-Po, puis la toute jeune École Nationale d'Administration (ÉNA), dont il sort dans la même promotion qu'Édouard Balladur, futur premier ministre, et quelques autres figures (plus industrielles d'ailleurs qu'administratives) comme Jérôme Monod et Jacques Calvet. Ce frère doué pour les études aide Alain à se canaliser (il est plutôt porté sur la fête, pour dire la vérité), et à obtenir un diplôme d'HEC. C'est l'époque où les grandes écoles s'imposent comme l'élite de l'enseignement supérieur français.

À peu près au moment où mon père sort d'HEC, son frère est emporté en peu de temps par un cancer du fumeur (lui qui ne fumait pas). C'est le drame. La mort de ce frère mentor va marquer profondément Alain. Et je peux témoigner qu'encore, le 10 mai 1981, mon père a tenu à voter au nom de son défunt frère qui n'avait jamais été radié des listes électorales. Mais j'anticipe...

La guerre d'Algérie, source d'un militantisme

À l'automne 1957, mon père est appelé à faire son service militaire. Diplômé d'une grande école, il a accès à des fonctions d'officier. Il va passer vingt-sept mois en Algérie, neuf à l'état-major, neuf comme SAS dans le bled, au sud de l'Algérie, à un endroit qui, je crois, s'appelle Colon Béchard. C'est là que, à l'automne 1958, il reçoit la Croix de la Valeur Militaire, une croix de guerre qui ne dit pas son nom, puisque la guerre d'Algérie, officiellement, n'est pas une guerre. Et il rempile pour une année supplémentaire, qui va s'achever ... au bout de neuf mois : il fait la bataille d'Alger et, début 1960, il est rapatrié sanitaire, je n'ai pas pu déterminer pourquoi, mais je sais qu'il a été marqué psychologiquement, voire psychiquement, par l'Algérie.

De même qu'il ne m'a jamais dit un mot de son enfance, ni de l'Occupation, il ne m'a jamais rien dit de ce qu'il avait fait en Algérie.

En rentrant, il se réinscrit en faculté de droit pour compléter son cursus, dans l'idée de se spécialiser dans ce qui l'intéresse : ce qu'on appelle alors d'une locution assez laide, la "fonction de personnel", et qu'on nomme aujourd'hui d'une locution encore plus laide, les "ressources humaines". Une de ses copines, d'origine algéroise, lui présente alors ma mère.

Parallélement à sa reprise d'études, il signe des articles dans "Combat", un quotidien né de la Résistance, longtemps dirigé par Albert Camus, et dont le jeune Philippe Tesson prend la direction au cours de l'année 1960. Il écrira dans "Combat", sous un pseudonyme, jusqu'à la disparition de ce titre en 1974.

À partir des Accords d'Évian, il refuse de s'associer à l'Organisation Armée Secrète (OAS), à ceux qui vont prolonger leur militantisme jusque dans des attentats. Il faut dire qu'à cette époque, mon frère est né. Et puis, sans doute, quand on a fait des choses terribles pour éviter des attentats à Alger, trouve-t-on au moins absurde d'en commettre à Paris.

La création du Parti Socialiste, le congrès d'Épinay

Une jeune famille, un début de carrière, des ennuis de santé, meublent ses années 1960. Il tâtonne en politique, j'ai son calepin pour l'année 1970, on y trouve le numéro de téléphone personnel de Pierre Joxe, futur ministre socialiste, mais aussi celui de Georges Mesmin, futur député centriste du XVIe arrondissement, et ceux de quelques autres. À cette époque, mes parents ont divorcé, il est plus libre pour entreprendre des choses en politique, ce qui le tente, disons-le, vachement.

La création du Parti Socialiste, à Épinay, se fait avec lui. Il est là parce que François Mitterrand a promis d'enlever un million de voix aux communistes. Chacun ses motivations. Politiquement, son admiration personnelle, c'est paradoxal pour un décoré de l'Algérie, a toujours été pour Pierre Mendès France, qui a incarné la probité et la vérité sous la IVe république. Nos contradictions nous nourrissent. Mendès, à cette époque, se remet difficilement de son cuisant échec de 1969 (où il avait eu l'idée très baroque de faire tandem avec le sulfureux maire de Marseille, Gaston Defferre). La SFIO a été aussi ébranlée par le désastre électoral, Mitterrand, roi des manœuvres d'appareil, s'empare du nouveau Parti Socialiste.

Les articles de mon père dans "Combat", à cette époque, traitent souvent des dossiers parisiens, en particulier de l'affaire du "trou des Halles" : on a démoli sottement les halles bâties par l'architecte Baltard sous le Second Empire, et le débat fait rage pour savoir que faire du squelette de fer démonté, et quoi mettre à sa place. Parmi ses combats de l'époque figure aussi le Marché Saint-Germain, dont on dit qu'il date en partie de l'époque romaine, et que Chirac finira par grâcier, bien plus tard, en le posant cependant sur l'un de ses inévitables parkings souterrains.

Mon père va aussi dans le Midi, s'insurger contre le bétonnage qui menace la Camargue et qui sévit autour de la Grande Motte, non loin de chez Georges Frêche.

C'est l'époque d'un PS très créatif : je me souviens des grandes affiches produites par les caricaturistes du "Canard" notamment : on y voyait par exemple Giscard (alors ministre des finances) représenté en pieuvre à manchettes de lustrine, une pieuvre rond-de-cuir. Mon père participait à des soirées culturelles, j'ai des mots charmants signés de Louis Le Pensec, futur ministre de Rocard, ou de quelques autres du même tonneau, qui le traitent de "poète de nos soirées" et autres amabilités dont j'ignore tout, je dois le reconnaître, sinon que mon père, à cette époque, ne détestait pas les jolies femmes, qu'il nous emmenait à la piscine pour pouvoir y draguer les jolies filles, qu'il nous emmenait aux Puces pour pouvoir y draguer les jolies filles, et que nous préférions quand il nous emmenait à la Foire du Trône ou chez des cousins, le dimanche... J'avais six, sept ou huit ans.

Le rapprochement avec Frêche, les dernières années

Il est possible que Frêche ait connu mon père dès 1960 : tous deux étaient alors inscrits à la faculté de droit de Paris. Mon père était plus âgé, mais Frêche, grande gueule, avait de quoi se faire remarquer, lui qui, dit-on, militait alors si fort contre la guerre d'Algérie... S'il m'arrive de rencontrer Frêche, un jour, je lui poserai peut-être cette question.

Or en 1973, Frêche avait été nommé à la faculté de droit de Montpellier. Il s'y présentait aux élections législatives pour le Parti Socialiste. Son échec lui enseigna (c'est ce que dit sa fiche Wikipedia) qu'il avait besoin de se faire pardonner par les pieds-noirs. Sans doute est-ce sur cette base qu'eut lieu le rapprochement avec mon père, qui pouvait promener partout sa décoration algérienne.

C'est à la même époque que mon père a postulé au Grand Orient De France. J'ai encore sa lettre, j'ignore s'ils l'ont admis, mais je crois que ce fut pour lui un moment important que de faire cette démarche.

Après "Combat" disparu, il signait des tribunes, plutôt économiques (il travaillait avec la commission économique du PS) dans "Le Monde", sous le même pseudonyme.

C'est à peu près à l'époque où Frêche emporta la mairie de Montpellier, en 1977, qu'il put se faire élire délégué syndical cadre CFDT de la grosse boîte où il travaillait, les Produits Chimiques Ugine-Kuhlmann (PCUK), qui, je crois, étaient déjà une branche du groupe Péchiney.

Débarrassé des contraintes hiérarchiques, il put se consacrer à sa passion : l'organisation du travail des gens. Quand il est mort, les gens de PCUK ont été si gentils avec nous que je crois qu'il leur avait vraiment laissé un bon souvenir.

La fin

Il a voté (deux fois, comme je l'ai écrit plus haut) en mai 1981, mais n'a guère eu le temps de savourer la victoire de ses amis socialistes.  Son père s'était présenté sous une étiquette disons poujadiste dans la circonscription de Jacques Médecin dans les Alpes-Maritimes en juin 1981, où il avait obtenu un peu plus de 5 %, crime de lèse-majesté dans ce département. Quinze ans plus tard, la grande résistante Louise Moreau, maire de Mandelieu dans ce même département, m'a confié qu'à chaque fois qu'elle se présentait, elle devait verser 120 000 Francs de l'époque à Médecin... Bref, ma grand-mère fut renversée par un chauffard dans l'été 1981, reçut dix-huit blessures graves, dont neuf mortelles, auxquelles elle survécut, et mon grand-père fut à son tour renversé par une mobylette, et mourut quelques jours plus tard en m'ayant écrit qu'il était convaincu d'avoir été assassiné, en octobre 1981. J'avoue ne l'avoir pas cru à l'époque.

Mon père, hospitalisé dans l'hiver, est mort fin février 1982.

Que penser de Frêche ?

Je ne suis pas en mesure de me prononcer sur l'œuvre municipale de Georges Frêche : je n'habite pas Montpellier, je n'y suis jamais allé. Mais longtemps, j'en ai entendu dire grand bien.

J'ai une opinion assez précise sur le faux procès qui lui a été fait à propos des harkis. Il faut savoir que le général de Gaulle, pour des raisons plus que défendables par ailleurs, a fait des Accords d'Évian, qui mettaient fin à la guerre d'Algérie, un véritable pacte d'alliance avec le FLN, parti qui accédait au pouvoir dans l'Algérie souveraine. La chose a son importance : la France aurait pu donner l'indépendance à trois états souverains : la Kabylie d'un côté, Alger de l'autre, et le désert, voire à quatre, si l'on considère l'ouest algérien. En acceptant la création d'un État unique, la France faisait un cadeau dont elle attendait des retours, qu'elle a eus en partie, notamment dans le domaine énergétique.

En contrepartie, la France n'accorda ni les honneurs, ni même une réelle protection, à ceux des fils de la terre algérienne qui s'étaient battus pour elle dans les sept années du conflit. De là est née l'injustice criante et flagrante connue sous le surnom de ces gens : les harkis, qui furent parqués dans des conditions scandaleuses et ignorés pendant un long temps par l'État français (la majorité d'entre eux est restée en Algérie où beaucoup ont été massacrés).

Pour un ancien combattant d'Algérie, comme mon père, cette injustice était insupportable. Pour un certain nombre de pieds-noirs aussi.

Georges Frêche fut l'un de ceux qui prirent le problème à bras-le-corps.

Dans la célèbre vidéo qui lui a été reprochée, on l'entend s'en prendre à un groupe de harkis. On n'en a retenu que "Vous êtes des sous-hommes !" qui, tel quel, a un sens profondément raciste. Mais en fait, Frêche est blessé : le reste de la vidéo le dit, ces harkis viennent de défiler avec l'UMP, alors que la droite n'a jamais rien fait pour eux. "J'ai donné du travail à vos fils !" clame Frêche, réllement blessé parce qu'il se sent trahi par des gens qu'il a été le seul à considérer et à aider, pour lesquels il s'est donné du mal. Il s'est senti blessé, il répond avec les mots des tripes. Il ne les traite pas de sous-hommes, il leur dit "Vous m'avez trahi !", ce n'est pas la même chose.

Sur son autre phrase concernant les noirs et l'équipe de France ("Il y a trop de noirs dans l'équipe de France"), j'avoue que, autant l'équipe black-blanc-beur de 1998 m'a bien plu, autant cette équipe postérieure où tous les joueurs, sans exception, étaient antillais ou d'origine africaine subsaharienne, m'a dérangé, parce que, d'une part, ce n'était plus un symbole de mixité, et parce que, d'autre part, on sentait une anomalie : y avait-il une pression exercée par certains joueurs sur l'entraîneur ? y avait-il un communautarisme ? Bref, c'était dérangeant, autant que si l'équipe de France avait été entièrement blanche dans un pays qui ne l'est plus depuis longtemps (l'a-t-il d'ailleurs jamais été ?). Donc, au risque de soulever des torrents d'injures me traitant d'aussi raciste que lui, je crois sincèrement qu'on a fait à Frêche un mauvais procès, assez tartuffe, qui arrangeait bien ses adversaires locaux et nationaux.

Conclusion

Pour conclure, je voudrais rappeler que la première UDF, celle créée par Giscard et Lecanuet (c'est un autre sujet à la mode en ce moment), est morte en 1998, lorsque, au moment d'élire les exécutifs régionaux, quelques candidats (je crois qu'il y en avait trois) acceptèrent d'être élus  présidents de région grâce aux voix des élus du Front National.  C'étaient des UDF. Il y avait un ancien PSD (devenu Force Démocrate) en Picardie, le PR Charles Millon en Rhône-Alpes et ... l'autre PR Jacques Blanc en Languedoc-Roussillon. L'attitude médiocre et indigne de ces élus leur fut fatale. Les trois ont disparu.

Or celui qui a enlevé Languedoc-Roussillon à Jacques Blanc, c'était Georges Frêche.

Tous comptes faits, et sans même examiner la qualité de sa gestion, sans me soucier non plus de son soutien à Ségolène Royal qui n'est pas ma préoccupation, oui, je peux le dire, je ne regrette pas d'avoir exprimé mon souhait que Georges Frêche soit réélu président de sa région, et qu'il se prépare ainsi à passer la main aux nouvelles générations.

28/11/2009

L'arnaque des ONG et la tartufferie climatique.

Il n'y a rien que je déteste plus que de recevoir des leçons de la part de gens qui ne sont pas exemplaires, pas plus que moi en tout cas.

L'objet de la présente note n'est en rien de remettre en cause les constatations du GIEC ni de contester l'hypothèse d'une cause principalement humaine du réchauffement climatique de la planète terre. Ce sont choses bien trop compliquées pour mon niveau, je ne peux que déplorer que, depuis vingt ans que le GIEC existe, ses conclusions aient surtout servi à brider la croissance des pays autres que les États-Unis, alors même que les États-Unis sont le premier pollueur mondial, notamment en gaz à effet de serre. De toutes façons, limiter la production de CO2 est une bonne idée, il faut désormais que ce soit fait de façon équitable.

Non, l'objet de la présente note est de dénoncer, non plus le greenwashing, mais le green business pseudo-associatif et le climate business actuel, qui masque mal la vérité des intérêts qui s'y expriment : les organisations non gouvernementales (ONG) sont de véritables PME, parfois même des multinationales (pour les plus grandes comme MSF et Médecins du Monde), et très souvent, leur but est surtout financier. La liste des rédacteurs de l'Ultimatum climatique est, de ce point de vue, exemplaire, je devrais dire contre-exemplaire.

Les signataires de l'Ultimatum climatique

Entre écoblanchiment et collecte de fonds à la limite de l'escroquerie, les signataires de l'Ultimatum climatique sont une belle brochette de grigous. Passons-les en revue.

Greenpeace. L'organisation est née aux États-Unis mais, alors que les États-Unis sont de très loin le premier pollueur mondial, aucune activité marquante de Greenpeace depuis plus de trente ans n'a concerné les États-Unis. Quant à Greenpeace France, cette organisation a pour activité principale la collecte de fonds. On peut lui donner acte de la transparence avec laquelle elle explique tout benoîtement que seuls 56 % des dons collectés sont utilisés poiur ses activités de terrain. Encore faudrait-il creuser un peu ce chiffre, qui intègre probablement des dépenses de fonctionnement ordinaires. Les 44 % autres sont répartis en deux enveloppes : 33 % pour la collecte de dons, 11 % pour le fonctionnement proprement dit. C'est donc si dur de récolter des dons ? Soulignons au passage que ce ne sont pas de petites sommes, puisque le budget de Greenpeace France s'élève à 9 millions d'Euros, dont 3 millions consacrés à la collecte de dons, sans compter qu'en vérité toute campagne d'opinion montée par Greenpeace n'est finalement qu'une opération de collecte de fonds. On se demande si cet argent ne serait pas mieux utilisé à éradiquer le paludisme dans le Tiers-Monde. Bref, si la Sécurité Sociale avait des frais de fonctionnement de 44 %, tout le monde hurlerait au scandale. mais du moment que ce sont des gens qui se dévouent à sauver le climat, tout va bien. Hum.

Le WWF France. J'avoue que je suis très peiné d'écrire ce paragraphe, car j'ai beaucoup de sympathie a priori pour le WWF. Mais quand je regarde sa page de partenaires, j'ai envie de pleurer : Carrefour, Castorama, Center Parcs. Si cela n'est pas de l'écoblanchiment, qu'est-ce qui le sera ? Carrefour est quand même une usine de malbouffe et de surconsommation. Mais pas de problème pour le WWF, l'argent n'a pas d'odeur. Vraiment ?

Action contre la faim. À peu près la même remarque que pour le WWF en consultant sa page de partenariats. Chacun sait qu'Air France est une grande entreprise écologique, et que la BNP, si chère au président Sarkozy, n'a aucune filiale dans un paradis fiscal, qu'elle pratique des taux d'intérêt tout à fait convenables et que tout va très bien, Mme la marquise. Du reste, comme le rappelle cette très intéressante étude, Action contre la faim a eu de véritables problèmes et un gros scandale voici peu d'années et le moins que l'on puisse dire, c'est que le doute subsiste. La signature de l'Ultimatum climatique lui accorde-t-elle une nouvelle virginité ?

Care France. Cette branche française d'une multinationale humanitaire fait du partenariat avec les régions un véritable fonds de commerce. Pour elle, se manifester dans le jeu politique à quelques mois des régionales est évidemment une façon d'intervenir sur ses futurs donateurs institutionnels... Si l'on lit la liste de ses partenariats régionaux, qui sont ciblés par action, on verra d'ailleurs que ces partenariats sont politiquement connotés : la municipalité communiste de Saint-Denis près de Paris intervient pour aider Cuba, le département des Hauts-de-Seine est tout réjoui de glisser un œil dans la très secrète Birmanie communiste à l'occasion d'un accident climatique. Mais tout cela n'est que pure coïncidence. Quant aux régions concernées, ce sont déjà cinq régions. Un hors d'œuvre ?

La FIDH (Fédération Internationale des Droits de l'Homme). Cette organisation déjà ancienne publie ses comptes, mais dans une assez profonde opacité. On y trouve, comme ressources, cinq lignes comptables dont le sens est parfois ésotérique : cotisations (jusqu'ici tout va bien), subventions et dons reçus (le gros de la troupe : environ 75 % du total des ressources), dons et manifestations, Liberté et solidarité, les Amis de la FIDH. Le mot dons apparaît deux fois, on suppose qu'il y a d'un côté les dons spontanés, de l'autre les dons reçus à l'occasion de manifestations. Seulement voilà : dans ce total, on ne voit pas le montant des subventions publiques, et c'est très mal, car tout le monde sait que la FIDH est fortement subventionnée par l'État pour certaines de ses actions de terrain. Donc opacité, opacité suspecte.

La Fondation Nicolas Hulot est un véritable cas d'école de l'écoblanchiment. La page des quatre partenaires fondateurs ressemble au portrait de groupe des Dalton : Averell Dalton, c'est l'EDF, dont chacun sait que les centrales nucléaires sont un modèle environnemental universellement claironné, William Dalton, ce sont les hôtels Ibis, qui paraît-il tâchent d'écoblanchir leur béton et leur malbouffe, Jack Dalton c'est L"Oréal, dont l'activité chimique n'a évidemment aucun rapport avec la pollution, ni avec les shampoings Ushuaïa. Joe Dalton, enfin, c'est évidemment TF1, la plus grande usine de crétinisation d'Europe. Un véritable modèle, ou contre-modèle, à enseigner dans les écoles tant qu'il en restera. Écœurant.

Les Amis de la Terre. On se demande ce qu'ils foutent là-dedans, sinon offrir une légitimité aux autres. Par ailleurs, ils ne publient pas leurs comptes, ou du moins pas sur leur site, et c'est dommage, car on est forcé de les taxer d'opacité.

Médecins du Monde (MDM). Là, on est dans le charity business à très grande échelle, où s'entremêlent barbouzages, subventions publiques et écoblanchiment, avec tout de même, heureusement, de vraies actions de terrain, dont on voudrait qu'elles soient plutôt prises en charge par de vraies institutions désintéressées. Parmi les fondations partenaires de MDM, on retrouve Air France et L'Oréal (tiens, tiens). Parmi les entreprises, le meilleur et le pire (le meilleur le crédit coopératif, le pire la Société Générale) et l'inévitable Air France, au milieu desquels se glisse le site Soliland, dont il a été remarqué lors d'une récente table ronde animée par Quitterie Delmas pour Babyloan que sa raison sociale elle-même était l'écoblanchiment, ce qu'on retrouve dans un autre partenaire, Solidaripresse. Enfin, parmi les institutions, on trouve évidemment le gouvernement français, son homologue néerlandais et la Commission Européenne, de quoi afficher respectabilité et crédibilité. On peut savoir gré à MDM de jouer la transparence, qui est un gage de sincérité, mais on a le droit de redouter que cette transparence ne dissimule un surcroît de duplicité. Le procès du charity business n'est plus à faire.

Oxfam France. Cette branche française d'une organisation née il n'y a pas si longtemps au Royaume-Uni pratique une forme d'insincérité comptable absolument révoltante. En vérité, on est ici à la limite de l'escroquerie. En effet, si l'on lit les comptes qu'elle a publiés d'un œil distrait, tout va bien, mais si l'on y regarde d'un peu plus près, aïe. Lisons les chiffres. Le total des ressources d'Oxfam France se monte à environ un million deux cent mille Euros. Un tiers de ce budget provient d'une dotation de la maison-mère, Oxfam international. Le budget réel d'Oxfam France se monte donc à environ 800 000 Euros. Sur ces 800 000 Euros, 377 000 sont affectés à la collecte de dons, soit environ 47 % ! Près de la moitié de ce que les gens en France donnent à Oxfam est utilisé pour la recherche de nouveaux donateurs. On peut réellement dire que l'activité principale d'Oxfam France est la collecte de fonds. En fait, les dons accordés à Oxfam France ne servent qu'à permettre à Oxfam international de s'implanter en France et d'y conquérir une part de marché, une part du marché des dons... Et sl'on ajoute les frais de fonctionnement, le total des frais de structure dépasse les 500 000 Euros, soit plus de 60 % du total. Oui, vous avez bien lu : les donateurs d'Oxfam voient leurs dons utilisés à moins de 40 % pour les buts affichés de cette organisation. Seule la dotation d'Oxfam International permet de masquer ce scandale et d'afficher un bilan largement consacré aux actions de terrain... Pas de doute, pour Oxfam, signer l'Ultimatum climatique n'est pas une façon de lutter pour l'amélioration du monde, mais une façon de travailler sa notoriété et son image en France. Le fait qu'Oxfam international soit majoritairement tributaire des suventions européennes a d'ailleurs été noté, ce qui crée le doute sur la sincérité de ses engagements.

Le Réseau Action Climat semble n'être que le réseau des réseaux déjà recensés par ailleurs, qualités et défauts inclus. Ses comptes indiquent que son petit budget provient à plus de 80 % de subventions, sans qu'on sache par qui ces subventions lui sont allouées. On est tenté de parler à la fois d'endogamie et d'opacité.

Pour le Secours Catholique, Caritas, j'ai envie de dire comme pour Les Amis de la Terre : qu'est-ce qu'ils font là ? Mais il faut tout de même noter qu'ils appartiennent à la catégorie du charity business, et qu'évidemment ils ne sont exempts d'aucun des doutes qui planent sur cette activité économique qui peut exploiter autant ses bénévoles que ses donateurs. Par ailleurs, j'ai eu beau chercher dans leur vaste site (qui a dû leur coûter cher), je n'ai pas trouvé de bilan comptable, si bien que je suis forcé de parler d'opacité. Enfin, si pour eux, la signature de l'Ultimatum climatique a pour effet indirect de signaler leur soutien aux listes écologistes pour les élections régionales, il faut tout de même remarquer qu'en contestant le leadership du Parti Socialiste en France et dans les régions les listes écolo combattent aussi le vieux frère ennemi du Secours Catholique : le Secours Populaire, dont les liens avec la gauche ancienne sont connus. Alors, si c'est pour vider une vieille querelle de rivalité, ego te absolvo. Hum.

La politique française en filigrane

Accessoirement, en signant l'Ultimatum climatique, les organisations susmentionnées paraissent donner un soutien explicite au président de la république dans une vaste opération de communication qu'il mène en vue du sommet de Copenhague.

Mais là n'est pas pour moi l'essentiel. L'essentiel est que si l'Ultimatum climatique sert de base de légitimité conceptuelle et de valeurs (sinon d'idées) aux listes écolo pour les élections de mars prochain, force est de constater que le jury d'honneur convoqué pour conforter la légitimité écolo ne semble guère en mesure de refléter autre chose que l'image d'une assemblée de mœurs économiques douteuses et de calculs vénaux prononcés.

C'est pourquoi lorsque j'entends les Verts rugir ces jours-ci contre Bayrou, j'avoue que ça me donnerait presque envie de revoter pour celui-ci : car lui, au moins, ne fait pas semblant de prêcher la vertu.

Tartuffes sont les Verts qui accusent Bayrou de leur voler... de leur voler quoi, d'ailleurs ? le pain de la bouche, leur fonds de commerce écolo, car c'est bien de quoi il s'agit : Bayrou a voulu leur dérober leur fonds de commerce. Tartuffes qui reprochaient à Bayrou de piétiner la démocratie au Mouvement Démocrate et qui ne sont pas capables de la pratiquer chez eux. Comment, voilà des gens qui, lorsqu'ils ont accueilli la candidature du "parachuté" Meirieu n'ont même pas été capables de voter à bulletin secret ? Allez, on fait ça vite fait, à mains levées... c'est tellement plus commode pour ratifier des décisions qui viennent non pas de la base, mais d'en haut, dans la plus parfaite verticalité jupitérienne. Que reprochait-on à Bayrou, déjà ? ça ? C'est vrai. Mais alors, ils ne font pas mieux que ce qu'ils lui reprochaient.

Et pas question de primaires dans ces listes écolo, non, comme chez Bayrou, les têtes de listes sont recrutées sur casting pour passer à la télé, vous imaginez bien qu'on ne va pas demander aux adhérents (pouah ! fi !) de concourir et de venir menacer le débauchage qu'on a eu tant de peine à réaliser ! Les stars, c'est tellement mieux que les gens ordinaires, que les vertueux anonymes qui devraient pourtant être la sève de la démocratie. Hum.

Et parmi ces têtes de listes, comme est transparente l'envie d'en finir avec l'encombrant MoDem : Bayrou a plein de profs ? Bon, on va lui sortir l'arme lourde. Et qu'est-ce que l'arme lourde ? Croyez-vous que ce cerait un prof de ZEP qui viendrait témoigner de sa tâche héroïque et anonyme ? Que nenni ! On va prendre une star, oui une star, quelqu'un qui depuis trente ans incarne toute la pensée pédagogique dominante. L'arme atomique. Bayrou a eu un ancien dircab de Mauroy ? Qu'à cela ne tienne, on en a aussi : après le banquier Peyrelevade, voici Robert Lion, qui a été, vous ne devinerez pas, patron de Greepeace France. Bon Dieu, mais il fallait y penser ! Au passage, avec un ancien dircab de premier ministre comme patron, on mesure la très grande indépendance des ONG françaises... Il est vrai que le président de la Croix-Rouge est un ancien ministre UMP.

Allons, tout ça n'est pas sérieux. Dans l'ensemble, je rejoins l'analyse de Bernard Stiegler dans le dernier numéro papier de Bakchich Hebdo (EDIT : on peut la retrouver ) : je suis fatigué de constater que les politiques ont renoncé à la réflexion doctrinale, au travail de fond, et qu'ils ne se concentrent plus que sur leur égo, leurs rivalités personnelles et les effets d'annonce, avec le but évident non pas de s'adresser à la conscience ni à l'intelligence des électeurs, mais de travailler leur inconscient, ou pour mieux dire, de manipuler leur inconscient.

Je ne suis pas du tout sûr de voter en mars prochain, mais il y a une chose dont je suis certain : je ne voterai pas pour ceux qui font la même chose que ceux qu'ils conspuent, tout en prétendant faire le contraire. La sincérité, l'authenticité, la cohérence, la transparence, sont toujours parmi les maîtres-mots de mes aspirations politiques, à côté du rêve un peu fou que les politiques fassent leur métier en informant les gens des enjeux réels des décisions politiques, en s'adressant à leur intelligence et à leur conscience.

09/06/2009

Royal en embuscade.

La plus grande erreur que les élus puissent commettre, c'est de se croire propriétaires des voix qui se sont portées sur eux. Cohn-bendit l'a justement noté dimanche soir : des millions d'électeurs se sont portés sur Europe-Écologie "cette fois-ci", façon de dire que ces électeurs sont désormais adultes. Fini, l'électeur ventouse qui oublie de prendre ses lunettes pour lire les programmes, allume le feu avec son courrier électoral et va voter comme son père avant lui. Désormais, l'électeur se renseigne, lit les professions de foi, calcule, évalue, soupèse, et choisit pour une raison qui lui paraît bonne.

Cette fois-ci, puisqu'on l'invitait à lancer un signal fort, et puisque l'enjeu de pouvoir lui paraissait faible, il a lancé un mot : "écologie". En comptant les deux listes écolo (EE et AEI), 20 % des voix tout juste se sont directement (et sans la moindre ambiguïté possible) portées sur l'écologie. Et le message était bien l'écologie, l'environnement, l'avenir de la planète, puisque les "petits" écologistes en ont autant bénéficié que les grands. Le vainqueur n'est ni Cohn-Bendit, ni EE, mais l'écologie elle-même, ce que ni les écolo des Verts, ni ceux du MoDem (dont son président) ne devront oublier.

Car l'écologie était lourdement absente de son livre. Deux ou trois autres choses m'y ont paru gênantes (bien que je trouve en général le livre bien écrit et juste sur des points cruciaux) : la première, c'est qu'on n'y parle des immigrés qu'une fois, pour les désigner comme nuisibles (les patrons se servent d'eux pour comprimer les petits salaires à la baisse, ce qui est vrai), pas d'amendement "Welcome" chez Bayrou, c'est réellement abasourdissant ; la deuxième, c'est que lorsqu'il dit qu'il ne fréquentait plus les gens de la haute industrie ni de la haute finance depuis 1997, je reste circonspect, étant donné qu'après cette date il a très longtemps siégé dans le bureau de la gestion économique du sport hippique français aux côtés de Lagardère père puis de Rothschild, et je veux bien croire qu'il n'appelle pas cela les fréquenter, mais tout de même, il y a une forme de tartuferie ; bref, peu importe, disons que son livre fait l'impasse sur l'écologie, et que c'est regrettable, une faute non seulement politique, mais tout simplement contre l'esprit.

Pour en revenir au fait que les voix n'appartiennent à personne, il faut noter aussi qu'une bonne part de l'électorat socialiste a décidé de sanctionner le Parti Socialiste, et c'est certainement le cas de nombreux partisans de Ségolène Royal, ce qui laisse augurer des régionales terribles pour le PS s'il ne se réforme pas. Royal est en embuscade, ça sent la poudre.

Et pour finir sur ce sujet, je reviens une dernière fois sur ce qui a été dit par les esprits nauséabonds du bayroucosme : que Quitterie se serait vendue à Ségolène Royal. Il y a deux choses : la première, c'est qu'elle se serait vendue. Or sur ce point, renoncer à une candidature qui lui garantissait (ah, si elle avait été candidate !) d'être députée européenne pour rejoindre le bateau Royal, lâcher la proie pour l'ombre, cela ne me paraît pas relever de la catégorie des âmes vendues pour des plats de lentilles. La deuxième chose, c'est qu'il aurait été parfaitement admissible que Quitterie, jugeant les perspectives programmatiques proposées par Royal plus proches de ses aspirations profondes (compte tenu de l'évolution de Bayrou), se rapproche de Royal. Quel mal y aurait-il eu à cela, d'autant plus qu'elle avait l'honnêteté de ne pas le faire en empochant au passage un siège de député MoDem qu'elle aurait ensuite monnayé auprès de Royal ? On s'est donc vraiment mal conduit envers elle.

Une dernière conclusion sur le vote de dimanche dernier : près d'un électeur sur trois qui s'est exprimé a refusé d'entrer dans le jeu du débat droite-gauche... J'ai l'impression que c'est la première fois depuis très longtemps, mais je ne serais pas surpris que ce chiffre continue à augmenter, tant la réalité de l'axe doite-gauche peine à rendre compte de celle des politiques menées.

Le cadeau électoral du RSA, quelques jours avant le vote, a dissuadé les petits revenus concernés (qui sont nombreux) de protester contre le sarkozysme, il faudra en tenir compte, car cette tactique sera employée de nouveau.

Je crois que ces manoeuvres détestables ne nous seront pas épargnées à l'avenir, et j'ai la conviction qu'il faudra une alliance très large dans laquelle l'ensemble des sensibilités devra faire preuve d'abnégation, si nous voulons au moins remplacer le sarkozysme par un moindre mal en 2012, voire favoriser l'évolution vers une société des "petits matins" chère à Quitterie.

Quant à Quitterie elle-même, qu'elle le sache, elle peut décider de soutenir qui elle veut, non pas forcément pour le succès de cette personne, mais pour des principes qu'elle jugera cardinaux. Elle peut continuer à agir seulement dans l'ombre, ou bien militer pour le succès d'un programme, ou soutenir qui elle veut, elle aura mon soutien, qu'il s'agisse de n'importe qui, même de Bayrou ou de Royal.

08/06/2009

Plus que jamais, la vraie opposition est dans la société civile.

À un moment donné, en écoutant le discours de Cohn-Bendit devant ses troupes, ce soir, j'ai cru entendre, presque mots pour mots, ce que Bayrou avait dit aux fondateurs du MoDem en 2007 : créer un mouvement "où il n'y aura pas d'OPA de l'un sur l'autre", parlant des différentes organisations supposées se fédérer dans un nouvel ensemble, plus ou moins citoyen, blablabla, etc. Bref, on rejoue le film. Et on sait où il mènera, on peut écrire le scénario d'avance. Disons au moins que l'écologie y aura gagné en visibilité, c'est déjà ça.

Pour le reste, ce qui est marquant est un léger redressement de la droite. En 1999, le total droite + extrême droite est 39 %, en 2004 il descend à 38 % (l'étiage pour la fin de règne de Chirac). Or en 1994, juste avant ce cycle, il est au-delà de... 48 %, mais c'est en comptant le centre. Celui-ci s'est présenté librement quatre fois : en 1989 il a obtenu 8,43 %, en 1999 9,28 %, en 2004 11,96 %, et cette fois retour à 8,5 %.

Le total droite + ext dte + centre donne 49 % en 1989, 48 % en 1994 et 1999, 50 % en 2004 grâce à une poussée du centre au détriment de la gauche pourtant au zénith. Cette fois-ci, il approche de 51 % grâce à une poussée de la droite au détriment du centre.

Il est vrai qu'alors qu'en 2004, l'électorat centriste était perméable au vote UMP, les 8,5 % restant au MoDem peuvent facilement passer pour particulièrement déterminés contre l'UMP dont l'expansion semble bloquée.

Mais de toutes façons, cette poussée ne s'est pas (ou peu) faite par une conquête d'électeurs, mais par l'abstention plus grande de l'électorat de l'opposition que celle de l'électorat de la majorité.

Et c'est bien là le vrai problème : l'opposition politique est malade de ses partis politiques. Il n'y a décidément rien à tirer de cet invariable amoncellement de fatuités et de cupidités. Incontestablement, si nous voulons défaire le sarkozysme, en 2012 ou avant, c'est dans la société civile qu'il faudra le faire, comme l'a très justement anticipé Quitterie.

19/05/2009

Quelques réflexions sur le résultat possible des Européennes en Île de France.

Un mot du dernier sondage dont j'ai eu connaissance pour l'Île de France. Je rappelle qu'il y a treize sièges à pourvoir à la proportionnelle selon la méthode de la plus forte moyenne. D'après Wikipedia (j'avoue que j'avais oublié ce détail qui n'en est pas un), la règle antérieure des 5 % a été maintenue malgré le découpage de la France en circonscriptions. Seule les listes dépassant 5 % peuvent prétendre avoir des élus.

Les estimations du sondage en question donnent 33 % à l'UMP, 21,5 % au PS, 14 % aux Verts, 12 % au MoDem et on passe sans transition à 5,5 % pour le Front de Gauche, l'autre Front ne passant pas la barre des 5%.

Pour 5 sièges, l'UMP a une moyenne de 6,6, pour 6, elle est de 5,5. L'UMP a 5 sièges garantis.

Pour 3 sièges, le PS a une moyenne légèrement supérieure à 7 %, pour 4 elle tombe à 5,3 %. Le PS a 3 sièges au moins.

Pour 2 sièges, les Verts ont une moyenne de 7 %. Pour 3 sièges, elle tombe à 4,7 %. Les Verts ont 2 sièges.

Pour 2 sièges, le MoDem a une moyenne de 6 %, pour 3 elle va à 4 %. Le MoDem a 2 sièges.

5 + 3 + 2 + 2 = 12. Il reste un siège à pourvoir. Pour ce siège ultime, si l'on prend les scores ici estimés, l'UMP et le Front de Gauche sont au coude à coude à 5,5 %, il manque 0,8 % aux Verts pour y prétendre et 0,2 % au PS ou 1,5 % au MoDem. Le vote utile, selon ces estimations, serait en Île de France (et là seulement) de voter pour le Front de Gauche, de façon à ôter un siège au sarkozysme.

Mais il faut relativiser : je n'ai pas vu d'autre sondage francilien. En faisant la moyenne des sondages, on pourrait affiner l'estimation des scores éventuels des listes.

Quant à savoir ce que cela changerait pour l'Europe et pour la vie des gens, c'est une autre histoire, comme dirait Quitterie.

 

30/04/2009

Hadopi : députés UMP, PS, MoDem, NC, Verts, PCF, DLR, à la conférence de presse pour une alternative à l'Hadopi.

Je signale que, dans la très longue vidéo que je viens de donner, figurent des députés de pratiquement toutes les tendances politiques représentées à l'Assemblée Nationale : Lionel Tardy et Christian Vanneste malgré l'UMP (et le CNI), Jean-Marc Ayrault, Christian Paul, Patrick Bloche, Michel Françaix pour le PS, Martine Billard pour les Verts, Jean-Pierre Brard pour le PCF, Nicolas Dupont-Aignan pour Debout la République, Jean Dionis du Séjour malgré le Nouveau Centre, et ... Abdoulatifou Aly pour le MoDem, parti qui daigne enfin se manifester à l'Assemblée Nationale sur un sujet crucial.

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26/04/2009

PS, MoDem, Verts : tant de convergences.

Plus le temps passe et plus s'impose à moi l'évidence énoncée (et annoncée) tôt par Quitterie : la convergence de vue qui rassemble les militants, adhérents et sympathisants du PS, du MoDem, des Verts (ou la majorité d'entre eux) sur de très nombreux sujets. Les élections européennes sont évidemment le moment où ces convergences apparaissent avec le plus de netteté, car on trouve chez les militants des trois formations le même appétit de construction européenne, la même envie de dégager l'Union Européenne des contraintes de la financiarisation de l'économie, le même souci d'écologie, de comportement solidaire, responsable et durable.

Les états-majors ne sont pas toujours sur cette même longueur d'ondes et la règle des calculs tactiques existe, mais les liens se tissent malgré eux. Et je me demande pourquoi, au-delà de la République des Blogs qui continue à jouer son rôle éminent de carrefour, il n'y a pas plus de réunions informelles et décloisonnées entre des adhérents ou sympathisants de ces trois formations, et d'ailleurs des gens de la société civile. Je serais prêt à participer à ce genre d'initiatives et je pense que Quitterie aussi.

C'est sans doute de ce genre de discussions à bâtons rompus que pourraient sortir des idées capables de nourrir une alternative solide au pouvoir actuellement en place.

Quelqu'un a-t-il des idées ?

EDIT : je vois d'ailleurs qu'un sondage annoncé ce matin s'exprime en partie dans ce sens.

05/04/2009

Les réseaux sociaux vont-ils servir de Big Brother aux partis politiques ?

Je vous invite à lire ce compte-rendu d'une conférence faite par Howard Dean devant des cadres du Parti Socialiste il y a peu. Le passage qui fait frémir (l'auteure du compte-rendu en frémit elle-même) est celui où il est expliqué que le Parti Démocrate a "fiché" 220 millions d'Américains (soit plus de deux sur trois) avec des fiches comptant parfois plus de 600 renseignements... L'avantage des médias sociaux est que ce sont les interautes eux-mêmes qui y enfournent les info...

Brrr, enfin, lisez quand même : c'est du plus haut intérêt et merci à l'Internet et aux internautes qui permettent à ces info de traverser les cloisons partisanes. Le plus intéressant n'est pas l'article de Mediapart (qui est honnête), mais le CR qui suit, rédigé par une militante.

13/03/2009

Hadopi : manif et récupération partisane.

Ayant vu sur Betapolitique ce matin qu'un socialiste avait lancé l'idée d'un rassemblement devant l'Assemblée Nationale contre le projet Hadopi, j'ai eu l'idée de m'y rendre après l'avoir annoncé sur mon blog (et noté que d'autres invitaient à s'y rendre aussi, notamment en twittant sur leur profil Facebook).

Le rendez-vous était pour 18 heures précises. À 18 heures précises, nous étions huit, sept plus moi. J'ai connu des foules plus denses.

L'un des autres (je n'en connaissais aucun) m'indiqua qu'il venait en fait d'apprendre que l'horaire avait été changé en cours de journée, et que le départ était pour 18 heures 30. Quelques minutes plus tard apparurent de jeunes militants socialistes avec des drapeaux. Je crus d'abord que c'était l'UNI (écrit en rouge sur blanc), mais évidemment, ça ne pouvait pas être l'UNI, c'était les MJS, un groupe.

D'autres gens venaient, d'un peu tous les côtés.

Pour ceux qui ne le savent pas, l'expression "devant l'Assemblée Nationale" est des plus ambiguës et peut concerner trois endroits : côté place de la Concorde (en fait devant la buvette), côté rue de Bourgogne (et donc devant l'entrée principale), ou... sur le côté. Et "devant l'Assemblée Nationale" veut dire "sur le côté", dans un triangle bordé vers l'Assemblée de barrières de fer de la préfecture. Une grosse masse de gens se joignit à nous qui étions là, lorsqu'on s'aperçut là-bas (devant la buvette) que le devant se trouvait sur le côté... Il faut excuser les internautes, ce ne sont pas des professionnels de la manif, ils n'ont pas l'habitude.

Enfin, sauf quelques-uns.

Car les MJS avaient préparé banderoles, masques, écriteaux, chansons, du travail de pro (à l'échelle modeste de vingt militants). Ils s'en donnaient à coeur joie sous l'oeil de la caméra de la Chaîne Parlementaire.

Mais cet activisme incommodait les autres, les geeks, les gens venus pour la cause, sans mot d'ordre, sans étendard. Nous aurions pu être reconnaissants au PS du travail qu'il fait à l'Assemblée (et nous le sommes), mais nous étions franchement dérangés par ce qui ressemblait trop à de la récupération. La volonté de la ligne rose de se joindre aux autres groupes pour donner à croire à la caméra que les vingt militants en étaient 150, alors qu'il y avait vingt militants et 130 personnes autres, était plus qu'agaçante et, à chaque fois, les autres se déplaçaient pour n'être pas amalgamés. Erreur de communication, donc, de la part des militants.

Ce sont les gens de la Quadrature du Net qui, les premiers, ont manifesté leur mécontentement de la récupération. Ils étaient venus à cinq (les fameux "cinq gus" sortis de leur garage) et commençaient à lancer d'autres slogans : "Des millions de gus dans un garage ! Télécharger c'est notre liberté !".

À vrai dire, le débat entre eux n'était pas que de territoire : le PS se mobilise pour la "licence globale", tandis que la Quadrature s'investit pour la liberté pure et simple. Débat sémantique ? Pas du tout !

En en discutant, je me suis rappelé que, il n'y a pas si longtemps, pendant la campagne présidentielle, nous aussi, nous dénoncions la "fracture numérique", nous aussi, nous voulions mettre Internet à la portée de tous, faire baisser les prix de l'accès à l'Internet (et pourquoi pas des formules gratuites ?)

Je me faisais la remarque que, avec la victoire de Sarkozy, c'est comme si tous nos projets s'étaient dissipés en même temps, comme si nous avions perdu nos cerveaux, nos bras, nos rêves, comme si une chappe de plomb s'était abattue sur nous, une fatalité insurmontable donnant le surnom d'impossible à tout ce que nous avions voulu jusque-là.

Et si, parmi les projets concrets que Quitterie souhaite tant nous voir échafauder, il y avait cela : des FAI alternatifs capables de proposer l'accès à l'Internet à prix coûtant, voire gratuit ?

Et c'est en songeant à cette idée que m'est venu à l'esprit le problème de la licence globale : elle ajoute 5 Euros par mois au coût supporté par les abonnés. Autrement dit, elle renforce la fracture numérique, c'est une mesure élitiste. Nous qui voulions proposer la connexion à 5 Euros maximum pour les fauchés, nous nous retrouvions avec une connexion à 35 Euros pour nourrir les milliardaires du showbiz sarkozyste, ce qui est le paradoxe de la propostion socialiste (qui leur a échappé, c'est évident).

La Quadrature est tellement plus dans l'esprit du net. D'ailleurs, ils n'étaient pas venus nombreux, mais spontanément, beaucoup d'autres se sont rapprochés d'eux parmi les manifestants (silencieux).

Bref, après les MJS et les joyeux gus de la Quadrature, j'avisai un troisième pôle : deux jeunes tenaient un grand rectangle noir, sous lequel ils avaient inscrit en gros une IP, sous-titrée : "C'est mon IP, j'ai téléchargé".

Je supposai que c'étaient des signataires du Pacte du Réseau des Pirates.

J'avais raison. Je commençai à parler avec eux et, comme j'expliquais, d'autres "pirates" signataires sortaient des rangs anonymes pour se grouper avec nous, et je voyais que nous nous ressemblions (enfin, j'étais de loin le plus vieux...).

Voilà, que dire d'autre ? Je ne suis pas resté très tard : un peu après 19 heures, je suis parti vers un cinéma. Entre-temps, j'avais salué Valerio Motta (vu la veille à la Cantine), Samuel Authueil sorti tout souriant de l'Assemblée pour distribuer des invitations à la séance pour ceux des manifestants qui souhaitaient y assister, j'ai aperçu Ronald aussi.

Ce que j'ai trouvé ridicule, ce sont les gardes mobiles qui se sont déployés avec leur boucliers de plexi et un air plus que martial, comme si on avait eu une tête à transporter des cocktails molotov entre deux micro-ordinateurs.

Mais comme l'a fait remarquer quelqu'un, les gendarmes sont sous linux, alors total respect.

C'est vrai.

Voilà, je suis revenu du cinéma (dont je parlerai un peu plus tard), et il me reste cette idée : est-il absolument impossible de créer des FAI pour le hyperfauchés ? des accès entre 0 et 5 Euros ?

Il faudra que j'en parle à Quitterie.

20/02/2009

Pourquoi triche-t-on tant dans les partis politiques ?

Je précise avant de commencer cet article que si je n'y inclus pas Désirs d'Avenir, c'est parce qu'il s'agit uniquement d'un fanclub, sans autre vocation que l'adulation, et forcément gouverné par la verticalité incarnée dans la parole du (de la) chef et sans ambition de démocratie interne, puisque le chef est donné d'avance et que tout émane de lui.

Ainsi étaient les Jeunes Giscardiens (EDIT pour réjouir les Alcibiade) AU DÉBUT, juste un fanclub sans affiliation partisane.

À l'inverse, les partis politiques se veulent porteurs d'une continuité historique.

Qu'est-ce qu'un parti politique ? Trois éléments : une doctrine, des élus et des militants. Il faut y ajouter un quatrième, transversal : un appareil. Un parti, c'est avant tout un appareil.

Et cet appareil est un composite : d'un côté il incarne la ligne majoritaire du parti, de l'autre il incarne la permanence du parti, donc sa diversité. et comme on est en démocratie, il est fréquent que les partis essaient de se donner un sembant d'apparence de démocratie interne pour résoudre cette contradiction interne de la nature de l'appareil.

Un semblant.

Oh, ce n'est pas toujours le cas : fidèle aux anciennes pratiques de feu le RPR, l'UMP a tendance à pratiquer la nomination et le centralisme "démocratique" dans la plus pure tradition stalinienne.

Mais sinon, la plupart des partis se sont mis à la démocratie. Hum.

Il y a toujours eu d'abord des problèmes de fichiers : on se souvient de Michel Mouillot, l'ancien maire de Cannes, dont on rapportait qu'il envoyait des chèques de 50 000 Francs de l'époque à son parti (composante de feue l'UDF ancienne manière), et des listes de noms, à charge pour le parti de répartir l'argent du chèque en cotisations correspondant aux noms. Hum.

Ces mêmes pratiques sévissaient, dit-on, au PS des Bouches-du-Rhône du temps de Gaston Defferre au moins.

Contre ces pratiques, à la suite d'un procès où Méhaignerie et Barrot, anicens leaders du parti, avaient été condamnés au pénal (mais amnistiés), feu le CDS s'était vu contraint de renoncer aux pratiques de cotisations collectives et avait instauré le principe "une cotisation = un chèque émanant de la personne qui cotise". Ce vertueux principe s'était transmis à la Nouvelle UDF en 1998. Et il faut reconnaître que l'inconvénient de la cotisation par Internet est d'ôter cet outil de contrôle de la réalité des cotisations, il y a de nouveau du flou dans les fichiers. Hum.

Et bien entendu, ce sont les autorités dirigieantes d'un parti, et elles seules, qui détiennent la clef des fichiers. Hum.

C'est ainsi que le dernier congrès du Pari Socialiste a donné le spectacle dégradant de tripotages quasiment en direct qui ont clairement exposé la décrépitude des ambitions éthiques de ce mouvement.

Oh, les autres n'en ont pas rigolé trop fort : l'UMP, parce qu'elle n'a de leçons à donner à persone en ce domaine et que chacun le sait, et le MoDem, parce que les élections internes du début de l'automne ont soulevé tant de suspicion, qu'il valait mieux faire ensuite profil bas.

Allons, il n'y a pas eu partout de concurrence entre plusieurs candidatures. Là où il n'y avait qu'un candidat et qu'une liste, s'il y a eu triche, c'est quand même un peu fort. Et là où il y a eu plusieurs listes, eh bien dans quelle proportion avons-nous vu des indices plus que convaincants de fraude ? Souvent, très souvent, bien trop souvent. Et les instances supposées fournir lumière et contrôle juridictionnel sur ces événements n'ont été qu'un dysfonctionnement patent.

Et le simple fait qu'il y ait eu des personnages à la fois juges et parties suffirait pour jeter la suspicion. Qu'il n'y ait eu ni enquête ni audition en dit assez long sur les intentions des dirigeants démocrates. Vraiment, ils avaient raison de ne pas se moquer des turpitudes des socialistes.

Pour répondre à ma question titre : pourquoi ?

Mais tout simplement à cause du pouvoir.

22/01/2009

À quoi jouent l'UMP et le PS ?

L'UMP et le PS font monter la pression. Lors des séances publiques sur la réforme du travail parlementaire, l'agitation a cru au point qu'elle a été suivie d'un boycott pur et simple, hier, de la séance télévisée par les députés socialistes.

Oh, on n'est pas dupe, on sait bien que comme l'a noté justement Bayrou, les socialistes savent que ce sera leur tour un jour, et s'ils se battent, c'est avant tout pour ne pas avoir l'air de se rendre trop facilement.

Il est normal aussi de tenter de reconcentrer l'attention sur la prétendue bipolarisation en vue des élections européennes de juin. Il faut dire que la bipolarisation n'est pas le sujet de ce scrutin, dont les enjeux sont à la fois plus profonds (plus nobles), attachés pour une fois aux courants de pensée plus qu'au pouvoir, et plus troubles, chaque famille politique s'agitant de convulsions sur son attitude face à l'horizon européen et à la nature de la construction européenne.

Un début d'année en forme de piqûre de rappel, donc, mais injectant un placebo.

 

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06/12/2008

La rumeur.

Cette note fait suite à la précédente sur les médias.

En ouvrant aujourd'hui l'hebdomadaire "Marianne", j'y ai trouvé un entrefilet selon lequel Claude Goasguen estimait que le débat sur la nomination du président de France Télévision était un faux débat, puisque Sarkozy allait nommer quelqu'un de gauche à la tête de France Télévisions.

De gauche ?

Évidemment, si c'est Claude Allègre...

Plus sérieusement : info ou intox ?

Goasguen est maître ès rumeurs. Dans le XVIe par exemple, il a passé toute sa campagne municipale à faire courir le bruit que le maire sortant, Taittinger, serait maintenu, ce qui finalement n'a pas été le cas lors du vote du conseil d'arrondissement qui a élu... Goasguen.

Donc... info ou intox ?

On imagine aisément qu'avec une telle intox, une partie de la gauche ait pu être démobilisée, a fortiori si c'est une info. Finalement, la note de Quitterie Delmas pourrait bien être plus subtile qu'il n'y paraît.

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29/11/2008

À quoi sert le Mouvement Démocrate ?

Dans un débat récent ici, sur mon blog, j'indiquais que si le MoDem n'est qu'une machine à gagner des élections, et en particulier une machine à faire gagner l'élection présidentielle par Bayrou, alors le MoDem ne m'intéressait pas. Cette même opinion, je l'ai déjà exprimée dans le passé et j'en ai déjà tiré les conséquences nécessaires : de 2001 à 2004, je suis resté un adhérent distant, ne participant à rien. 2004 a été un moment sympathique, mais c'est l'apparition de Quitterie Delmas en 2005 qui m'a vraiment ramené vers l'engagement politique.

Tout en étant distant, je n'ai pas changé mon vote, ni d'ailleurs mes convictions foncières, mais mon activité a été nulle, parce que je trouve sans le moindre intérêt de consacrer du temps au culte de la personnalité ou à une stratégie dont je ne suis qu'un paramètre (faible).

En réclamant aux adhérents du Modem un esprit "commando", Bayrou a réitéré le choix qu'il avait déjà exprimé du temps de l'UDF : celui d'un appareil voué à lui obéir sans débat, un choix qui a à mon avis accéléré le déclin démographique de la vieille famille centriste et démocrate. Je crois personnellement dans la vertu du débat.

C'est son choix, à chacun d'en tenir compte en conscience. Pour ma part, comme on le sait, je préfère consacrer mon travail politique à Quitterie. D'autres ont pris la tangente.

C'est chez l'un de ceux-ci, Hyarion (passé au PS) que j'ai trouvé un texte qui m'a ouvert à l'idée que la proposition de Ségolène Royal de transformer le PS en fan-club était sérieuse : il faut vivre avec son temps, dit en substance Georges Frêche selon les propos rapportés par Hyarion, et notre temps a besoin de partis politiques qui soient des écuries présidentielles, rien de plus.

Il y a donc bien une opinion commune chez les politiques, chez les gens d'en haut, ceux qui nous gouvernent, que la participation des citoyens est un leurre et que l'adoration est l'état natif du militant politique.

Tant pis pour eux s'ils croient cette folie.

Mais il faut dire qu'ils sont alors moins en situation de critiquer la pratique despotique et discrétionnaire (pour ne pas dire arbitraire) du président Sarkozy, puisque leur conception du pouvoir est en fait la même.

Il y a là, de toute évidence, un constat qui va continuer à éloigner les gens de la politique dont ils seront de plus en plus les spectateurs et non les acteurs, quoi qu'en disent nos responsables politiques qui me semblent plus inconscients que réellement malveillants.

Le discours participatif se dévoilera comme triste farce assez vite.

Pour ma part, ce constat ne signifie pas que je ne soutienne pas Bayrou, il y a un socle programmatique qui nous est propre et que Bayrou, je crois, n'éludera pas s'il est élu et s'il conquiert le pouvoir législatif ensuite : liberté de la presse, indépendance de la justice, bonne gouvernance, saine gestion. Ce constat ne signifie pas non plus que je penche subitement du côté de ceux qui semblent tourner le dos à la logique des partis-croupions : le PS canal historique de Martine Aubry. Non, car on voit que les vieilles marmites ne sont parfois capables que de réchauffer des plats rances et moisis. Mais ce constat fait que je ne perdrai pas mon temps dans des activités vides de sens.

Heureusement, il y a Quitterie Delmas.

25/11/2008

L'image du jour, forcément.

L'image du jour fait très bien la synthèse entre les affaires du PS et l'arrivée de l'ex-porte parole des Verts Yann Wehrling au Mouvement Démocrate. Je me suis permis d'emprunter cette image sur son site indiqué par nos amis alsaciens et j'espère qu'il ne m'en voudra pas de ce détournement (je ne recommencerai pas, promis) mais je n'ai pas pu résister. (Ce sont des éléphants siamois).

elephants-siamois.gif

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23/11/2008

Démocratie interne : mission impossible ?

L'aboutissement du vote du Parti Socialiste des deux dernières semaines est profondément paradoxal : d'un côté, c'est un extraordinaire exercice de démocratie interne, à faire pâlir tous les militants sincères de la planète ; mais de l'autre côté, c'est une prodigieuse catastrophe qui semble comme un cas d'école de ce qu'il ne faut pas faire, et comme la démonstration jusqu'à l'absurde (sinon par l'absurde) de la fragilité de la méthode démocratique.

Tripotages en tous genres et dans tous les camps rivalisent avec soupçons, menaces, coups bas, bref, c'est la foire d'empoigne.

D'un côté, on a vu le premier secrétaire ségoléniste du PS des Bouches-du-Rhône dissoudre les sections qui n'avaient pas voté pour sa motion lors du premier scrutin, juste avant le congrès (en quelque sorte lors du tour de chauffe), de l'autre le blogueur Marc Vasseur, partisan de Pierre Larrouturou au premier tour et de Ségolène Royal au second, empêché de se présenter aux élections internes, et tous les soupçons se porter sur le vote de ce département. De partout, on voit maintenant surgir des erreurs de décompte, 30 voix de plus pour l'une ici, 30 pour l'autre là.

Il n'y a guère qu'à Paris, où Bertrand Delanoë est minoritaire et où dans sa propre section du XVIIIe arrondissement, Royal était en tête au premier tour, qu'à Paris donc que les choses semblent avoir été un peu plus transparentes. Encore est-ce au détriment du maire et alors que l'ex-premier fédéral, Patrick Bloche, avait dû "manger son chapeau" de l'alliance MoDem aux dernières municipales.

Quoi qu'il en soit, le PS donne un spectacle indigne de l'un des grands partis de notre démocratie. Quitterie Delmas y a vu à juste titre un symptôme d'une démocratie souffrante, non pas celle seulement de ce parti, mais celle du pays tout entier.

Nous, au Mouvement Démocrate, nous nous sommes bien gardés de nous gargariser sur ce point, et notre modestie paraît raisonnable.

Mais tout de même, la question se pose : la démocratie interne, sereine et sincère, en conscience, est-elle impossible dans les partis politiques français ? Je veux croire que non, je veux croire que nous pouvons entendre la voix de la raison et de la démocratie, et la voix du vivre ensemble, Quitterie Delmas.

22/11/2008

La disparition programmée du socialisme à la française est-elle une bonne nouvelle ?

En huit jours, le Parti Socialiste est passé de l'état gélatineux à l'état gazeux. Il s'est volatilisé. Dispersé façon puzzle.

Est-ce vraiment une bonne nouvelle ?

Tout d'abord, il faut noter que l'État, en tant qu'acteur de la gestion nationale, en sort affaibli, ce qui n'est pas une bonne nouvelle. Je suis allé en 2002 dans un pays où il n'y avait plus du tout d'État, Haïti, eh bien, c'est invivable (mis de côté le fait que la misère ambiante est insoutenable).

Mais pour creuser plus profondément, je dois dire que le principe central du socialisme à la française explique la chute du parti censé le porter : depuis Zola, écrivain socialiste s'il en fut, on sait que le socialisme politique français est gouverné par le principe de l'intérêt, analyse de la société où tout n'est qu'appétit, et donc chaque acteur socialiste sait qu'il doit se gouverner selon son propre intérêt. C'est comme ça. Et bien entendu, l'intérêt individuel venant toujours à se heurter à l'intérêt collectif, l'aboutissement ne peut être que la SFIO, dont le fantôme se nomme Parti Socialiste. La chute est inscrite dans les gènes du socialisme à la française.

La tendance individualiste est poussée jusqu'à l'extrême dans la situation actuelle où une (très courte) majorité de socialistes choisit de se bunkeriser sur son périmètre balkanisé où chaque fraction se bunkerise à son tour.

Il y a eu trois grandes époques du socialisme français à la tête de l'État (donc sans compter les origines ni le personnage exceptionnel qu'a été Jaurès qui mérite mieux que le miroir qu'en donne le socialisme d'aujourd'hui) : la première, juste avant guerre, c'était le Front Populaire, nationalisations de certains monopoles ou d'entités liées à la souveraineté nationale (SNCF, Banque de France) ; la deuxième, juste après la guerre, avec l'ensemble des forces politiques issues de la Résistance, ce furent les grandes réformes sociales que la droite actuelle combat ; la troisième... mais qu'en reste-t-il ? ce fut 1981, là encore des innovations utiles, au milieu d'un fatras d'excès et d'un désquilibre des finances publiques qui n'a jamais pu être résorbé depuis.

Des trois périodes, celle qui conservera la plus grande aura historique, c'est la seconde. Pourquoi ? Parce qu'elle n'est pas enfermée dans l'image d'un prétendu sauveur, mais que, au contraire, elle représente l'union de gens de bonne volonté, débarrassés de leurs intérêts propres et conflictuels, engagés au service de l'intérêt général.

Voilà donc l'objectif à poursuivre : se libérer du principe paternel incarné dans les institutions par le président de la République, donner bien plus de pouvoirs au parlement, aux initiatives collectives, inventer une république qui remette les gens en réseaux, qui les retisse, ce pourrait être notre idée de la VIe république.

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